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La conférence de la Maison Blanche sur les bibliothèques et l'information

1980

    La conférence de la Maison Blanche sur les bibliothèques et l'information

    Washington D.C. 15-19 novembre 1979

    Par Renée Lemaître

    Les bibliothécaires américains qui avaient préparés depuis des années cette conférence capitale sur le rôle des bibliothèques et des services d'information, ne furent pas déçus. En effet, aux 900 bibliothécaires venus de tous les Etats de l'Union, se joignirent 1 500 non-professionnels, dont de nombreux membres du gouvernement. Le Président des Etats-Unis lui-même tint à adresser aux bibliothécaires présents un message improvisé de dix minutes, qui fût la plus chaleureuse profession de foi en faveur des bibliothèques jamais proférée par un chef d'Etat dans ce pays. Il alla jusqu'à dire : « Une information obtenue en temps voulu, grâce à l'aide éclairée et de sang-froid d'un bibliothécaire compétent, peut sauver une situation, une vie même ».

    « Vous avez un ami à la Maison-Blanche » ajouta-t-il. Et, tout au long de la conférence un certain nombre de membres du gouvernement, sénateurs ou représentants, affirmèrent avec ardeur leur soutien à la cause des bibliothèques. Déplorant l'insuffisance lamentable du budget des pouvoirs publics concernant les bibliothèques, le sénateur de l'Etat de New York, Major R. Owens, démocrate, ne craignit pas de dire que trop d'élus étaient hostile, consciemment ou non, au développement des bibliothèques et des services d'information, afin de maintenir un état d'ignorance qui favorise la manipulation de l'opinion publique. Ralph Nader lui, accusa les bibliothécaires d'« apathie inquiète » et affirma qu'il ne pouvait y avoir d'action possible de la part des citoyens que si la justice était en cause :« Il faut qu'une lutte s'établisse entre la victime et le pouvoir ».

    Ce thème de justice et d'injustice fut repris pendant toute la conférence. Mari-lyn Gell, qui présidait, devait parler d'une justice dans le droit à l'information : « Nous sommes en possession d'une technologie qui peut révolutionner l'accès à l'information dans les bibliothèques. De plus, un sixième de toutes les ressources documentaires se trouvent à Washington ». Cette question de la prédominance de Washington en sources et en moyens d'information a été longuement évoquée. Le problème majeur concerne la Bibliothèque du Congrès, qui fut créée pour informer les membres du Congrès, mais dont l'importance des collections, accrues grâce au copyright, et les moyens technologiques de recherche et de diffusion, ont amené à jouer le rôle d'une bibliothèque nationale et d'un centre majeur d'information pour tout le pays. Or elle n'a pas les moyens de tenir ce rôle, doit-elle l'abandonner ou faire payer ses services aux utilisateurs ? Pour transformer son rôle (la faire passer d'une espèce animale à un autre selon le mot de Marilyn Gell) il faudrait que le Congrès vote une loi.

    Mais la question se pose : est-il juste de faire payer l'information dans une démocratie ?

    « Nous devons éviter qu'un fossé ne se creuse entre les riches et les pauvres en information » devait affirmer Marilyn Gell et ceci est le but principal de la conférence ». Elle ajouta cette phrase prophétique : « Si nous laissons la technologie avancer sans nous, la politique de l'information sera faite par les technocrates, le public ne sera pas consulté ».

    Au cours de la conférence, pas moins de 3 000 résolutions furent prises sur les cinq thèmes qui avaient été fixés concernant les utilisateurs de l'Information : besoins personnels, éducation permanente, organisations et professions, administrations gouvernementales, coopération internationale.

    Les mots de liberté d'accès, de coordination, de besoins de la communauté revenaient dans toutes les discussions. La nomination d'un sous-secrétaire d'Etat chargé des bibliothèques au ministère de l'Education nationale fût vivement recommandée.

    Dans le cadre du congrès le « Comité national d'urgence des citoyens pour sauver nos bibliothèques publiques » qui milite très activement en faveur de la promulgation d'une loi nationale pour les bibliothèques, avait organisé une série de manifestations. Le slogan « Passez une journée avec un livre » fut répandu par des milliers d'affiches et d'autocollants dans tout le pays, il était illustré d'un dessin représentant le bâtiment de la Maison-Blanche posé sur un livre ouvert. La radio et la télévision reprirent ce thème par des interviews de célébrités qui devaient parler de leur livre préféré, les subventions étaient fournies par de grandes firmes comme l'encyclopédie britannique ou Demco (fournitures pour bibliothèques).

    L'atmosphère générale de cette conférence fut une remarquable camaraderie : tolérance et patience envers toutes opinions et différences de mentalités et de conceptions furent la règle.

    En résumé cette conférence a été un succès.

    En formulant une politique de l'information et une législation adéquate pour le proche futur elle vient à son heure : une coupure de 71 millions de dollars est prévue dans le budget du ministère de l'éducation, pour les bibliothèques !

    Sources : DE WITT (Karen). - Role of Library of Congress is debated at capital parley. - New York Times, Friday, No-vember 16 1979. DE WITT (Karen). - Charges of official neglegt stir Library Conferees. - New York Times, Sunday, November 18, 1979, p. 34. Flash report : The White House Conference on Library and Information Services. - American Libraries, Decem-ber 1979, p. 634, The Editors page one. WHCLIS obserred. - American Libraries, January 1980, p. 18-28.