si les premiers Centres de Documentation Sociale, aujourd'hui retenus au nombre des propositions officielles pour développer la lecteure et améliorer la situation des citoyens vis-à-vis de l'information pratique et de la culture, sont de création récente, les causes et les facteurs de la situation qu'ils cherchent sinon à résoudre, du moins à améliorer sont, eux, identifiés et étudiés depuis quelques temps. Les difficultés d'accès qui sont supposés contribuer à aplanir tiennent à des causes multiples, dont les effets se cumulent :
Le recensement d'expériences menées à partir des bibliothèques centrales de prêt, par exemple, donne à lui seul une idée de foisonnement d'initiatives centrées sur le livre (1) .
Par ailleurs, parmi ceux qui se trouvent, par fonction ou par vocation, concernés par la pauvreté totale ou relative de certains groupes sociaux, certains, comme Pierre Belleville et l'équipe de l'Atelier Culturel, se sont attachés à définir la culture ouvrière, à en dégager les caractéristiques età proposer les modalités d'une démocratisation de la culture.
Les Centres de Documentation Sociale (C.D.S.) constituent l'une des propositions concrètes issues de cette gestation. Ces « bibliothèques pour ceux qui ne lisent pas » (2) se veulent différentes par leur contenu et le mode de relations qu'elles instituent entre le lecteur, le texte et l'animateur. A l'image, sinon vétusté et ennuyeuse, mais au moins anonyme et codifiée de la bibliothèque telle qu'elle existe dans la majorité des esprits, il s'agit de substituer celle d'un lieu ouvert accueillant, où l'on se rend en confiance, sûr de trouver le renseignement, le document dont on a besoin et la personne compétente qui pourra éventuellement compléter ou clarifier l'information.
Ce lieu devrait assurer une double fonction :
Dans le même temps (octobre 1 980), le FIC apportait son aide à quatre projets identiques dans leurs principes mais sensiblement différents suivant leur situation régionale ou leur rattachement structurel. L'un, rappelons-le, était situé à Barc-le-Duc (ville lorraine de 25 000 habitants), l'autre dans un village du Gard ( 1 700 habitants), les deux derniers étant implantés dans des villes nouvelles de la région parisienne (Saint-Quentin-en-Yvelines et Cergy-Pontoise), mais avec un rayon d'action totalement différent.
Les dispositions initiales du progès agréé par la FIC et les autres partenaires ministériels comprenaientque, en raison du caractère expérimental de cette initiative, les Centres de Documentation Sociale feraient l'objet, au terme d'un an de fonctionnement, d'une évaluation réalisée conjointement par le Ministère de la Santé et de la Sécurité Sociale et le Ministre de la Culture et de la Communication. Toutefois, le moment venu, le budget nécessaire à cette évaluation n'ayant pu être dégagé, le Service des Etudes et Recherches du Ministère de la Culture a accepté d'entreprendre un bilan rapide. Le travail dont on va lire ici les résultats correspond à une observation très limitée. Chaque centre a été visité en deux journées consécutives pour les plus éloignés, fractionnées pour ceux de la région parisienne. Ces visites ont permis de rencontrer les animateurs des projets, ( parfois les responsables quand il s'agissait des personnes distinctes), quelques utilisateurs, des spécialistes (bibliothécaires, animateurs socio-culturels) associés à la mise en place ou à leurs activités.
Le rapport qui en est issu se propose de se mettre en évidence, à travers l'analyse des démarches et des initiatives communes à tous les CD. S. et des conditions dans lesquelles ils les ont menées à bien, les caractéristiques propres à ces organismes. Très concrètement, on a cherché à éclairer les points suivants : Comment les C.D.S. se sont-ils organisés pour répondre aux questions qui leur sont posées ? Quels produits, quels services offrent-ils ? L'accès à l'information se fait-il directement ou est-il médiatisé ? Comment s'établit l'équilibre entre la satisfaction des besoins exprimés et la proposition spontanée d'un certain nombre d'actions destinées à encourager le recours au C.D.S. ? Quelles relations les C.D.S. entretiennent-ils avec les autres lieux qui assurent une fonction d'information sociale ? avec les bibliothécaires ? Quel est l'impact de leur action ? Auprès de quel publics ? Dans l'immédiat et sur un plan opérationnel, les enseignements tirés de l'observation comparée d'un an de fonctionnement devraient permettre d'orienter le développement des CD. S. et, à un niveau plus synthétique, de dégager les caractéristiques communes propres à ces structures qui permettent de conclure - ou non - au rôle spécifique des Centres de Documentation Sociale.
