
Originaire d'Île-de-France, Nicolas Thimon a enseigné le Français au collège et au lycée pendant dix-sept ans tout en assumant la fonction de référent numérique dans les établissements scolaires. Pour éveiller ses élèves et élargir leurs horizons, il a multiplié les occasions de valoriser la littérature et les professions artistiques au moyen de son blog, de chroniques et d'interviews dans les milieux artistiques. Dans le cadre d'une évolution professionnelle, il réussit le concours interne de conservateur des bibliothèques d'État et commence la formation à l'Enssib en janvier 2020.
1/ Vous êtes actuellement élève conservateur des bibliothèques à l'Enssib. En quoi consiste votre formation ?
La formation commence après l'obtention du concours de conservateur des bibliothèques et dure dix-huit mois. Elle prépare aux fonctions d’encadrement des bibliothèques, établissements d’une grande diversité (bibliothèques d’Etat, universitaires, de la Ville de Paris). La formation s’organise autour de deux axes : un axe théorique, avec des cours assez denses, portant à la fois sur le management, la déontologie du fonctionnaire, les aspects juridiques, la politique documentaire, etc., mais aussi avec un mémoire d’étude, dont le travail de recherche doit présenter un intérêt pour la profession. Le sujet est retenu par chacun des élèves et pour ma part, j’ai choisi de travailler sur la bande dessinée numérique dans les bibliothèques, en abordant notamment la question des pratiques culturelles.
Le second axe de la formation est pratique et donne lieu à une gestion de projet, travail de groupe s’organisant sur cinq mois et consistant à apporter des solutions de fonctionnement à des commanditaires. À titre d’exemple, le département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France sur le site Richelieu nous a sollicités pour développer des services numériques à l’attention de ses publics. Complétant l’axe pratique de la formation, trois stages se tiennent au cours de l’année, qui permettent une immersion dans des établissements variés. C’est donc une formation riche, qui constitue par ailleurs un véritable engagement puisque sur les vingt-huit personnes de la promotion, nous sommes nombreux à venir de régions éloignées. Heureusement, nous sommes accompagnés par l’Enssib, notamment pour les questions de logement (dans le cadre de la mission « vie étudiante »), et l’on peut observer une vraie solidarité au sein de la promotion.
2/ Dans le cadre de votre formation, vous avez participé à l'édition 2020 des Assises internationales du Roman (AIR), organisées par la Villa Gillet du 11 au 17 mai dernier. Expliquez-nous votre participation ?
Dès notre rentrée en janvier 2020, une présentation des AIR nous a été faite par Léa Rumiz, chargée des médiations culturelles à la Villa Gillet, et Julia Morineau-Eboli, responsable du pôle développement des publics à l’Enssib. Nous avons alors été invités à participer aux assises pour modérer des rencontres avec des auteurs. J’ai tout de suite été enthousiasmé par cette proposition, qui me permettait de renouer avec des pratiques d’interviews que j’avais mises de côté pour la préparation du concours. Par ailleurs, ce type d’intervention correspond tout à fait à ce qui peut être attendu de certains profils de conservateurs liés à la culture. Toutes ces raisons m’ont donné envie de participer et de modérer une rencontre. L’équipe des AIR nous a alors proposé de choisir parmi une liste d’auteurs invités et c’est ainsi que j’ai choisi Jan Stocklassa. J’ai délibérément retenu un auteur que je ne connaissais pas du tout mais dont le sujet du livre La folle enquête de Stieg Larsson m’intéressait.
3/ Comment cette participation s'est-elle organisée ? Comment avez-vous travaillé avec l'équipe des AIR ?
La Villa Gillet a organisé au sein de l’Enssib une rencontre en deux temps : dans un premier temps, une présentation des AIR a eu lieu pour l’ensemble de la promotion avec un critique littéraire; dans un second temps, une présentation s’est tenue pour ceux qui étaient volontaires pour modérer une rencontre des AIR, ce qui a permis d’aborder les aspects pratiques et matériels (en quoi consiste la modération ? comment se tenir ? où s’asseoir ? où regarder ? etc.). A la suite de cette deuxième présentation, j’ai reçu le roman La folle enquête de Stieg Larsson de Jan Stocklassa afin de préparer les questions et l’entretien. Au départ, nous devions travailler en duo mais la crise sanitaire ne l’a pas permis. Le confinement a changé la donne car il a fallu imaginer une version virtuelle des AIR avec des visioconférences. C’est ainsi que Léa Rumiz m’a finalement proposé de faire l’interview de Jan Stocklassa en visioconférence et en anglais. L’entretien a duré 30 minutes, avec une forme plus proche d’un entretien classique puisqu’il n’y avait pas de public. Il a été enregistré pour être ensuite diffusé sur le site de la Villa Gillet.
4/ Concrètement, qu'avez-vous retiré d'une telle expérience ? Que vous a-t-elle appris ?
C’est une expérience riche d’enseignements, qui oblige notamment à être organisé. La formation de conservateur est déjà dense et l’on choisit d’assumer un travail supplémentaire. Il s’agit par ailleurs d’un travail de lecture et d’analyse, qui demande de savoir faire la synthèse de l’œuvre et de la vie de l’auteur. L’interview vise à valoriser l’auteur, à donner envie de lire son ouvrage. Pour conduire l’interview, des qualités de communication sont nécessaires : il faut pouvoir être à l’aise avec un inconnu, savoir le mettre en confiance, savoir réagir, quitte à s’éloigner du plan que l’on s’était fixé. Dans le cas particulier de l’interview de Jan Stocklassa, il fallait également savoir s’exprimer en langue étrangère devant du public, ce qui n’est pas une mince affaire ! De façon générale, cette expérience m’a conduit à répondre à la demande précise d’un commanditaire. Jouant finalement le rôle de prestataire, je devais rendre un service dont devait bénéficier le public de la Villa Gillet.
5/ L'Enssib et la Villa Gillet sont partenaires depuis plusieurs années dans le cadre des AIR. Quel est l'intérêt d'un tel partenariat pour des élèves-conservateurs comme vous ?
L’intérêt est multiple. En plus des compétences que nous acquérons par le biais de la formation, ce type de partenariat nous permet de faire connaissance avec le réseau culturel local, à proximité de l’école. En tant que professionnels des bibliothèques, il nous permet par ailleurs d’établir un lien entre le monde des bibliothèques et celui de la littérature, ce qui est cohérent. Le partenariat entre l’Enssib et la Villa Gillet s’inscrit en outre dans une dimension internationale, avec pour les AIR, de nombreuses personnalités étrangères qui viennent pour l’occasion. Enfin, les futurs cadres que nous sommes auront à participer à ce type de manifestation, aussi bien dans la mise en place que dans la conduite.
6/ Un mot pour conclure ?
Cette participation aura été pour moi épanouissante à titre personnel et enrichissante à titre professionnel. C’est un excellent complément à la formation, qui m’aura aidé à grandir et qui m’ouvre de nouveaux horizons. Enfin, je suis flatté qu’une manifestation de dimension internationale m’ait fait confiance.
Propos recueillis par Véronique Branchut-Gendron
Le 9 juin 2020