Alice Séqué-Weil

Alice Séqué-Weill possède un parcours pluridisciplinaire, entre une formation de sciences politiques et une expérience professionnelle dans le domaine de l’environnement et du développement durable (secteur associatif). Ce stage professionnel de trois mois et demi lui a donné l’occasion de satisfaire sa curiosité du monde de l’archéologie et de l’histoire ancienne à l’École Française d’Athènes (EfA) tout en découvrant de nouveaux aspects du métier de conservatrice.

Alice Séqué-Weill : proposer des services aux chercheurs dans un environnement multilingue, stage en Grèce

Pouvez-vous nous présenter une de vos missions de stage ? 

Ma mission portait sur les services à la recherche, une thématique que les bibliothèques investissent de plus en plus aujourd’hui. En rencontrant les chercheurs de l’école et plus largement ceux rattachés au domaine de l’Antiquité grecque, en fréquentant les différents services qui composent l’établissement, j’ai cherché à dresser un panorama de ce qui existait déjà et des besoins en matière de nouveaux services ou de renforcement des services existants. J’ai ensuite fait des propositions pour la mise en place d’une stratégie transversale d’Open access entre les différents services de l’EfA.

 

Avez-vous été étonnée par des pratiques ou perspectives professionnelles différentes des habitudes françaises ?

Les Grecs lisent vraiment beaucoup ! Si les bibliothèques publiques en dehors de la bibliothèque nationale de Grèce sont rares et mal dotées, les librairies sont en revanche très nombreuses à Athènes. Même les peripteri, sorte de kiosques qui vendent chewing gums, cartes postales, aspirine, etc. proposent des livres. Le respect des auteurs et l’importance accordée à l’histoire et à la philosophie se remarquent notamment dans les prénoms : les Platon, Aristote ou Thémistocle sont fréquents. Bref, l’étude des pratiques culturelles donnerait sans doute des résultats très différents entre la France et la Grèce.

Sur le plan des pratiques professionnelles, si mon cadre de travail était celui des EPSCP françaises, il était intéressant de découvrir une équipe composée principalement de personnels grecs, parlant pour certains très bien français et pour d’autres pas du tout. Je me demandais pourquoi les réunions d’équipe n’étaient pas une pratique instituée, mais j’ai vite compris que la mise en place de discussions multilingues était un véritable défi ! En tant que future conservatrice, cela m’a fait réfléchir sur des dispositifs qu’il y aurait à mettre en place dans un contexte où tout le monde ne se comprend pas (langue étrangère, mais aussi langue des signes ou tout simplement difficultés de communication).

J’ai également noté l’attachement des chercheurs de l’école à « leur » bibliothèque. En BU il est rare de voir les chercheurs, ils préfèrent souvent travailler à distance via les ressources en ligne. Mais à l’EfA ceux-ci disposent de sources précieuses et introuvables ailleurs sur l’histoire grecque, et nombreux sont ceux qui viennent y travailler pendant les congés universitaires français. Cette proximité avec son public est un atout pour la bibliothèque car elle peut facilement le solliciter. Mais cela peut aussi constituer une difficulté pour mettre en place des évolutions dans la bibliothèque, car certains usagers ont leurs habitudes bien ancrées. Il s’agit donc de les associer plus fortement aux projets et décisions.

 

Si vous avez visité une bibliothèque ou un centre de documentation, qu'en avez-vous retenu de particulièrement surprenant, innovant ou enthousiasmant ?

Je suis allée visiter la Gennadius Library, qui est la bibliothèque de l’École américaine d’archéologie, qui s’est notamment constituée grâce à un don colossal (26 000 ouvrages) sur l’hellénisme en 1920. Ces derniers temps, elle a bénéficié d’investissements importants et de travaux, et elle est très moderne pour ce type de bibliothèque (équipements de pointe, écrans tactiles, grande salle d’exposition etc.). J’ai aussi été particulièrement marquée par l’existence d’une salle muséale assez grandiose donnée par la collectionneuse Helen Stathatou, notamment par sa cheminée décorée de faïence. Dommage qu’on ne puisse pas s’asseoir au coin du feu pour y feuilleter les ouvrages !

En revanche, les bibliothèques publiques grecques sont très rares et mal dotées, elles ont parfois recours au mécénat privé pour se moderniser. Le contraste est vif entre les bibliothèques étrangères de recherche et les bibliothèques grecques de lecture publique.

 

Que vous aura apporté ce stage à l'étranger ?

Une expérience auprès d’un public de chercheurs sur le développement de nouveaux services. Une vision globale des différents pôles pouvant exister au sein d’une bibliothèque de recherche. L’opportunité d’expérimenter à petite échelle un condensé des enjeux du métier de conservateur. L’envie de revenir dans ce pays magnifique et chaleureux.