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Réalisations et problèmes de la bibliothèque municipale de Bourges

1959

    Réalisations et problèmes de la bibliothèque municipale de Bourges

    Par Jean Jenny

    Cette communication était intitulée dans le programme de la journée : «Les tribulations d'un bibliothécaire de province». En fait, M. Jenny s'est contenté de donner quelques aperçus sur les activités... et les difficultés de la Bibliothèque de Bourges.

    Pauvreté, retard, tels sont les deux principaux obstacles auxquels le bibliothécaire à eu à faire face dès son arrivée en 1952.

    Les conditions matérielles de son activité sont très défectueuses : en 1952, 300.000 francs de crédits annuels pour les achats, abonnements, reliures, frais de bureau. Le local est singulièrement délabré et incommode (infiltrations, d'où livres perdus, salle unique pour prêt et lecture, etc), les méthodes de travail archaïques (registre de prêt, fiches à la main ; pas de téléphone ni de machine à écrire). Le personnel consiste en un employé ayant le grade de rédacteur, mais remplissant à peu près tous les emplois. Les heures d'ouverture (13 h. à 18 h.) sont insuffisantes. La bibliothèque, surtout riche d'ouvrages d'étude, comporte cependant un fonds de lecture publique (romans) constitué par les Amis de la Bibliothèque (actuellement 5.000 volumes), mais elle est pauvre en ce sens que ses moyens ne lui permettent pas d'acheter les principaux ouvrages à un certain nombre d'exemplaires. Le manque d'ouvrages documentaires de vulgarisation se fait cruellement sentir ; rien, ou à peu près, n'est prévu pour les enfants ou pour les jeunes.

    Quelques progrès ont été réalisés : augmentation des crédits (en 1959, 1.340.000), installation du téléphone, achat d'une machine à écrire, accroissement du personnel en nombre (2 employés auxiliaires en plus, mais le recrutement d'un sous-bibliothécaire qualifié est maintenant souhaitable) ; élargissement du Comité d'inspection et d'achat. Surtout l'espoir d'un prochain transfert dans l'hôtel Témoin aménagé (Voir Jenny, Jean) - La Bibliothèque de Bourges, anciens et nouveaux locaux, dans Bulletin de l'A.B.F., n° 24, nov. 1957, p. 147-157) permet de supporter patiemment les inconvénients du local : encore faudrait-il que les travaux débutent bientôt..

    Les efforts traditionnels de propagande (par la prose, la réalisation d'expositions) ont-ils été suivis de quelques résultats ? Laissons parler les chiffres :

    • Pour la Bibliothèque d'étude :
    • Lecteurs sur place : en 1951, 332 ; en 1958, 10.195.
    • Lecteurs inscrits au prêt à domicile : en 1951, 332 ; en 1958, 438.
    • Livres prêtés sur place : en 1951, 2.264 ; en 1958, 2.117.
    • Livres prêtés à domicile : en 1951, 3.558 ; en 1958, 4.282. (surtout, par ordre d'importance, littérature et histoire)

    Les lecteurs sont surtout des « étudiants » (grands scolaires), professeurs, retraités, employés. Les quartiers éloignés ne sont pas représentés.

    Pour la bibliothèque de lecture publique (Amis de la Bibliothèque) (fonctionnant uniquement grâce aux cotisations des adhérents) :

    • Adhérents : 1951, 461 ; 1958, 505 (surtout retraités, femmes de la bourgeoisie, employés, professeurs, peu de quartiers éloignés).

    Livres prêtés en un an : 1951, 18.295 ; 1958, 22.594.

    Ces statistiques sont évidemment dérisoires, et le progrès peu sensible. Faut-il incriminer l'apathie berrichone ? ou, bien plutôt, les conditions de local et d'horaire extrêmement défectueuses ?

    Deux essais "d'élargissement" de la lecture publique

    1° Prêt aux entreprises - Il se poursuit, cahin-caha, dans deux ou trois entreprises ou administrations. A signaler l'intéressante expérience de l'Imprimerie Tardy, dont le responsable «loisirs» du Comité d'entreprise (ancien chef Eclaireur) s'est occupé du problème de la bibliothèque, malgré de nombreuses difficultés de temps, de local... et d'argent. Une partie importante de cette bibliothèque est constituée par le dépôt régulier de 30 livres toutes les 6 semaines, fait par les Amis de la Bibliothèque municipale. Le succès fut grand au départ : 25 % du personnel s'inscrivit ; puis on retomba à 15 %, surtout des typographes, apprentis de 16 à 20 ans, ou ouvriers de 40 à 60 ans. Si les jeunes recherchent surtout les romans d'espionnage, les ouvriers plus âgés préfèrent les livres de voyages, de nature, etc. Les ouvriers n'aiment pas en général les livres d'une fantaisie irréelle (type le Passe-muraille de Marcel Aymé), ni les ouvrages au vocabulaire trop grossier. Tout reposait, en somme, sur le dévouement et le savoir-faire du responsable qui, malheureusement, est malade depuis deux ans.

    2° Jeunes - Une entente des principaux mouvements de jeunesse de Bourges (Eclaireurs, Scouts, Auberges de Jeunesse, Cercle Léo Lagrange, etc.), a abouti, dans le cadre de l'Office municipal des sports, jeunesse et culture, à la création d'un Foyer des jeunes (14 à 20 ans), récemment ouvert, et qui doit être géré par les jeunes eux-mêmes. Les fondateurs auraient souhaité qu'à cette occasion une annexe pour jeunes de la Bibliothèque municipale put être créée, mais la double question des crédits et du personnel faisant reculer la Ville, on s'en est tenu à la formule du prêt de livres par la Bibliothèque municipale à la petite bibliothèque de la maison des jeunes, sous la responsabilité de cet organisme, avec l'accord de la Mairie

    Le responsable de cette bibliothèque, un Normalien de 4e année, qui doit rester à Bourges et a pris à coeur ses activités du Foyer des jeunes, a tenté en mai-juin, une petite expérience en ce qui concerne la bibliothèque : une soixantaine d'ouvrages, choisis sur une liste établie par le bibliothécaire municipal parmi les titres de livres de la Municipale pouvant convenir à la jeunesse, ont été déposés pendant cette période dans la petite salle de lecture du Foyer des jeunes. La lecture sur place était seule envisagée, pendant les permanences du jeudi et du samedi après-midi. Une dizaine de jeunes seulement, garçons et filles, surtout du milieu « grands scolaires », en ont profité réclamant d'ailleurs une ouverture plus fréquente et moins de titres «enfantins» (Bibliothèque verte).

    L'expérience sera reprise sur une plus large échelle en octobre prochain. Les deux principales difficultés résident : a) dans la difficulté de trouver d'autres responsables; b) dans le manque actuel de crédits du Foyer des jeunes pour l'acquisition de livres, et dans la pauvreté de la Bibliothèque Municipale en livres pour jeunes.