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Programmer une bibliothèque municipale à vocation régionale (BMRV)

1998
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    Programmer une bibliothèque municipale à vocation régionale (BMRV)

    Par Isabelle Radlak, Programmiste Setec Organisation

    Dans un premier temps, je tiens à rappeler les objectifs de la programmation fonctionnelle : les buts et finalités de la programmation, les intervenants du processus opérationnel d'une opération de bâtiment, la mission de programmation, sa place et son rôle dans le processus opérationnel et la définition du programme.

    Dans un second temps, la présentation de l'étude de programmation réalisée pour la BMVR de Reims va me permettre d'illustrer l'application pratique de cette démarche de programmation.

    Les objectifs de la programmation fonctionnelle

    La programmation est une démarche de travail et une action continue, phase essentielle du processus général de réalisation d'une opération d'aménagement ou de construction. Elle permet au maître d'ouvrage d'expliciter ses objectifs, d'assurer une cohérence d'ensemble de l'opération, d'estimer l'investissement prévisionnel.

    Le travail de programmation consiste essentiellement à aborder et analyser les problèmes, les présenter aux différents intervenants, susciter les décisions nécessaires, récapituler l'ensemble de la demande, élaborer le document-programme (document cadre de référence) et à veiller au respect des objectifs initiaux.

    La programmation facilite une réponse conforme aux objectifs du maître d'ouvrage, une réponse adéquate aux attentes des utilisateurs, la qualité architecturale et le déroulement de l'opération.

    Les intervenants du processus opérationnel d'une opération de bâtiment sont étroitement liés entre eux : schématiquement, le maître d'ouvrage en est l'acteur principal qui gère l'opération, prend les décisions, et auquel se réfèrent tous les autres intervenants. Les utilisateurs sont également primordiaux, en tant que futurs gestionnaires et « occupants (sans parler des usagers qui seront bien entendu des futurs occupants). Le programmiste, ou le programmateur selon le nom qu'il s'attribue (mais c'est le même métier...), assure la mission de programmation (et l'élaboration du programme, pour le compte du maître d'ouvrage). Le concepteur (l'architecte et ses bureaux d'études) est chargé de la mission de maîtrise d'oeuvre (la conception du projet d'architecture, sa mise en forme, les choix des solutions techniques...). Le réalisateur est l'entrepreneur et le « fabricant du bâtiment mis à disposition des utilisateurs.

    La programmation est donc bien un travail d'équipe, placé sous la responsabilité du maître d'ouvrage, en concertation avec les utilisateurs potentiels, et en relation avec d'autres partenaires concernés.

    La programmation requiert des compétences méthodologiques (pour le recueil d'informations, pour le traitement et la synthèse des données, pour l'animation de réunions, pour la présentation et la communication didactique des résultats) ; des moyens humains et du temps (il ne faut pas sous-estimer le « temps» de la programmation, c'est un travail en soi, qui nécessite de désigner un responsable qui en sera chargé, et c'est un délai à prévoir, qui ne doit pas être réduit sous prétexte de vouloir "gagner du temps ») ; des supports pour produire des documents.

    Selon la nature de l'opération et les moyens dont dispose le maître d'ouvrage, la programmation peut être effectuée par les services du maître d'ouvrage ou par un prestataire extérieur, assistant de la maîtrise d'ouvrage.

    La démarche de programmation intervient tout au long du processus opérationnel, à des degrés divers toutefois. Si on découpe le processus en grandes étapes entre le point de départ d'une opération, qui correspond à l'initiative (l'idée de faire un bâtiment), et le résultat final, soit la mise en service du bâtiment réalisé, la démarche de programmation intervient principalement dans le cadre des études en amont de la conception et elle se concrétise particulièrement par l'élaboration du document programme. La démarche de programmation intervient plus ponctuellement pendant la phase de conception, par le biais d'itérations permettant de vérifier l'adéquation programme-projet.

    Bien que la démarche de programmation ne se limite pas à la seule production du document programme, ce dernier en est bien souvent le principal témoignage...

    Qu'est-ce donc que le programme ?

