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Les associations de bibliothèques et de bibliothécaires en République fédérale d'Allemagne

1971

    Les associations de bibliothèques et de bibliothécaires en République fédérale d'Allemagne

    Rapport présenté au Conseil général de la F.I.A.B., Liverpool, 1971. IL

    Par F.A. Schmidt-Kùnsemiiller,, Directeur de la Bibliothèque de l'Université de Kiel, Président du « Verein Deutscher Bibliothekare ».

    IL n'y a guère de pays où les associations indépendantes de bibliothèques ou de bibliothécaires prolifèrent autant qu'en République fédérale d'Allemagne. A l'étranger, et plus encore dans l'opinion publique allemande, cette multiplicité et cette diversité ont souvent choqué. On y a vu une singularité allemande, bien inutile, et le reflet d'une stérile dispersion. Cette critique est certainement largement fondée - nous nous efforçons d'ailleurs de lutter contre cette dispersion - mais il ne faudrait cependant pas non plus méconnaître les causes historiques de cet état de choses. L'Allemagne compte parmi les pays qui, les premiers, ont connu une organisation du secteur des bibliothèques. Très tôt, les bibliothécaires s'y sont associés ; dans le cours du temps de nouvelles associations n'ont cessé de se constituer ; ce processus se poursuit maintenant encore.

    Parmi les causes de cette diversité souvent critiquée des associations de bibliothèques ou de bibliothécaires en Allemagne, il en est deux qui dominent. Il s'agit tout d'abord de la coupure assez nette, et ignorée dans d'autres pays, qui existe entre les bibliothèques scientifiques d'une part, et les bibliothèques publiques d'autre part. Ici encore sont intervenues des causes d'ordre historique. En effet, comme les bibliothèques scientifiques (essentiellement, les bibliothèques de l'Etat, des Länder et des établissements d'enseignement supérieur, auxquelles il convient d'ajouter certaines bibliothèques municipales) sont plus anciennes et plus traditionnelles que les bibliothèques publiques, elles ont vu s'unir plus tôt leurs bibliothécaires. Cette différence d'ancienneté entre les deux types de bibliothèques est la cause de la séparation qui s'est perpétuée jusqu'aujourd'hui, entre les programmes destinés à la formation de leurs bibliothécaires respectifs. Pour les bibliothécaires scientifiques, l'enseignement réglé par l'Etat apparut en 1893, avec de nombreux antécédents remontant jusqu'au début du XIXe siècle ; pour les bibliothécaires des bibliothèques publiques, primitivement dénommés bibliothécaires « populaires », cet enseignement ne fut introduit qu'en 1909 et en même temps que celui menant au grade de bibliothécaire diplômé (Diplombibliothekare) pour les bibliothèques scientifiques. Le lien entre les deux enseignements fut supprimé entre les deux guerres mondiales, et ce n'est que depuis peu qu'on cherche à coordonner dans une certaine mesure les deux types d'enseignement.

    A cela se superpose dans les bibliothèques scientifiques la distinction en plusieurs catégories de fonctions auxquelles correspondent, de nouveau, des enseignements séparés. Il y a ce qu'on appelle le « höher Dienst », c'està- dire les fonctions exercées par des bibliothécaires qui sont titulaires d'un diplôme universitaire et qui ont accompli un stage de deux ans ; le « gehobene Dienst » : fonctions exercées par les bibliothécaires diplômés (2 à 3 ans de formation professionnelle spécialisée après obtention du diplôme de fin d'études secondaires) ; et depuis peu, le « mittlere Dienst » : fonctions exercées par les assitants-bibliothécaires (enseignement primaire ou secondaire plus deux ans de formation professionnelle spécialisée). En ce qui concerne les bibliothécaires des bibliothèques publiques, nous n'avons en tout et pour tout que deux catégories, le bibliothécaire diplômé et l'assistant bibliothécaire.

    Finalement il convient encore de distinguer, d'une part, les organisations qui ont des objectifs purement professionnels et corporatifs, c'est-àdire celles qui défendent les intérêts personnels de leurs membres en matière de formation, de barèmes et de rémunération, et, d'autre part, celles qui s'occupent des problèmes des bibliothèques et de leur bon fonctionnement. On signalera d'emblée qu'existent entre ces deux types caractérisés d'associations des formes intermédiaires.

    Pour comprendre la multiplicité des associations de bibliothèques et de bibliothécaires dans notre pays, il est indispensable de connaître toutes ces distinctions.

