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Le service photographique de la bibliothèque nationale

1984

    Le service photographique de la bibliothèque nationale

    Par Anne-Françoise BONNARDEL, Conservateur à la Bibliothèque nationale Département de la Photographie

    A l'heure où chacun s'interroge sur l'accès aux documents (Congrès A.B.F. 1983, St Brieuc) ou sur le rôle que doit jouer la technique dans le fonctionnement des bibliothèques (Congrès I.F.L.A. Munich, 1983), il est particulièrement intéressant que le Service photographique de la Bibliothèque nationale fasse mieux connaître l'aide qu'il peut apporter aux lecteurs pour accéder aux documents, ainsi que les techniques dont il dispose pour apporter aux chercheurs tous les éléments nécessaires à leurs travaux.

    Depuis une trentaine d'années, le Service photographique assure deux missions qui paraissent contradictoires et sont assurément complémentaires :

    • Fournir à une vaste clientèle la reproduction de tout document conservé à la Bibliothèque nationale.
    • Participer à la sauvegarde des collections.

    Cette clientèle internationale est très diverse : étudiant, chercheur, universitaire, écrivain, journaliste, éditeur, établissements publics, sociétés privées, simples particuliers... Ses exigences sont parfaitement spécifiques, et il convient d'y répondre au mieux.

    Le courrier apporte chaque jour des demandes qui nécessitent des recherches de cote ou qui posent des problèmes délicats d'identification; il arrive aussi des lettres qui exigent un travail trop long ou trop approfondi que nous ne pouvons assumer, car le Service photographique ne peut prendre en charge des tâches qui incomberaient à un service de documentation.

    Au client qui souhaite la reproduction de « tout ce que vous avez sur Molière », la réponse n'est pas aisée. Nous ne pouvons lui proposer qu'un choix d'épreuves tirées de la photothèque - ce qui, en général, suffit à combler ses voeux.

    Mais, nous devons aussi satisfaire le client qui recherche la reproduction d'un document très précis - dans son esprit - mais pour lequel il ne communique que des renseignements très vagues.

    Que le client soit un habitué du Service ou un demandeur occasionnel, il convient d'apporter la plus grande attention à sa demande : l'accueil doit être absolument personnalisé ; il exige donc une grande expérience professionnelle et... une parfaite sérénité !

    Pour satisfaire cette clientèle, des équipes - conservateurs et sous-bibliothécaires - en relation étroite avec les départements reçoivent les demandes, effectuent des recherches, établissent des devis, préparent les documents pour les ateliers, rédigent des fiches normalisées pour les catalogues de photo-tèque ou de filmothèque.

    Après acceptation par le client des conditions mises à la reproduction : démarches auprès d'ayants droit éventuels, déclaration d'usage privé et réception de son paiement, le dossier est transmis aux ateliers pour l'exécution de la commande.

    Ces ateliers disposent de procédés aussi divers que spécifiques pour fournir aux clients la reproduction adaptée à l'usage souhaité.

    L'atelier de microformes fournit des microfilms positifs ou né: gatifs et des microfilms en couleur. Ils permettent la consultation sur un appareil de lecture, l'établissement d'agrandissements ou la reproduction anastatique d'ouvrages imprimés.

    Cet atelier exécute aussi des diapositives, en noir et blanc ou en couleur, destinées essentiellement à la projection.

    Une section de cet atelier établit des microfiches - de préférence, mais non exclusivement, à partir d'ouvrages de petit ou moyen format et peu illustrés. Chaque microfiche reproduit au maximum 60 ou 98 pages. Ce procédé est adapté à la consultation sur un appareil de lecture.

    A partir de ces microformes, le client peut obtenir des agrandissements de qualité différente : des photocopies conviennent pour un simple travail de documentation, des agrandissements sur papier document - papier mince, qui peut être plié et sur lequel on peut écrire - sont recommandés pour la reproduction des manuscrits anciens ou des périodiques de grand format. Des agrandissements sur papier glacé, recommandés pour les illustrations, peuvent servir pour la reproduction en librairie générale ou dans les journaux.

    L'atelier de clichés établit des inversibles couleur ou des clichés noir et blanc. Il est proposé au client un choix de formats adaptés aux dimensions de l'original, comme à l'utilisation envisagée ; pour le noir et blanc, le Service photographique ne livre que les épreuves sur papier et conserve le négatif. Ces travaux sont plutôt destinés à l'édition de haute qualité.

    Le Service photographique est particulièrement bien équipé pour exécuter des bétagraphies, des photographies sous éclairage rasant, avec filtres colorés, sous radiations monochromatiques infra-rouges et ultra-violettes, et des reproductions de très grand format (au-delà du m2).

    Ainsi, le Musée du Louvre nous a confié récemment des dessins de G. Bellini pour la réalisation de photographies utilisant ces techniques.

    Tous ces travaux sont exécutés selon un tarif aussi clair et concis que la diversité des documents et des procédés le permet. Les prix tiennent compte de la comparaison avec des établissements français et étrangers.

    Lorsque la publication des documents dont la reproduction a été fournie par le Service photographique de la Bibliothèque nationale est envisagée, une autorisation préalable, sans préjudice d'une éventuelle autorisation des auteurs des documents ou de leurs ayants droit, est nécessaire.

