Michael David Miller est un bibliothécaire québécois. Il travaille à la McGill University Library, qui reçoit régulièrement des étudiants de l’Enssib en échange universitaire. De passage en France, il nous a rendu visite.
 
De Montréal à Lyon, il y a plus d’un pas. Quelle est la raison de votre venue à l’Enssib ?
Je suis venu en France dans le cadre de ma participation à la WikiConvention francophone 2018, à Grenoble, où j’interviens à propos de l’intersection des bibliothèques et bibliothécaires, Wikipédia et la communauté LGBTQ+ du Québec. N’étant pas loin de Lyon, l’idée de faire un peu de « bibliotourisme » m’est venue à l’esprit et j’en ai profité pour visiter l’Enssib.
 
Vous êtes diplômé de l’université de Montréal, dont l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information (EBSI)  est partenaire de l’Enssib. Que vous évoque ce lien entre ces deux écoles francophones ?
C’est une manière de favoriser les échanges internationaux, notamment avec les écoles d’été sur la francophonie qui ont récemment eu lieu. Personnellement, je suis avec beaucoup d’attention ce qui se fait à l’Enssib, surtout en ce qui concerne le Bulletin des bibliothèques de France. C’est justement grâce à l’EBSI que j’ai découvert l’Enssib. C’est aussi un moyen efficace de mettre en avant les études en bibliothéconomie à travers un réseau d’écoles francophones.
 
Du fait de vos expériences personnelle et professionnelle, avez-vous pu observer des différences entre les modèles français et québécois ?
Oui ! J’ai remarqué que la présence sur internet des bibliothécaires d’université était bien plus discrète en France. J’ai eu du mal à trouver des confrères qui travaillent dans les mêmes disciplines que moi. Quant à la fréquentation des bibliothèques, je dirais qu’elles sont au même niveau dans les deux pays même si, en France, les horaires d’ouverture sont moins larges qu’au Québec. Les collections en BU me paraissent aussi plus petites ici. Dans le fond, nous faisons le même travail mais avec des ressources assez différentes.
 
L’ouvrage Des bibliothèques Gay Friendly ? (collection La Numérique, gratuite) est récemment paru aux Presses de l’Enssib. En tant que personne sensible aux problématiques LGBTQ+, que pensez-vous du traitement de la question des minorités au sein des bibliothèques ?
Je pense que ces sujets ne sont pas assez traités en profondeur. Je reste persuadé que les bibliothèques se doivent d’être des lieux inclusifs qui offrent des ressources destinées à tous. Cela passe notamment par le fait de disposer d’ouvrages qui traitent davantage de ces minorités puisque si elles ne se retrouvent pas dans ce que nous proposons, alors elles ne voudront pas pousser nos portes. Le personnel a tout intérêt à être accompagné et formé à leur accueil, parce que c’est l’ignorance qui nous rend mal à l’aise.
Au-delà des enjeux propres aux LGBTQ+, c’est une approche générale, plus globale, de ces problématiques qu’il faut envisager. J’ai en tête le manque de représentation des auteurs féminins dans nos collections par exemple. Ce livre publié par les Presses de l’Enssib est une bonne nouvelle et déjà un bon début dans cette démarche de promotion de la diversité au sein des bibliothèques.

Un mot pour la fin ?
Je voudrais dire que les bibliothèques ont souvent été passives dans la société en restant cantonnées à un rôle de conservation du patrimoine alors qu’elles ont l’occasion de faire tellement plus, d’être actives dans le processus d’intégration sociale. Je suis convaincu que le personnel des bibliothèques a beaucoup à apporter à ce niveau-là. Cette image poussiéreuse du bibliothécaire sagement assis derrière son comptoir est révolue. C’est avant tout un métier qui requiert des qualités humaines et relationnelles certaines.

Propos recueillis par Karim Guerda