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Une expérience de la mise en place d'un plan de développement des collections

1995
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    Une expérience de la mise en place d'un plan de développement des collections

    Par Gisèle Maxit, Bibliothèque de l'université de Savoie

    Qu'est-ce qu'un plan de développement des collections ? Q L'expression .. plan de développement des collections » est une traduction de l'anglais collection development policy, qui révèle l'origine anglo-saxonne de la méthode. Le PDC est issu de la nécessité d'évaluation et de planification suscitées dans les années soixante-dix aux États-Unis par des restrictions budgétaires dans les bibliothèques d'étude. En France, c'est en 1985 que la DBMIST (Direction des bibliothèques, des musées et de l'information scientifique et technique) l'introduit dans les secteurs documentaires relevant de contrats de recherche et dans les bibliothèques CADIST (centres d'acquisition et de diffusion de l'information scientifique et technique).

    Instrument de la politique documentaire de l'université, le plan de développement des collections doit permettre l'évaluation des collections et la définition d'une politique d'enrichissement des fonds, en fonction des besoins actuels et de ceux qui sont prévisibles. Pour être pleinement efficace il doit s'inscrire dans la continuité, ce qui nécessite la mise en oeuvre d'outils permettant un suivi précis : statistiques sur les acquisitions par disciplines fines, gestion comptable, taux de consultation, analyse des prêts... et tout indicateur permettant de le maintenir à jour et de l'affiner.

    Aux États-Unis l'intérêt de ce travail d'évaluation a dépassé le cadre local : en 1979 le comité de gestion et de développement des collections du RLG (Research library group) a décidé de rassembler les évaluations faites par les bibliothèques d'étude participantes, selon une méthode commune mise au point dans ce but, Conspectus ("vue d'ensemble » en latin). On pouvait ainsi disposer d'un outil en vue d'améliorer l'orientation du prêt entre bibliothèques et de mieux coordonner les politiques d'acquisition. En 1980 ces travaux ont débouché sur une banque de données du nom de RLG Conspectus online.

    Pourquoi un plan de développement des collections à la bibliothèque de l'université de Savoie ?

    L'université de Savoie est une université multidisciplinaire implantée sur cinq sites où les secteurs thématiques se recoupent parfois : Chambéry (administration et services généraux), Jacob-Bel-lecombette (6 000 étudiants en 1993 : droit et économie, lettres et sciences humaines, dont psychologie), Le Bourget-du-Lac (2 500 étudiants : sciences, dont géographie et urbanisme), Annecy (500 étudiants : sciences), Annecy-le-Vieux (IUT GEA, sciences et commerce). Le Bourget-du-Lac et Annecy sont respectivement à 12 et 50 km environ de Chambéry, Jacob-Belle-combette jouxtant cette ville.

    Initialement collège universitaire issu de Grenoble, l'université a fêté ses 20 ans en 1989. Elle compte actuellement six UFR, deux IUP, un IUT et deux écoles d'ingénieurs. Ses filières se diversifient vite (seules médecine et pharmacie sont absentes) et progressent actuellement en nombre croissant vers les formations de troisième cycle. Le nombre de ses étudiants est en forte expansion (9,2 % en 1993).

    Comme la plupart des bibliothèques universitaires de sa génération, la bibliothèque de l'université de Savoie s'est constituée peu à peu, à une période difficile du point de vue budgétaire, sans réelle politique de constitution de fonds de base, mais en essayant simplement de répondre le plus possible aux besoins les plus urgents, besoins souvent ponctuels. Devenue Service commun de la documentation en 1990, elle s'est donné pour objectifs d'être un outil pédagogique performant pour la formation des étudiants et d'être un partenaire efficace pour la recherche.

    C'est lors de l'élaboration du premier contrat quadriennal (1990-1994) que l'idée d'utiliser la méthode du plan de développement des collections a été retenue. La volonté de l'État de changer les principes de répartition des dotations budgétaires, en demandant aux universités d'évaluer leur plan d'évolution sur quatre ans, a conduit, pour le volet documentaire, à une réflexion qui a eu pour base la comparaison entre l'état des lieux et l'évolution prévue de l'université avec les conclusions du rapport Mique (1) . Très vite un objectif est apparu clairement : la nécessité d'une mise à niveau des fonds de la bibliothèque de l'université de Savoie par rapport à ce qui avait été défini dans le rapport Miquel comme devant constituer un seuil minimal pour une bibliothèque universitaire, soit 200 000 ouvrages. Les collections se situant alors à 74 500 volumes, il fallait définir les modalités de cette importante montée en charge, afin de ne pas seulement acheter un nombre x de volumes mais de constituer une collection, c'est-à-dire un socle solide, avec des développements plus spécifiques dans certains domaines où ils se révéleraient nécessaires. La méthode du plan de développement des collections étant apparue alors complètement pertinente, sa mise en place a été annoncée dans le contrat quadriennal.

