Rafael Martinez

Originaire de Haute-Savoie, Rafael Martinez est à 28 ans titulaire d’un DUT « Information numérique dans les organisations » de l’IUT 2 – Université Grenoble Alpes et d’une Licence 3 « Information et documentation », obtenue à l’Université Jean Moulin – Lyon 3. Après deux expériences professionnelles dans des bibliothèques de communes rurales de Haute-Savoie, il rejoint l’Enssib en master 1 PANIST puis, l’année suivante, en master 2 ARN (Archives numériques).

Rafael Martinez témoigne de son année de master ARN

1/ Pourquoi avoir choisi le master ARN de l'Enssib ? Quel a été votre parcours auparavant ?
Le master ARN (Archives numériques) correspond finalement à un choix assez naturel. Je suis d’une génération qui a toujours eu un ordinateur, qui est née avec les jeux vidéo et qui se pose peut-être plus que d’autres des questions de sauvegarde de données. J’ai ainsi le souvenir du site d’Internet Arcade, qui permet de retrouver d’anciens jeux vidéo qui y sont archivés et d’y rejouer. Je crois que j’ai toujours été quelqu’un de sensible aux questions de la conservation du savoir et de sa transmission mais là, cette question se posait concrètement à l’un de mes centres d’intérêts. C’est sûrement par cette voie que les questions d’archivage et de conservation numérique se sont posées à moi. Je les ai également abordés dans le cadre de mon DUT puis en travaillant dans deux bibliothèques de petites communes de Haute-Savoie, Fillinges et Gaillard. Cependant, j’ai très vite eu envie d’en apprendre davantage et j’ai naturellement regardé du côté de l’Enssib, dont j’avais déjà fréquenté la bibliothèque quand j’étais à l’Université Jean Moulin – Lyon 3. Je ne voulais pas partir vers un master en archivistique orienté « papier » et le master ARN de l’Enssib m’a semblé plus malin. En M1 Panist, nous avions assisté à la présentation du master ARN par l’équipe enseignante et c’est ce qui m’a définitivement convaincu de rejoindre ce master.

2/ Comment s'est déroulée cette année de master ? Quels en ont été les temps forts ?
Dans l’ensemble, on a bénéficié d’une très bonne année, grâce à l’environnement de l’Enssib, mais aussi à l’ambiance entre camarades de promotion, ce qui n’est pas anodin dans la réussite de chacune et de chacun. De façon générale, on a beaucoup de chance à l’Enssib, notamment pour ce qui est de l’équipe pédagogique. Les intervenants sont des pointures et c’est très stimulant. Plus concrètement, l’année commence véritablement fin septembre, et on est très vite dans un rythme soutenu avec du travail en continu de mi-octobre à mi-janvier. A partir de novembre, la gestion de projet demande beaucoup d’énergie, alors qu’il nous faut répondre à d’autres attentes, notamment en matière de lecture d’ouvrages universitaires. Globalement, c’est une année exigeante mais également très stimulante.


3/ Vous évoquez la gestion de projet. En quoi cela a-t-il consisté ? Qu'est-ce que cela vous a apporté ?
La gestion de projet a commencé début novembre, relativement lentement mais on a vite été pris à 100%. Ce n’était pas une gestion de projet fictive mais un travail sur un vrai projet, qui visait à faire progresser les Archives départementales et métropolitaines (Rhône et Métropole de Lyon) sur des questions pour lesquelles elles ne se sentaient pas suffisamment armées. Pour les étudiants comme pour les commanditaires, c’est une expérience « gagnant / gagnant ». Pour ma part, je suis très satisfait qu’on ait pu travailler sur un projet réel, avec de vrais commanditaires en face, qui sont confrontés à des vrais problèmes et que l’on peut questionner. C’est probablement cela que l’on retient le plus : les échanges. Autre caractéristique de la gestion de projet : avec une répartition par groupes, chacun a un rôle mais, au final, on est tous amenés à prendre des initiatives, à s’adapter en fonction des commanditaires et à ne pas se limiter à son propre rôle. La dimension du temps est également très importante, avec un rythme très dense. Finalement, chacun des groupes était vraiment content des retours des enseignants et des commanditaires. Nous étions soulagés de voir que nous n’étions pas passés à côté de la commande.


