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La coopération régionale en matière de livres et de bibliothèques

1985

    La coopération régionale en matière de livres et de bibliothèques

    L'exemple de la région Poitou-Charentes

    Par Marie-Simone de Nucé de Lamothe, Conservateur en Chef Bibliothèque universitaire de Poitiers

    La coopération régionale en matière de livres et de bibliothèques est possible lorsqu'un souhait commun s'affirme dans ce sens et que les bonnes volontés pallient les difficultés liées à la complexité et à la diversité des organismes concernés. C'est le cas dans la région Poitou-Charentes où la Bibliothèque universitaire a pu être associée dès l'origine, en avril 1984, au fonctionnement de l'Office du Livre. Celui-ci a été lancé par le Conseil régional, le Centre national des Lettres et la Direction du Livre et de la Lecture. Créé en association, l'Office du Livre, comme l'indiquent ses statuts, «a pour objet de concourir au développement des activités liées au livre et à la dynamisation de la vie littéraire dans la région Poitou-Charen-tes ».

    Dans cette région qui regroupe quatre départements, on trouve une quinzaine d'éditeurs, un réseau d'une trentaine de librairies traditionnelles et de 200 points de vente, une trentaine de bibliothèques importantes et une dizaine de revues littéraires et ethnographiques. Jean-Louis Cordebard, chargé de mission auprès de la Direction du Livre, affirme qu'il a trouvé ici « des professionnels du livre qui ne se connaissaient pas ou peu et il a pensé « qu'il fallait mettre en place un outil, pour créer la notion de solidarité professionnelle et permettre l'élaboration de stratégies communes ».

    L'Office aura vocation à intervenir à divers stades de la vie du livre, tels que la création, l'édition, l'impression, la diffusion, la distribution, la promotion, l'animation, la lecture.

    Il pourra également produire ses propres projets, notamment dans les domaines de la promotion, de l'animation et de l'information. Il s'interdira toutefois de concevoir des projets susceptibles de concurrencer directement des initiatives professionnelles ou associatives.

    Deux instances sont à la tête de l'Office : un conseil d'administration constitué de 16 représentants des collectivités territoriales - Conseil régional et Conseil économique et social - et un comité technique, chargé d'éclairer le conseil d'administration. Celui-ci est composé de 24 professionnels du livre - libraires, éditeurs, écrivains, imprimeurs, bibliothécaires. C'est à ce dernier titre qu'un représentant de la Bibliothèque universitaire participe à ce comité qui s'est déjà réuni plusieurs fois et qui traite toutes les demandes de subvention qui parviennent à l'Office. Celles-ci ont concerné essentiellement l'aide aux revues, à l'édition, à la création et à l'animation.

    L'Office du Livre n'a prévu aucune intervention dans le domaine de la lecture publique puisque, parallèlement, vient de se constituer, tout récemment, une « Association pour la Coopération des Bibliothèques et Centres de Documentation en Poitou-Charentes ». Celle-ci « a pour objet de mettre en oeuvre et développer la coopération dans les domaines touchant l'ensemble des bibliothèques, médiathèques et centres documentaires : formation professionnelle continue, conservation et mise en valeur du patrimoine, information, élaboration de catalogues et bibliographies régionaux, animation, liaison avec le réseau national et toute autre action concertée avec l'ensemble des parties concernées et les pouvoirs publics ».

    L'association est administrée par un Conseil d'Administration composé de 15 membres répartis en 3 collèges de la manière suivante :

    • 6 représentants de l'Etat et des Collectivités territoriales.
    • 6 bibliothécaires et documentalistes.
    • 3 représentants des autres catégories de membres pouvant adhérer à l'Association.

    Le Directeur de la Bibliothèque universitaire a été élu au Conseil d'Administration comme bibliothécaire et il a fait partie du bureau provisoire, le bureau définitif n'étant pas encore élu.

    Comme l'ont précisé les membres du bureau, le rôle de cette association est d'examiner l'opportunité d'organiser la coopération des bibliothèques, des centres de documentation et des organismes de promotion de la lecture dans une structure régionale cohérente, elle-même incluse dans un dispositif à l'échelle du territoire français.

    La coopération elle-même a pour finalité d'améliorer le rendement et l'efficacité des services. Elle doit permettre une meilleure conservation et la mise en valeur de l'ensemble du patrimoine et des documents que les bibliothèques ont pour mission de rassembler et de mettre à la disposition du public.

    De façon concrète, les motifs qui incitent à coopérer sont nombreux :

    • réduire certains coûts de fonctionnement (catalogage, plan d'acquisition des documents).
    • faire face à la croissance et à la diversité de la production éditoriale, particulièrement des nouveaux médias.
    • mettre en commun certaines tâches, chaque établissement apportant une contribution partielle et bénéficiant de la totalité du travail accompli (ex. : catalogage partagé).
    • améliorer le service rendu au public en facilitant et en élargissant l'accès à l'information documentaire et aux documents eux-mêmes.
    • libérer les personnels des tâches répétitives et les rendre plus disponibles pour le service direct du public, permettant ainsi à la bibliothèque de jouer son rôle véritable d'action culturelle.