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    Evolution de 1990 à 1993

    Mise en place du plan de développement des collections : objectifs, partenaires, méthodes

    Comme tout PDC, celui de la bibliothèque de l'université de Savoie a eu pour objectif de programmer sa croissance en commençant par évaluer l'existant, puis en cherchant à estimer les besoins en fonction des niveaux d'enseignement et des pôles de recherche et, éventuellement, en fonction d'une diversification des supports d'information. Il a été limité aux collections de la seule bibliothèque universitaire, les autres unités documentaires de l'université étant, pour la plupart, de très petite taille, peu riches et professionnalisées.

    L'ensemble de l'opération s'est étalé de mai à novembre 1991 environ. Annoncée au Conseil de la documentation, la démarche est approuvée par ses membres. Pour la mise en pratique, les partenaires indispensables pour ce travail étaient les enseignants-chercheurs. Il semblait judicieux de profiter de cette occasion pour développer le dialogue avec eux, leur faire mieux connaître les fonds, les sensibiliser au travail à long terme qu'est leur constitution, et leur démontrer que ce travail nécessite une collaboration entre bibliothécaire et enseignant-chercheur. Par ailleurs, le personnel de la bibliothèque manquait de compétences dans de nombreuses disciplines et était (est) en petit nombre : en 1991, les trois sections de la bibliothèque (droit et sciences économiques, lettres et sciences humaines, sciences) étaient dotées de deux conservateurs (dont le directeur) et de 3,8 bibliothécaires adjoints (dont l'un traite les périodiques droit et lettres et le prêt entre bibliothèques).

    Ont été touchés par le projet les directeurs d'UFR, les responsables d'enseignement, les directeurs de centres de recherche ou de laboratoire, les correspondants documentation du SCD. Des réunions ont cherché à préparer le terrain » : les responsables des différents secteurs disciplinaires ont été réunis pour exposer la démarche et susciter la collaboration des enseignants-chercheurs. Une annonce de l'opération a été faite dans le /OMrMa/ de l'université de Savoie afin de sensibiliser le plus grand nombre. L'enquête proprement dite a été envoyée aux responsables d'UFR, d'enseignement et de recherche. En fin d'étude une synthèse en a été faite auprès du Conseil de la documentation.

    Modalités du plan de développement des collections

    Les tableaux

    L'équipe de la bibliothèque, c'est-à-dire les deux conservateurs et les trois bibliothécaires adjoints traitant les ouvrages, a préparé dans chacune des trois sections des tableaux permettant une évaluation à deux niveaux : l'état des collections et les niveaux à atteindre dans les différents secteurs. Ces tableaux se sont très largement inspirés, en les simplifiant, de ceux existant aux États-Unis (2) et, plus directement encore, de ceux utilisés à l'Université Laval (Canada) (3) pour l'élaboration de politiques sectorielles de développement des collections.

    Ces tableaux ont été établis par grandes disciplines, d'abord exprimées en clair, puis représentées par leurs indices dans la classification décimale de Dewey - classification utilisée à la bibliothèque de l'université de Savoie depuis 1990 sous la forme d'un cadre de classement limité (listes des seuls indices à utiliser), pour le rangement des ouvrages en libre accès.

    Pour chaque rubrique différentes colonnes permettaient d'indiquer :

    • le niveau de représentation de la discipline à l'université (premier cycle, deuxième et troisième cycles, thèses, recherche) et le fait qu'elle soit ou non prioritaire, pour l'université dans son ensemble ou au niveau de l'UFR ;
    • le nom du responsable ;
    • le niveau des collections du point de vue qualitatif : état des lieux à exprimer selon un indicateur tiré d'une échelle de six graduations inspirées de Conspectus (0, hors sujet ; 1, informations de base ; 2, premier cycle ; 3, deuxième et troisième cycles ; 4, recherche ; 5, exhaustivité) ;
    • les besoins exprimés sous quatre aspects : niveau (selon les mêmes indicateurs que pour l'état des lieux), support (limité à : monographies, périodiques, vidéo), langue, période chronologique concernée ;
    • les observations éventuelles.

