LORS de la conférence de l'IFLA, à Leipzig en 1981, s'était constitué un groupe de travail sur les expositions. Une première réunion eut lieu à Montréal en 1982. Elle fut suivie d'une enquête sur les questionnaires et les réglementations concernant le prêt de documents de bibliothèque aux expositions.
En 1983, à Munich, les résultats de l'enquête furent communiqués et cette année, à Chicago, un projet de recommandations fut proposé et amendé.
Le texte ci-dessous n'est pas définitif. Il sera publié également dans IFLA Journal et dans une revue professionnelle allemande, afin que tous les collègues concernés par ces problèmes puissent y apporter leur point de vue.
Les suggestions et propositions de modification doivent être adressées à Marie-Thérèse VARLAMOFF, Conservateur à la Bibliothèque nationale, Secrétaire du Groupe de Travail sur les expositions 58, rue Richelieu, 75084 PARIS CEDEX 02.
Une version définitive sera élaborée en fonction des réponses reçues. Il est bien évident que ces recommandations concernent surtout les bibliothèques qui sont peu habituées à organiser des expositions, les grandes bibliothèques et les bibliothèques nationales en particulier ayant déjà des réglementations très complètes.
Le succès d'une exposition dépend au départ du soin qui sera apporté à sa réalisation d'où la nécessité de disposer d'un laps de temps minimal pour la préparer. Il semble que neuf mois soient indispensables pour les expositions de petite et moyenne importance (moins de 200 documents, avec moins de 15 % d'emprunts à l'extérieur) et deux ans pour les grandes expositions de renommée internationale comportant un nombre important de documents empruntés.
Ce temps de préparation est nécessaire pour rechercher les documents susceptibles d'être exposés et aussi pour opérer une sélection rigoureuse et déterminer, suivant le type d'exposition (de prestige, ou didactique) et suivant l'état des documents eux-mêmes, si l'on exposera les originaux ou des reproductions.
Soulignons ici qu'une reproduction de qualité, surtout lorsqu'il s'agit de l'agrandissement photographique d'un manuscrit, est souvent plus parlante qu'un original difficilement lisible - le recours au panachage est même recommandé lorsque les originaux sont fragiles, ou concer-vés dans une reliure unique.
Le choix des documents doit obéir à plusieurs critères;
ce qui tend à éliminer les documents non indispensables à la compréhension ou au cheminement logique de l'exposition, à privilégier les documents iconographiques et visuels et à éviter de présenter des documents ayant déjà figuré à maintes reprises dans différentes expositions (certains commissaires ont trop tendance à effectuer leur sélection à partir des catalogues réalisés lors de précédentes expositions).
Suivant le type et l'importance de l'exposition, il faut déterminer la forme et le contenu du catalogue.
Le temps de rédaction des notices doit être pris en compte dans la préparation de l'exposition.
Pour éviter les erreurs, il est nécessaire que le prêteur indique clairement comment il souhaite que soit décrit physiquement le document qu'il prête. Dans le cas d'un catalogue scientifique, l'emprunteur doit s'engager à respecter cette description.
Le lieu d'exposition doit permettre d'accueillir documents et public en toute sécurité. Un lieu clos, spécifiquement réservé à l'exposition et permettant une surveillance constante et efficace, est nécessaire. Ce lieu doit comporter les aménagements indispensables à la protection et à la conservation des documents. Tout organisateur doit avoir soin d'équiper ses locaux contre:
et doit observer les règles de conservation actuellement en vigueur (éclairage restreint - 50 à 150 lux - sur les documents fragiles, taux d'hygrométrie relative aux alentours de 55 %, température constante - entre 18°C et 20°C).
Nous devons attirer l'attention des organisateurs sur le fait que les documents sont en général assez bien surveillés pendant la durée de l'exposition mais qu'ils doivent être particulièrement vigilants au cours de la phase préparatoire et lors du démontage. Une pièce, fermant à clé, équipée d'alarmes et répondant aux normes de conservation, accueillera les documents - principalement les documents empruntés - dès leur arrivée et avant leur accrochage définitif, ainsi qu'après le démontage et avant leur restitution.
Ce stockage des documents en dehors des périodes d'exposition proprement dites est un des points particulièrement importants qu'il convient de souligner.
L'autre point concerne la surveillance journalière, par un responsable des documents prêtés et le retrait immédiat de tout document présentant une altération quelconque.
Les documents de bibliothèques ne devraient pas, en principe, être exposés pendant plus de trois mois consécutifs.
Dans le cas d'expositions itinérantes, ou ayant lieu à plusieurs endroits, il est préférable de sélectionner des documents similaires mais différents pour chacun des endroits.
Si l'assurance peut représenter une dépense très lourde dans le budget global d'une exposition, il est toutefois illusoire d'essayer de s'y soustraire. Tout objet emprunté doit obligatoirement être assuré (à moins que des accords spécifiques aient été conclus et des conventions signées par les deux parties à ce sujet). La valeur d'assurance doit être donnée par le prêteur ou faire l'objet d'un accord écrit entre le prêteur et l'emprunteur. L'assurance doit être prise très largement de manière à tenir compte des délais de transport, de préparation ou d'éventuelle prolongation de l'exposition. L'assurance doit être de type "clou à clou" et couvrir le document depuis son départ de chez le prêteur jusqu'à son retour.
Le transport est un point délicat qui doit être effectué par des spécialistes. Un soin très particulier doit être réservé à l'emballage et aux conditions de conservation pendant le transport. Le convoiement, s'il n'est pas toujours demandé, est cependant recommandé. Il permet d'assurer une surveillance du document pendant le transport, la mise en place du document dans l'exposition et la vérification de la bonne observation des règles de sécurité. Un convoiement bien fait, s'il signifie une dépense supplémentaire pour l'emprunteur, a l'avantage de partager les responsabilités entre prêteur et emprunteur au cas où un litige quelconque interviendrait.
