Sandhia Vasseur

Sandhia Vasseur, étudiante en M2 PBD [politique des bibliothèques et de la documentation] à l'Enssib, a réalisé son stage de fin d'étude, co-financé par l'Union Européenne et par l'AUF, en Inde. Elle revient sur cette riche expérience internationale.

Sandhia Vasseur, coordinatrice de projets culturels pendant son stage en Inde

Dans l’établissement dans lequel vous faites votre stage, pouvez-vous nous parler d’une des missions qui vous ont été confiées ?

Dans le cadre du développement du Plan Médiathèques XXI, j’ai participé à l’organisation de journées de formation qui ont eu lieu les 9, 10 et 11 mai 2017 avec les professionnels du réseau de bibliothèques françaises en Inde. J’ai eu un rôle de coordinatrice et j’ai travaillé sur l’administration du projet. Cette formation s’inscrit dans une stratégie de modernisation des bibliothèques mise en œuvre depuis l’année 2016. L’enjeu est de préparer les bibliothécaires à devenir des acteurs centraux de la médiation dans le réseau francophone en les engageant à innover au sein et en dehors de leur médiathèque, notamment via des actions hors les murs. Dans ce cadre nous avons fait venir Héloïse Courty, consultante spécialisée dans la modernisation des services de proximité pour être formatrice. Toutefois nous souhaitions que ces journées soient participatives, d’où le fait que chacun ait un moment ou à un autre présenté sa structure, animé un atelier ou une séance. J’ai moi-même animé un atelier « User Experienc » à cette occasion. Ces formations nous ont permis de réfléchir en réseau sur les façons d’utiliser de telles ressources. Outre cette fonction pédagogique cette formation a permis de mieux connaître les dynamiques, moyens et besoins de chaque espace en Inde. Elle a favorisé la coopération en permettant aux professionnels de se rencontrer et d’échanger sur leurs pratiques de travail, leurs observations sur leurs publics et leurs établissements. Cela leur a permis de comprendre l’importance de la mutualisation des pratiques et des enjeux.

 

Dans votre environnement de travail, avez-vous été étonnée par des pratiques ou perspectives professionnelles différentes des habitudes françaises ?

L'expérience que j'ai eu des bibliothèques s'est limitée aux bibliothèques publiques de Delhi et aux médiathèques des Alliances françaises en Inde, je me garderais donc de faire des généralités des observations que j'ai pu faire. Toutefois il était assez étonnant de constater que les bibliothèques indiennes axent leur travail sur le traitement des collections et leur mise à disposition du public plutôt que sur le développement de services conviviaux qui facilitent l'échange et le loisir des publics comme en France. Les publics eux-mêmes sont en recherche d'espaces silencieux et propices au travail lorsqu'il se rendent en bibliothèques. Ils paraissaient plus en recherche de collections riches et d'ouvrages spécifiques que de découvertes culturelles et sociales. Le concept de bibliothèque comme lieu de loisir est finalement peu répandu et les services offerts sont perçus comme des outils de développement d'un capital culturel personnel, notamment lors des études.

Par ailleurs un enjeu actuel fort dans les bibliothèques indiennes est actuellement de numériser les collections patrimoniales pour lutter contre leur perte dues à des conditions de stockage inadaptées. Le gouvernement indien a récemment débloqué des fonds car il s'agit d'un enjeu national.

 

Parmi les bibliothèques visitées, pouvez-vous nous raconter une chose que vous avez trouvée particulièrement surprenante, innovante ou enthousiasmante ?

La "Deepalaya Community library" m'a beaucoup marquée et enthousiasmée. Cette bibliothèque associative repose à la fois sur le travail des bénévoles mais aussi sur le dynamisme de la communauté crée. La bibliothèque est située dans un quartier de Delhi dont les habitants ont parfois des difficultés sociales et financières, ce qui les éloigne des lieux culturels comme les bibliothèques, d'autant plus car leur accès est rarement gratuit en Inde. L'enjeu majeur est de permettre aux usagers de prendre confiance en eux et de faire entendre leur voix à travers leur pratique de la lecture. Il s'agit d'un lieu d'émulation et de partage dont les ressources de très bonne qualité reposent entièrement sur des dons, notamment d'éditeurs. Le fonctionnement de cette bibliothèque est participatif et les enfants et les adolescents font partie intégrante de l'organisation de la bibliothèque. Certains d'entre eux étaient même présents lors des réunions que nous avons eues avec Mridula Koshy, membre actif de l'association. Ils ont également présenté la bibliothèque lors des journées de formation des bibliothécaires du réseau français. J'ai trouvé le travail des bénévoles et l'organisation de la structure inspirant et exemplaire.

 

Au final, que vous aura apporté ce stage à l'étranger ?

J'ai découvert des usages et des pratiques professionnelles très différentes de celles auxquelles j'étais habituée en France, ce qui a ouvert mes perspectives. Ce stage a été très formateur dans le cadre de mon master et plus largement de mon parcours professionnel. Il m’a permis de travailler sur le développement de la coopération au sein d’un réseau de lecture francophone dans le contexte dynamique de la préparation de Bonjour India. J’ai notamment appris à coordonner les échanges entre différents acteurs d’un réseau de bibliothèques. J’ai donc des clés précieuses pour développer une coopération en réseau efficiente et pour mettre en œuvre des partenariats au sein de mon futur environnement professionnel. J’ai expérimenté à quel point la communication interne est primordiale pour développer des projets et pour proposer des services efficients et innovants. Lorsque je serai en poste je saurai développer mes pratiques en faisant varier les acteurs et les actions en bibliothèques car je connais maintenant des méthodes efficaces pour développer et maintenir des partenariats. Par ailleurs j'ai beaucoup travaillé avec des professionnels et usagers indiens ce qui m'a permis d'améliorer mon anglais. En définitive ces quatre mois en Inde m'ont fait prendre confiance en moi, à titre professionnel comme personnel.