A partir de ce projet très général - mais pas forcément très homogène (nous y reviendrons) -les quatre démarches ont évolué de façon indépendante. Les résultats atteints au boutd'unan permettent toutefois d'observer des similitudes :
Si les quatre promoteurs ont jété leurs forces et leurs moyens dans la mise en place des services d'information et de documentation pratique, aucun n'en a pour autant totalement négligé l'autre axe de développement : les actions destinées à favoriser le goût de la lecture. Pour ne citer que quelques exemples : Menucourt achète et gère activement un fonds de littérature générale, Saint-Quentin-la-Poterie a constitué un fonds de culture régionale, Saint-Quentin-en-Yvelines participe à des animations par le conte et Bar-le-Duc poursuit un travail plus ancien que le C.D.S. sur la mémoire ouvrière. Cependant, la lourdeur du programme de départ imposait de hiérarchiser les urgences, et c'est nettement le savoir et le savoir-faire pratique et utilitaire qui ont pris le pas, dans l'option première de tous les promoteurs, sur l'acquisition parla lecture d'une culture générale plus désintéressée.
A cela des raisons évidentes, mais qui ne lèvent peut-être pas toutes les ambiguïtés. Quelles sont ces raisons ?
BRIC-A-DOC, INFO SERVICE, BIP Pratique, leurs noms le disent bien, ces centres ont cherché d'abord à donner l'image et à jouer le rôle de « stations-service » de l'information, de lieux où l'on peut, sans grandes formalités, disposer immédiatement d'une information sans apprêt, obtenir les éléments d'un savoir minimum, ou les adresses utiles pour poursuivre son itinéraire selon trois axes principaux : renseignements administratifs - vie pratique et informations générales sur la vie quotidienne - connaissances encyclopédiques. Nous reviendrons plus loin sur la manière dont ce programme a été réalisé.
De la qualité des réponses apportées dans ces domaines dépendent- les animateurs l'ont bien senti - la crédibilité des C.D.S. et la possibilité pour eux, tout en maintenant les services déjà assurés, de se doter progressivement des moyens d'un rôle culturel plus large que celui qu'ils remplissent actuellement.
Se préparer à accueillir les questions les plus diversifiées et - à défaut d'y répondre directement - se doter des moyens de les réorienter est une nécessité pour tout lieu d'information. Plus encore pour une structure comme le CD. S. qui, pardéfinition, travaille dans un environnement sous-équipé ou pour une population démunie ou inexpérimentée devant lès outils d'information.
Sans entrer dans une analyse approfondie des demandes d'information auxquelles les C.D.S. se trouvent confrontés, disons schématiquementque l'infrastructure nécessaire à la satisfaction de ces demandes sera déterminées par deux facteurs :
Lntre ces demandes, ponctuelles, du type :
et enfin d'autres, très « profilées », comme :
Il y a une différence immédiatement perceptible. Il est clair que la recherche et l'élaboration de la réponse, dans les deux premières catégories d'exemples, s'effectueront plus directement et plus simplement que dans la troisième.
Plus précisément :
Dans un cas comme dans l'autre, l'intéressé pourra s'informer lui-même, à condition :
Sur ce point, les CD. S. existants, à l'exception de Menucourt, sont encore très insuffisants ; leurs fichiers sont très peu développés, voire inexistants et, pour le peu qu'on en voit, mal bâtis. A l'évidence, le manque de temps et l'inexpérience expliquent ce défaut. Il n'en reste pas moins que, si l'on n'y porte pas remède, l'utilisation des ressources accumulées s'avérera, à terme, impossible.
