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    La loi "Galland" de juillet 1987

    Quels changements ?

    Par Michel SENIMON, Centre interdépartemental de gestion de la grande couronne - Versailles.

    L a prétention que j'ai aujourd'hui est de dresser un panorama des changements apportés par la «Loi Galland» à la loi du 26 jan-vierl984 qui est la loi de base en matière de fonction publique territoriale.

    Je me situe dans le cadre des particularités de vos emplois : à savoir la diversité de vos statuts, le mélange des agents de l'Etat et des agents des collectivités locales. Le point crucial de vos préoccupations est que les emplois de la catégorie A

    de direction - sont détenus presque exclusivement par des agents de la fonction publique d'Etat, limitant les débouchés de carrière sur un niveau de catégorie A aux agents territoriaux. Ce sera l'enjeu des statuts particuliers, des nouveaux cadres d'emplois de la fonction p ublique territoriale d'apporter une réponse à vos interrogations.

    Malheureusement, quand on regarde les premières orientations des statuts particuliers des cadres d'emplois de la filière administrative, on s'aperçoit que l'on ne va pas vers un tout territorial mais vers une mobilité à sens unique de l'Etat aux Collectivités Locales.

    Avant d'aborder ces questions techniques, je voudrais souligner la spécificité de la Fonction publique territoriale (FPT), et développer deux points fondamentaux :

    montrer que la loi du 1 juillet 1987, dite «loi Galland», n'est qu'un texte correcteur de la loi initiale du 26 janvier 1984 et qu'elle préserve le système de la carrière tel qu'il a été défini.

    voir quels sont les aménagements apportés par la loi Galland aux principes fondamentaux exposés par la loi de 1984.

    1 - Le système de la carrière

    Le système de la carrière a été institué par la loi du 26 janvier 1984. Avant 1984, la loi de base en matière de statuts de la fonction communale était celle du 28 avril 1952 qui a créé le système de l'emploi ; système dans lequel, travailler au service d'une administration équivaut à travailler pour une entreprise privée. Dans un tel système les emplois de l'administration sont classés en fonction de leur nature, de leur niveau de recrutement et du taux de rémunération qui leur est affecté.

    Le choix de ce système s'est traduit par un arrêté ministériel du 3 novembre 1958 qui porte tableau indicatif des emplois communaux pouvant être créées par une municipalité et qui classe ces emplois en fonction du seuil démographique des communes. Cela veut dire que vous n'êtes pas titulaire d'un grade mais titulaire d'un emploi et lorsque l'administration supprime cet emploi, vous vous trouvez dans une situation précaire. Aucune garantie «de carrière» n'est là pour protéger l'agent.

    C'est là tout l'enjeu de la loi du 26 janvier 1984, donner aux agents des collectivités locales les garanties inhérentes au système de la carrière, telle qu'elle est organisée au niveau de la fonction publique d'Etat depuis 1946. C'est l'affirmation faite dans la loi du 13 juillet 1983 qui porte droits et obligations des fonctionnaires. Cela veut dire que pour la première fois, on considère que les agents des collectivités locales sont des fonctionnaires et qu'il y a donc parité de droits et obligations entre les fonctionnaires de l'Etat et les fonctionnaires territoriaux. Il ne faut pas oublier que le code des communes offrait des garanties à l'agent communal en cas de suppression d'emploi : «... lorsqu'un Maire supprime un emploi pour raison d'économie, il doit prioritairement reclasser cet agent dans l'une des communes du département.» Cette obligation de reclassement interdisait en quelque sorte le licenciement pour suppression d'emploi. C'est pour cela que le Conseil d'Etat a donné une portée très restreinte à cette obligation de reclassement (arrêtés de 1982 où la tentative de reclassement est assimilée au reclassement effectif).

    La loi du 26 janvier 1984. La solution a été d'introduire dans la fonction publique territoriale la notion de corps de fonction publique. Le corps des fonctionnaires est juridiquement défini comme un ensemble de fonctionnaires soumis à un même statut particulier et ayant vocation a occuper les mêmes grades et donc à être affectés à un certain nombre d'emplois. Cette loi pose un problème de mise en place qui tient au fait que l'Etat est un employeur unique, maître du jeu sur l'ensemble du territoire, tandis que les collectivités locales représentent 40 000 autorités (régions, départements, communes), autonomes depuis 1984 qui sont autant de centres de décisions. Il faut donc trouver une solution pour pouvoir gérer les grades des fonctionnaires territoriaux indépendamment de leur emploi.

