Les bibliothèques de lecture publique ont commencé à prêter des disques après la deuxième guerre mondiale. La première bibliothèque qui ouvrit un rayon disque fut celle de Zwolle en 1958 ; comme cet article le montre, les discothèques de prêt sont maintenant nombreuses. Pour les discothécaires elles ne sont pas aussi nombreuses qu'ils le souhaiteraient : plusieurs villes, grandes et moyennes, sont encore dépourvues de cette forme d'information musicale. Entre parenthèses c'est maintenant la devise avec laquelle on s'attaque au travail des discothèques et aussi des bibliothèques musicales. Pour cela un changement de mentalité est essentiel.
La tradition dans les bibliothèques publiques hollandaises - souvent renforcée par la faiblesse des moyens financiers -, était jusqu'à il y a une dizaine d'années environ, hautement éducative, plus ou moins moralisante et tendant comme l'on dit aujourd'hui à conforter les valeurs établies. Une forte expansion de la lecture publique avec un personnel jeune et souvent bien formé, jointe à un développement souvent sensationnel des bibliothèques provinciales (1) , a évidemment contribué à modifier certaines conceptions jusqu'alors intangibles. Les bibliothèques ont acquis un devoir nouveau : celui de distraire. La lecture de divertissement et la pornographie ne sont plus des mots barbares. On peut observer le même phénomène dans l'histoire du surgeon « prêt de disques ». Les discothèques sont nées comme section des bibliothèques musicales de prêt et ont pratiquement toutes été coiffées de la même façon à leurs débuts, car les bibliothèques avaient alors une politique nettement conservatrice : il n'y avait que de très rares livres d'exercice, voire aucun (guitare, flûte à bec) aucune biographie d'accès facile, aucune musique populaire, et pratiquement ni chansons, ni pop, ni jazz.
Les discothèques suivirent la même voie à leurs débuts : pas de pop, pas de musique légère, seulement du jazz « historiquement valable ». Cette situation a totalement changé en l'espace de trois ou quatre années. Mais on peut affirmer sans crainte de démenti qu'à leurs débuts, l'influence des discothèques a été très réduite, surtout lorsqu'elles étaient intégrées dans des bibliothèques musicales.
Placé sous la direction du Centre de lecture et des bibliothèques publiques hollandaises (le service correspondant à notre Direction des bibliothèques et de la lecture publique, N.d.T.), il fut créé en 1951. Du fait de ce qui vient d'être rappelé, du fait aussi de leur majorité numérique, les discothécaires ont une voix importante au Centre d'études des bibliothèques et des diccothèques. Il en ait résulté un certain nombre d'activités énumérées ci-dessous :
a) La normalisation est importante dans le cadre de la nouvelle Loi des bibliothèques de lecture publique par laquelle toutes les bibliothèques et discothèques seront subventionnées. L'idée est de démarrer avec une collection d'au moins 3.000 disques (pour les petites communes de 5.000 habitants), oortée par paliers à 15.000 disques pour les grandes villes. Ce dernier chiffre vaut pour une discothèque municipale centrale ; dans les grandes villes, on doit aussi prendre en considération les discothèques de quartier. Dans cette perspective, Amsterdam (environ 700.000 habitants) aura bientôt 100.000 disques disponibles si la normalisation proposée est appliquée à son optimum. Le financement de cette répartition des discothèques s'appuie sur une espèce de formule qui doit être utilisée en rapport avec la structure du personnel.
(nombre de disques actuel + nombre à atteindre)/4000= nombre de personnel
Cette normalisation contient des rapports entre le nombre de disques en collection et l'espace disponible, les détériorations, etc...
b) Les descriptions du travail apparurent nécessaires car trois catégories de personnes auxquelles correspondent trois formations, se répartissent le travail. La formation est faite maintenant sous la forme d'un cours spécial d'un an à l'Ecole des bibliothécaires et diccothécaires d'Amsterdam, suivant en principe un cours général de bibliothécaire de deux ans (2) .
c) Le budget initial d'une discothèque municipale est très affecté par la situation des Pays-Bas, où les calculs sont basés sur un prix moyen de 23 F par disque, et des frais de personnel d'environ 4.000 F par mois pour les membres les plus qualifiés (et les mieux formés) du personnel.
