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Gestion et organisation générale d'un fonds de journaux

1987

    Gestion et organisation générale d'un fonds de journaux

    Par Else DELAUNAY, Conservateur responsable du Catalogue général des périodiques Bibliothèque nationale.
    L'exposé ci-dessous a été prononcé à l'occasion du Premier Symposium international sur la conservation et la communication de la presse tenu à Londres du 12 au 15 août 1987, et organisé par le Groupe de travail IFLA sur les journaux (IFLA Working Group on Newspapers). Il s'agissait de présenter ce que doivent être la gestion et l'organisation d'un fonds de journaux compte tenu des connaissances actuelles et des moyens techniques disponibles dans ce domaine. Le sujet, très général, a été traité à la lumière de l'expérience acquise par l'auteur au Service de la conservation du Département des Périodiques de la Bibliothèque nationale, d'une part, au Service du Catalogue général des Périodiques de ce même établissement, de l'autre. Etant donné que les problèmes et la politique concernant le microfilm étaient traités par d'autres participants au Symposium, l'auteur a préféré s'étendre plus longuement sur tous les problèmes suscités par la conservation de ce document si particulier et si fragile qu'est le journal.

    Décidé dès 1936, établi en 1942, mais ouvert seulement en 1945, le Département des Périodiques doit recevoir, enregistrer, cataloguer, conserver et communiquer l'ensemble de la production périodique française, celle-ci étant déposée à la Bibliothèque nationale conformément à la loi sur le Dépôt légal. Il va sans dire que le dépôt de cette production était effectué à la Bibliothèque nationale bien avant 1945 mais, alors, le seul Département des Imprimés, avec le Service général du Dépôt légal, était chargé de toutes les opérations. Actuellement, le Département des Périodiques comprend 135 agents et 13 vacataires sous la direction de Mlle Le Nan, conservateur en chef. Il reçoit quotidiennement environ 6000 fascicules (la loi prévoit le dépôt de 4 exemplaires d'éditeur et de 2 ou de 1 exemplaire d'imprimeur). La conservation des fonds est répartie entre Paris et Versailles.

    A Paris, le département est à la fois installé sur le site Richelieu et sur le site Vivienne (inauguré en décembre 1985). Sur le site Vivienne se trouvent le Dépôt légal des périodiques et les services de catalogage informatisé (Bibliographie de la France, Supplément! : Publications en série, et CNEPS), sur le site Richelieu : la salle de lecture, les magasins, les services de catalogage rétrospectif et le Service des périodiques étrangers. L'effectif à Paris comprend 113 agents et 10 vacataires. Les magasins à Paris occupent à peu près 14 000 mètres linéaires et l'accroissement annuel est d'environ 380 m. Y sont conservées toute la presse d'importance nationale et les revues principales.

    A notre annexe de Versailles sont conservés et communiqués environ 80 % des périodiques après enregistrement dans les services du Département à Paris. L'annexe est composée de 3 bâtiments de 10 étages chacun, dont le premier fut inauguré en 1934, le second en 1962 et le dernier en 1970. L'annexe occupe aujourd'hui 21 agents et 3 vacataires sous la direction de Mme Olivier. L'accroissement annuel des collections, qui est d'environ 450 m, comprend, d'une part, les revues techniques, syndicales, professionnelles, d'associations diverses, les journaux pour enfants, les quotidiens français de province et les quotidiens étrangers, d'autre part, des revues étrangères, des annuaires, les périodiques d'outre-mer, les bulletins paroissiaux et municipaux. Le métrage linéaire est d'environ 46 000 m. La salle de lecture à Versailles est ouverte tous les jours, sauf le lundi, et elle comprend 40 places. C'est dire l'importance de cette annexe pour le Département des Périodiques.