    Créer une F.P.T., c'est donc résoudre deux principes juridiques antinomiques :

    • l'un constitutionnel (art. 72) : c'est le principe de la libre administration des collectivités locales.
    • l'autre légal (loi du 13/07/83) : c'est le droit des fonctionnaires territoriaux à bénéficier des garanties de carrière des fonctionnaires de l'Etat.

    La solution a été la création des centres de gestion définis comme des établissements publics administratifs, héritiers juridiques des syndicats de communes pour le personnel. De ce fait, a été instaurée une gestion partagée du personnel : collectivités territoriales / centres de gestion, national et départementaux.

    De même, pour permettre aux fonctionnaires de «faire carrière», la formation communale donnée au Centre de formation des personnels communaux, établissement public, est transposée à des organismes décentralisés et autonomes de formation, national et régionaux.

    Les conséquences de ces réformes ont abouti à la multiplication des cotisations des collectivités locales, l'atteinte - du point de vue des élus - à leur libre administration et surtout, la lourdeur de l'ensemble.

    Le rejet s'est matérialisé au printemps 1986 par le fait que seuls deux statuts particuliers des corps de fonctionnaires ont été publiés mais rendus inapplicables par 1 ' arrêt du système, après les élections, par la circulaire du 23 mai 1986.

    Le but de la loi Galland a été de réformer cet édifice juridique et institutionnel tout en préservant l'essentiel.

    II La loi du 13 juillet 1987

    a) Cadre d'emploi. La Loi du 13/02/87 substitue à la notion de corps celle de cadre d'emploi défini comme un corps géré localement par chaque collectivité territoriale.

    Les collectivités territoriales géreront librement leur cadre d'emploi sauf incident de carrière (c'est-à-dire licenciement pour suppression d'emploi, décharge de fonction, non réintégration après détachement) ; en cas d'incident les collectivités devront s'adresser à un centre de gestion et payer une contribution égale à 150 % de la rémunération de l'agent concerné les deux premières années de prise en charge.

    La question de l'efficacité reste toujours posée puisque le centre de gestion n'apas le pouvoir d'imposer le reclassement mais ne peut faire que des propositions.

    b) les aménagements apportés aux trois principes piliers de la fonction publique d'Etat en 1984 :

    1) l'unité signifie que le champs d'application de la F.P.T. est étendu aux régions, départements, communes et à leurs établissements publics. Elle implique donc la mobilité inter-collectivités. Dès que nous aurons les statuts particuliers des cadres d'emploi, ils seront communs aux communes, départements etrégions et les fonctionnaires pourront muter de l'une à l'autre de ces collectivités. La mutation est un simple arrêté de l'autorité d'accueil, qui s'impose à l'autorité d'origine - au plus tard dans les trois mois suivant la notification de la décision de mutation.

    2) la parité avec l'Etat instituait en 1984 la mobilité entre la F.P.T. et la F.P.E. par le moyen de la comparabilité des corps. La loi du 13 juillet 1987 se situe très en retrait par rapport à ce principe puisqu'on ne parle plus de corps de fonctionnaires mais de cadre d'emploi.

    Il reste néanmoins des points d'organisation communs entre les deux fonctions publiques :

    • le mode d'accès à la F.P.T. par les concours ;
    • le principe de la parité des rémunérations entre les deux fonctions publiques - territoriale et d'Etat - ; mais c'est quand même l'Etat qui prédomine avec le rappel que les rémunérations accordées aux fonctionnaires de l'Etat constituent des maximums pour les fonctionnaires territoriaux ;
    • la parité des droits et obligations ;
    • le passage de la F.P.E. à la F.P.T. reste toujours le même : c'est la voie du détachement.

    3) la spécificité. En 1984, c'était la création des centres de gestion. En 1987, c'est l'augmentation du rôle des collectivités territoriales dans la gestion de leurs cadres d'emploi et corrélativement, la diminution du rôle des centres de gestion. Les élus se voient restituer la liberté de nommer leurs agents d'après une liste d'aptitude établie par ordre alphabétique. Les collectivités retrouvent une liberté de gestion de leurs cadres d'emplois : recrutement, avancement, discipline, licenciement (avec pour conséquences des risques de clientélisme et de différences de niveaux de recrutement entre les communes).

    Conclusion :

    Les deux idées forces de la loi du 13 juillet 1987 sont la préservation du système des carrières et le renforcement du pouvoir des élus dans le cadre de la libre administration de leurs fonctionnaires.

    Des statuts particuliers des cadres d'emploi dépend la mobilité entre les deux fonctions publiques vous permettant de préserver la faculté d'accéder à des cadres d'emplois de catégorie A.

    Les premiers statuts particuliers des cadres d'emploi de lafilière administrative seront définis fin décembre 1987. Quidde la filière culturelle ? Pas de calendrier prévu !