4/ Dans le cadre de votre cursus, vous avez à rédiger un mémoire de recherche. Quel sujet avez-vous choisi ? Pourquoi ?
Le thème est celui de la souveraineté numérique, expression qui revient régulièrement depuis une dizaine d’années et qu’avait employée pour la première fois Pierre Bellanger, PDG de Skyrock. Pris sous l’angle des archives numériques, je pose la question de leur conservation sur le territoire ou pas. Est-ce que l’on peut en effet retenir des données sur un territoire ? Est-ce que l’on doit ? Et quelles données doit-on alors conserver, puisque cette question se pose notamment depuis les révélations d’Edward Snowden sur l’espionnage de la NSA. Aujourd’hui, les données numériques produites par un organisme ou un agent public sont considérées comme des archives publiques et relèvent à ce titre du Trésor public. Cela doit-il notamment être vrai des mails d’une mairie ? Et qu’en est-il de ceux sur Gmail ? J’aborde ce travail comme une étude de cas, avec une intrigue secondaire qui est celle du pouvoir des GAFA. C’est l’intérêt des archives numériques : la discipline est relativement récente et on a donc davantage le champ libre pour explorer les différents sujets auxquels elle se rattache.


5/ Quelle orientation professionnelle envisagez-vous après votre master ARN ?
J’ai commencé en travaillant en bibliothèque mais ce n’est finalement pas forcément ce secteur professionnel que je vise. Pendant mon cursus de master ARN, le cours sur le record management m’a beaucoup intéressé, notamment la manière d’envisager le sujet au sein de l’entreprise. J’intégrerai donc très certainement le secteur privé puisque c’est là qu’il y a besoin de ce type de profil. C’est ce que je constate dans le cadre de mon stage dans une entreprise pharmaceutique implantée à Bâle. Cela m’a conforté dans l’idée de trouver un poste de record manager, de me tourner vers les entreprises qui ont une production documentaire et qui besoin de professionnels pour la gérer (quoi conserver ? sous quelle forme ?). En fait, le master ARN permet de travailler dans des domaines d’activité très différents. A l’origine, j’étais intéressé par le secteur de l’énergie, où la documentation est très technique, mais mon stage m’a fait découvrir le secteur pharmaceutique. Finalement, c’est plutôt bien de se laisser surprendre, de ne pas avoir d’a priori. C’est sûrement une qualité dans ce métier, qui nous demande d’être adaptable.


6/ Alors que l'année universitaire s'achève dans quelques semaines, quels auront été pour vous les points forts de ce master ?
Premier point fort, la dimension théorique, que j’ai trouvé très stimulante. Les cours de Céline Guyon, co-responsable du master ARN, établissent des parallèles historiques entre le numérique et l’imprimerie de Gutemberg ou encore exposent les travaux de chercheurs, ce qui s’avère très opérant pour le mémoire de recherche, exercice où il nous faut conceptualiser. Ce sont aussi des temps de « pauses » dans l’année universitaire puisque nous ne sommes pas notés sur ces notions et elles nous ouvrent de nouveaux points de vue, parfois très surprenants. Les apports juridiques de Sarah Markiewicz m’ont également beaucoup appris. Second point fort, le côté technique, qui est primordial. Les cours de Laurent Duplouy, notamment sur les normes et les formats, m’ont permis d’être confronté à des problèmes que je rencontrerai en situation professionnelle. Enfin, troisième point fort, le dialogue entre ces deux aspects théorique et technique.

 

 

Propos recueillis par Véronique Branchut-Gendron,
Le 30 avril 2020