La bibliothèque de la Sorbonne est une bibliothèque interuniversitaire relevant des universités de Paris I, III, IV, V, VII, rattachée pour sa gestion à l'université de Paris I. Bibliothèque d'intérêt national, spécialisée en lettres et sciences humaines, elle s'adresse en priorité à un public d'universitaires et de chercheurs, même si elle se doit d'accueillir les étudiants des 1eret 2e cycles des universités parisiennes contractantes.
Son fonds compte actuellement environ 2,5 millions d'ouvrages et 13 000 titres de périodiques dont 4 500 vivants dans toutes les disciplines des lettres et sciences humaines : histoire (la bibliothèque, CADIST en histoire médiévale et moderne, a pour mission de viser à l'exhaustivité dans ces domaines pour les publications de niveau scientifique mais elle a aussi une forte tradition pour l'antiquité classique), littérature et linguistique, philosophie, sciences humaines et sociales (psychologie, sociologie, sciences de l'éducation... (1) ). Qu'ils parviennent par abonnement (75 %), par don ou par échange, une très forte proportion (70 %) des périodiques reçus sont publiés dans des langues étrangères, conformément à la vocation de la bibliothèque de servir la recherche ; les domaines linguistiques privilégiés sont, outre le français, l'anglais, l'allemand, l'italien et l'espagnole (2) 2
Chacun connaît le rôle majeur joué par les périodiques dans la recherche, c'est pourquoi la bibliothèque a toujours cherché à se constituer une collection de haut niveau que ses responsables ont essayé de poursuivre depuis un siècle en dépit des variations budgétaires, au gré des intérêts des chercheurs et des développements de la production imprimée. On peut considérer que les abonnements ont été relativement épargnés, au détriment des monographies, au cours de la dernière période de restriction budgétaire (1975-1986).
Les périodiques occupent actuellement près de 12 km de rayonnages dans les magasins de la bibliothèque. Ceux-ci, totalement saturés, ne permettent plus d'assurer le stockage des dernières livraisons. Afin de remédier à cette situation, il a été décidé dès 1992, à l'heure où le projet de Centre technique du livre (CTL) se confirmait, d'y transférer les collections les moins consultées.
Le CTL est un établissement public national placé sous la tutelle du ministre chargé de l'Enseignement supérieur (décret n° 94-922 du 24 octobre 1994), qui a pour mission d'assurer « la collecte, la gestion, la conservation et la communication des livres et documents d'intérêt patrimonial et scientifique qui lui sont confiés en dépôt par les établissements publics relevant du ministre chargé de l'Enseignement supérieur et en particulier par ceux qui sont situés dans les académies de Paris, Créteil et Versailles ». Le bâtiment est actuellement en cours de construction à Bussy-Saint-Georges en Seine-et-Marne, partagé entre la Bibliothèque nationale de France et le ministère de l'Enseignement supérieure (3)
Sur les 90 km de rayonnages prévus lors de la construction de la première tranche, 2, 6 km sont réservés à la bibliothèque de la Sorbonne : 1, 5 km destinés à accueillir un fonds de thèses étrangères et 1,1 km réservés aux périodiques. La Sorbonne, en effet, est l'une des premières bibliothèques à pouvoir y disposer d'espaces de stockage dès l'automne 1995.
Après un premier tri rapide portant sur les collections entreposées dans les étages supérieurs, les plus saturés, la décision a été prise courant 1993 de procéder à un examen systématique de l'ensemble de la collection.
L'opération se déroule selon les étapes suivantes :
Il est à noter que la bibliothèque ne dispose pas de statistique de communication valable, les seuls éléments dignes d'intérêt pouvant être fournis par le service du prêt, informatisé depuis 1990.
La grande majorité des collections sont, bien entendu, conservées. L'examen général de la collection permet de noter des informations diverses, toutes utiles à une meilleure gestion : titres morts et donc resserrement lors du refoulement, erreurs de classement, lacunes ou retards manifestes, travaux de maintenance ou de reliure à entreprendre, mise à l'écart des revues jugées précieuses, etc.
Lorsqu'un titre paraît avoir davantage sa place dans un autre établissement où il est susceptible d'être mieux mis en valeur (périodique de botanique à la bibliothèque du Muséum d'histoire naturelle, livret d'étudiant de l'université d'Uppsala à la Bibliothèque nordique, publication pékinoise à la bibliothèque des Langues orientales par exemple) ou quand la collection partielle, de la bibliothèque de la Sorbonne est susceptible de compléter avec intérêt la collection d'une autre bibliothèque (c'est parfois le cas pour la Bibliothèque nationale de France), une fiche de proposition de don avec un descriptif sommaire est adressée à la bibliothèque pressentie. En cas de réponse positive, les volumes sont expédiés. En cas de refus, soit une autre bibliothèque est contactée, soit les volumes sont transférés au CTL ou éliminés.
