Archivage des mémoires de master : éventuelle mise à jour des obligations légales

Attention, cette réponse est ancienne. Son contenu peut être en tout ou partie obsolète.

Question

Bonjour,

Notre base spécialisée art et design https://www.bsad.eu/ signale les mémoires réalisés ces dix dernières années dans les écoles d'art et de design françaises et de Monaco. Après avoir consulté votre réponse du 04/06/2014, nous souhaitons savoir si de nouvelles réglementations sont parues concernant le signalement des mémoires. Un.e étudiant.e est-il en droit de demander la suppression des données concernant son mémoire (titre, date, résumé, direction de mémoire), même si la base ne propose pas l'accès au mémoire électronique ?

Bien cordialement,

Réponse

Date de la réponse :  21/01/2021

Vous êtes en charge d'une base spécialisée qui signale les mémoires réalisés ces dix dernières années dans les écoles d'art et de design françaises et de Monaco.
Vous souhaitez savoir si de nouvelles réglementations sont parues concernant le signalement des mémoires et si un.e étudiant.e est en droit de demander la suppression des données concernant son mémoire (titre, date, résumé, direction de mémoire), même si la base ne propose pas un accès en ligne à la version numérique du mémoire.

 

Les chartes de diffusion des mémoires que nous avons consultées ne font jamais référence au droit donné à l'auteur d'un mémoire de s'opposer au signalement de son travail dans le catalogue de la bibliothèque de son établissement ou dans un catalogue national.


Il est établi en revanche que ce signalement est obligatoire pour les thèses, comme l'exige l'article 6 de l'arrêté du 7 août 2006 relatif aux modalités de dépôt, de signalement, de reproduction, de diffusion et de conservation des thèses ou des travaux présentés en soutenance en vue du doctorat :
 

Le service chargé du doctorat assure la transmission des deux exemplaires et du bordereau au service commun de la documentation ou au service interétablissements de coopération documentaire ou à la bibliothèque, qui :
- signale la thèse dans le catalogue collectif de l'enseignement supérieur (Système universitaire de documentation ou Sudoc) et dans le catalogue de l'établissement ;
- conserve un exemplaire et, sauf dans le cas d'une clause de confidentialité, en assure la communication ;
- adresse le second exemplaire à l'un des ateliers nationaux de reproduction, sous réserve des autorisations mentionnées à l'article 5.

 

 

Pour les mémoires de licence ou de masters ou tout autre diplôme autre que celui du doctorat, il apparaît que si le dépôt dans l'ENT de l'établissement est souvent une obligation, ce dépôt ne donne pas forcément lieu à une diffusion, ni même à un signalement. En effet, l'archivage et le signalement des mémoires n'est pas une obligation légale. Les bibliothèques sont libres de privilégier le catalogage des mémoires dans certaines disciplines considérées comme prioritaires ; elles peuvent choisir de ne cataloguer que les meilleurs travaux.

Exemples :

Dépôt et diffusion des mémoires de master recherche. Bibliothèque universitaire de Lyon 3

Procédure de dépôt des mémoires de master. Université de Grenoble

 

 

Concernant le droit donné à l'auteur d'un mémoire qui serait catalogué de demander la suppression ou la modification de données bibliographiques, nous manquons de certitude, en revanche les données à caractère personnel (le nom, la date de naissance) peuvent faire l'objet de réclamations.
Un récent mémoire d'une conservatrice aborde cette question.

Extrait  (p.37):
 

Les fichiers autorités
Du point de vue français,
Il existe deux établissements qui gèrent les fichiers autorités sur l
e territoire national: l’Agence bibliographique de l’enseignement supérieur (ABES)et la Bibliothèque nationale de France (BnF). Leur positionnement est très proche, notamment en opérant une distinction entre l’interface public et l’interface professionnelle. L’ABES en matière de fichier «Auteurs», a toujours refusé les demandes de suppression car les informations de publication sont des données publiques. Ainsi les dates de naissance des auteurs peuvent être rendues non publiques, mais pas supprimées car cette donnée personnelle permet d’éviter les risques d’homonymie.Pour toute demande d’un usager de modification dans le catalogue collectif géré par l’ABES, le Sudoc, d’une donnée le concernant, le site de l’ABES lui indique de contacter une des bibliothèques qui a rédigé la notice litigieuse. L’ABES met également à disposition du demandeur, un lien vers la CNIL qui propose un modèle type de courrier.

Source : La protection de la vie privée des lecteurs par les bibliothécaires français. Marion Chovet. Mémoire du diplôme de conservateur des bibliothèques, Enssib, 2019.

 

 

L'article 17 du RGPD traite du droit à l'effacement (droit à l'oubli), toutefois, comme le rappelle Marion Chovet :
 

L’article 17 fixe les conditions d’un droit à l’oubli numérique.Le responsable de traitement ayant rendu publiques des données à caractère personnel doit informer les tiers de la demande de la personne concernée d’effacer tout lien vers ces données ou les copies ou reproductions qui en ont été faites. Le droit à l’oubli numérique a été renommé en droit à l’effacement. Le droit à l’oubli n’est pas un droit absolu: il ne s’applique pas lorsqu’il s’agit de garantir la liberté d’expression et d’information ou encore le droit à l’histoire (archivage dans l’intérêt public, scientifique, statistique ou historique). Le législateur européen a ainsi opéré une balance de proportionnalité entre le droit des internautes à accéder à l’information et les droits fondamentaux de la personne concernée, en particulier le droit au respect de sa vie privée.


 

Pour conclure, le signalement des travaux d'étudiants (hors doctorat) n'étant pas systématique, nous n'avons pas trouvé de textes ou de chartes rédigées par des bibliothèques qui incluraient la possibilité de signifier son accord ou son refus de voir son travail cataloguer dans une base bibliographique.

Il nous semble que le signalement est justifié par l'intérêt scientifique qu'un mémoire peut représenter et que, par conséquent, son catalogage dans une base publique ne requiert pas, sauf exceptions, le consentement de l'auteur.

 

Veuillez noter que cette réponse n'a pas de valeur juridique.

 

Pour aller plus loin :

Archivage des mémoires de master : obligations légales. Questions? Réponses! 04/06/2014

Archivage des mémoires universitaires.Questions? Réponses! 08/11/2016

Le point sur les données à caractère personnel. Anne-Laure Stérin. Ethique et droit [blog], 9 novembre 2018