    Dès à présent, les magasins à Paris et à Versailles sont pratiquement saturés. C'est pourquoi il a fallu penser à d'autres "annexes". Dans le cadre du "Plan de sauvegarde", depuis 1980, des crédits importants ont été accordés à la Bibliothèque nationale, ce qui a permis la mise en place de deux nouveaux centres. L'un est à Sablé à 300 km à l'ouest de Paris et il est particulièrement chargé de la restauration et du microfilmage des livres. L'autre, à Provins à 100 km à l'est de Paris, est aménagé pour la conservation de la presse et la reproduction des éditions locales de la presse quotidienne régionale courante, ainsi que pour la restauration des journaux anciens par thermocollage et pour le microfilmage. Le Centre de Provins, qui occupe actuellement 19 personnes et dont le métrage linéaire des magasins est à présent de 1800 m, travaille pour le Département des Périodiques.

    Cette brève présentation de l'ensemble de notre département était nécessaire avant d'entrer dans le vif du sujet qui est la gestion et l'organisation générales d'un fonds de journaux en 1987 avec tous les problèmes que celles-ci comportent : acquisitions, besoins des lecteurs, conservation, communication, ressources financières... J'ai passé moi-même de très longues années au Département des Périodiques, principalement dans le secteur du catalogage rétrospectif (ce qui, hélas, m'a permis de suivre la dégradation impitoyable des collections consultées pour le besoin du catalogage), mais aussi au Service de la conservation.

    CONSERVATION ET RESTAURATION

    Au Service de la conservation, j'ai été tout particulièrement confrontée avec la détérioration des journaux anciens, quotidiens ou hebdomadaires, de grand format. Notre fonds au Département des Périodiques commence aux alentours de 1800. Si l'usure due à la consultation a été sévère, malgré des collections bien reliées et communiquées dans des conditions convenables, il faut bien reconnaître que la qualité très médiocre du papier journal, depuis 1860 environ, a rendu la conservation très précaire. Nous savons tous désormais que le papier à base de pâte de bois a une teneur en résidu acide qui augmente avec les années. Cela fait qu'au bout de cinquante ans, les marges ont jauni et sont devenues friables et qu'après cent ans, le papier se casse et s'émiette, ce qui rend toute restauration extrêmement difficile et, de ce fait, onéreuse. A cela s'ajoute la dégradation due à la pollution industrielle à laquelle sont soumises la plupart des grandes villes.

    Il semble bien que, depuis quelques années, nous sommes arrivés à un point de rupture. La désacidification est devenue la grande affaire pour toutes les bibliothèques qui possèdent des fonds de journaux et de livres anciens.

    Par conséquent, pour gérer un fonds de journaux, le premier souci est incontestablement la conservation des documents puisque, sans conservation correcte, il n'y a pas de communication possible et que, de ce fait, le lecteur ne peut avoir accès à l'information à laquelle il a droit et dont il a besoin pour ses propres recherches.

    A la Bibliothèque nationale qui est responsable de la sauvegarde du patrimoine national, nous avons uni tous nos efforts, mais ils sont encore insuffisants, pour assurer la conservation de notre fonds de journaux publiés en France et reçus par dépôt légal. Seules, les collections conservées à Paris (sur le site Richelieu) sont reliées ; à Versailles, elles sont gardées, dépliées, dans des cartons.

    La conservation, telle que nous la concevons aujourd'hui et dans la mesure de nos moyens financiers, comporte plusieurs éléments, majeurs ou mineurs. J'en parlerai assez brièvement ici car ce sont là des exigences et aussi des difficultés qui sont connues de tout bibliothécaire chargé de la conservation de journaux. J'essaierai pourtant d'être aussi complète que possible dans mon énumération.

    Eléments de conservation

    Surveillance régulière des collections :

    • vérifier régulièrement l'état des journaux (papier, reliure, etc.), évaluer l'usure due à la communication ainsi que l'avancement de la détérioration provoquée par la teneur en résidu acide du papier et par la pollution ;
    • surveillance permanente des conditions atmosphériques dans les magasins où sont stockés les collections : humidité, température, lumière...
    • Détection de parasites et de moisissures...
    • Dépoussiérage.