    La plus ancienne association de notre pays est le Verein Deutscher Bibliothekare, fondée en 1900, et réunissant les bibliothécaires du « höher Dienst», c'est-à-dire ceux qui ont une formation universitaire. Elle compte environ 900 membres. Le Verein Deutscher Bibliothekare fut et reste, en premier lieu, une association professionnelle et corporative. Il a récemment adopté des règles qui permettent la création de sous-associations régionales. Jusqu'à présent, il n'existait de groupements régionaux de bibliothécaires attachés aux bibliothèques scientifiques que dans quelques-uns des Länder (Bavière, Bade-Württemberg, Sarre). Ces groupements s'occupaient exclusivement de problèmes de barèmes et de traitements. Comme, dans notre pays, il n'existe, à cause de la structure fédérale de l'Etat, aucune instance centrale chargée de s'occuper des bibliothèques, leurs problèmes ont depuis longtemps fait l'objet des préoccupations du V.D.B. qui, aux côtés de la Deutsche Forschungsgemeinschaft, a mené ce qu'on pourrait appeler une politique fédérale des bibliothèques. Le V.D.B. compte aujourd'hui quatorze commissions qui ont à travailler dans des domaines variés : règles catalographiques, construction des bibliothèques, questions juridiques concernant les bibliothèques, prêt et catalogues collectifs, manuscrits et incunables, publications officielles et journaux, aussi bien que sur des problèmes techniques relevant par exemple de la reliure ou de la restauration des livres. Cependant, comme il est impossible financièrement à une association de personnes de subvenir aux dépenses de fonctionnement de toutes ces commissions, on envisage de fonder une association des bibliothèques scientifiques allemandes qui prendra à sa charge les Commissions et qui plus généralement se consacrera aux questions de bibliothéconomie.

    Cette solution est déjà pratiquée à propos de la défense des intérêts particuliers à certains types de bibliothèques régionales (bibliothèques de l'Etat fédéral, des Etats fédérés et bibliothèques scientifiques municipales), tous deux affiliés au V.D.B. Dans la même catégorie, on trouve encore le Comité d'études des bibliothèques spéciales, qui cependant constitue luimême une association au sens de la loi. Ce Comité réunit tout particulièrement les bibliothèques d'instituts de recherche et d'entreprises industrielles ou commerciales. Fondé en 1946, il est en relations étroites avec la Bibliothèque du Parlement et les bibliothèques administratives, ainsi qu'avec les organismes allemands qui s'occupent de documentation.

    Associés sur la base des domaines couverts et sans lien particulier avec le V.D.B., on trouve les comités d'études des bibliothèques de pédagogie, de musique, de droit, de médecine, de théologie catholique et de l'Eglise protestante (compétente aussi pour les dépôts d'archives). Il ne s'agit pas ici véritablement d'associations, mais bien de groupes, plus lâches, de bibliothèques ou de bibliothécaires spécialisés, réunis pour la discussion de questions d'intérêt commun.

    Le Verein der Diplombibliothekare an wissenschaftlichan Bibliotheken (V.D.W.B.), fondé en 1948, est étroitement lié au V.D.B. et constitue une pure association de défense d'intérêts professionnels. Les problèmes d'enseignement et les questions de barèmes sont le principal objet de ses préoccupations. Cette association s'occupe aussi du perfectionnement professionnel de ses membres (plus de 1.500). Elle est divisée en autant de groupes que de Lànder.

    Le V.D.B. et le V.D.W.B. organisent ensemble, chaque année, le Deutsche Bibliothekartag (journée des bibliothécaires allemands).

    Dans le domaine des bibliothèques publiques il existe également deux grandes associations, mais ici la première réunit des personnes, la seconde des institutions. Les bibliothécaires se regroupent dans le Verein der Bibliothekare an ôffentlichen Büchereien (Association des bibliothécaires des bibliothèques publiques), fondé en 1949 et comptant 3.200 membres. Cette association n'a d'objectifs que professionnels, c'est-à-dire un enseignement adapté pour ceux qui se destinent à la profession, de bonnes possibilités de perfectionnement professionnel et parallèlement une rémunération de ses membres qui tienne compte de la formation reçue et du travail fourni. L'association comprend des groupes par Länder pour la défense de ses objectifs au niveau des Etats fédérés.

    D'autre part, les bibliothèques publiques (en majorité communales) se sont unies dans le Deutsche Bùchereiverband (Association des bibliothèques allemandes), fondé en 1949 à l'instigation de la « Journée des Villes d'Allemagne » ; il a pour mission la promotion des bibliothèques publiques en R.F.A. Pour exécuter sa tâche, le Deutsche Bùchereiverband utilise les services de l'Arbeitstelle fur das Bûchereiwesen » (Office de bibliothéconomie) de Berlin qui lui est rattaché, et qui finance une série de comités de travail dans les différents domaines de la bibliothéconomie et un ensemble de commissions pour la discussion de questions intéressant cette spécialité. Cet office joue aussi le rôle de bureau central pour de nombreuses publications relatives aux bibliothèques publiques.

    En 1968, le Deutsche Bùchereiverband et le Verein der Bibliothekare an ôffentlichen Biichereien ont fondé un groupe de travail pour les bibliothèques publiques, qui coordonne les activités de leurs deux associations et qui organise les congrès annuels communs.