C'est une de leur tâches-clés. Apprendre à lire un indicateur d'horaires, une table de correspondance, à utiliser l'index d'une encyclopédie, les renvois d'une rubrique à l'autre dans un manuel ou dans un fichier sont la condition première (3) du libre accès à l'information et, donc, de l'autonomie des usagers. A Menucourt, la pratique montre qu'enfants comme adultes parviennent aisément à un large dégré d'indépendance de la BIP et la manière d'utiliser les outils de recherche qui restent d'ailleurs toujours simples et clairs.
Dans ce cas particulier, le demandeur, en raison même de sa question età travers elle, sollicite plus qu'une simple information. Il a besoin d'expliquer sa situation, ne serait-ce que pour la distancer et, au-delà de la connaissance, cherche une aide. Là, plus question d'aspiration à l'autonomie. Un dossier, une fiche ne lui seront d'aucun réconfort. Pour faire face à ce type de demande, le C.D.S. doit se faire à la fois lieu d'écoute et lieu de ressources. A vrai dire, sur ce dernier point, le seul outil indispensable au C.D.S. est un bon fichier de personnes-conseils er de services spécialisées. Chacun des C.D.S. en a d'ailleurs constitué un, auquel il se réfère pour orienter les demandes impliquant l'intervention d'un spécialiste.
Quoi qu'il en soit, et pour faire face à ces divers types de demandes, tous les centres ont procédé, dans la phase de mise en place, à des démarches similaires :
Quelques remarques à ce propos :
Sur le bricolage, par exemple, Menucourt a créé - et continue de créer - bon nombre de dossiers (« jouets en bois », « meubles en bois », « pulls paysages », etc) dont la fonction principale estd'apporter des idées plus qu'une technique. Ils regroupent en une succession non hiérarchisée des documents graphiques (photos, dessins, plans, schémas) accompagnés de notices explicatives, de conseils et de modes d'emploi. Ces dossiers sont surtout utilisés par des amateurs expérimentés ou des animateurs d'ateliers qui s'en inspirent pour réaliser un produit défini ou simplement pour s'exercer, les deux objectifs étant souvent confondus.
A l'opposé, certains C.D.S. possèdent un ou deux dossiers élaborés : le dossier « vacances », ou le dossier « divorce », par exemple, qu'ils ont réalisés eux-mêmes en cherchant à les rendre opérationnels : c'est-à-dire complets (sans être exhaustifs), actuels et accessibles. Parvenir à un tel résultat exige du temps et beaucoup de travail pour :
Ainsi, le BRIC-A-DOC de St-Quentin-en-Yvelines a mis au point pour le dossier « divorce » une fiche récapitulant les procédures d'urgence à respecter pour les situations de crise (femmes battues quittant leur foyer, par exemple). Rien en effet, dans la littérature examinée pour la constitution du dossier, ne précisait les choses indispensables à faire ou à éviter dans ces circonstances.
Les travaux manuels, également, donnent matière à l'élaboration de fiches :
INFO-SERVICES travaille à un très intéressant projet concerté avec un LEP de Bar-le-Duc. Le C.D.S. soumet aux élèves apprenant les métiers du bois un certain nombre de fiches tirées des « Carnets du bricolage », les élèves les critiquent, éventuellement proposent une rédaction modifiée à partir de leur pratique et ce, avec le concours de leur professeur de menuiserie et de leur professeur de français. A Saint-Quentin-en-Yvelines, les responsables du BRIC-A-DOC, en relation avec une assistante sociale, se préoccupent d l'élaboration de notices d'emploi simplifiées pour l'utilisation de machines à coudres mises par le C.D.S. à la disposition de femmes immigrées dans l'antenne d'un centre social.
