La bibliothèque Leninka, deuxième plus grande bibliothèque du monde après la Bibliothèque du Congrès, a ouvert son site (en russe pour le moment : www.rsl.ru) le 24 novembre 1999 dans un contexte difficile : salaires non versés depuis des mois, délabrement des bâtiments. Elle fournira des documents en ligne, point trop gênée par les peu contraignantes dispositions russes sur le copyright, et doit encore numériser 97 °/o de son catalogue d'ici à 2002, avant d'être mise en réseau avec cinq autres bibliothèques d'études et de recherche. (Libération du 10 décembre 1999, p. 35.)
Des producteurs indépendants donnent de l'air au marché de la musique, cadenassé par les cinq « majors » qui en contrôlent 80 Ofo, en proposant des diffusions gratuites sur Internet et en récoltant en ligne les maquettes de nouveaux groupes. Leur rémunération sera assurée par les droits dérivés et le produit des tournées (www.stargic.com, www.cosmic.cdnow.com, www.farmclub.com). La firme Samsung fait de même pour vendre son baladeur MP3 (www.yepparty.com) et drague les petits labels techno. (Libération du 10 décembre 1999, p. 34-35.)
« Jamais je n'aurais pu mettre 65 fois 120 F dans l'achat de ces disques. Si je n'avais pas eu la possibilité de les copier, je ne les aurais pas achetés », déclare pour sa défense un des prévenus d'une affaire de piraterie de CD à petite échelle, dans laquelle la SCPP évalue le préjudice à 120 000 F, pour un « bénéfice » de 4 000 F du côté de l'accusé revendeur. (Libération du 22-23 janvier 2000, dans un dossier sur la question).
Les Éditions des Femmes suspendent leur production de livres : 500 titres ont été publiés depuis 1973. La collection de textes enregistrés « La Bibliothèque des voix continue. (Le Monde du 3 février 2000.)
Au détour d'un erratum de bonne volonté diffusé par le (bon) docteur Bréchot sur Biblio-fr, nous apprenons avec consternation le 29 février 2000 que l'index général auteurs du Bon Jardinier est lacunaire, mais aussi que ce monument de l'érudition, de l'agriculture et de l'édition française disparaît avec la 153e édition. Flammarion explique que la société ayant composé l'ouvrage n'existe plus, que la plupart des auteurs sont décédés et que l'ouvrage ne sera pas réédité car il ne répond plus aux attentes. Encore une preuve du courage des éditeurs français. Avis aux éditeurs belges.
www.reseau-kemal.com met en ligne, et donne gratuitement à consulter et à télécharger, des oeuvres inédites. Si l'internaute est content, il verse de lui-même une rémunération partagée entre l'auteur (80 °/o) et l'éditeur (20 o/o). Car éditeur il y a : les auteurs signent un contrat sans exclusivité, le comité de lecture de l'association ne retient que 20 °/o des textes qui lui sont adressés et jure qu'il lit tout, à la différence de l'édition traditionnelle. Mais les textes en ligne disparaissent quand ils trouvent un éditeur papier...
Le Syndicat de la librairie ancienne et moderne organise en novembre, en alternance avec la Foire internationale du livre ancien de Paris, qui se tient tous les deux ans, une vente en ligne (www.slam-livre) au cours de laquelle chaque « stand » présente de façon détaillée vingt ouvrages. (Le Figaro du 10 décembre 1999.)
Divers articles parus en fin d'année 1999 font état de lacunes inquiétantes dans l'indexation du Web : aucun moteur de recherche ne couvrirait plus de 1 6 °/o des 800 millions de pages existantes, les auteurs de sites négligeant généralement d'utiliser les métatags de description et les standards de métadonnées. (Archimagr\° 127.)
Archimag publie dans son numéro de septembre 1999 (n° 127, p. 20-26) les résultats de son enquête sur les utilisations d'Internet en documentation. Nous vous renvoyons à la publication pour en prendre connaissance et ne retiendrons ici que quelques faits : l'autoformation est très majoritaire, Internet est devenu le principal mode de recherche complémentaire des sources d'information imprimées, les outils le plus fréquemment utilisés sont les mêmes que ceux du grand public (Alta Vista et Yahoo arrivant loin devant les autres moteurs), mais ils sont relativement moins utilisés que le recours à des sites favoris déjà connus, en particulier les sites gouvernementaux et ceux de la presse généraliste.