    A côté des associations sur le plan fédéral déjà citées, il existe toute une série d'associations régionales qui s'attachent à la promotion de l'activité des bibliothèques dans leurs circonscriptions respectives. Parmi cellesci, on notera tout particulièrement le Verband der Bibliotheken des Landes Nordrhein-Westfalen (Association des bibliothèques de Rhénanie-Westphalie), fondé en 1948, dont les affiliés sont aussi bien des bibliothèques publiques que des bibliothèques scientifiques de ce Land, et qui déploie une activité particulièrement intense.

    Les bibliothèques d'entreprises, c'est-à-dire les bibliothèques soutenues par des entreprises industrielles et commerciales pour aider leur personnel à se distraire et à se cultiver, ont leurs propres organisations. Il en va de même pour les bibliothèques dépendant des églises catholique et protestante qui sont regroupées par des Comités de travail et qui s'occupent des activités des églises dans le domaine des bibliothèques.

    La Deutsche Bibliothekskonferenz constitue un premier pas vers une organisation unique dans le monde des bibliothèques d'Allemagne fédérale. Cette conférence est née spontanément des discussions communes qui se déroulaient entre représentants des principales associations de bibliothèques et de bibliothécaires. Aujourd'hui encore elle demeure une union lâche, sans personnalité juridique ; elle pourrait à l'avenir évoluer jusqu'à prendre la forme d'association-maîtresse à laquelle se rattacheraient toutes les organisations de bibliothèques et de bibliothécaires. A l'heure actuelle sont affiliés à la Deutsche Bibliothekskonferenz l'Arbeitsgemeinschaft der Spezial-Bibliotheken, le Deutsche Bùchereiverband, le Verband der Bibliotheken des Landes Nordrhein-Westfalen, le Verein der Bibliothekare an wissenschaftlichen Bibliotheken et le Verein Deutscher Bibliothekare. La Conférence coordonne, sur une base volontaire, la collaboration entre ces associations. Elle a déjà entrepris, par l'intermédiaire de plusieurs comités, l'étude de questions particulières intéressant toutes les bibliothèques allemandes (mise à la disposition du public des publications en général, catalogage systématique unifié, statistiques relatives aux bibliothèques). Elle est aujourd'hui l'organisme vraiment représentatif du monde des bibliothèques en Allemagne. D'elle dépend aussi la Bibliothekarische Auslandstelle de Munich (Office des relations extérieures), par l'intermédiaire de qui sont organisés les voyages d'études en République fédérale des bibliothécaires étrangers ainsi que ceux à l'étranger des bibliothécaires allemands.

    A l'exception de l'association des bibliothèques de Rhénanie-Westphalie, toutes les associations membres de la Deutsche Bibliothekskonferenz sont également membres de la F.I.A.B. Il s'y ajoute un grand nombre de bibliothèques qui, à titre individuel, sont membres associés de la F.I.A.B. Nombre de collègues allemands prennent activement part aux travaux des sections et commissions de cette organisation internationale.

    Beaucoup de bibliothèques scientifiques allemandes appartiennent déjà à la Ligue des bibliothèques européennes de recherche (LIBER), tout récemment fondée.

    Tout naturellement, les relations des associations de bibliothèques et de bibliothécaires allemands avec celles des pays voisins sont particulièrement étroites, tout spécialement en ce qui concerne les pays de langue allemande. Les Suisses et Autrichiens sont régulièrement invités aux « Journées » et congrès organisés par l'Allemagne, et mes collègues allemands prennent régulièrement part aux réunions qui se tiennent dans ces pays. Les visites individuelles des bibliothécaires qui parlent l'allemand, originaires des pays voisins, sont également très fréquentes, soit pour débattre de questions techniques d'intérêt commun, soit pour étudier les bibliothèques nouvellement édifiées et leurs équipements et tirer parti de ces expériences pour établir leurs propres plans de construction.

    Il n'existe toutefois qu'un seul comité permanent où sont représentés tous les pays de langue allemande, y compris la République Démocratique Allemande. Il s'agit de la Commission commune pour le catalogage alphabétique, qui, au cours de multiples sessions, a élaboré les nouvelles règles pour le catalogage auteurs en les adaptant aux normes internationales. Les fruits de cet important travail en commun profitèrent à l'ensemble des bibliothèques allemandes.

    L'image que j'ai tracée ici de la vie et des travaux des organisations de bibliothèques et de bibliothécaires en République fédérale d'Allemagne est certainement complexe et peut-être même passablement confuse. Cependant, malgré tous les inconvénients qu'une telle diversité entraîne, elle comporte aussi un certain nombre d'avantages, car elle permet à chaque association d'exprimer ses opinions, ses souhaits et ses objectifs en tenant compte de ses caractéristiques propres. L'efficacité et le succès dépendent, en fin de compte, d'une coopération, saine et compréhensive, de tous les intéressés.