    C'est un document écrit, cadre de référence, contractuel dans les marchés publics. Il comprend les informations essentielles définissant les intentions, le contexte et les contraintes du projet à concevoir ; il permet de donner une synthèse des études préalables puis de détailler les objectifs et les moyens ; il doit être complètement abouti et défini avant l'avant-projet sommaire ; il sert de base de dialogue au sein de la maîtrise d'ouvrage ; il sert de base de dialogue ensuite, entre maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre.

    Le programme formule la synthèse des besoins et attentes du maître d'ouvrage, en termes de prescriptions et performances à atteindre, mais en aucun cas en termes de solutions techniques ou formelles, qui relèvent du projet d'architecture. À un programme unique peuvent correspondre des réponses formelles différentes, mais un seul projet est choisi au final.

    Le programme est destiné au maître d'ouvrage, pour faire le point tout au long de l'opération, aux gestionnaires et futurs utilisateurs, pour s'assurer que les usages et les demandes ont été pris en compte, et au maître d'oeuvre pour concevoir le projet d'architecture. La forme du programme doit donc être adaptée à la diversité des lecteurs potentiels : élus, administratifs, utilisateurs... sont plus sensibles aux textes, alors que les architectes, les techniciens... préfèrent le plus souvent des formes plus synthétiques (schémas, tableaux...).

    Que contient le programme ?

    • * Les objectifs : politiques, structurels, sociaux, culturels, économiques, formels (image...)
    • * Les données et les contraintes : réglementaires (urbanistiques, liées à la sécurité, à la sûreté, à l'accessibilité...), liées au site et au terrain (situation foncière, dessertes, accès, données physiques, topographie, environnement, occupation, sous-sol, VRD, constructibilité...), liées à un éventuel phasage, etc.
    • Les besoins (la description des activités, le parti d'aménagement et l'organisation spatiale, la décomposition en locaux et espaces, les surfaces associées, les liaisons fonctionnelles et les relations de proximité).
    • * Les exigences (les performances architecturales et techniques, les niveaux d'équipement et de confort).

    En dehors de l'obligation d'établir un programme pour tout maître d'ouvrage public, les risques encourus par un maître d'ouvrage en l'absence de programme consistent à reporter ses responsabilités sur le maître d'oeuvre, à avoir des solutions toutes faites », à s'apercevoir après coup que le bâtiment ne répond pas aux besoins et exigences (qui n'ont jamais été exprimés), et surtout, à perdre la maîtrise des objectifs, des coûts et des délais.

    Plus généralement, l'insuffisance des études préalables et de la programmation peut entraîner la réalisation d'une opération non justifiée ou trop lourde, la destructuration d'un site ou le choix d'une mauvaise localisation d'un bâtiment (si l'opportunité d'implantation n'a pas été correctement évaluée), la mauvaise appréciation de l'urgence éventuelle de besoins (une réponse inadaptée sera insatisfaisante pour des populations ciblées par exemple), l'implication trop tardive de partenaires essentiels ou des autorités de tutelle...

    Même si l'existence d'une démarche de programmation ne suffit pas à elle seule à en garantir le succès, elle contribue à assurer la qualité d'une opération de construction ou d'aménagement.

    Programmation de la BMVR de Reims

    Cette mission d'assistance à la maîtrise d'ouvrage en matière de programmation a été confiée à Setec Organisation par la Ville de Reims, maître d'ouvrage, à l'issue d'une consultation de programmistes en juin 1996. L'étude démarrée en septembre 1996 s'est achevée en septembre 1997.

    La mission a porté sur 3 opérations engagées dans le cadre du développement du réseau de lecture publique.

    • * La réalisation de la Bibliothèque municipale à vocation régionale de Reims, qui comprend la construction neuve d'une nouvelle médiathèque centrale de 6 500 m2 hors oeuvre sur un terrain donnant sur le parvis de la cathédrale, et la réorganisation-restructuration de la bibliothèque existante Carnegie (bâtiment historique de 3 500 m2 hors oeuvre, comportant des parties classées au titre des Monuments historiques), consacrée à « l'étude et au patrimoine ; les budgets prévisionnels sont de l'ordre de 100 millions de francs TTC pour la médiathèque centrale (travaux, honoraires et équipements) et plus de 15 millions de francs TTC de travaux pour la restructuration de Carnegie.
    • * La construction d'une seconde médiathèque de 2 150 m2hors oeuvre : l'annexe de quartier Croix-Rouge.