    Chaque tableau était doté d'un numéro et d'un titre général permettant de le situer par rapport aux autres listes établies, 54 au total. Les personnes appelées à les remplir devaient indiquer leur nom au bas de chaque tableau, afin de permettre l'échange d'informations, et étaient invitées à ajouter tout sujet qui leur semblait avoir été oublié.

    Chaque destinataire de l'enquête a reçu un courrier lui précisant la méthode, l'intérêt et les enjeux de la démarche, l'ensemble des grilles correspondant aux disciplines qui le concernaient avec un mode d'emploi pour les remplir. Une assistance était proposée en cas de besoin. Pour les personnes que ce type de présentation rebutait, un autre formulaire était joint : il permettait une analyse de même esprit, mais sur un mode moins technique. Baptisé rapport d'évaluation des collections », il permettait à l'enseignant-chercheur d'énoncer globalement sa thématique d'intérêt et le niveau qu'il souhaitait voir atteindre par les collections pour ce domaine. Enfin, pour les réfractaires », il était encore possible de répondre entièrement sur papier et en textes libres, ou même sous la forme d'un entretien.

    L'ensemble des réponses reçues a été analysé et complété par les évaluations que l'équipe de la bibliothèque avait pu mener à bien à partir de sa connaissance des fonds, de l'étude des catalogues et des documents en rayons.

    L'enquête au sujet des manuels

    Complémentairement à cette évaluation disciplinaire, deux autres questions étaient posées aux enseignants-chercheurs concernant un type d'ouvrage particulier, les manuels. Le but était que les enseignants prennent position sur l'achat des manuels : est-il du ressort de la bibliothèque ou seulement de l'étudiant ? L'autre objectif était de savoir si les enseignants préféraient voir acheter un petit nombre de titres de manuels en (relatif) grand nombre d'exemplaires ou un à deux exemplaires de l'ensemble des manuels existant dans leur discipline. Ces questions étaient posées indépendamment, sur une feuille séparée. Elles se justifiaient plus en sciences et en droit qu'en lettres et sciences humaines.

    Ce qui n'a pas été utilisé

    Un certain nombre d'outils et de travaux auraient pu, ou auraient dû, être utilisés en complément pour contribuer à une évaluation plus juste, et donc plus fiable. Malheureusement cela n'a pas été possible, faute d'outils, de personnel et/ou de temps. Il faut citer :

    • la comparaison avec le tableau de chaque discipline en elle-même : étude en amont sur son contenu, sa hiérarchisation, ses rapports avec les disciplines voisines... ;
    • la comparaison avec la production éditoriale dans chaque discipline, les catalogues de grandes bibliothèques, les ouvrages bibliographiques de référence ;
    • l'analyse des citations : identification des références les plus citées dans la littérature propre à chaque discipline ;
    • l'utilisation de descripteurs : ils auraient permis un réel regroupement des différentes facettes d'un même thème éclatées dans différentes classes de la classification Dewey ;
    • en l'absence de catalogue systématique, le catalogue topographique : il n'a été qu'un indicateur lointain, car, pour la plus grosse partie classé par lettres de secteurs thématiques (ouvrages en magasins et libre accès avant 1990), il ne permettait pas une approche par discipline fine ;
    • l'évaluation quantitative des fonds ;
    • la pondération des disciplines par rapport aux effectifs d'étudiants ;
    • les statistiques de prêt et de consultation sur place : telles que saisies à la bibliothèque de l'université de Savoie, les notices minimum enregistrées sur le système Mobibop qui permet de gérer informatiquement le prêt, auraient demandé un gros travail de recherche dans les registres inventaire pour identification du contenu réel des ouvrages ;
    • une évaluation particulière des collections de périodiques ;
    • l'évaluation des autres unités documentaires de l'université.

    Bilan de l'expérience

    Les collections

    Dans ce domaine le bilan a été sans surprise. Des conclusions spécifiques ont été dégagées pour chaque section, mais on peut résumer ici les grandes tendances de la politique documentaire ainsi définie.

