élu à la culture, directeur de pôle culturel et responsable de la médiathèque : quelles prérogatives ?

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Question

Bonjour, je souhaitais connaître les prérogatives d'un élu à la culture, un directeur de pôle culturel et un responsable de médiathèque d'une même ville.
En fait, je voulais savoir si chaque décision du responsable de médiathèque (d'une affiche jusqu'à la rédaction des mails), devait systématiquement être validée par le directeur du pôle culturel et par l'élu à la culture ? De même, l'élu à la culture peut-il décider de la programmation culturelle d'une médiathèque, peut-il annuler ou imposer des animations au responsable de médiathèque ou au directeur du pôle culturel de sa ville ?
D'avance un grand merci pour votre réponse.

Réponse

Date de la réponse :  04/10/2017

Vous aimeriez connaître les prérogatives d'un élu à la culture, d'un directeur de pôle culturel et d'un responsable de médiathèque d'une même ville.
Plus précisément, vous souhaiteriez savoir s'il est légitime que les décisions prises par le responsable de la médiathèque (projets divers, communication externe, programmation culturelle) soient systématiquement visées par le directeur du pôle culturel et l'élu à la culture.
Enfin, vous vous demandez si un l'élu à la culture a le droit d'intervenir dans la programmation culturelle d'une médiathèque.

Selon Noé Wagener, maître de conférences en droit public (Université Paris-Est Créteil), la question de l'autorité hiérarchique dans la fonction publique est posée en ces termes :

"L’obéissance est une obligation juridique, en effet : elle est posée à l’article 28 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires (titre Ier du statut général), aux termes duquel tout fonctionnaire doit, par principe, « se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique ».[...]
Quelle est portée de cette obligation d’obéissance aux instructions hiérarchiques ? Une portée très grande. Ainsi, le maire peut prendre toutes les mesures qu’il juge nécessaire, et les ordres donnés sont obligatoires. Cela concerne aussi bien la politique d’acquisition que n’importe quel acte matériel (par exemple : le type de périodiques en consultation libre sur les présentoirs).

Les seules limites au maire sont celles posées par les lois et règlements. Encore faut-il aussitôt préciser que les bibliothécaires ne peuvent, de toutes façons, tirer que très modérément partie de ces limites pour contrevenir à un ordre : ils ne peuvent déroger au devoir d’obéissance que dans le cas où l’ordre donné est « manifestement illégal et susceptible de compromettre gravement un intérêt public ». Autrement dit, la simple illégalité d’un ordre ne dispense en rien l’agent d’obéir (c’est pourquoi, dans la jurisprudence, on constate que c’est essentiellement dans l’hypothèse où l’exécution de l’ordre conduirait l’agent à commettre une infraction pénale qu’il sera tenu pour manifestement illégal)."

Source : Le bibliothécaire face au pouvoir hiérarchique : une analyse juridique, Droit, patrimoine & culture, 27 septembre 2016

Le Vademecum "Se positionner dans sa collectivité" publié par l'ABF que nous vous invitons vivement à consulter détaille bien l'environnement hiérarchique dans lequel les professionnels des bibliothèques évoluent.
Voici ce que le vademecum indique au sujet des circuits de validation :

"Le temps de la validation et l’aide à la décision

La lecture publique accède véritablement au statut d'objet de politique publique quand elle fait l'objet d'une décision. Il appartient aux professionnels de faciliter la prise de position en l'éclairant le mieux possible par des faits et des propositions d'orientation. Cela peut prendre du temps: les équipes municipales ont de multiples responsabilités à assumer, chaque dossier vient à son heure. Mais quand aucune décision n'est à rendre dans un de leurs domaines de responsabilité, celui-ci aura tendance à ne pas être vu. C'est pourquoi il est bon que la bibliothèque fasse l'objet de décisions. Cela peut concerner de grands dossiers comme un projet de création ou de rénovation de bâtiments, ou bien la tarification, les horaires d'ouverture, une démarche de partenariat, etc. Mais on peut aussi transformer en objet de validation ce qui relève d'une activité quotidienne ou régulière : un programme d'actions culturelles, ou encore la politique documentaire qui peut faire l'objet d'une charte validée par les élus. La validation étant alors une forme suprême d'appropriation. Et n'oublions pas que l'élaboration annuelle du budget peut être l'occasion d'une validation d'objectifs et de moyens Qui valide ? Cela va du supérieur hiérarchique direct ou non (un DAC, UN DGA, UN DGS) au détenteur de l'autorité territoriale (maire ou président). Mais la validation politique prend une grande force quand elle fait l'objet d'une délibération du conseil (municipal, communautaire ou départemental selon le cas). Naturellement, la décision finale peut ne pas correspondre totalement ou partiellement, aux propositions des professionnels : à chacun son rôle. Il appartient ensuite à ces derniers de mettre en œuvre."

Ce cadre juridique posé, l'ABF indique qu'il est toutefois possible pour les professionnels de garder une certaine marge de manoeuvre (voir la partie intitulée "La mise en oeuvre et les marges d'autonomie" page 7 du vademecum). Elle consiste, par exemple, dans la formalisation et la validation par l'assemblée délibérante de procédures et/ou de la charte documentaire de la bibliothèque, ou par la création de liens forts avec d'autres services de la municipalité.
Vous trouverez également dans ce document les différents recours possibles en cas de graves difficultés : les syndicats ou les associations des professionnels de bibliothèques en tout premier lieu.

Source : Se positionner dans sa collectivité : vademecum à destination des personnels de bibliothèque. ABF, 2016.

Nous vous invitons enfin à consulter un article de la Gazette des communes intitulé "Culture : malaise entre élus et professionnels" paru en mars 2015. Il y est question de l'interventionnisme de certains élus à la culture qui met en difficulté certains professionnels de la culture. Cet article fait partie d'un dossier intitulé "Culture : quand élus et professions culturelles se marchent sur les pieds".