Ces produits, très difficiles à établir car ils réclament temps et compétence, sont aussi très prisés car ils correspondent étroitement à la demande des utilisateurs. Les dossiers « vacances pas chères » établis indépendamment par le BRIC-A-DOC de Saint-Quentin-en-Yvelines et la BIP Pratique de Menucourt en 1981, ont reçu, l'un comme l'autre, un excellent accueil et une « édition 82 », actualisée et améliorée, figure au programme de travail des deux C.D.S. Sur ce point particulier de l'élaboration de produits étroitement adaptés aux besoins, il faut souligner le bénéfice singulier que les C.D.S. tireraient de la mise en commun de leurs efforts et des résultats de leurs recherches. Menucourt et Saint-Quentin-en-Yvelines, d'ailleurs, parce que leur proximité relative dans la région parisienne rend la chose plus aisée, ont comparé leurs dossiers « vacances », chacun dans le souci d'améliorer sa propre formule.
Dans tous les axes de développement, le bricolage devait être le fleuron. N'était-il pas question en effet d'implanter, au lieu de centres de documentation, des « quincailleries sociales », des « BHV de l'imprimé » qui auraient :
On en escomptait un double effet :
Comment les C.D.S. ont-ils abordé ce domaine ?
Seul le BRIC-A-DOC de Saint-Quentin-en-Yvelines a monté un « atelier itinérant de bricolage de d'aménagement » équipé de perceuses, de shampooineuses à moquette, de matériel à tapisser, de machines à coudre, d'une tondeuse, de tables à encoler ainsi que d'un véhicule qui sert à transporter tout ce matériel aussi bien que la documentation (livres, dossiers, périodiques) dans les différentes antennes où ils sont laissés en dépôt.
A noter :
Une des machines à coudre, par exemple, est mise à la disposition d'une assistante sociale qui organise des réunions « couture » tout à fait informelles que fréquentent surtout des femmes maghrébines et africaines. C'est avant tout pour elles l'occasion de sortir de chez elles et de parler, ce qui est très important, même si l'objectif initial à quelque peu reculé !
Or le Centre de Documentation Sociale de Saint-Quentin-en-Yvelines vient de s'implanter dans la bibliothèque intercommunale Georges Brassens, au choeur de la Ville Nouvelle et il n'y a pas place, dans ce lieu pourtant spacieux pour un atelier ou même un magasin d'outillage.
Il faudrait donc ou bien équiper un atelier dans le proche voisinage, ou aménager le véhicule qui, pour l'instant, n'assure que le transport du matériel.
Tant que l'une ou l'autre solution ne sera pas effective (4) , les animations basées sur le bricolage ne pourront être que sporadiques et légères. Telles quelles, toutefois, elles ne sont pas dénuées de valeur :
Les autres C.D.S. n'ont pas négligé l'aspect concret du bricolage mais y ont répondu différemment :
Ainsi, la BIP Pratique de Menucourt a organisé, en concertation avec l'atelier « bois » de la Maison de quartier, des journées « Jouets en bois » qui ont connu un très grand succès : partant des réalisations présentées par la CEMEA, dont elle avait loué l'exposition, elle a exposé également les jouets fabriqués par les enfants et les animateurs ainsi que des documents sur le sujet. Des fiches techniques mises à la disposition du public avaient été réalisées par l'atelier.
ou encore en faisant appel au concours bénévole de personnes compétents :
A Bar-le-Duc, par exemple, INFO-SERVICE a monté à deux reprises une opération originale de « Taille des rosiers » pour laquelle un jardinier amateur a accepté d'organiser dans son jardin une démonstration à l'intention des habitants intéressés, tandis que les animatrices du C.D.S. proposaient dans de grands casiers une sélection d'ouvrages et de revues sur les techniques de jardinage et l'art floral.
Le très bon accueil réservé à ces initiatives ne doit pas masquer la difficulté pour un centre de documentation non équipé d'organiser de façon permanente des activités concrètes centrées sur le bricolage et les travaux manuels.
