Bibliothèque et éditions universitairesCaronYvesAprès une première partie de carrière à découvrir de nombreux environnements professionnels variés, jusqu’en Kanaky-Nouvelle Calédonie, il travaille depuis 2013 à l’université d’Avignon et des Pays de Vaucluse. D’abord responsable de l’informatique documentaire puis chargé de mission « Hal, bibliométrie et open access », il a pris les fonctions de responsable éditorial des Éditions universitaires d’Avignon début 2017.Bibliothèque et éditions universitairesYves Caron
Le BBF s’entretient avec Yves Caron, bibliothécaire et responsable éditorial des Éditions universitaires d’Avignon, sur l’inscription de la bibliothèque dans cette nouvelle mission au service de la diffusion des savoirs universitaires.
Libraries and university presses
BBF interviews the librarian Yves Caron, publishing manager at Editions Universitaires d'Avignon, on how the library is approaching its new remit to disseminate research output.
Le BBF s’entretient avec Yves Caron, bibliothécaire et responsable éditorial des Éditions universitaires d’Avignon.
BBF • Depuis 2017, les Éditions universitaires d’Avignon (EUA) sont portées par la bibliothèque universitaire. Comment se positionne la bibliothèque dans le rapprochement de ses missions avec ces fonctions éditoriales ?
Yves Caron • Ces dernières années les Éditions universitaires d’Avignon, service commun de l’université, rencontraient des difficultés de fonctionnement. L’université s’est interrogée quant aux possibilités de renforcer le soutien de l’établissement aux EUA et de dynamiser la politique éditoriale. C’est par un dialogue rénové entre l’équipe présidentielle et la bibliothèque universitaire, dès l’arrivée en 2015 du nouveau directeur de la bibliothèque, Jacky Barbe, qu’a pu se construire la prise en charge par cette dernière de la « fonction support » des EUA.
Cette nouveauté s’inscrit à la suite de changements déjà à l’œuvre. La BU avait en effet précédemment organisé des journées d’étude et des ateliers en direction des doctorants et des enseignants-chercheurs. Elle a également accompagné des laboratoires pour la mise en place et la gestion de leurs collections dans HAL. Elle a aussi eu à présenter sa démarche lors de rendez-vous institutionnels, en commission de la recherche ou lors de réunions des directeurs de laboratoires. Ces moments ont constitué autant d’opportunités pour vivre des échanges fructueux, montrer un savoir-faire et une capacité à analyser les enjeux et les évolutions en cours.
Dans les faits, l’université a défini une nouvelle décision d’affectation, répartissant mon temps de travail entre 40 % ETP pour l’administration de HAL-Avignon et la construction d’outils bibliométriques, 40 % en tant qu’éditeur et 20 % de collaboration aux tâches communes de la BU (permanences aux banques publiques, actions de formation et manifestations culturelles). Auparavant chargé de mission « Hal, bibliométrie, open access », je suis resté chargé de mission pour la gestion des EUA, toujours sous la responsabilité du directeur de la bibliothèque.
D’autres collègues participent également plus ou moins directement à la prise en charge des EUA, pour l’exécution du budget et la facturation des ventes, pour l’intégration des stagiaires ou encore la communication via les réseaux sociaux. Se mélangent donc de nouvelles compétences à acquérir et un élargissement de process déjà bien établis.
BBF • Vous êtes bibliothécaire et responsable éditorial des Éditions. Comment envisagez-vous l’articulation de ces fonctions en termes de compétences et d’expertise métier ?
Y. C. • Autant certains aspects du monde de l’édition sont connus, tels que le dépôt légal, le rythme des parties d’un livre (faux titre, titre courant, ISBN ou encore achevé d’imprimé), autant d’autres demandent clairement une montée en compétences. Pour l’environnement juridique, la commercialisation, la distribution ou même la réalisation technique d’un ouvrage, l’université me permet de suivre des formations et de participer à des journées professionnelles. On est à la limite de la reconversion professionnelle : c’est exigeant et passionnant. Un détachement dans le corps des ingénieurs d’études est évoqué, afin de consolider cette évolution ainsi que le renouveau des EUA. Il y a pourtant un continuum entre les activités des bibliothécaires et le monde de l’édition. Nous gérons la documentation déjà produite : la publier ne fait que compléter notre champ professionnel, en nous déplaçant un peu plus en amont, structurer l’information à sa source facilitant par ailleurs sa mise à disposition.
Par contre, il est évident que ce type d’activité fait dépendre encore plus directement les bibliothécaires de l’établissement. Ils collaborent en continu avec les enseignants-chercheurs, et le planning de travail, tant dans ses urgences que pour le moyen terme, se définit et se modifie en fonction du rythme donné par ces derniers. En d’autres termes : la prise en charge de la gestion et de la professionnalisation des EUA par la BU accroît son périmètre de compétences et renforce sa place au sein de l’établissement.
BBF • Selon vous, quels sont les grands enjeux et les perspectives ouvertes par cette collaboration éditoriale entre la bibliothèque et les presses universitaires ?
Y. C. • Les enjeux paraissent nombreux et structurels. L’accès payant à la documentation scientifique s’amenuise continuellement, au profit de l’accès libre. La prise en charge globale de l’édition universitaire, après les premiers paliers qu’ont pu représenter les thèses électroniques et HAL, ouvre la possibilité de placer les bibliothèques au cœur des évolutions en cours. Nous sommes capables de proposer une gestion de projets de publications dès leur conception. Nous avons une vision assez large des possibilités éditoriales pour dialoguer avec les enseignants-chercheurs et construire une grande variété d’opportunités. Localement, nous venons d’accompagner le dépôt d’un inventaire scientifique dans HAL (hal-01775007), pour un partage – sous licence Creative Commons – et une visibilité d’envergure, tout en publiant un ouvrage imprimé contextualisant cet inventaire. Dans le même temps, nous souhaitons faciliter l’édition numérique, en mettant en place la chaîne Métopes.
Notre inscription au cœur de la production de l’information facilite les transformations inéluctables de nos métiers. Elle enrichit notre réflexion, notamment quant à la structuration et à la place de nos catalogues alors qu’une partie sensible de la communauté universitaire les ignore, ou la visibilité de nos portails documentaires. Nous avons ici constaté la grande efficacité d’une présentation de l’activité des EUA sur la plateforme hypotheses.org du Cléo.
Les perspectives sont les mêmes que ces dernières décennies, au moins : s’adapter. Dans l’organigramme de la bibliothèque, la « mission EUA » devrait disparaître au profit d’un pôle éditorial, toujours sous la responsabilité fonctionnelle du directeur de la bibliothèque. Un palier sensible pour l’intégration de l’activité éditoriale consisterait à associer formellement les EUA aux organes politiques internes : conseil de direction et/ou conseil documentaire. Une insertion plus complète dans un « service aux chercheurs » élargi est envisageable, mais encore convient-il de donner le temps au personnel de la BU d’assimiler ces changements. La spécificité organisationnelle des EUA doit aussi être préservée : leur fonctionnement et leur programme d’activité ne sont pas définis par le conseil de direction de la bibliothèque, mais par un professeur d’université qui s’appuie sur un comité éditorial, dont le directeur de la BU est membre de droit, et un comité scientifique.
L’équipe des EUA a été renforcée par l’arrivée d’une gestionnaire administrative (0,3 ETP) ; la place des stagiaires a été élargie, avec à présent la venue de deux stagiaires pour six mois. Il est souhaitable que se poursuive l’apport de nouvelles compétences, d’autant que les EUA devraient aussi prendre en charge la publication de revues.