Bonjour La collection pour adolescents "Expri'm" chez l'éditeur Sarbacane a décidé, dit le directeur de la collection, Tito Berard "de se dispenser...

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Question

Bonjour
La collection pour adolescents "Expri'm" chez l'éditeur Sarbacane a décidé, dit le directeur de la collection, Tito Berard "de se dispenser de à la loi de 1949 sur les publications destinées à la jeunesse". Mais légalement, est-ce possible? Un éditeur qui publie des titres dans une collection pour adolescents peut-il refuser de se soumettre à cette loi et cela a t-il des conséquences pour lui? Et dans la section jeunesse d'une bibliothèque, peut-on proposer ces titres qui finalement ne sont plus des ouvrages jeunesse sans risquer de problèmes? Certains collègues ont eu récemment des plaintes concernant certains titres de cette collection.
Merci d'avance de votre réponse

Réponse

Date de la réponse :  21/09/2012

Il nous est difficile de vous répondre en ce qui concerne la légalité des publications de l’éditeur Sarbacane : si cet éditeur enfreint la loi de 1949 sur les publications destinées à la jeunesse, il s’expose en effet à la censure. Mais dans la mesure où les titres qui vous posent problèmes ont été publiés, les questions qui se posent concernent moins la responsabilité juridique de l’éditeur que les choix déontologiques des bibliothécaires.

C'est pourquoi nous répondrons principalement à votre deuxième question, sur la responsabilité les bibliothèques lorsqu'elles proposent ces titres en section jeunesse.

En 1999, la revue Lecture Jeune a consacré un dossier aux romans violents, qui aborde à de nombreuses reprises la collection "Expri'm" de Sarbacane ; des psychologues, des professionnels du livre et des lecteurs adolescents y donnent leur avis ; nous n'avons en revanche pas identifié d'éléments relatifs spécifiquement à la responsabilité des bibliothécaires : http://www.lecturejeunesse.com/index1024.php?page=revue_archives&menu=1&...

En 2008, la revue Bibliothèque(s) a consacré un dossier à la censure, dans lequel il est rappelé à plusieurs reprises la nécessité (mais aussi la difficulté) de fonder les choix d’acquisitions sur des principes objectifs. Bertrand Calenge pointe la responsabilité des bibliothécaires, en indiquant qu'elle ne se résume pas à l'observation de lois et de règlements. Florence Schreiber indique que les Médiathèques de Saint-Denis décident parfois à l'issue de débats interne "de faire passer du côté adultes un livre publié dans une collection pour ados". L'article le plus intéresssant au regard de vos interrogations est celui de Caroline Rives et Annick Lorant-Jolly sur la censure en matière de littérature jeunesse. Celles-ci évoquent notamment la question des mentions d'âges, les pressions extérieures et l'autocensure des bibliothécaires. Elles indiquent que la Commission de surveillance et de contrôle des publications adressées à l’enfance et à l’adolescence recommande la mention d’âge sur les quatrièmes de couverture, mais se montrent réservée sur l'utilité de telles mesures : "Les récentes interventions (en 2007 et 2008) de cette commission auprès des éditeurs pour recommander instamment la mention d’âge sur les quatrièmes de couverture ne peuvent qu’alerter, d’autant qu’elles ne semblent pas a priori entrer dans le champ de ses compétences. Celles-ci concernent surtout (mais pas exclusivement) les fictions romanesques destinées aux plus grands, ces lecteurs qui se situent au seuil de cette frontière ténue entre l’adolescence et l’âge adulte. Elles inquiètent en tout cas les éditeurs pour la jeunesse qui ne veulent pas soumettre leurs publications au diktat de la tranche d’âge, concept imposé par les services marketing et qui limite la portée potentielle d’un livre. À quand les romans ciblés pour les 11-13 ans, 13-15, 15-17, 17 et + ?. (...)
Cependant, on peut observer dans les bibliothèques pour enfants des phénomènes de nature diverse, qui peuvent plus ou moins renvoyer à des formes de censure. Les bibliothécaires sont susceptibles, de façon récurrente, de subir des pressions de la part de personnes ou de groupes pour des raisons morales, pour des raisons politiques, ou en raison de cette vision de l’enfance selon laquelle on devrait la protéger de la découverte précoce de réalités déprimantes (mort, violence, inégalités…)."
Plus loin, elles évoquent l'autocensure : "Plus difficile à cerner est l’autocensure, pratiquée par des bibliothécaires, qu’ils craignent d’affronter les mécontentements extérieurs évoqués ci-dessus ou bien qu’ils soient eux-mêmes hostiles à la présence de certains ouvrages dans leurs collections. Ils sont rejoints en ce sens par d’autres prescripteurs : éducateurs, enseignants, journalistes… La littérature pour adolescents suscite régulièrement ce type de débats, qui semblent cependant circonscrits au monde des adultes. (…) Mais cette littérature est-elle lue largement par les jeunes ? Elle semble réservée à de petits groupes (souvent féminins) de lecteurs confirmés et probablement suffisamment aguerris pour affronter un point de vue pessimiste sur l’existence."
Source :
Dossier "La censure". Bibliothèque(s) 41/42. Décembre 2008. Sommaire disponible sur : http://www.abf.asso.fr/fichiers/publications/bibliotheques/sommaires/bib...

A la lecture de ces différents articles, il apparaît que les bibliothécaires se doivent d'éviter à la fois l'autocensure et les plaintes parentales.

Pour ce faire, il importe d'ouvrir la discussion au sein de l'équipe et de mettre en place des règles claires et lisibles, pour les bibliothécaires comme pour le public : définir les critères d'acquisitions ainsi que les modalités de mise à disposition des documents susceptibles de poser problème - en adoptant un classement adapté, et éventuellement des règles de prêt spécifiques (âge minimum, accord des parents?).

Une information à destination des parents peut également être envisagée.

Veuillez noter que cette réponse n'a bien entendu pas de valeur juridique.

Tous les liens ont été consultés le Consulté le 21 septembre 2012.

Cordialement,

Le Service questions? réponses! de l'enssib

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