Bar-le-Duc, par exemple, a connu des échecs dans des opérations identiques en plein air pour lesquels seules les intempéries peut-être, sont à incriminer. Il n'en reste pas moins que la mise sur pied de manifestations de cet ordre, en l'absence de moyens adéquats, reste une gageure et qu'en ce domaine comme en d'autres, les C.D.S. ne peuvent entreprendre seuls. L'intérêt de la documentation, en ces domaines, ne peut être découvert, par un public non- initié, qu'en appui de démonstration qui supposent un outillage et des praticiens expérimentés. Réunir toutes ces conditions reste encore problématique pour les C.D.S., mais le désir n'en est pas moins grand de persévérer dans une voie qui semble très prometteuse.
Pour qui les C.D.S. ont-ils travaillé en 1981 ?
Chacun dans sa situation propre a raisonné sur deux plans :
Progressivement une image se crée, mais elle doit toujours être entretenue, à l'aide surtout d'opérations concrètes, conçues en tenant compte des exigences suivantes :
La jeunesse des C.D.S. rend prématurée toute tentative d'analyse globale des résultats en général, des publics atteints en particulier. Ainsi, même si Bar-le-Duc, par exemple, peut se référer au travail pionnier mené par la commission extra-municipale appelée « Groupe Secteur social »dès 1978, grâce auquel INFC-SERVICESa pu, d'emblée, proposer un projet pédagogique très maîtrisé, le C.D.S. lorrain n'a pas pour autant échappé aux tâtonnements et aux approximations du « rodage »et, là comme ailleurs, bien des résultats restent incertains. Pour quelles raisons, par exemple, une démonstration « Bricolage Bois » a-t-elle suscité si peu d'intérêt, alors que les deux journées « Taille des rosiers «ont connu un grand succès ! Hormis quelques hypothèses oiseuses, il est impossible sur une si courte période et avec si peu de recul, d'avancer des explications fondées et cohérentes.
De même, que dire des résultats tangibles obtenus à Saint-Quentinen-Yvelines alors qu'à l'époque de la visite, l'implantation matérielle prévue pour le BRIC-A-DOC n'était pas encore effective mais que, par contre, les virtualités s'annonçaient très prometteuses ? (Ce que semble aujourd'hui confirmer les premières réalisations originales qui ont surgi dès que le C.D.S. a pu enfin rencontrer son public). Aucune enquête n'a pu encore être menée, aucun résultat n'est stable. Chaque C.D.S. accumule les indices et les interprète comme autant d'éléments pour orienter son développement.
Il apparaît toutefois :
Généralement, la promotion de ce service s'opère à l'occasion de manifestations combinées avec d'autres structures (stages, ateliers, session déformation, etc...).
Cette formule d'actions concertées s'avère le plus souvent très heureuse. Les préparer, les organiser, les réaliser est l'occasion d'une meilleure connaissance, d'une découverte réciproque des besoins et des ressources.
Ainsi une journée sur le bricolage conçue avec un lycée technique, impliquera deux professeurs (de menuiserie et de français) et leurs élèves d'une part, les animatrices du C.D.S. de l'autre. Pour les premiers, il s'agira d'organiser une démonstration du travail du bois avec présentation des outils, des matériaux, des différentes phases des opérations avec schémas, composition et rédaction de fiches explicatives, étude critique des revues ou dossiers proposés par les documentalistes ; pour le secondes, l'enrichissement consistera en une meillieure connaissance du domaine, du vocabulaire, des outils documentaires disponibles ou à créer pour satisfaire les besoins d'information.
Il est certain que pourtoutes les questions touchantaux connaissances appliquées (travaux manuels, questions sociales, juridiques, etc...), la participation individuelle ou collective de praticiens est actuellement et restera sans doute toujours indispensable pour permettre aux C.D.S. de jouer leur rôle spécifique auprès du public qui ne cherche pas d'abord à lire mais à savoir. On peut penser que ce n'est qu'au prix d'un patient travail de démonstrations, d'échanges que s'instaurera le climat de confiance - confiance en ceux qui détiennent la connaissance, confiance en soi-même aussi - qui créera les conditions d'une démarche moins utilitaire vers la lecture, d'un comportement plus autonome vis-à-vis de l'accès à l'information et l'acquisition du savoir.