    Il s'agissait d'élaborer :

    • d'une part les programmes détaillés pour les deux concours (médiathèque centrale et annexe Croix-Rouge), dont les programmes des équipements et mobiliers, et l'assistance à la mise au point des Dossiers de consultation des concepteurs (l'analyse des candidatures de concepteurs et l'analyse des projets des deux concours étant réalisées en interne par les services de la Ville) ;
    • et d'autre part, le programme de réorganisation de la bibliothèque Carnegie.

    Le déroulement de l'étude a été suivi par le groupe de pilotage constitué par la Ville. Ce comité comprenait le secrétaire général adjoint, les représentants des Directions de la culture, des services techniques, de l'Urbanisme, et bien entendu, l'interlocuteur privilégié du programmiste, Nicolas Galaud, directeur de la Bibliothèque, et son équipe.

    Au démarrage de l'étude, le calendrier a dû être précisé et le canevas méthodologique a été ajusté en conséquence, afin de tenir l'objectif fixé par la date-butoir de dépôt d'un dossier pour la Bibliothèque Municipale à Vocation Régionale, soit le 31 décembre 1997 : ce dossier devant comprendre un avant-projet-sommaire d'architecture, il fallait donc avoir préalablement choisi un architecte lauréat à un concours engagé sur la base du programme.

    Les quinze mois compris entre le début de la programmation et le 31 décembre 1997 ne semblaient pas confortables, compte tenu de délais incompressibles à dédier à certaines tâches ou procédures administratives.

    Le programme de la nouvelle médiathèque centrale, composante de la BMVR, a donc été élaboré en premier lieu afin de l'intégrer au Dossier de consultation des concepteurs, prêt en janvier 1997. Le lauréat du concours sur esquisse, l'architecte J.-P. Viguier, a été choisi en juin 1997, et l'avant-pro-jet-sommaire a été mis au point au troisième trimestre de 1997.

    Pendant le déroulement de la consultation d'architecture pour la médiathèque centrale, les études de programmation ont été menées pour la nouvelle médiathèque du quartier Croix-Rouge et pour la réorganisation de la bibliothèque centrale existante, Carnegie (deuxième composante de la BMVR).

    L'architecte lauréat du concours sur esquisse de la médiathèque Croix-Rouge, le cabinet Goldstein, a été désigné en novembre 1997; l'opération en est au stade de la mise au point de l'avant-projet-sommaire.

    La méthodologie préconisée par la Ville, au stade de la consultation de programmistes, distinguait trois « phases :

    • 1. l'élaboration des programmes détaillés « espaces pour chacun des trois bâtiments,
    • 2. l'élaboration des programmes détaillés « équipements » pour chacun des trois bâtiments,
    • 3. l'évaluation des coûts et du calendrier prévisionnel.

    Il faut signaler que la programmation de la BMVR a débuté avant septembre 1996 : une étude préalable, confiée à J.-P. Roux-Fouillet du bureau Van Dijk, a permis à la Ville d'analyser le réseau existant et d'identifier les hypothèses de développement en termes de pré-programmation ; le choix des sites des deux nouvelles médiathèques a été également arrêté avant l'élaboration des programmes grâce à une analyse comparative de sites menée par la Ville.

    Les options fondamentales quant à la création d'une BMVR sur deux sites (une nouvelle médiathèque et la bibliothèque centrale réorganisée) ont été ainsi tranchées au stade des études préliminaires. La programmation proprement dite, réalisée par Setec Organisation, s'est appuyée sur ces hypothèses préalables, qui ont été développées (identification des objectifs et des besoins à partir des données générales : publics et lecteurs, développement des collections multimédia et mode de consultation, activités d'animation autour de la lecture publique, structures d'accompagnement à intégrer...) au même titre que la faisabilité financière de l'opération et les besoins en personnel ont été recalés.