    Les coopérants - les bibliothèques et les autorités diverses dont elles dépendent - sont des partenaires volontaires, qui peuvent se réunir dans le cadre territorial de la Région ou de plusieurs régions, autour de fonctions définies pour lesquelles ils sont bénéficiaires et/ou prestataires. Ils contribuent au financement de la coopération et en récoltent les produits.

    Le financement ne doit pas entraîner de surcoût de fonctionnement sensible pour les partenaires. Toutefois, une structure de coopération ne peut être mise en place qu'avec l'aide de pouvoirs publics : la Direction du Livre et de la Lecture est prête à subventionner cette installation, mais recherche des partenaires pour une institution qui a une vocation culturelle indiscutablement régionale.

    Que le Centre de Coopération qui sera créé soit Service régional ou Association, il apparait souhaitable qu'une instance consultative soit installée à côté du service technique, Comité consultatif dans le premier cas, Conseil de coopération dans l'autre, assistant le Conseil d'Administration associatif.

    Cette instance serait composée d'élus et de professionnels, à parité, et chargée de veiller au fonctionnement du Centre, tout en tenant compte des compétences spécifiques assumées par le prestataires de service.

    Il conviendra aussi de déterminer si la région Poitou-Charen-tes est un cadre viable pour un tel service, et pour quelle fonctions, ou si l'association avec une autre région n'est pas un facteur positif pour des fonctions telles que l'informatique ou le patrimoine.

    On peut aussi se demander si le Centre doit être une entité dont les divers services fonctionnels peuvent être éparpillés en plusieurs lieux, ou bien constituer un service unique regroupé en un lieu propre et, dans ce cas, quelle implantation est souhaitable pour une meilleure intervention.

    En ce qui concerne le contenu de la coopération, il semble devoir se situer autour de quatre grands axes :

    Patrimoine -

    La coopération doit permettre des traitements d'urgence de fonds patrimoniaux mal conservés, plus ou moins mis en valeur, faute de moyens en personnel et en matériel.

    En matière de conservation et d'élimination, le centre de coopération peut se doter des outils bibliographiques nécessaires, non disponibles présentement dans la région. Si en outre un terminal peut être prévu dans chaque établissement pour permettre l'accès à la base bibliographique, une politique concertée d'élimination sera possible.

    En matière de restauration, les besoins étant énormes, on ne prévoit pas d'atelier mais un service léger qui pourrait avoir un rôle de conseil et d'orientation.

    Catalogues et bibliographies -

    L'automatisation qui devrait permettre à terme une gestion intégrée de multiples fonctions, autorise dès demain le catalogage partagé entre les bibliothèques et la constitution d'une base bibliographique régionale commune, connectée à une base nationale. Le Catalogue collectif des périodiques dont le centre régional a son siège à la Bibliothèque universitaire en est un élément important, déjà en grande partie réalisé.

    Cependant, la présence de matériels et de logiciels différents équipant les bibliothèques de la région risque de compromettre la constitution d'un réseau homogène et d'empêcher une communication totale.

    Il y a donc un problème de compatibilité entre les systèmes en présence qui demande à être étudié car c'est l'avenir même de la coopération qui en dépend en grande partie.

    Animation -

    Une cellule « animation du Centre de Coopération assurerait des fonctions diverses telles que la publication d'un bulletin de liaison, la constitution d'un catalogue des ressources, la mise en service d'un pool de matériel, audiovisuel et d'exposition, avec gestion et service d'entretien.

    Formation professionnelle continue -

    L'intervention du Centre consisterait essentiellement à organiser des stages, en concertation avec le centre professionnel existant qui assure la formation initiale (C.A.F.B.). Il convient donc que le centre soit agréé comme agence pour la formation continue et qu'en relation avec le C.F.P.C., ou l'insitution appelée à le remplacer, il puisse notamment prendre en charge les personnels territoriaux.

    L'Association pour la Coopération des Bibliothèques et Centres de Documentation en Poitou-Charentes a recruté une chargée d'étude qui va travailler pendant six mois pour affiner le projet. Parallèlement, quatre groupes de travail ont été mis en place à la fois pour aider cette personne et pour préciser les objectifs. Il est donc trop tôt pour tirer des conclusions quant aux possibilités de coopération dans cette région et même quant à la forme à donner à celle-ci, structurelle ou non. Cependant, la machine est mise en route, et on peut espérer que les résultats seront positifs car vouloir coopérer, n'est-ce déjà pas une forme de coopération ?