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Des acquisitions en bibliothèque publique

1996
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    Des acquisitions en bibliothèque publique


    Avant d'aborder ce problème important que sont les acquisitions de documents en bibliothèque publique -municipales, départementales - il est bon de redéfinir rapidement ce que sont les objectifs, les missions de ces services territoriaux que sont les bibliothèques, leurs usagers, et leurs usages aujourd'hui (1) . Selon le Manifeste de l'Unesco sur les bibliothèques publiques, selon la Charte des bibliothèques rédigée par le Conseil supérieur des bibliothèques en 1992, les bibliothèques publiques sont le lieu fondamental, pour toute la population d'une collectivité territoriale, de la mise en circulation et de la diffusion d'informations, de formation, de loisirs et de culture sur des documents sur tous supports. Le rôle de la collectivité qui la gère, est d'assurer le bon fonctionnement de ce service public, au service de tous les habitants, dans le respect de la diversité des opinions et des courants de pensée de chacun - et cela va de soi des lois de la République.

    Les acquisitions de livres, en particulier, ont ces dernières semaines suscité l'intérêt des médias la question étant de savoir qui est en charge de mener une politique d'acquisitions en bibliothèque, qui a la responsabilité de la signature des bons de commande.

    La responsabilité des élus

    Dans le respect des lois, les élus territoriaux définissent, dessinent les orientations de la politique de leur collectivité. Cette politique est en particulier définie par le vote du budget, moment privilégié de la décision politique, et par le recrutement des personnels territoriaux qui seront chargés d'appliquer au quotidien les orientations définies par les élus.

    Quand il s'agit pour une bibliothèque de décider la création ou l'extension d'un service - fonds spécialisé, discothèque, logithèque, formathèque, etc. les élus en sont pleinement responsables. Il s'agit en effet de définir une politique culturelle, au plein sens du terme, de proposer à leurs administrés, sur les fonds publics, de rendre à tous un service nouveau, ou redéployé, ou étendu. Il s'agit de définir les priorités que s'est données la collectivité. Nul ne le contestera : il s'agit là du strict respect de la démocratie.

    La responsabilité des bibliothécaires

    Le rôle du fonctionnaire, conservateur, bibliothécaire, et de l'ensemble de l'équipe professionnelle de la bibliothèque est à la fois d'être le conseil technique pour la mise en place des services, d'être également force de proposition à la lumière de compétences régulièrement mises à jour, et de suivre au quotidien la mise en place et le développement du service dont il a la charge.

    Les acquisitions de documents font partie intégrante de cette responsabilité. Le professionnel des bibliothèques a acquis les connaissances nécessaires pour se repérer dans la masse tous les jours grandissante des documents en vente : 40000 livres en France chaque année, dont 8000 ouvrages pour la jeunesse, 20 000 ouvrages inédits, et 8 000 rééditions environ.

    Au contact des publics de la bibliothèque - centrale et bibliothèques de quartier - les bibliothécaires connaissent les demandes du public, les lacunes de leurs collections, les points forts, les sujets d'intérêt. Mais ils doivent aussi présenter une collection cohérente, et pourtant diverse dans ses thématiques (on dit encyclopédique), qui puisse s'adresser à des usagers de niveau d'étude et de lecture différents.

    Cela, c'est la mise en oeuvre au quotidien de la politique générale d'acquisitions. Suivi quotidien des publications, lecture de critiques dans des journaux et magazines de toutes sortes, évaluation de la collection existante -sa fraîcheur, son obsolescence dans certains domaines, les demandes satisfaites et insatisfaites - écoute des demandes des lecteurs, prise en compte des suggestions d'achats, tous ces éléments entrent en compte dans la décision d'achat d'un ouvrage, ou de non-achat. Car il faut évidemment tenir compte du budget d'acquisitions voté par l'Assemblée délibérante (Conseil municipal ou général) et écarter souvent avec regrets de bons ouvrages, parfois trop spécialisés, parfois parce qu'ils font « doublon"avec d'autres déjà présents...

    Notre association, dès sa création en 1906, a insisté et insiste encore sur une formation professionnelle initiale et continue de tous les personnels des bibliothèques, quelque soit leur niveau dans la hiérarchie. Car, les acquisitions en bibliothèque, c'est tout cela, et c'est aussi beaucoup de soin, de réflexion d'équipe, de discussions entre collègues, et avec les lecteurs. Les achats de livres ne peuvent être jugés avec le seul prisme de l'orientation politique de leurs auteurs, ou des thèmes ; ils doivent servir l'objectif fondamental de la bibliothèque : ouvrir les yeux sur le monde, pour aider à mieux en comprendre les évolutions, pour aider chacun à mieux y trouver sa place, mais aussi à trouver distraction, loisirs, et aliment à ses curiosités.

    Les bibliothécaires sont les mieux à même de remplir ces fonctions dans le respect de tous leurs lecteurs, de leurs opinions et de leurs demandes, et dans le respect des orientations générales fixées par leurs autorités élues.

    Association des bibliothécaires français septembre 1996

    1. Article paru dans la Gazette des Communes. retour au texte