    L'étude a débuté par une analyse préalable qui a permis de caler les objectifs, les activités et les besoins pour les trois composantes principales du réseau (les deux futures médiathèques et la centrale recentrée sur l'étude). Une première synthèse a été validée à ce stade (fin octobre 1997).

    Les programmes détaillés destinés à servir de référence aux deux concours (niveau esquisse), comprenant un volet technique correspondant aux programmes des équipements et des mobiliers, ont été ensuite élaborés, en plusieurs étapes suscitant des arbitrages internes. Le programme de réorganisation de l'actuelle centrale Carnegie a été étudié en dernier lieu (bilan des besoins, scénario de réaménagement spatial, bilan des travaux et des actions liés au réaménagement).

    Menée à un rythme soutenu, l'étude n'a pas rencontré de difficultés, hormis peut-être pour deux aspects.

    • D'ordre pratique tout d'abord, le calendrier était sous-tendu, comme pour toute étude, par les objectifs des dates de présentation de résultats ou de remise de documents ; mais il a fallu également compter sur des délais complémentaires inhérents au mode de fonctionnement interne de la Ville (les circuits de validation interne, la fréquence des conseils municipaux ou les commissions préparatoires appelées à valider la programmation...).
    • Par ailleurs, des interrogations liées aux contraintes du site de la médiathèque centrale ont fait l'objet de réflexions internes et d'échanges entre la Ville et les services de l'État, non pas quant à la localisation proprement dite d'une nouvelle construction en vis-à-vis direct de la cathédrale de Reims, mais plutôt quant à la conservation, partielle ou non, du bâti existant sur le terrain.

    Que contient le programme de la médiathèque centrale de Reims?

    Le document-programme final ne restitue qu'une partie de la matière analysée pendant la démarche de programmation ; le programmiste ne prend bien sûr pas en charge les démarches à effectuer par le maître d'ouvrage pour constituer un dossier de demande de subvention par exemple.

    Le document-programme destiné à un concepteur dans le cadre d'un concours d'architecture n'évoque donc pas forcément tous les aspects de l'opération, même si ceux-ci ont bien été traités dans le cadre de la démarche de programmation d'ensemble, notamment afin d'en dégager plus particulièrement les incidences en termes d'organisation fonctionnelle et spatiale (le déménagement des collections, les recrutements de personnel, les nouvelles acquisitions, les objectifs en matière d'heures d'ouverture...).

    La vocation du programme est bien d'éclairer le concepteur en condition de concours sur les attentes du maître d'ouvrage afin de favoriser la création du projet architectural adéquat, et non pas d'argumenter ou de justifier l'exhaustivité de la genèse de l'opération, qui trouve sa place dans les documents préalables à l'usage du maître d'ouvrage (que ces documents d'aide à la décision s'appellent préprogramme, synthèse des études préliminaires, calage des objectifs, calage des besoins, première version du programme...).

    Les caractéristiques principales du programme

    Outre la Direction du réseau des bibliothèques de la Ville de Reims (services communs), la médiathèque centrale assurera des missions d'information, de diffusion culturelle, d'animation et de loisirs.

    Sa capacité lui permettra d'accueillir 305 000 documents de différents supports, dont 145 000 documents en libre accès. Les publics disposeront de près de 600 places, adaptées à la diversité des pratiques des lecteurs (emprunt, consultation sur place, lecture-loisir, travail individuel ou en groupe...).

    Il s'agit de créer 4 668 m2utiles, correspondant à un total prévisible de 6 500 m2hors oeuvre, comprenant des espaces ouverts aux publics (des espaces d'accueil et d'animation dont une salle d'exposition et un auditorium de 200 places, des espaces de prêt et consultation, un café-bar), des bureaux et espaces de travail du personnel (espaces de traitement, espaces logistiques...), des magasins de stockage, un logement de fonction, plus un parking de 50 places réservées au service et au personnel.

    Le bâtiment sera géré par une équipe d'une quarantaine de personnes (personnel administratif, scientifique et technique).

