Logique "publics" et logique "collections" en bibliothèque

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Question

Qu'est-ce que la logique de public et la logique de collection en bibliothèque ?

Réponse

Date de la réponse :  22/10/2015

Vous cherchez à comprendre ce que sont la logique de public et la logique de collection en bibliothèque.

Nous supposons que votre question porte sur l’évolution du cœur de métier des bibliothécaires, qui s’est progressivement déplacé de la gestion des collections vers le service aux usagers. On peut situer le point de bascule dans les années 70, quand les bibliothèques ont généralisé le libre-accès, et que les missions d’accueil et de médiation ont pris de l’importance.

Dans le manuel Créer des services innovants, Raphaëlle Gilbert propose un chapitre sur le projet de service (pages 31 à 46), qui invite les bibliothèques à (re)placer les usagers au cœur de leur stratégie de services : « le métier de bibliothécaire reste encore largement identifié aux activités d’acquisition et de prêt. Pourtant, la constitution de collections est un outil, parmi d’autres, au service de missions : offrir à tous un égal accès à la culture, la formation et l’information. L’enjeu est aujourd’hui de redéfinir la façon de répondre à ces missions. Or il semble que le cœur d’activité tende à se déplacer d’un processus de production-distribution (acquisition de documents et prêt) vers une logique de services. »

Si le cœur de métier porte actuellement plus sur les services, la gestion des collections n’a pour autant pas disparue ; les questions de politique documentaire perdurent, mais sont renouvelées par une plus grande prise en compte de l’usager.

Pour vous faire une idée des compétences actuelles liées à ces deux aspects du métier, vous pouvez consulter l’offre de stages de formation continue de l’enssib sur les Collections et politiques documentaires et sur La bibliothèque et son public.

Enfin, à titre d'illustration, on peut mentionner le projet d’établissement de la bibliothèque municipale de Lyon, qui revendique un "mouvement qui va de la collection vers le public, les publics, les plaçant au cœur de ses dispositifs et non pas comme variable d’ajustement, les accueillant en acteurs, en créateurs aussi, voire en producteurs de contenus et non plus seulement en usagers passifs". Ce projet comprend un axe "orienté publics", qui s’articule autour de trois programmes : accessibilité, offre documentaire et élargissement des publics.

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter ce mémoire :
Services innovants en bibliothèque : construire de nouvelles relations avec  les usagers. Raphaëlle Gilbert. Mémoire d’étude d’élève conservateur. enssib, 2010
Extrait (page 21) :
« Le rôle de la bibliothèque est traditionnellement présenté en référence à la collection : il s’agit de mettre des documents à disposition, de les proposer au public et éventuellement d’offrir une assistance documentaire. Dans le processus de service, le rôle de la bibliothèque fait référence à l’usager. B. Calenge propose ainsi de redéfinir le rôle de la bibliothèque : « accueillir, orienter, informer ». « Il s’agit désormais de la considérer non plus comme un fonds stocké à l’usage d’amateurs, mais comme un fonds rendu vivant par l’usage. Ce n’est plus en accumulant du savoir que la bibliothèque gagne sa légitimité sociale, mais en aidant la communauté à s’approprier ce savoir. Si la collection reste centrale, c’est par l’usage qui en est fait, non par les documents ou accès documentaires qui la composent, et l’objet de la bibliothèque est non de développer cette collection comme fonds, mais de satisfaire les besoins d’information de publics à l’aide de ce fonds vivifié. »
Extrait de la conclusion (page 79) :
« La relation de service modifie le rapport entretenu entre usagers et bibliothèque. Elle construit de nouveaux usages, parfois à distance, souvent plus participatifs, plus horizontaux. Elle fait également évoluer les représentations de chacun : pour les usagers, la bibliothèque apparaît moins comme une institution publique vieillie destinée à des publics scolaires ; pour les bibliothécaires, les besoins et usages des publics sont mieux connus et pris en compte. Enfin, les services innovants poussent à reconsidérer la place de chacun. L’usager, considéré comme un individu, se positionne comme acteur plus que comme consommateur. Il participe activement au service et bénéficie de prestations personnalisées. Le bibliothécaire doit quant à lui repenser ses missions. Il trouve dans la relation de service une fonction plus relationnelle et plus intellectuelle, axée sur la médiation, la production de contenus, la formation et la maîtrise des technologies. »

Vous pouvez également vous référer au dernier livre de Bertrand Calenge, qui invite les bibliothécaires à élargir leur rôle, de la transmission de documents à la médiation des connaissances :
Les bibliothèques et la médiation des connaissances. Bertrand Calenge. Ed. du Cercle de la Librairie, 2015. Présentation