Index des revues

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    Création d'une base de données anti-incendie

    Résultat de la collaboration entre la Bibliothèque de l'université de Nice et le Centre de Recherches anti-incendie (CRAI)

    Par Michel MEINARDI

    (1) Depuis quelques années, grâce au développement de l'informatique et surtout de la micro informatique, on assiste à une « démocratisation » de la production de bases de données. En effet, dans les années 70, seuls des organismes importants disposant de très gros moyens informatiques pouvaient se permettre d'être producteurs de bases de données. On peut citer, en France, parmi les premiers, le Centre national de la Recherche Scientifique, Electricité de France ou le Commissariat à l'Energie Atomique. Aujourd'hui, l'apparition de progiciels documentaires performants et de micro-ordinateurs plus puissants permet à un certain nombre de laboratoires de recherches de créer leurs propres bases dans les domaines qui correspondent le mieux à leurs besoins documentaires. Dès lors, pourquoi ne pas associer les Bibliothèques Universitaires à cette entreprise en faisant intervenir les bibliothécaires, interlocuteurs les plus compétents dans le domaine du traitement de l'information? Par sa vision d'ensemble de la chaîne documentaire, le bibliothécaire peut intervenir soit en amont de celle-ci au niveau du traitement de l'information (création de fichiers classiques et de bibliographies) soit en aval au niveau de la diffusion (orientation du lecteur dans ses recherches bibliographiques.)

    Avec l'intervention de l'informatique dans la documentation, le bibliothécaire, en devenant un spécialiste de l'interrogation en conversationnel des bases de données, a surtout assumé son rôle d'aide à la recherche délaissant la création de bases. Sans doute, craignait-il de mal maîtriser les techniques informatiques dans ce domaine? L'évolution récente de la micro-informatique et l'arrivée de progiciels documentaires d'emploi facile permet maintenant aux bibliothécaires, au même titre qu'ils étaient producteurs de bibliographies classiques, d'intervenir dans la création de bases de données.

    Afin de créer des bases de données spécifiques, une convention a été conclue entre la Bibliothèque de l'Université de Nice et le Centre de Recherches Anti-Incendie. Ce Centre, unique en Europe, a été fondé à l'initiative du Professeur Aimé Cambon, directeur du Laboratoire de Chimie organique du fluor à l'Université de Nice et du Docteur Roger Vandamme. La vocation du Centre de Recherches Anti-Incendie est d'induire et de favoriser les recherches relatives aux problèmes de l'incendie. Son originalité réside dans l'association étroite de spécialistes de secteurs 'socio-économiques très divers (Universitaires, industriels, sapeurs-pompiers, représentants de la Sécurité civile) dans le but d'une lutte efficace contre les ravages des incendies. Action primordiale dans nos régions qui paient chaque année un lourd tribut aux incendies de forêts mais dont l'intérêt s'avère également capital sur le plan national et international.

    Méthodologie de mise en oeuvre d'une base de données :

    A partir de l'exemple de mise en place de la base anti-incendie il est possible de dégager un processus d'élaboration applicable à n'importe quelle base de données. Ce processus peut se décomposer en trois phases :

    1. Phase de conception :

    Cette phase consiste à concevoir le projet puis à le soumettre à la personne ou à l'organisme qui a pouvoir de décision.

    TRAME D'UN PROJET

    A. Définition du projet :

    Définir les objectifs, les partenaires qui doivent intervenir, les besoins.

    B. Conception du système :

    • Définir l'information traitée, c'est-à-dire les types de documents retenus. Faire une estimation de leur nombre en fonction des limites (disciplines, langues, dates) que l'on se fixe, et de l'exhaustivité souhaitée.
    • * Prévoir le traitement au niveau de la saisie de l'information, la forme sous laquelle elle sera conservée puis exploitée.
    • * Décrire les productions envisagées en fonction des utilisateurs potentiels :
      • produits classiques (papier - microformes),
      • produits informatiques (disquettes, interrogation de la base en conversationnel).

    C. Étude des moyens nécesaires à la mise en oeuvre du projet:

    • Matéie informatique.
    • * Logiciels et progiciels disponibles et leur compatibilité avec le matériel informatique.
    • * Ressources humaines.
    • Crédits de fonctionnement.