« Florence, 26 ans, responsable du projet, n'aime pas être qualifiée de documentaliste : ce terme renvoie trop à la documentation classique et aux bibliothécaires, explique-t-elle... Nous sommes des indexeuses. » Ainsi se définissent les petites mains du Web, qui classifient à la main par thème les sites référencés sur l'annuaire en ligne de Lycos. On devient indexeuse avec une bonne culture générale, attestée par un deuxième cycle universitaire, et apparemment on débute au SMIC. C'était dans Le Monde du 9 février 2000 (Le Monde interactif, p. Il) et les annonces de recrutement sont sur Lycos.fr. Chez d'autres employeurs, ils (elles) sont payé (e) s à l'heure sous un statut de travailleur indépendant ou au nombre de sites répertoriés. Dans la même page, une liste de sites sur le cybertravail.
En 1988, le ministre de l'Intérieur a interdit par arrêté la diffusion en France du livre Euskadi en guerre, dont 2 000 exemplaires avaient été saisis par la douane à la frontière franco-espagnole quelques mois plus tôt. Car, s'il n'existe plus de censure administrative en France (à l'exception de celle prévue par la loi de 1949 sur les publications pour la jeunesse), un décret-loi de 1939, toujours en vigueur, permet l'interdiction de la diffusion d'ouvrages étrangers.
En 1997, après neuf ans de procédure, le Conseil d'État a fini par annuler l'interdiction ministérielle en déniant toute dangerosité à l'ouvrage en question. Les plaideurs sont allés plus loin et ont porté l'affaire devant la Cour européenne des droits de l'homme, pour attaquer le décret-loi en question comme contraire aux droits de l'homme et à la liberté d'expression. Celle-ci rendra prochainement son arrêt. (Libération du 19 janvier 2000.)
La presse nationale relatait début février l'expulsion et l'interdiction de séjour en Tunisie de l'éditeur (Aloès) et enseignant français Jean-François Poirier, après de multiples menaces et pressions. Livres Hebdo du 25 février 2000 complète l'enquête. « À chaque intimidation, je m'adressais aux ambassades et aux autorités françaises. Je n'ai jamais obtenu de réponse... », précise l'expulsé. Même attitude du Quai d'Orsay face aux demandes d'informations de Livres Hebdo.
Libération du 28 janvier fait état de la déprogrammation de dernière minute de la séquence consacrée à la SACEM dans une émission de France 2 sur la spoliation des biens des Juifs réalisée par un producteur indépendant. (p. 33).
La Cour des comptes publie avec son rapport annuel les conclusions d'une enquête réalisée en 1997 sur l'utilisation des crédits du titre IV du ministère de la Culture (subventions aux associations et aux collectivités locales). Elle déplore « la reconduction tacite des subventions... sans réexamen, l'insuffisance du dispositif de contrôle, ainsi que la centralisation excessive de la gestion des crédits » et « le détournement ponctuel du statut associatif utilisé pour fédérer les initiatives des collectivités locales et de l'État ». (La Gazette des communes du 24 janvier 2000, p. 15.)
Dans La Gazette des communes du 6 décembre 1999, un dossier sur la délégation du service public à des associations rappelle quelques conditions (mise en concurrence) et quelques limites, dont celle-ci : le département des Pyrénées-Orientales a été empêché par la Cour administrative d'appel de déléguer à une association la gestion d'archives départementales, en application de la loi du 13 janvier 1979 sur les archives. Rappelons que La Gazette donne gratuitement accès en ligne sur son site au texte intégral de ses articles pendant une période « provisoire ». Merci La Gazette.
Les bibliothèques de lecture publique britanniques, qui ont toujours été montrées comme un modèle à suivre ici, connaissent les mêmes difficultés que celles du continent : réductions de budget qui entraînent des restrictions dans les acquisitions et dans les heures d'ouverture. Cette triste annonce est contrebalancée par le fait qu'une manifestation de personnalités connues et d'écrivains s'est tenue devant les Communes pour soutenir les bibliothèques. [Le Monde du 3 mars 2000.)
Autre agréable nouvelle, l'ouverture à Peckham, un quartier défavorisé de Londres, d'une bibliothèque de lecture publique dont l'architecture « excitante et ludique » a été conçue pour attirer le public. Une exubérance de couleurs contrastées, des lettres découpées le long du toit inscrivant en gros et en couleurs dans le ciel LIBRARY, 45 000 livres déjà offerts doivent faire changer l'image de Peckham. Pour ses futurs visiteurs, son adresse : Peckham Library, 122 Peckham High Street, London SE 15. (Financial Times du 4-5 mars 2000.)
Toujours à Londres, 4 000 livres de la bibliothèque privée de William Foyle, le fondateur de la célèbre librairie de Charing Cross, seront vendus aux enchères par Christie's en juillet prochain. La collection comprend des manuscrits enluminés, les classiques anglais et en particulier l'édition folio du XVIIe siècle de Shakespeare. (International Herald Tribune du 10 mars 2000.)