    Les diverses dégradations étant constatées il faut entreprendre la remise en état des documents, autrement dit la restauration.

    Celle-ci peut être d'ordre mineur. De ce fait, un petit atelier de restauration attenant aux magasins est fort utile. Celui-ci peut rapidement réparer les petites détériorations telles que déchirures, parties de reliure endommagées ou usées, pliures malencontreuses, etc. Ici, nous pensons surtout aux dégâts provoqués par la consultation des documents, qu'ils soient anciens ou récents.

    En revanche, la dégradation du papier due à une trop forte teneur en acide concerne tous les journaux publiés après 1860 et celle-ci nécessite une restauration lourde. Le papier journal est d'une qualité particulièrement médiocre ; d'autre part, leurs grandes dimensions rendent les journaux plus fragiles. Même si un journal relié a été peu consulté à travers les années, il va jaunir, le papier devenant sec et friable. Alors il doit absolument être restauré si l'on veut espérer le conserver. La désacidification et parfois aussi la désinfection sont devenues indispensables.

    Arrivée à ce point, il me faut parler du "Plan de sauvegarde" élaboré par la Bibliothèque nationale de 1978 à 1980. Depuis 1980, le Gouvernement français accorde à la Bibliothèque nationale, pour la sauvegarde de ses collections, des crédits supplémentaires de l'ordre de 10 millions de francs par an. Dans le cadre de ce Plan, un certain nombre d'estimations avaient été faites pour connaître les besoins financiers d'un tel programme de sauvegarde : restauration, microfilm, microfiche, etc. Pour ce qui concerne les seuls journaux, on a estimé que 40 millions de feuilles devraient être traitées (doublage et microfilmage). C'est donc une masse énorme à laquelle nous devons faire face.

    Ici, je me permettrai de vous citer quelques chiffres très éloquents calculés par la responsable du Centre de Provins, Mlle de Lépiney.

    Le doublage effectué par l'Atelier central de restauration à Paris mais surtout dans notre Centre de Provins consiste à recouvrir recto-verso chaque feuille (après désacidification manuelle par immersion) avec un matériau transparent (en l'occurrence une feuille de polyamide "Cerex") au moyen d'une machine dite "reliante". Chaque machine nécessite le travail d'un effectif de 6 à 9 personnes tournant à temps complet. A Provins, on a estimé que 160 000 feuilles pourraient ainsi être "doublées" chaque année. Le coût moyen du doublage d'une feuille étant d'environ 30,00 francs, il apparaît que le doublage des 40 millions de feuilles reviendrait à 1 milliard 200 millions de francs et qu'il représenterait 205 années-machine de travail à plein temps. Actuellement, la Bibliothèque nationale ne dispose que de trois machines "reliantes". Avec un tel équipement qui serait utilisé seulement pour les journaux, le doublage nécessiterait donc 83 ans de travail et cela si les machines travaillaient à plein temps, ce qui n'est nullement le cas. A présent, une seule machine "reliante" (celle de Provins) est affectée à 100 % aux périodiques ; elle a permis de doubler 300 000 feuilles depuis 1981. Si l'on voulait accélérer le doublage et établir un programme sur 5 ans pour doubler les 40 millions de feuilles, il faudrait disposer de :

    • a) 50 machines "reliantes",
    • b) 300 à 450 personnes,
    • c) environ 240 millions de francs par an pour le seul doublage, outre les crédits de fonctionnement, le montant des salaires des employés, etc.

    Il n'est pas besoin de vous dire que la Bibliothèque nationale ne sera jamais en mesure de réaliser un tel programme, d'autant plus que nous traversons, depuis plusieurs années déjà, une période de restrictions budgétaires (personnel, crédits de fonctionnement, etc.).

    Ce qui est sans doute plus inquiétant encore, c'est que, dans dix à vingt ans, ces 40 millions de feuilles non restaurées seront pratiquement irrécupérables à la fois pour la restauration et le microfilmage.