    D. Débouchés et prospectives :

    2. Phase de réalisation

    Une fois l'accord obtenu, la réalisation proprement dite du projet peut commencer. Cette phase doit tenir compte des moyens en matériel et en personnel disponibles.

    • D'abord pour saisir l'information.
    • Ensuite pour en assurer l'actualisation et la conservation.
    • Enfin pour en assurer l'exploitation, c'est-à-dire la diffusion par des moyens classiques (papier - microformes) ou par l'interrogation en conversationnel.

    Le choix du logiciel est soumis à sa comptabilité avec le matériel. En effet, si aujourd'hui on trouve facilement un progiciel documentaire performant, il n'est pas certain que celui-ci fonctionnera sur n'importe quel type de mini ou de micro-ordinateur. Il est donc fortement conseillé, si l'on doit acheter l'un de ces appareils de fixer son choix en fonction des progiciels compatibles disponibles.

    Parallèlement au choix du logiciel et du matériel, la collecte de l'information peut commencer. elle peut prendre plusieurs aspects :

    • * soit une forme traditionnelle : recherche bibliographique classique dans les bibliographies courantes ou rétrospectives.
    • * soit une forme moderne qui consiste à récupérer l'information résultant de l'interrogation d'autres bases de données.
    • * soit pour la littérature grise essentiellement, l'utilisation de la documentation personnelle de chaque chercheur.

    Cette collecte est suivie par la saisie et la vérification des données puis le stockage de l'information sur un support informatique approprié (disque ou disquettes selon le matériel).

    3. Phase d'utilisation

    Il s'agit essentiellement de la maintenance de la base, c'est-à-dire de la conservation et de l'actualisation des données qui la constituent, et de l'exploitation de celles-ci à des fins de diffusion. Diffusion qui peut présenter plusieurs aspects :

    • * Edition de l'ensemble de la base ou d'une partie particulièrement intéressante de celle-ci sous la forme d'une publication. Dans ce cas, en figeant l'information à l'instant de l'impression, on se prive de l'un des principaux avantages de l'automatisation: l'actualisation permanente de l'information.
    • * Aussi vaut-il mieux prévoir la possibilité d'interroger la bas en conversationnel. Ce qui permet l'obtention à tout instant des seules références désirées par l'utilisateur en fonction d'une stratégie de recherche qu'il définit lui-même.
    • * Grâce au développement de la micro-informatique, une nouvelle possibilité de diffusion peut-être envisagée. Elle consiste en la production de disquettes sur lesquelles sont stockées tout ou partie des informations constituant la base. Ces disquettes sont entuite distribuées aux utilisateurs possédant un micro-ordinateur compatible.

    Base anti-incendie : état des réalisations :

    La collaboration avec les spécialistes du centre a abouti à la mise au point d'un bordereau de saisie. Il se découpe en deux parties :

    • une partie description bibliographique qui identifie le document à partir des caractéristiques suivantes : type de document, niveau, langue, auteurs, affiliation des auteurs, titre original, titre traduit, éditeur, source,
    • une partie indexation qui en définit le contenu. A cet effet, les. options suivantes ont été retenues :
      • * une indexation à partir d'un plan de classement spécifique aux aspects incendie qui a été élaboré par les spécialistes du CRAI. Ce plan à structures hiérarchisée est constitué à partir d'un code alphanumérique à trois caractère,
      • des descripteurs ou mots-clés,
      • et éventuellement un résumé.

    Cette solution nous a paru préférable à l'utilisation d'un thesaurus qu'il aurait fallu créer. Ce qui était incompatible avec les délais et les moyens qui nous étaient impartis.

    Ces bordereaux sont édités à l'aide d'un programme spécifique implanté sur le micro-ordinateur du centre (Texas Instrument DS 990), puis remplis par les chercheurs eux-mêmes chaque fois qu'ils repèrent un document concernant l'incendie en général, les moyens de lutte ou de détection, et qu'après l'avoir lu et analysé ils désirent le voir figurer dans la base.