Plusieurs décisions importantes ont été prises préalablement à l'opération : céder au CTL la propriété des collections de périodiques transférés, ne lui transférer que des collections mortes, représentant au minimum 0,20 m/1, dans un état de conservation satisfaisant et entrer au CCN la totalité des collections transférées.
Les collections sont entrées au CCN sous un code RBCCN spécifique Sorbonne/CTL afin de faciliter la bascule sous un code CTL lors du transfert effectif des collections ; si, pour la moitié des titres, il s'agit de titres déjà signalés dans la base où seule la localisation doit être ajoutée, pour l'autre moitié il s'agit de titres non présents dans la base pour lesquels des bordereaux de création, accompagnés des photocopies des pages de titres, doivent être rédigés. Ce travail est mené avec l'aide d'un agent du CTL mis ponctuellement à la disposition de la bibliothèque et la responsable du CR 26 (centre régional du CCN spécialisé en lettres et civilisations sur Paris) implanté dans la bibliothèque.
La décision d'élimination est prise dans les cas suivants : collection très lacunaire (quelques fascicules isolés voire un unique numéro) ne pouvant compléter les collections d'un autre établissement, collection en trop mauvais état (papier acide...) pour être conservée, transférée au CTL ou proposée et collection dont le contenu est jugé sans grand intérêt.
Il va de soi que cette opération de tri s'accompagne de tâches plus techniques, fastidieuses, auxquelles participent l'ensemble du département des périodiques et celui des services publics : mise à jour des multiples registres ou fichiers pour toutes les collections qui quittent la bibliothèque, déplacement et reclassement de l'ensemble des collections, qu'elles soient conservées, expédiées à une autre bibliothèque, transférées au CTL et dans ce cas mises provisoirement à l'écart dans un magasin spécifique mais communicables jusqu'à leur transfert ou éliminées.
Ainsi que cela a déjà été signalé, cette opération menée pour dégager des espaces devenus indispensables présente un autre intérêt, l'évaluation de la collection en vue d'une meilleure gestion et notamment le recentrage de la politique d'acquisition sur les pôles d'excellence qui sont ceux de la bibliothèque. Un certain nombre d'abonnements sont interrompus à l'occasion de cette opération soit parce que le contenu est jugé peu intéressant pour la bibliothèque, soit parce que la langue du périodique (hébreu, chinois, hongrois...) ne fait pas partie des cinq grands domaines linguistiques retenus en priorité. C'est le cas notamment de publications reçues par échange acceptées massivement à une époque où la bibliothèque disposait d'espaces de stockage suffisants, notamment à la suite du transfert du fonds scientifique à Jussieu, où la production éditoriale était moindre, où il n'était pas encore question de partage des ressources documentaires (4) .
Le CTL est conçu pour désengorger les grandes bibliothèques parisiennes qui sont toutes, comme la Sorbonne, confrontées à des problèmes de saturation de locaux (Sainte-Geneviève, BIUM, Langues orientales, Institut, Sciences politiques, BDIC) et sont amenées à effectuer des tris du même type, sur les périodiques ou sur d'autres documents, en particulier les thèses.
Depuis quelques semaines, les établissements en question ont décidé de se concerter sur l'envoi de leurs collections au CTL : les premiers documents concernés sont les annuaires et les publications bibliographiques. Ces réunions semblent amorcer une pratique nouvelle de coopération, jusque-là presque inconnue dans les bibliothèques parisiennes.
Indispensable à la survie de la collection, cette opération devrait, une fois terminée (un peu plus d'un quart de la collection a été examiné de façon systématique actuellement) atteindre son premier objectif, permettre de désengorger ponctuellement, pour trois ou quatre ans sans doute, le magasin des périodiques. D'autres solutions sont d'ores et déjà à rechercher pour éviter l'asphyxie : espaces supplémentaires, achat de microformes de substitution pour remplacer de grosses collections imprimées, retrait du fonds slave ?
Plus fondamentalement, la réflexion entreprise au sein de la bibliothèque sur la politique d'acquisition devrait être tout à fait bénéfique pour la collection. A l'extérieur, il reste à espérer que les premières actions de concertation se poursuivent et ouvrent la voie à une coopération plus large.
Un outil de conservation partagée : le centre technique du livre "/ H. Dupuy - in Bulletin des bibliothèques de France, t. 37, n° 3, 1992, p. 25-30
La Bibliothèque de la Sorbonne et sa politique documentaire "/ C. Jolly - in Bulletin des bibliothèques de France, t. 37, n°3, 1992, p. 8-24.