    S'il est vrai que nos préoccupations immédiates portent avant tout sur les collections anciennes, il demeure que celles qui se constituent chaque jour poseront elles-mêmes des problèmes rapidement. Il est donc d'une importance majeure de disposer très vite d'un moyen de désacidificaiton de masse et pour grands formats. Au Canada, on pratique une telle désacidification pour les livres avec le système Wei T'o ; en France, et en collaboration avec les Etats-Unis (la Bibliothèque du Congrès), un système rappelant celui du Canada a été mis au point pour permettre la désacidification simultanée de 600 volumes in-8° (d'environ 400 pages chacun). Un autoclave (dimensions : 80 x 80 x 130 cm) a été installé au Centre de Sablé et le système devrait être opérationnel prochainement. Il pourra être adapté pour la désacidification de volumes grand in-folio en modifiant les paniers où sont entreposés les documents. Il est encore trop tôt pour évaluer la capacité réelle de ce dispositif pour la désacidification massive des journaux. Si toutes les collections anciennes doivent absolument passer par un tel traitement avant restauration, les collections récentes devraient aussi être désacidifiées avant leur conservation en magasin pour prévenir leur dégradation ultérieure.

    Préservation et restauration sont donc des éléments majeurs de conservation.

    Mais il est évident qu'ils seront d'autant plus efficaces qu'ils seront accompagnés d'un autre élément essentiel de conservation : le microfilmage systématique des documents restaurés. Il est toujours préférable de réaliser le microfilm avant restauration mais, dans bien des cas, les journaux sont dans un tel état que leur restauration préalable apparaît indispensable. Cette fois encore, je ne peux entrer dans les détails. Je me contenterai de dire combien il importe, dans toute gestion de fonds de journaux, de mettre en place une véritable politique de microfilm, et notamment pour les collections à restaurer. Le microfilm protège les collections puisqu'il remplace le document original; il permet de stocker l'original dans un lieu éloigné de la salle de lecture et de la bibliothèque même, ce lieu pouvant être spécialement aménagé pour recevoir des collections de journaux, ce qui a lieu actuellement avec le transfert à Provins de nos collections de. journaux entièrement microfilmées.

    Autre élément de conservation : la reliure. Elle protège contre l'usure consécutive à la manipulation des documents. Toute la presse nationale publiée à Paris et quelques grands journaux régionaux ont ainsi été systématiquement reliés à la Bibliothèque nationale. De la reliure classique, très coûteuse aujourd'hui, nous sommes passés à une reliure industrielle : la reliure Aclé, dont le coût est peu élevé et le montage rapide (en 2 heures, 2 relieurs peuvent monter un volume comprenant la parution sur 2 mois d'un quotidien européen). Il s'agit là d'une reliure constituée par des cahiers faits de plusieurs numéros agrafés ensemble, puis assemblés à l'aide de pinces métalliques, elles-mêmes fixées à la reliure avec des tringles métalliques. Les plats de la reliure sont en carton neutre et recouvert de papier neutre, le dos est en toile. Un tel système présente des avantages évidents : montage rapide, coût modique (environ 140,00 francs la reliure), possibilité de relier sans disposer de la totalité des numéros pour la période concernée (il est facile d'insérer le numéro manquant lorsqu'il arrive), possibilité d'ouvrir complètement le volume en cas de microfilmage (l'onglet dont est pourvu chaque numéro au cours du montage permet en quelque sorte d'élargir la marge de fond).

