Index des revues

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    Par Hervé Le Crosnier, Bibliothèque scientifique de Caen
    Jean-Pierre Lardy

    Les accès électroniques à l'information

    Etat de l'offre

    Paris : ADBS, 1993. - Prix : 160 F.

    Jean-Pierre Lardy, de l'URFIST de Lyon-Villeurbanne, a souhaité réaliser, en un court opuscule, une synthèse des tendances de la recherche documentaire informatisée. L'auteur, fidèle à son expérience pédagogique, a choisi le point de vue de l'utilisateur confronté à un univers de la documentation électronique protéiforme. Mais il se veut aussi l'écho de critiques portées par les néophytes aux stratégies et méthodes de la recherche documentaire.

    Après un court survol historique des 35 années d'existence des banques de données, l'auteur pointe un écueil majeur : "La consommation n'a pas suivi les prévisions [...] l'appropriation sociale de cet outil a été moins rapide que prévu". Il souligne les tendances actuelles vers le développement des banques de données en texte intégral, ou factuelles et augure de nouveaux développements liés à "l'augmentation de la puissance de traitement [...] ouvrant la porte à des fonctionnalités nouvelles", notamment la diffusion de l'information graphique (molécules chimiques, logos de marques...) : "Les années quatre-vingt-dix vont se caractériser par une croissance qualitative pour adapter l'outil à l'utilisateur'.

    Les chapitres suivants reprennent les divers modes d'accès à l'information électronique : depuis les accès classiques en ligne à partir de terminaux (aujourd'hui des micro-ordinateurs reliés au réseau téléphonique) jusqu'à la diffusion régulière sur disquettes, en passant par les disques compacts. Chaque mode d'accès est présenté, suivi d'un récapitulatif de ses avantages et inconvénients.. On peut parfois critiquer certains points de vue de l'auteur, qui manquent souvent de recul, notamment en ce qui concerne les CD-Rom. Mais c'est aussi la rançon d'un ouvrage court et synthétique.

    Les nouvelles fonctions proposées par les serveurs professionnels sont présentées au chapitre sur les "accès classiques" aux banques de données : analyse statistiques des résultats, regroupement des banques de données, accès immédiat aux informations financières. Mais la complexité, tant organisationnelle que technique, rend indispensable la présence d'un "intermédiaire" hautement spécialisé. Or l'objectif de croissance du secteur ne peut être atteint qu'en touchant directement l'utilisateur. Les serveurs y répondent en proposant des "accès guidés" qui sont examinés dans le chapitre suivant. L'auteur remarque que ces nouvelles méthodes sont limitées par la difficulté générale à se repérer dans une hiérarchie de menus, et que la "facilité" d'utilisation se paye par une limitation de la qualité des recherches. Il souligne néanmoins le succès des accès vidéotex en France, qui élargit notablement le public des banques de données.

    Deux innovations radicales sont présentées aux chapitres suivants : les "front-ends" (frontaux ?), logiciels présents sur le micro-ordinateur de l'utilisateur qui facilitent la formulation des questions et la récupération des informations ; et les "passerelles" qui proposent des accès uniformes à de multiples serveurs, dispensant l'utilisateur de la maîtrise des "langages de commande". De même, deux nouvelles organisations des accès sont évoquées : les "supermarchés de l'information", qui à l'instar de Compuserve aux Etats-Unis, desservent un large public, pour des informations aussi bien généralistes (enseignement assisté par ordinateur) que spécialisées (information financière) ; et le réseau mondial Internet qui propose à la recherche et à l'enseignement de partager les ressources informationnelles dans un vaste réseau d'échange à haut débit.

    Deux chapitres sont consacrés aux accès "en mode local" à l'information : la diffusion sur disquettes, reprenant notamment l'exemple du succès des Current contents on diskettes parmi les chercheurs scientifiques ; et les disques compacts (CD-Rom) qui constituent surtout un produit "d'appel vers la recherche en ligné'.

    Après un tel survol de l'offre d'information électronique, on est cependant surpris de la conclusion, qui accumule les réticences : "L'industrie de l'information électronique, après avoir su s'adapter à l'évolution des techniques semble marquer le pas". En fait. cette optique a marqué l'ensemble du document : l'interrogation sous-jacente porte sur l'écart entre les possibilités ouvertes par la recherche en science de l'information et la réalité des structures sociales qui portent la recherche documentaire. C'est un débat très intéressant, et l'on se prend à regretter qu'il n'ait pas été plus assumé et développé. Pour l'aborder, il eut fallu aussi développer les contraintes sociales du secteur (le coût de l'information, mais aussi l'utilisation de l'information dans les organisations) et une approche cognitive de l'accès à l'information (pourquoi recherche-t-on de l'information. et comment celle-ci modifie en permanence la relation entre l'utilisateur et le système).

    Il nous faut pour terminer souligner la faible qualité éditoriale de cet ouvrage, pourtant proposé à un prix élevé. Par exemple. la bibliographie n'est pas présentée suivant l'ordre alphabétique retenu pour le renvoi aux références. Des incohérences de vocabulaire subsistent et certaines informations mériteraient d'être vérifiées et approfondies (le projet FOUDRE cité page 32 ne doit pas "être étendu à 250 bibliothèques', mais est au contraire abandonné... pour des raisons organisationnelles : droit d'auteur, réutilisation faible des documents numérisés, et non pas techniques...). On trouve aussi des affirmations qu'il faudrait nuancer : en page 70, l'auteur indique que "l'achat du CD-Rom ne dispense pas de l'achat des formes papief , ce qui est pourtant la règle dans de nombreuses bibliothèques. De même, contrairement à ce qui est dit en page 83, de nombreux serveurs offrent régulièrement des accès à 2 400 ou 9 600 bits par seconde ; c'est du côté des utilisateurs qu'il existe des limites à ces vitesses.

    Au bilan, une synthèse intéressante des tendances de l'information électronique, que l'on aurait aimé voir mieux présentée, et plus solidement argumentée. Une vision moins centrée sur la technologie, qui offrirait une vision plus positive des développements qualitatifs annoncés pour les années 90.