    La création de la médiathèque correspond à un besoin de remise à niveau de la bibliothèque municipale, dotée de locaux insuffisants et inadaptés à ses objectifs, mais également à un grand projet pour la Ville, de par l'importance du programme et de par l'inscription du terrain dans l'environnement immédiat de la cathédrale.

    L'image de cet équipement doit traduire plusieurs enjeux.

    • * Créer l'identité visuelle d'un nouveau lieu culturel, attractif et ouvert à tous types de publics : une architecture accueillante, conviviale et « appropriable ».
    • * Produire une architecture à la mesure du lieu et de la relation visuelle qui sera instaurée entre la cathédrale et la médiathèque : une architecture prestigieuse, mais destinée à perdurer au-delà des modes.
    • * Ménager l'évolution ultérieure des abords du parvis de la cathédrale.

    L'impact formel de la nouvelle médiathèque ne doit pas occulter pour autant la qualité fonctionnelle attendue. Le bâtiment se doit d'offrir des locaux adaptés aux activités prévues et une organisation efficace des circulations internes, pour assurer correctement ses missions et recevoir un accueil favorable du public.

    Enfin, l'évolutivité souhaitée du bâtiment a été également soulignée en tant que contrainte majeure du programme, afin que le parti architectural retenu garantisse une souplesse d'aménagement et de flexibilité interne tout au long de la vie de l'équipement. Cependant, il ne faut pas se méprendre sur la notion d'évolutivité d'un bâtiment, et sur les recommandations en matière de flexibilité qu'on peut inscrire au stade du programme.

    Cette notion de flexibilité interne des espaces construits possède des limites et ne signifie pas que tous les espaces d'un bâtiment soient interchangeables. La localisation d'éléments stables doit être fixée une fois pour toutes dans un bâtiment, pour la durée de vie du bâtiment (les accès, les noyaux de circulation verticale par exemple). En revanche, pour les espaces de consultation et pour les espaces de bureaux, au sein d'une même enveloppe de surfaces, il faut pouvoir transformer la modulation interne afin de faire face à une relative évolution des activités et de la structure en personnel.

    La création des nouveaux équipements répond aux objectifs de développement de la fréquentation, de la conservation et mise en valeur du patrimoine écrit local et régional (mission spécifique de la bibliothèque Carnegie), de l'animation culturelle (par des expositions thématiques ou destinées à mettre en valeur les fonds, ou des manifestations propres à sensibiliser un public particulier, ou des conférences associées à l'accueil d'auteurs, etc.), de la formation, de l'information et des loisirs (mise à disposition du public d'une offre diversifiée : des collections encyclopédiques et multimédia regroupant l'ensemble des supports existants à partir desquels l'information est accessible). Le développement de la bibliothèque municipale de Reims doit également lui permettre de devenir BMVR et de l'insérer dans les réseaux locaux, régionaux et nationaux.

    Le réseau de la bibliothèque municipale de Reims sera ainsi composé d'une centrale sur deux sites (la nouvelle médiathèque située rue Rockfeller et la bibliothèque d'étude Carnegie), de 5 annexes de quartier (la nouvelle médiathèque Croix-Rouge et 4 autres annexes existantes), et de 3 bibliobus (basés à Croix-Rouge).

    La médiathèque centrale assurera la direction du réseau, aura une vocation régionale, développera des missions d'information, de diffusion culturelle, d'animation et de loisirs, et sera organisée en pôles thématiques permettant le rapprochement des supports et assurant la visibilité de l'encyclopédisme des collections. Elle prendra également en compte la diversité des pratiques des lecteurs.

    Les collections futures du réseau (capacité maximale) correspondent à environ 850 000 documents (tous supports) et environ 850 titres de périodiques, dont plus de 305 100 documents à la médiathèque centrale (environ 120 000 ouvrages en libre accès, 6 000 cassettes vidéo, 20 000 CD audio, 200 cédéroms, et 255 titres de périodiques) et 350 000 documents à la bibliothèque d'étude Carnegie. Les collections de la nouvelle médiathèque centrale seront constituées par des collections transférées de Carnegie et des acquisitions complémentaires. Les besoins en surfaces du programme tiennent compte du développement des collections sur une période de 30 ans avant saturation des magasins. Les collections en libre accès sont réparties en six zones thématiques (langues et littérature, sciences et techniques, sciences humaines et sciences sociales, son-image-arts et loisirs, actualités, section jeunesse).