    Toutefois, cette reliure est encore trop chère pour pouvoir être appliquée à l'ensemble des journaux reçus par la Bibliothèque nationale. Aussi avons-nous adopté d'autres méthodes pouvant fournir une protection suffisante: les journaux, dépliés et bien serrés, sont conservés dans des cartons aux dimensions du journal. Ces cartons sont en fibre cuir armé 1750 gs conforme aux clauses techniques, ph 7 ; ils sont fabriqués par la Société Cauchard. La majorité des journaux à l'Annexe de Versailles, sont, ou seront, gardés dans de tels cartons. Il sera préférable de conserver les cartons à plat sur les rayons mais, pour des raisons matérielles, ils sont conservés verticalement comme les journaux reliés. Pour la consultation, les cartons entraînent des manipulaions supplémentaires puisque le comptage des numéros, avant et après consultation, est nécessaire. En revanche, quand les collections ont été microfilmées, les originaux sur papier peuvent parfaitement être conservés dans ce type de carton qui fournit alors une protection tout à fait suffisante.

    Cependant, faut-il ajouter que l'état même des magasins qui doivent abriter les collections de journaux est un point tout aussi important. Les conditions atmosphériques, la lumière et l'environnement doivent être rigoureusement contrôlés. Mais ces problèmes sont connus de tous. Je ne ferai donc que les rappeler brièvement ici.

    Température et humidité : il faut disposer d'un nombre suffisant de thermo-hygromètres (suivant le cubage des magasins) pour surveiller sans cesse ces deux facteurs essentiels dans la conservation des documents.

    Lumière : il est également important de disposer d'un luxmètre pour mesurer les radiations lumineuses et veiller ainsi à ce que les documents soient protégés contre la lumière qui ne doit pas dépasser 50 lux.

    Environnement : le pollution urbaine notamment représente des risques pour le papier qui s'acidifie sous son influence. Il y a aussi les risques de moisissure, de prolifération d'insectes, etc. Dans ce cas, il sera nécessaire de désinfecter les locaux ainsi que les documents qui s'y trouvent ou qui y entrent.

    Enfin, il est important que le personnel de magasinage et de communication soit bien formé puisqu'il est quotidiennement en contact avec les documents et joue de ce fait un rôle capital : surveiller l'évolution de l'usure et de la dégradation, effectuer le relevé des thermo-hygromètres, signaler la présence de parasites, faire le récolement des collections, dépoussiérer régulièrement, signaler les reliures abîmées, les pages déchirées, etc., surveiller la consultation en salle de lecture.

    Photocopie. Pour ce qui concerne les journaux, la photocopie est interdite à la Bibliothèque nationale en raison du format même des journaux. En revanche, grâce au lecteur-reproducteur, il est possible d'obtenir des photocopies à partir d'un microfilm.

    QUESTIONS

    Ce que je viens d'évoquer au sujet de la conservation et de la restauration des journaux anciens, particulièrement à propos des chiffres astronomiques correspondant aux besoins évalués à la Bibliothèque nationale, m'amène tout naturellement à la réflexion qui, aujourd'hui, s'impose de plus en plus aux conservateurs des grandes bibliothèques nationales dans le monde : peut-on réellement envisager la désacidification et la restauration de telles masses de documents ? Aura-t-on la possibilité de les stocker (le doublage augmente de 75 % environ l'encombrement des collections) ?

    En attendant la réponse, la dégradation des journaux s'accélère. Les collections qui ont été microfilmées, mais non désacidifiées, sont conservées dans un état souvent misérable. Seules, les collections restaurées avant microfilmage sont à l'abri. Devant une production sans cesse plus envahissante peut-on continuer à tout conserver sur papier, dans la forme originale des documents ? Les conservateurs que nous sommes, doivent-ils, dès à présent, et après réflexion approfondie, envisager, et même programmer, la destruction complète, ou partielle, des collections sur papier (les originaux), lorsque celles-ci ont été entièrement microfilmées, et en respectant scrupuleusement les règles stipulées dans la norme internationale sur le microfilm et son stockage ? Ne faudrait-il pas alors conserver des spécimens sur papier ou la collection complète de certains titres comme témoins ? Ne pourrait-on encore imaginer une nouvelle répartition des tâches, certaines bibliothèques régionales devenant responsables de la conservation, de la restauration et du microfilmage des journaux publiés dans la région considérée ? Chaque pays aurait-il seulement la charge de conserver et de restaurer sa presse propre et, éventuellement celle provenant de ses territoires d'outre-mer, anciens et présents ? Ne pourrait-on restituer certains titres étrangers au pays d'origine lorsque celui-ci n'en possède aucune collection originale, ou seulement une collection incomplète ? Autant de questions qui prouvent qu'une nouvelle politique en matière de conservation de la presse doit être mise en place. Il est donc urgent d'ouvrir le débat, de connaître les difficultés et, peut-être, les solutions choisies ici et là, bref, de susciter une réflexion commune permettant de dégager quelques lignes de conduite susceptibles d'aider chacun à mieux déterminer une politique nationale dans ce domaine.