C'est le troisième axe de construction des C.D.S. qui a fait la charnière avec les bibliothèques.
Les C.D.S. ont peu ou n'ont pas développé leurfonds de littérature encyclopédique ou générale, soit que les bibliothèques avec lesquelles ils travaillent assurent cette fonction, soit qu'ils n'aient pu encore atteindre ce point de développement. Cela ne veut pas dire qu'ils n'ont pas travaillé à développer le goût et l'intérêt pour la lecture.
Bon voisinage...
Tous ont des liens très proches avec des bibliothèques (Saint-Quentinla-Poterie et Menucourt confondent dans la même pièce C.D.S. et bibliothèque, Bar-le-Duc partage le même bâtiment, Saint-Quentinen-Yvelines s'installera prochainement dans le même espace). A Bar-le-Duc et à Menucourt, l'acquisition, le traitement et le prêt des livres sont effectués indistinctement par l'un ou l'autre, pour l'un ou l'autre, à peu de choses près.
Certaines actions d'animation sont menées en concertation, au bénéfice des deux, les C.D.S. s'appuyant sur les ressources, les moyens et l'expérience des bibliothèques gagnant en extension de domaines et de publics. Et tout permet d'espérer que cette collaboration ira en se développant.
mais il n'y a pas encore compatibilité totale.
Cependant tout n'est pas simple.
Les bibliothèques sont des institutions dont les règles de travail sont fixées et l'organisation rôdée de longue date. Elles travaillent essentiellement sur le livre et selon des modes de relations avec le public qui ne se prêtent pas forcément aux objectifs des C.D.S.
D'où la nécessité de veiller à la plus grande clarification des rapports et à la définition des « territoires entre les bibliothèques et les C.D.S.
Comme avec les organismes à vocation sociale ou éducative, une complémentarité est possible avec les bibliothèques dont l'une des raisons d'être est de développer le goût de la lecteure. Toutefois, pour que le pasage se réalise du D.C.S. à la bibliothèque, il faut que les voies d'une harmonisation soient recherchées, sur tous les plans, et surtout à travers des animations conçues et menées de concert.
Sur le terrain de l'information et de la documentation sociale et pratique, les C.D.S. ne se retrouvent pas seuls. Maints organismes d'accueil, d'animation, de formation, maintes associations ou mouvements de jeunes, de femmes, d'immigrés ou travaillant pour ces catégories de population et d'autres constituent, utilisent, diffusent une documentation spécifique ou bien organisent des permanences, des consultations, des services d'information et la mise en place des C.D.S. peut sur certains terrains - notamment dans les Villes Nouvelles - susciter des confusions, des réticences, voire des appréhensions. Des démarches ont été entreprises parfois par des assistantes sociales, par exemple, qui croyaient déceler dans le travail d'information du C.D.S. une manière d'empiétement sur leurs fonctions. Il faut donc être très vigilants et raisonner l'implantation et toutes les étapes de la mise en oeuvre etdu développement en tenant compte d l'infrastructure locale en moyens d'information et de documentation sociales, paratiques et culturelles.
Cette démarche est capitale et lourde à conduire. A vrai dire, elle devrait préciser la décision d'implantation d'un CD. S., il s'agit, en fait, d'une sorte d'« étude de marché «dont les paramètres sont très complexes et jouent de façon très aléatoire.
Quoiqu'il en soit, pour les quatre C.D.S. jusqu'ici empiriquement créés, il s'agit progressivement :
L'expérience des C.D.S. recueillie au bout d'un an de fonctionnement permet:
Situés à la charnière entre les fonctions d'information des administrations et des services sociaux et les fonctions d'animation des bibliothèques, les C.D.S. jouent un rôle polyvalent qui trouve dans certains terrains sa pleine justification sociale et culturelle.