Pour les prêts à l'étranger, le recours à un transitaire agréé par les douanes semble indispensable car les problèmes douaniers sont épineux et souvent insolubles. Il faut toutefois savoir que les services de ces transitaires sont très onéreux.
Lorsque le transport s'effectue en voiture, il est indispensable de prévoir deux personnes dans le véhicule qui ne doit en aucun cas rester sans surveillance. Ceci est valable dans le train. Le convoyeur ne doit jamais abandonner, ne serait-ce que pour quelques minutes, les documents qu'il transporte.
Pour les documents uniques ou très rares, la fabrication d'un microfilm ou d'une reproduction de sécurité est indispensable, les frais incombant à l'emprunteur.
Tout document emprunté devrait faire l'objet d'une fiche d'accompagnement, véritable feuille de route permettant d'indiquer son identification, sa localisation dans l'exposition, son état de conservation dûment constaté à son départ par la bibliothèque d'origine àson arrivée chez l'emprunteur, pendant l'exposition, au moment du décrochage et de l'emballage et à son retour chez le prêteur.
La signature des différents responsables au cours des divers stades de sa manipulation permet de déterminer les responsabilités de tel ou tel service en cas de détérioration ou lors de contestations éventuelles avec les assurances.
Outre son utilité manifeste en cas de litiges, cette fiche d'accompagnement oblige prêteur et emprunteur à examiner avec minutie les documents exposés, examen qui est souvent négligé dans la fièvre des préparatifs ou la bousculade du démontage.
En règle générale, l'emprunteur ne doit apporter aucune modification au document qui lui est prêté. Un document encadré ne doit pas être sorti de son cadre, à moins que le prêteur ait signé une autorisation. Un livre doit être ouvert à la page ou successivement aux pages indiquées par le prêteur.
Aucune restauration ne doit être entreprise par l'emprunteur sauf en cas d'un accord préalable avec le prêteur.
Si l'emprunteur constate une modification quelconque du document lors de l'exposition, il doit retirer immédiatement le document de l'exposition et avertir le prêteur qui décidera de la suite à donner - retour immédiat, restauration éventuelle sur place ou après son retour, ou peut-être nouvelle présentation.
Tous les frais engagés (y compris l'envoi d'un responsable sur place par le prêteur) sont, bien entendu, à la charge de l'emprunteur.
Toute manipulation tendant à modifier l'aspect ou la conservation d'un document prêté doit faire l'objet d'un accord écrit, ceci pour éviter les contestations ultérieures.
Lors de la demande de prêt, le prêteur devra indiquer clairement s'il autorise la reproduction totale ou partielle des documents prêtés et à quelles fins, publicitaires, scientifiques ou commerciales.
Chaque fois que cela est possible, il est préférable que les prises de vue des documents soient effectuées par le prêteur, aux frais de l'emprunteur, afin de limiter au maximum les manipulations de documents par l'emprunteur.
En outre, ce dernier, dans la plupart des cas, a besoin des reproductions longtemps avant l'ouverture de l'exposition. (Catalogue, cartes postales, affiches.)
Le prêteur doit également spécifier s'il autorise les prises de vue télévisée, les films, la fabrication de cassettes. Il doit indiquer les droits de reproduction éventuels et leurs montants.
Toutes ces indications doivent être données par écrits et signées par le prêteur et l'emprunteur.
Toute organisateur doit être conscient que pour reproduire certains documents, il aura à payer des droits d'auteur, droits auxquels il ne pourra se soustraire sous peine de poursuite et qui peuvent attendre, suivant les auteurs ou les artistes, des sommes importantes.
Tout organisateur d'exposition doit établir un budget prévisionnel, qui l'aidera à calculer au mieux ses dépenses après évaluation des recettes envisagées. S'il n'est pas de notre propos de rendre obligatoire la rentabilité des expositions, nous devons toutefois mettre en garde les organisateurs contre les économies qui peuvent paraître fructueuses au départ mais dangereuses au bout du compte.
Aucune économie ne doit être envisagée dans les domaines suivants :
Toutes les dépenses occasionnées par le prêt de documents (encadrement, convoiement, transport, assurance, reproduction, restauration) incombent à l'emprunteur qui doit s'engager à y faire face ou à renoncer à l'emprunt.
Elles doivent malheureusement être envisagées et appliquées avec fermeté mais discernement.
L'emprunteur qui, délibérément, n'aura pas respecté les souhaits du prêteur ou, plus grave, le contrat qu'il a signé avec lui, pourra se voir retirer les documents prêtés à n'importe quel moment de l'exposition, sans contrepartie, à charge pour lui de supporter les frais supplémentaires occasionnées par ce retrait imprévu.
Tout document altéré, détérioré, ou perdu par la négligence de l'emprunteur entraîne sa responsabilité morale, même si les assurances prennent en charge la responsabilité financière. Un emprunteur négligent devrait se voir refuser des prêts ultérieurs.
En cas de litige, le Tribunal sera celui du prêteur.
En règle générale et quelles que soient leur importance et leur rigidité, il faudrait que les réglementations imposées par les bibliothèques prêteuses fassent l'objet avant tout prêt d'une acceptation signée par l'emprunteur. Dans certains cas précis, cette acceptation pourra être accompagnée d'un contrat spécifique, signé des deux parties et concernant tel ou tel document particulier ou telle ou telle exposition.