    Il est clair que les bibliothèques nationales recevant les documents en dépôt légal doivent avancer avec prudence pour plusieurs raisons ; je voudrais citer ici quelques passages d'un article d'Albert Labarre, conservateur en chef du Service de la conservation et de la restauration de la Bibliothèque nationale, sur les "Causes et Finalité de la Conservation" (paru dans Liber en 1985) :

    "Plusieurs raisons militent pour la conservation des originaux, entre autres :

    • des raisons juridiques : l'exemplaire du dépôt légal doit être celui qui restera pour porter témoignage quand tous les autres auront disparu ;
    • des raisons techniques : les supports des microformes et des reproductions ne sont pas plus assurés de la pérennité que le papier, et il est possible que l'on prenne moins de soin d'une reproduction que d'un original. Aussi est-il indispensable de pouvoir recourir à l'original quand il est nécessaire de renouveler une reproduction.
    • des raisons intellectuelles : il y a des recherches particulièrement intéressantes qui ont besoin de recourir à la matérialité de l'original...".

    Voici rapidement évoqués les problèmes aigus qui se posent à ceux qui ont la charge de gérer, de conserver et de communiquer des collections de journaux. Je pense que notre Symposium offre une occasion idéale pour ouvrir enfin le débat sur cette question vraiment primordiale. Ici aussi, la coopération internationale apparaît précieuse et même indispensable.

    BIBLIOGRAPHIE :

    1) Albert Labarre: Le Plan de Sauvegarde des Collections de la Bibliothèque nationale 1980-1985. Note établie en juin 1986.

    2) Albert Labarre : Causes etfinalité de la Conservation in Liber 1985, n° 24.

    3) Désacidification à la Bibliothèque in Nouvelles de la Bibliothèque nationale [du Canada], marslavr. 1982, vol. 14, n°3/4.

    4) Joyce M. Banks : Note sur la désacidification de masse à la Bibliothèque nationale du Canada, Ottawa, 1985.

    5) Richard D. Smith : Progress in mass désacidification at the Public Archives, in Canadian Library Journal, Decem-ber 1979, vol. 36, n°6.

    6) Diverses notes établies par le Centre de Sablé (J.M. Arnoult et coll.) pour les besoins du stage de conservation prodigué par ce centre depuis 1984.

    7) Lionelle de Lépiney : Rapport annuel des activités du Centre de Provins en 1985 ; éléments de note établis en août 1986.

    8) Françoise Bony : Conservation : l'exemple de la Bibliothèque du Congrès in Livres Hebdo, 20 janv.1986, n° 4, p. 62-64.

    9) I.P. Gibb, S.P. Green Considérations relating to the Rétention or Disposai by the British Library of Newspaper after Microfilming, in Minutes of the Second Meeting [ ofthe British Library Consultative Group on Newspapers] , British Library, Novem-ber 1983.

    10) S.P. Green : The British Library' s Newspaper Library in a New Era, in Journal of Newspaper and Periodical History, winter 1984, loli1, n°l.

    11) E. Johansson : The British Library Newspaper Library : Looking Ahead, in Journal of Newspaper and Periodical History, Summer 1986, vol. II, n° 3.