d) Le chapitre sur les commodités du service central est peut être le plus important du rapport. Suivant l'exemple d'un service d'information déjà existant, ces services commenceront à être rendus au début de 1975 - si les propositions faites en février 1074 sont acceptées. Ce service fournira les disques complètement préparés pour le prêt, c'est-à-dire avec la cote, la pochette, la fiche de prêt, les fiches de catalogage, etc... L'idée générale repose sur un coût de traitement d'environ 5,50 F par disque et provient du prix de base indiqué, obtenu en déduisant les 31 % habituels consentis par les importateurs. Ce service ne sera rentable que si un minimum de 40.000 disques par an lui est garanti par les discothèques participantes. Mais il y a encore un certain r;ombre de problèmes pratiques à résoudre, puisque le choix d'un système de classification unique est la condition nécessaire de ce type de services. En gros, il existe actuellement deux systèmes de classification :
e) Questionnaire. En supplément du rapport, il y avait un questionnaire distribué en novembre 1973 à deux douzaines de discothèques réparties dans tout le pays. Le but était de connaître quels étaient les utilisateurs des discothèques, leurs motivations, leurs situations, etc.. Trente-quatre questions furent posées à 1.500 utilisateurs : les réponses donnent une bonne image de la situation, du fait notamment que des discothèques importantes moyennes et petites y participèrent. Parmi quelques résultats frappants, le groupe d'âge 18-25 ans était en tête et de loin avec 44 %, suivi par le groupe des moins de 18 ans (19%) et celui des 25-30 ans (15%). Ces données ont eu naturellement un effet important sur les réponses aux autres questions.
Le nombre des salariés et des sans profession étaient à peu près égal, respectivement 41 % et 45 %. Le nombre des utilisateurs encore en train de poursuivre leurs études était d'environ 56 %, un pourcentage digne d'attention (31 %) se trouvant dans les écoles supérieures ou l'université et 25 % dans les écoles secondaires.
Ces résultats amènent à s'interroger sur le succès des discothèques à réellement populariser la musique. L'observation du public dans les discothèques conduit souvent à une impression négative : les jeunes ouvriers en particulier ne participent pas (encore) à l'acquisition d'une libre information musicale générale. Il y a évidemment un seuil en rapport avec le niveau de l'éducation.
La répartition des préférences pour un genre donné était presque prévisible du fait de la structure d'âge des utilisateurs : 32 % pop, 10 % musique légère, 18 % cabaret et chanson, 17% classique, 6% jazz, 3% musique folklorique (y compris l'ethno-musicologie). Il est intéressant de remarquer que les utilisateurs préfèrent que les disques soient rangés par ordre alphabétique de compositeurs, ou d'interprètes, plutôt que dans une classification stricte, que moins de 10% demandait. Une remarque en passant : la plupart des discothèques où fut faite l'enquête utilisent un système de classification strict pour le rangement de leurs disques.
Une question sur l'utilisation du catalogue fit jaillir d'attristante réponse : 35 % n'avait aucune idée sur la façon de s'en servir. L'influence de la radio et de la télévision apparut forte : 18,3 %, mais les magazines de disques consultés par les utilisateurs avaient moins d'influence : 4 % des personnes questionnées consultaient les magazines hollandais tandis que 7 % consultaient les magazines étrangers, 33 % des utilisateurs motivés se laissaient guider par les interprètes, et seulement 3,3 % par l'apparence de la pochette.
Les trois quarts des personnes interrogées souhaitaient que l'on puisse écouter les disques sur place et 61 % auraient aimé pouvoir emprunter des cassettes.
La culture musicale joue-t-elle un rôle d'incitation pour fréquenter les discothèques ? 16,3% ne vont jamais au concert, 40,8% y vont une fois par an, 22,2% une fois par mois, 16,7 % plus d'une fois par mois.
Les préférences pour les types particuliers de concert sont :
28,4 % pour la pop, 20,1 % pour la musique orchestrale, 8,4 % pour la musique de chambre, et 6,7 % pour l'opéra.
On demandait également aux utilisateurs des discothèques quels étaient leurs talents musicaux. 44% d'entre eux jouaient d'un instrument, le piano (29%), la guitare (25%) et la flûte à bec (17%) venant en tête. Un point finalement susceptible d'intéresser les marchands de disques : 50 % des utilisateurs estimaient qu'ils avaient acheté moins de disques depuis qu'ils fréquentaient la discothèque, mais 43 % d'entre eux achetaient encore six disques par an et 19 % plus de douze disques par an pour leur propre collection.
Traduit de l'anglais par Bernard Marrey.