Ce n'est pas tant qu'ils rapprochent matériellement le document et le livre des utilisateurs, encore que la faiblesse du réseau national dans le domaine des centres d'information et des bibliothèques ne rende pas ce service négligeable ; c'est beaucoup plus qu'ils travaillent à modifier la relation entre le citoyen et l'information, entre le secteur et l'écrit.
Comment ?
Leur mission est donc, avant toute chose, d'éducation et de relation, par le moyen du document et du livre, ou plus largement de l'écrit et de l'écriture.
Pour une bonne part, ils affrontent les mêmes questions, les mêmes problèmes, puisent aux mêmes sources, fabriquent les mêmes produits, et bénéficieraient incontestablement de la mise en commun de leurs expériences respectives sur des points concrets et pratiques. Quelle forme donner à cette mise en commun ? Les tentatives d'échanges épistolaires ont rapidement tourné court. Mieux vaudrait, semble-t-il, poser le principe de rencontre des responsables des C.D.S. (tous les semestres, par exemple) dans l'un des centre à tour de rôle où pendant un ou deux jours ils examineraient leurs réalisations, discuteraient entre eux, éventuellement convieraient un ou deux spécialistes (documentalistes, bibliothécaires, spécialistes de la lecture, travailleurs sociaux, animateurs, élus locaux, etc...) pour les aider progresser sur un domaine ou un aspect précis de leur travail.
A qui reviendrait l'initiative de telles rencontres ?
Elle doit rester, semble-t-il, l'affaire des C.D.S. entre eux. Toutefois, la lourde charge du travail qui incombe à leurs animateurs et la précarité des budgets dont ils disposent ne leur donnent guère de latitude pour entreprendre de nouvelles activités. Il ne faut pas sousestimer, en effet, le travail préparatoire à de telles rencontres si on veut qu'elles soient fructueuses et génératrices d'une dynamique. On est tenté alors de se retourner vers le FIC, la Direction du Livre ou les autres partenaires financiers, pour voir qui pourrait au moins dans cette étape expérimentale, aider à la mise en route - qui après tout, fait partie au- même titre que l'achat d'ouvrages ou de fichiers, du travail constitutif - étant entendu que la démarche professionnelle reste du ressort des intéressés eux-mêmes. En effet, les trois réunions organisées par le FIC (Paris, 16 décembre 1980 - Menucourt, 27 mars 1981 Paris, 15 juin 1981 ) n'ont pas correspondu à l'attente des responsables de C.D.S. Leurordre du jourtrop chargé (compte rendu d'activité + respectives de financements renouvelés + possibilités d'information) ne permettait qu'une évocation superficielle des problèmes. Par ailleurs, leur composition hétérogène (représentants des administrations qui financent + responsables des projets ou de leur mise en oeuvre) bloquait l'échange, brouillait les objectifs réels de la réunion. Bref, l'utilité de telles assemblées est unanimement remise en cause par les responsables directs des C.D.S. qui n'en ressentent pas moins le besoin d'une coordination.
Reste à en rechercher la formule et, tout d'abord, à savoir à qui en revient l'initiative. Ce problème se pose plus encore au moment où d'autres CLDLSL devraient être implantés. Il ne s'agit ni de les uniformiser ni de les coiffer ; il s'agit de favoriser leur développement en leur permettant, autant qu'il se peut, de faire l'économie d'un apprentissage solitaire et de s'enrichir mutuellement de leurs démarches singulières, de leurs initiatives originales, de leurs découvertes propres (5)
Ce constat d'ensemble mérite toutefois d'être nuancé, en rappelant :
Il n'en reste pas moins que le développement du goût de la lecture et de l'intérêt pour les livres relève de techniques d'animation et d'éducation qui ne s'improvisent pas. C'est un point sur lequel il conviendrait d'intensifier les efforts à l'avenir.
Aux bibliothécaires ou aux animateurs spécialisés qui seraient tentés de considérer que ces tâches leur sont réservées, on peut faire observer que la spécificité des C.D.S. est justement de travailler au contact de populations qu'eux-mêmes n'atteignent pas.
La solution, là encore, est dans la mise au point d'actions concertées.
NOTES