    Elle doit, être sollicitée auprès du Service photographique de la Bibliothèque nationale qui agit en tant qu'auteur des reproductions photographiques à caractère documentaire. Une facture est établie, dont le paiement peut s'effectuer en nature dans certains cas particuliers ; le Service photographique, après avis des départements susceptibles d'être intéressés par l'ouvrage en préparation, en demande un ou plusieurs exemplaires en échange de la gratuité des droits.

    La mission de sauvegarde des collections qui incombe en partie au Service photographique commence avec la réalisation de ces reproductions commerciales pour la clientèle.

    En effet, tous les clichés sont conservés : une épreuve en est tirée pour la consultation dans les départements. Les inversibles couleur sont exécutés en deux exemplaires, et des diapositives peuvent être mises à la disposition du public, à la demande du département concerné - qui reste cependant réservé sur cette possibilité car les disparitions de diapositives sont fréquentes !

    Les microfilms d'ouvrages entiers : matrice (ou première génération) et exemplaire de filmothèque (destiné à des reproductions ultérieures) établis par le Service photographique, sont conservés au Centre Joël le Theule à Sablé - dont la mission est la conservation des documents imprimés ; en plus des tâches de désinfection, restauration, reliure..., il assure la reproduction photographique d'ouvrages à partir de programmes établis en priorité par le Département des Imprimés. Un film positif de tous les microfilms réalisés par le Service photographique et le Centre de Sablé est communiqué aux départements pour la consultation.

    Toutes les demandes concernant ces films doivent être adressées au Service photographique qui en assure la commercialisation ; aucune commande n'est reçue à Sablé.

    Puisque la décentralisation de la Bibliothèque nationale est évoquée, il est important de préciser que le Service photographique n'effectue aucun microfilm de périodique, par collection complète ou large période chronologique.

    Ce rôle a été confié à l'Association pour la Conservation et la Reproduction Photographique de la Presse qui a installé à Provins un atelier chargé de la reproduction de la presse régionale.

    L'A.C.R.P.P. vend directement les duplicata des films qu'elle a réalisés, mais le Service photographique en commercialise les agrandissements partiels. (1)

    Si deux « annexes de la Bibliothèque nationale se sont vues confier la sauvegarde des documents les plus nombreux - c'est-à-dire imprimés et périodiques - celle des collections des départements spécialisés est assurée par le Service photographique. Ainsi, pour une plus grande efficacité et une meilleure protection des documents, un opérateur est détaché au Cabinet des Médaillles et deux au Département des Manuscrits : ils travaillent en fonction de programmes établis par le directeur du département et ses collaborateurs. Pour les documents conservés au Département de la Musique et à la Bibliothèque de l'Opéra, la reproduction systématique a dû être écartée par manque de moyens ; mais, toute demande est étudiée par le conservateur en chef qui décide l'établissement d'un film de sécurité - même si la commande du client ne porte que sur quelques pages. Au Cabinet des Estampes, la collaboration avec un façonnier s'est poursuivie pendant ces dernières années : il semble que le contrat sera très sensiblement modifié dans les mois à venir ; le département envisage d'autres solutions en collaboration avec le Service photographique.

    Enfin, dans cette mission de sauvegarde, il est un troisième aspect qui ne doit pas être négligé car son importance s'accroît régulièrement : celui des expositions et des publications de catalogues.

    Tout prêt de document n'est consenti à l'extérieur de la Bibliothèque nationale que sous la condition expresse de l'existence d'un négatif, d'un inversible couleur ou d'un microfilm de sécurité, ou de son établissement aux frais de l'emprunteur, selon le procédé retenu par le directeur du département prêteur.

    Les expositions organisées par la Bibliothèque nationale utilisent fréquemment des reproductions de documents empruntés ou appartenant à ses propres collections, soit pour remplacer un ouvrage trop précieux ou fragile pour être exposé, soit pour l'illustration de catalogues.

    A propos de catalogue, la politique éditoriale de la Bibliothèque nationale étant en pleine expansion, le Service photographique est largement sollicité soit pour illustrer agréablement une publication soit pour soutenir par l'image un travail scientifique.

    Sans lasser l'attention du lecteur de cet article par trop de chiffres, il est bon que l'on sache que le Service photographique de la Bibliothèque nationale en 1983, avec moins de 70 personnes, a reçu 19800 demandes, proposé 12850 devis, honoré 11 550 commandes; il a réalisé 16200 clichés, 56000 épreuves, 5 300 inversibles couleur, 5 500 diapositives en couleur, 2900000 images de microfilm, 13000 microfiches, 68 200 tirages argentiques de microfiches, représentant 7 200 000 F de chiffres d'affaires, dont 592 000 F de droits de reproduction.

    Il reste à souhaiter que le Service photographique, aidé par l'informatique (l'automatisation du circuit commercial est à l'étude, et pourrait intervenir dans un délai raisonnable), puisse mieux assumer sa mission de sauvegarde.

    La réalisation de catalogues thématiques et de vidéodisques permettrait une large diffusion et donc une meilleure connaissance de la photothèque et de la filmothèque de la Bibliothèque nationale. Il en découlerait une moindre fréquentation des salles de lecture et une relative économie de personnel, qui pourrait se consacrer à d'autres tâches ; ces deux éléments se conjuguant vers ce qui est la finalité de la Bibliothèque nationale : la protection d'un patrimoine littéraire et artistique incomparable.

    1. *A.C.R.P.P. : 4, rue Louvois, 75 002 PARIS. Tél. : 296.83.12. retour au texte