    De par sa vocation, le rayonnement de ses activités et sa localisation en centre ville au coeur du réseau de transports en commun, la médiathèque dessert l'ensemble de la population de la ville (185 000 habitants), population constituant son public potentiel. Le nombre d'inscrits sur le réseau est évalué à 35 000 lecteurs prévisionnels, et la fréquentation de la future médiathèque a été estimée à une moyenne de 2 000 entrées par jour. Les quartiers de centre ville constituent sa zone de chalandise immédiate. L'un des objectifs assignés à la création de la médiathèque est de reconquérir le public actif de la ville (et du centre ville). En raison de la proximité de la cathédrale, le public peut également comporter une part importante de visiteurs occasionnels.

    Plus de 850 places, tous types confondus, seront offertes sur l'ensemble de la Centrale, dont près de 800 à la nouvelle médiathèque (places simples postes de consultation des catalogues, places informatisées, places de consultation individuelle de vidéos, méthodes de langues, places d'écoute individuelle de documents sonores (CD audio), places diverses (travail en groupe, lecture debout « heure du conte »... et auditorium) et 85 à la bibliothèque Carnegie : postes standard, informatisés, de groupe, pour grands formats, pour microformes...

    Les plages horaires d'ouverture de la future médiathèque seront précisées au vu des fréquentations réelles. Dans un premier temps, la Ville envisage une plage hebdomadaire d'au moins 40 heures.

    Les besoins en personnel scientifique et technique ont été estimés en fonction de la nature et du volume d'activités de la médiathèque, des contraintes de la Ville en termes de création de postes et des objectifs en matière d'amplitude horaire d'ouverture au public. Les effectifs du réseau basés à la nouvelle médiathèque (40 postes) centrale comprennent des postes des services communs et l'équipe de gestion de la médiathèque.

    Des activités peuvent fonctionner indépendamment du reste de la médiathèque, comme la salle d'exposition et l'auditorium, dont les plages horaires d'ouverture peuvent être modulées à l'occasion de cycles de conférences ou pour des événements ponctuels. Une partie des espaces publics peut donc fonctionner en dehors des horaires habituels d'ouverture, en soirée ou le dimanche par exemple. La sectorisation est obtenue grâce à un accès intérieur séparant le hall d'accueil et la zone d'accueil-prêt-retour, première zone que rencontrent les publics se rendant vers les espaces de consultation. Doté d'un accès extérieur indépendant depuis le parvis, le café-bar doit également pouvoir fonctionner indépendamment de la médiathèque, même s'il est intégré dans la même enveloppe bâtie. Le logement de fonction et le parking bénéficient d'accès extérieurs indépendants de ceux de la médiathèque, et du café-bar et d'accès intérieurs contrôlables. En ce qui concerne le site de la nouvelle médiathèque centrale, les contraintes principales résultent des servitudes de protection et faisceaux de vue liés aux Monuments historiques, du plafond constructible limité à environ 6 500 m2hors oeuvre et de la façade de l'ancien hôtel de police, situé en partie sud du terrain (pour le concours, le choix a été laissé aux concepteurs de supprimer ou de réutiliser cette façade : l'architecte lauréat l'a conservée).

    Le programme de réaménagement de la bibliothèque Carnegie

    À l'issue des transferts d'activités et de collections vers les deux nouvelles médiathèques (centrale et annexe Croix-Rouge), la bibliothèque Carnegie sera recentrée sur la fonction étude et le patrimoine. Il s'agit de réaffecter (en termes d'usage) une partie des 3 175 m2 utiles existants, qui comprennent des espaces ouverts aux publics (accueil et animation-exposition, espaces de prêt et de consultation), des magasins et des réserves de conservation (collections imprimées, manuscrits et estampes), des services intérieurs, un logement de fonction pour le gardien et des espaces occupés par le service des Archives municipales.

