Loi-cadre. C'est une « loi qui se borne à poser des principes généraux et laisse au gouvernement le soin de les développer en utilisant son pouvoir réglementaire » (Lexique de termes juridiques, 5eéd., Dalloz, 1981).
Loi-programme. C'est un « regroupement en la forme législative de prévisions d'ouverture, par des lois de finances ultérieures, des autorisations de programme nécessaires pour assurer le financement d'un ensemble cohérent de réalisations projetées » (id.). Une telle loi est donc purement financière et ne concerne en outre que des crédits d'équipement, mais il faut souligner l'expression « ensemble cohérent » et la parenté des lois-programmes avec les processus de planification.
Bibliothèques publiques. On réserve généralement cette dénomination aux bibiothèques :
Cette définition recouvre actuellement en France les bibliothèques municipales, les bibliothèques centrales de prêt, et la Bibliothèque Publique d'Information.
Il est généralement admis, à l'échelon international, que les bibliothèques publiques doivent être de la compétence des collectivités territoriales (en France : communes, départements et régions), mais que deux conditions sont nécessaires pour que le système soit efficace.
On peut constater que sous la 4eRépublique et au début de la 5e, la France -..en l'absence de réelle politique de décentralisation visant à remplir la première condition - ne s'est pas attachée à remplir la seconde. Les principales mesures ont été les suivantes :
La nécessité du projet de loi élaboré en 1979 est apparue comme urgente dès la formulation des projets de développement des responsabilités locales, qui prévoyaient notamment le transfert des BCP aux départements et la suppression des subventions spécifiques pour l'équipement et le fonctionnement des BM, remplacées par des dotations globales de l'Etat en équipement et en fonctionnement. Mais cette nécessité découlait aussi de l'insuffisance de la politique de subvention - malgré les progrès considérables du début des années 1970 - dû au désengagement financier de l'Etat.
Le projet de loi comportait deux volets :
A. DES DISPOSITIONS D'ORDRE GÉNÉRAL (du type loi-cadre) précisant les responsabilités respectives de l'Etat et des collectivités territoriales. Ce volet seul a fait l'objet d'une fuite et a été largement diffusé.
Il s'inspirait en grande partie de la législation étrangère (étudiée dans l'important livre de Frank GARDNER publié par l'UNESCO en 1972 et résumé dans le rapport VANDEVOORDE), tout en tenant compte de la réalité française, notamment le considérable émiettement communal et l'importance des fonds anciens appartenant à l'Etat et conservés (mal) dans les bibliothèques municipales.
Les dispositions les plus importantes étaient les suivantes :
B. DES DISPOSITIONS FINANCIÈRES (du type loi-programme) portant sur un plan quinquennal d'équipement qui prévoyait la construction des surfaces suivantes :
BM (Paris exclu) 300 000 m2
BCP 90 000 m2
soit environ un milliard de francs courants sur les budgets de l'Etat de 1980 à 1984. C'est ce volet du projet de loi (naturellement essentiel) qui n'a pas été divulgué à l'époque, mais qui a été actualisé en 1981 et publié dans le rapport VANDEVOORDE pour la période 1982-1986.
L'ensemble du projet de 1979 était donc articulé sur le fait qu'à une obligation faite aux collectivités territoriales de faire fonctionner une bibliothèque devait correspondre un engagement financier important de l'Etat. C'est ce qu'on a appelé la mise à niveau avant décentralisation ou le plan de rattrapage ou encore le moratoire de cinq ans, dont la demande a été formulée en 1979 par la Direction du Livre et soutenue pratiquement sans réserve par les organisations syndicales et professionnelles, les partis politiques, la Commission PINGAUD-BARREAU et l'Association des maires de France (Congrès de 1982).
D'une part, les mesures de décentralisation auront les conséquences suivantes sur les bibliothèques publiques, à partir de 1986 :
D'autre part, les conditions de développement seront facilitées par :
Pour ce qui est d'un projet de loi, le Ministère de la Culture exclut désormais qu'un tel projet puisse reprendre deux des dispositions prévues en 1979, à savoir l'obligation faite aux collectivités territoriales d'une certaine importance d'avoir une bibliothèque (ce qui serait politiquement en contradiction avec la loi de décentralisation du 2 mars 1982) et une loi-programme (compte-tenu des importants crédits d'équipement inscrits au budget de l'Etat depuis 1982). Une loicadre resterait cependant utile : c'est l'opinion du groupe de travail sur la décentralisation et les bibliothèques publiques, qui développera ce point de vue dans son rapport.
En ce qui concerne un moratoire, c'est-à-dire un délai d'application des mesures déjà décidées en 1982 et 1983, la question se pose de façon différente selon les domaines :
a) Le transfert des BCP. Prévu pour janvier 1986, le bruit a un moment couru qu'il serait reporté. Ceci supposerait une modification de la loi du 7 janvier 1983 sur les compétences, qui semble totalement exclue.
b) Le changement de statut du personnel des BCP. Le droit d'option entre statut territorial et statut d'Etat devrait intervenir dans les 5 années suivant le 1 er janvier 1984. Compte tenu de ce que les statuts particuliers des personnels territoriaux des bibliothèques ne sont pas encore arrêtés, ce délai devrait normalement être augmenté.
c) L'équipement. Pour les BM, les subventions spécifiques du Ministère de la Culture ne seront allouées que jusqu'en 1985 inclus. Pour les BCP, le financement à 100 % par le Ministère sera prolongé jusqu'à 1986 inclus. Compte tenu des budgets 1982-1984 et des prévisions que l'on peut faire pour 1985 et 86, le programme de 1979 sera réalisé :
Le groupe de travail préconisera l'instauration de subventions à 50 % pour la construction des BCP, jusqu'à la mise à niveau nécessaire.
d) Le fonctionnement et le personnel. Des subventions incitatives pour les BM et les BCP devraient être allouées de façon permanente ou, à défaut, pendant quelques années.
En résumé, les lois de décentralisation et une loi sur les bibliothèques publiques ne sont pas contradictoires mais complémentaires et la suppression des subventions spécifiques et le transfert des BCP ne devraient pas intervenir sans qu'au préalable :