Pascal Robert : Penser l’impensé du numérique

Dans le cadre d’une conférence à l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) qui s’est tenue en octobre 2016, Pascal Robert, directeur de la recherche, a présenté ses travaux sur les technologies intellectuelles et les images. Suite à cette mobilité, il a accepté de répondre à quelques-unes de nos questions.

Pascal Robert : Penser l’impensé du numérique

Pouvez-vous nous parler de ce que vous avez présenté lors de cette conférence ?

Il s’agissait, à l’invitation de Frédéric Kaplan de EPFL, de présenter mes travaux sur le numérique aux membres de son laboratoire, notamment. J’ai donc dressé un panorama de ma réflexion sur le numérique que j’ai intitulé « Penser l’impensé du numérique : des concepts et des livres ». J’ai alors présenté le couple qui articule fondamentalement mon travail, dans une tension à mon sens heuristique : d’une part la mise en évidence d’un impensé informatique-numérique, entre stratégies idéologiques et pratiques informationnelles qui posent les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) comme des évidences et d’autre part l’élaboration d’un système de catégories, qui ne relève ni de celui de la technique, ni de celui de la sociologie, et constitue ainsi une proposition proprement Sciences de l’Information et de la Communication (SIC). Cela dit, il peut apparaître comme quelque peu paradoxal qu’une recherche sur le numérique se traduise par la publication de livres papier. Or, à mes yeux, le livre papier offre une capacité de structuration, de profondeur et une richesse que la logique de la fragmentation qui domine l’univers du numérique ne peut prétendre atteindre. C’est ce que j’appelle sa puissance d’architecturation de la pensée (le livre est architecturé-architecturant). Lui seul peut donc offrir l’outil susceptible d’accueillir une pensée complexe du numérique, à condition de ne pas le confondre avec les essais qui envahissent les étals des libraires, et qui participent de l’impensé en faisant croire qu’ils pensent alors qu’ils ne font que bavarder.

 

D'une manière générale, que vous a apporté votre séjour international ?

Une discussion intéressante avec les membres du laboratoire et plus encore avec Frédéric Kaplan lui-même dont on connait la richesse de la réflexion sur ces questions ainsi que les passionnants travaux d'histoire augmentée par le numérique sur Venise.