    Les interventions associées aux réaffectations fonctionnelles portent sur une faible part des surfaces (quelques transformations d'usage nécessitant très peu de travaux), mais les interventions techniques dans le cadre d'une remise aux normes ou des travaux de réhabilitation-rafraîchissement devront être envisagés à plus grande échelle à l'occasion du réaménagement spatial de la bibliothèque.

    Le programme de réaménagement a permis de dresser l'état des réflexions préalables (notamment le bilan des travaux ou des actions diverses liées au réaménagement et l'approche de la problématique du déménagement des collections pendant les travaux) et un diagnostic technique, que la Ville a fait réaliser afin de compléter le dossier pour la BMVR

    Où en est-on aujourd'hui ?

    Le maître d'ouvrage est bien plus à même de répondre à cette question que le programmiste... Le programmiste s'efface certes de l'opération à la fin du marché d'étude contracté, mais le programme continue à vivre et à servir de référence au maître d'ouvrage et aux utilisateurs.

    Pour Reims, la forme souhaitée pour les programmes, très détaillée, allant au-delà des informations strictement nécessaires à la conception d'une esquisse architecturale, s'avère particulièrement adaptée à la poursuite des études de conception.

    Les trois « opérations sont en cours (mise au point de l'APD pour la médiathèque centrale, mise au point de l'APS pour la médiathèque Croix-Rouge, études techniques pour la bibliothèque Carnegie).

    La Ville de Reims a reçu une réponse de la Direction du livre et de la lecture augurant d'une poursuite favorable de l'opération et de l'éligibilité à la troisième part du concours particulier des bibliothèques. La mise en service de la nouvelle médiathèque centrale est prévue pour septembre 2001.

    Du point de vue d'un programmiste, peut-on parler d'une approche d'étude spécifique à une BMVR ?

    Les études ne sont-elles pas toutes différentes ? En fait, à l'usage, tout dépend de la conduite d'opération organisée par la maîtrise d'ouvrage (la BMVR de Reims ne ressemble pas à la BMVR de Toulouse, bien que toutes deux soient réparties sur deux sites), du choix du site, de la spécificité de l'établissement, de l'équipe de la bibliothèque...

    Et aussi, peut-être que l'implication de la tutelle et les dates-butoirs orientent et sous-tendent la manière de gérer ce type de programme.

    Mais qu'il s'agisse d'une BMVR ou d'une bibliothèque tout court, il n'y a pas systématiquement de différence : les enjeux électoraux sont des moteurs efficaces pour l'engagement de constructions à programmer.

    Toutefois, pour Reims, l'absence de retour entre la programmation et le fonctionnement futur du bâtiment programmé ne permet pas de tirer d'enseignement quant à la pertinence du programme, ou des choix programmatiques, ou de la qualité du projet d'architecture, ou de la qualité de la réalisation, ou de la qualité de l'exploitation à venir... Car c'est bien tout un ensemble de paramètres qui s'assemblent et produisent à terme un bâtiment de qualité, agréable, attractif, fréquenté, fonctionnel, gérable, pérenne, évolutif, etc.

    Pour une autre opération actuellement en cours de programmation à Clermont-Ferrand, relevant d'un principe comparable aux BMVR, tout en s'apparentant à un cas atypique d'une grande bibliothèque à la double composante municipale et universitaire, la question du choix du site semble être un élément primordial qui va sans doute conditionner l'opération. En outre, la complexité de la double maîtrise d'ouvrage a suscité l'implication très en amont des tutelles, avant même de parler de la définition proprement dite du programme qui reste à établir. Mais pour cette opération en cours, je serai plus à même d'en parler dans quelques mois...

    Le programmiste doit savoir concilier les enjeux et conseiller le maître d'ouvrage, mais il ne se substitue pas à ce dernier.

    Au-delà du souci de satisfaire son maître d'ouvrage et les utilisateurs, le programmiste doit veiller à permettre l'émergence d'un échange fructueux entre la maîtrise d'ouvrage et la maîtrise d'oeuvre, grâce à un programme clair et précis qui ne bride pas pour autant la créativité attendue.

    Il faudrait maintenant interroger les représentants de la maîtrise d'ouvrage et l'équipe de maîtrise d'oeuvre de la médiathèque centrale de Reims...