    La saisie proprement dite de l'information se fait à partir d'un programme qui affiche sur l'écran du micro-ordinateur une grille identique au bordereau. Un curseur se déplace à l'intérieur de cette grille, désignant à l'opérateur la zone à remplir. Des contrôles sont effectués sur la vraisemblance des zones saisies au fur et à mesure de la frappe (omission d'une zone obligatoire

    • caractère non numérique dans une zone qui doit l'être - etc.). Une fois vérifiées et validées, les données sont stockées sur une disquette (8 pouces) sous la forme d'enregistrements constituant un fichier à accès direct.

    Un programme de correction, fonctionnant selon le même principe, permet de supprimer ou de corriger tout ou partie d'un enregistrement.

    Toutes les fonctions nécessaires à la bonne gestion de la base ne sont pas encore disponibles. En effet, nous avons dû développer nous même un logiciel adapté au micro-ordinateur car les progiciels documentaires existants n'étaient pas compatibles avec le Texs Instrument. Une conception modulaire a été adoptée pour la mise en place de ce logiciel. Les modules opérationnels sont les suivants :

    • édition des bordereaux,
    • saisie et contrôle des données,
    • suppression ou correction des enregistrements,
    • visualisation et édition de la totalité ou d'une partie du fichier,
    • _L sauvegarde des disquettes.

    D'autres modules sont prévus, et sont en cours de réalisation, il s'agit:

    • du module de création des lexiques et des fichiers inverses,
    • du module d'interrogation de la base.

    Perspectives :

    Au départ notre ambition était de constituer une base à caractère purement documentaire sur les aspects théoriques, chimiques et physiques des incendies. Mais en étudiant le problème, il est apparu nécessaire de développer, parallèlement à cette base, une banque de données « sécurité » dont l'objectif est de recenser les produits dangereux avec pour chacun d'entre-eux ses caractéristiques physico-chimiques, les dangers qu'ils risquent d'occasionner et les moyens de lutte.

    L'analyse de l'existant nous a permis de constater que les banques et bases de données traitant de ces problèmes sont en anglais et implantées sur des serveurs étrangers, ce qui rend leur interrogation onéreuse.

    On peut citer:

    • ESDIS (Electronic Security Dialog and Information Service) produite par Security Architects, Inc. - utilisable par les- membres d'associations professionnelles aux Etats-unis et au Canada.
    • Fire Net produite par Bob Tidmore, Marmen Computing Company contient des informations sur la sécurité incendie dans l'industrie.
    • HASARDLINE produite par Occupational Healt Services, Inc. (OHS) - recense environ 2 000 produits chimiques dangereux et leurs effets sur l'environnement.
    • ECDIN (Environmental Chemicals Data and Information Net-work) produite par la Commission des Communautés Européennes - banque factuelle contenant des informations sur les substances chimiques, leur toxicité et leurs effets environnementaux.

    L'obstacle de la langue (dans un domaine où les prises de décisions doivent être rapides) et les coûts excessifs nous incitent donc à développer un produit spécifiquement français qui sera mis à la disposition des sapeur-pompiers et des représentants de la sécurité civile.

    Rôle respectif des. contractants :

    Par sa vision globale du système documentaire et son expérience en matière de catalogage et des problèmes de normalisation qui s'y rattachent, le bibliothécaire doit intervenir dans la définition des données et leur découpage en champs d'information. La pratique des interrogations de bases de données lui permet d'émettre un avis autorisé sur le choix d'un système d'indexation et d'en exposer les avantages et les inconvénients.

    Les spécialistes du Centre de Recherche Anti-Incendie apportent la connaissance du domaine d'application, du contenu de la base. Par leurs compétences dans les disciplines abordées, ils sont garants de la qualité des documents recensés, en même temps qu'ils sont les seuls à pouvoir en assurer une analyse pertinente.

    Pour les deux contractants l'une des conséquence de cette collaboration est une meilleure approche des problèmes documentaires qui se posent à l'autre. En effet, par son association à l'élaboration d'une base de données, à la création des bordereaux de saisie, le chercheur est sensibilisé aux problèmes de la recherche documentaire, tandis que le bibliothécaire intervient dans des secteurs d'activité nouveaux pour lui mais où ses connaissances en matière de traitement de l'information sont fort appréciées.

    Vignette de l'image.Illustration
    Synoptique général du processus d'élaboration d'une base de données

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