Empowerment et bibliothèques

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Question

Bonjour,
Concrètement qui sont les acteurs permettant aux bibliothèques de mettre en place des démarches d’empowerment ?
Merci

Réponse

Date de la réponse :  03/12/2019

Vous souhaiteriez savoir quels sont les acteurs permettant aux bibliothèques de mettre en place des démarches d’empowerment.

 

L'empowerment

 

L'ouvrage intitulé L'empowerment, une pratique émancipatrice, dont nous vous recommandons la lecture, tente de définir un concept issu du monde anglo-saxon  :


Depuis le début des années 1990, une littérature anglosaxonne pléthorique s'est développée à ce sujet dans des champs aussi différents que l'action sociale, l'éducation, le développement international et dans des registre variés, universitaire, professionnel ou politico administratif. Elle en propose de nombreuses définitions, méthodes et critères d'évaluation. Une utilisation  aussi extensive dit à elle seule la polysémie de cette notion et le flou conceptuel qui l'accompagne. Pour autant des traits communs se dégagent de ces différents interprétations. L'empowerment  articule deux dimensions, celle du pouvoir, qui constitue la racine du mot, et celle du processus d'apprentissage pour y accéder. Il peut désigner autant  un état (être empowered) qu'un processus, cet état et ce processus étant  à la fois individuels, collectifs et sociaux ou politiques - même si, selon les usages de la notion, l'accent est mis sur l'une de ces dimensions ou au contraire sur leur articulation. Cela implique  une démarche d'autoréalisation et d'émancipation des individus, de reconnaissance des groupes ou des communautés et de transformation sociale.

Source :  L'empowerment, une pratique émancipatrice. Marie-Hélène Bacqué, Carole Biewener. La Découverte, 2013. Présentation sur le site de l'éditeur.

 

 

C'est l'aspect politique que Raphäelle Bats met en avant, liant l'empowerment à la notion de participation, dans le manuel Construire des pratiques participatives en bibliothèque (p.22) :

 

Aujourd’hui, la participation démocratique est portée, en France, par deux types d’acteur. D’une part, les municipalités : certaines d’entre elles transforment leur service de démocratie participative en service de participation démocratique, acceptant ainsi que la participation, plutôt que la démocratie, soit au cœur de l’action politique . [...]

D’autre part, des associations et différentes formes de groupes, pour qui il revient à la société civile de transformer la société. De fait, la participation semble réellement accroître le pouvoir des citoyens quand elle se fait action collective plutôt que réflexion partagée.
En cela, la notion de participation rejoint celle d’empowerment*, soit la possibilité de gagner en pouvoir pour les communautés, voire les individus, par le résultat d’un apprentissage, d’une éducation leur permettant d’améliorer leurs connaissances et compétences.

Source :  Construire des pratiques participatives dans les bibliothèques. Sous la dir. de Raphaëlle Bats. Presses de l'Enssib, 2015. Disponible en ligne sur OpenEdition Books.

 

 

Les acteurs

 

Comme l'indique Raphaëlle Bats dans l'ouvrage cité plus haut, la bibliothèque est actrice de l'empowerment quand elle crée des conditions favorables aux projets participatifs, ou quand la bibliothèque devient elle-même  "un bon outil pour accompagner des projets émancipateurs. On parle aux États-Unis de bibliothécaire embarqué (embedded librarian), quand la bibliothèque met un de ses personnels à disposition d'une association, par exemple, pour apporter son expertise documentaire au service d'un projet d'empowerment." (p.22)

L'ouvrage présente un ensemble d'expériences de bibliothèques, que nous vous invitons à consulter.



Parmi les acteurs de l'empowerment avec lesquels la bibliothèque peut interagir, on trouve :

 

  • les associations  notamment celles issues du mouvement Maker que l'on peut retrouver dans les Fablabs, mais aussi celles issues de l'éducation populaire, ou celles qui travaillent par exemple sur l'exclusion numérique, l'illettrisme, la lutte contre les fake news, la place des femmes dans la société ou qui viennent en aide aux migrants.
    Quelques exemples :
    - Emmaüs Connect et les bibliothèques parisiennes s’allient pour vaincre l’exclusion numérique. Emmaus Connect, janvier 2018
    - Accueil des migrants en bibliothèque. Bibliothèques Sans Frontières.
    - Le projet les sans pagEs qui a pour but de combler le fossé des genres sur Wikipédia et qui a proposé un projet collaboratif porté par l'Espace numérique de la Bibliothèque de Lyon Part-Dieu, Cherchez la Femme
    - l'association La 27e région, spécialisée dans le design de services, qui a aidé la médiathèque de Lezoux dans son projet de co-construction.
     
  • les entreprises de conseil et de design de services

    Exemples :
      - l'agence Vraiment Vraiment
      - la Fondation Internet Nouvelle Génération
 

  • les tutelles des bibliothèques et les institutions :
    Ce sont avant tout les tutelles (municipalités, communautés de communes, régions) et les institutions (DRAC, Agences du livre) qui sont susceptibles de soutenir les actions liées à l'empowerment dans les bibliothèques.
    Certaines grandes villes se sont dotées de services de design de politiques publiques. A titre d'exemple, Silvère Mercier, ex-bibliothécaire est devenu chargé  mission design des politiques publiques à la Métropole Européenne de Lille (voir le site #Symbioses_citoyennes)

    Au niveau de l'État, le Commissariat général à l'égalité des territoires, ainsi que le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique  sont des acteurs qui favorisent l'autonomie des citoyens et la participation.

    A l'échelon plus local, les centres sociaux, les hôpitaux, les écoles ainsi que d'autres institutions peuvent être aussi des partenaires.

 

  •  les associations professionnelles et notamment diverses commissions de l'ABF (Labenbib, Legothèque, Accessibib...)
     
  • les individus : en effet, ce sont parfois des particuliers qui peuvent être à l'origine d'actions de ce type en bibliothèque pour le compte d'une communauté.

    Quelques exemples :
    - le dispositif des bibliothèques vivantes :  imaginée en 2000 par l’ONG danoise « Stop the violence », la bibliothèque vivante est un outil de lutte contre les discriminations et stigmatisations soutenue par le Conseil de l’Europe. Les lecteurs de la bibliothèque peuvent emprunter des "personnes"  découvrir l’histoire et le quotidien d’une personne appartenant à un groupe confronté à des préjugés et des stéréotypes (immigré, sans emploi, handicapé etc.). Voir le site des médiathèques Rennes Métropole.
    - Une soirée de folie co-organisée par un usager. Louise & les canards sauvages [blog], Bibliothèque Louise Michel, octobre 2019

 


Pour aller plus loin :