    Comme prévu le niveau d'exhaustivité, c'est-à-dire l'achat de tous les documents dans un domaine, a été rejeté partout. Encore fallait-il le dire. En matière d'acquisitions la priorité devrait porter sur les matières de base des cursus les plus nombreux, sur les spécialités pointues de l'université et sur les disciplines nouvellement enseignées. Du fait de la séparation géographique, un certain nombre de documents d'intérêt commun devront être acquis dans plusieurs sites : les grandes encyclopédies et les dictionnaires de langue, les livres scientifiques utiles aux littéraires ou aux économistes, inversement, les livres d'histoire, d'économie et de droit utiles aux scientifiques, par exemple. Le support prioritaire resterait le livre : très peu de demandes pour la vidéo (ceci s'expliquait partiellement du fait de l'existence d'un centre audiovisuel desservant le site de Jacob-Bellecombette).

    Chronologiquement, les efforts devraient d'abord porter sur les seconds cycles, mal desservis, puis sur les premiers cycles, leur donnant ainsi le temps d'achever leur remaniement en cours.

    Les langues des documents acquis seraient, prioritairement, le français et l'anglais, puis l'allemand, l'italien et l'espagnol pour des disciplines ciblées, les documents écrits dans d'autres langues étant acquis exceptionnellement.

    En ce qui concerne les questions sur les manuels, les enseignants ont estimé que la bibliothèque devait les acquérir, surtout ceux dont le prix est élevé et ceux qui sont recommandés dans les cours. L'option consistant à acheter peu de titres en nombre a été majoritairement retenue. Cependant, dans les faits, il reste souvent difficile, pour certaines disciplines, d'obtenir les références des manuels agréés ».

    Les partenaires

    Pris sous cet angle le bilan a été très riche d'enseignements. Tout d'abord il a été difficile de faire bien comprendre ces travaux, tant auprès des enseignants qu'auprès du personnel. Il n'était guère étonnant que les enseignants soient déroutés par ce type d'approche, mais il a aussi fallu expliciter assez longuement la méthode auprès du personnel : une chose est de lire un article sur le sujet dans la littérature professionnelle, autre chose est de s'approprier une technique peu naturelle jusqu'alors, surtout quand les outils d'évaluation font défaut.

    Par ailleurs, l'utilisation de la classification Dewey reste souvent un obstacle à la transparence pour des non-Anglo-Saxons. Toute classification nécessite de la part de l'utilisateur un minimum de compréhension, dans les deux sens du terme. Malheureusement, malgré leur réputation de tempérament cartésien et méthodique, les Français sont peu familiers, comme les Anglo-Saxons, de l'utilisation d'une quelconque classification dès l'enfance. Ils en profitent souvent pour rejeter sur les origines étrangères de la classification Dewey le fait qu'ils ne la maîtrisent pas. Pourtant chacun sait qu'aucune classification n'est idéale et le but qui préside à son utilisation principale en France, c'est-à-dire tenter de regrouper des documents sur un même sujet en libre accès, ne peut guère être atteint autrement. Pourquoi alors ne pas reprendre la classification la plus répandue et qui a aussi l'avantage d'être tenue à jour ? Seuls peut-être les juristes, du fait de son origine étrangère, sont-ils réellement éloignés de leurs schémas de pensée et de l'organisation du droit français.

    La mauvaise connaissance des fonds de la bibliothèque qu'avaient la plupart des enseignants-chercheurs a constitué un autre enseignement. Ce n'était pas une surprise pour les professionnels mais les enseignants en ont pris conscience au cours de leurs tentatives d'évaluation et des échanges avec les bibliothécaires. De même, dans l'autre sens, l'équipe de la bibliothèque avait besoin d'un aiguillon pour identifier de plus près que de coutume le contenu réel des programmes d'enseignement et des recherches en cours.

    Le plus gros acquis de cette expérience a été l'importance du dialogue qui s'est noué avec les enseignants-chercheurs. Malgré les difficultés rencontrées, l'enquête a été très bien perçue et les utilisateurs ont été satisfaits de devoir se pencher de plus près sur les fonds de la bibliothèque. De même, ils se sont sentis concernés, et même responsables, en collaboration avec les conservateurs, de l'état et de l'évolution des collections dans leurs disciplines. Si le taux de retour des questionnaires n'a pas été calculé (sans doute pour ne pas décourager les bibliothécaires participants !), on peut affirmer que la plupart des enseignants ayant effectivement participé à l'opération y ont trouvé un intérêt certain. Globalement ce sont les scientifiques qui ont le plus répondu, les juristes le moins. On notera aussi qu'en sciences humaines ce sont les enseignants d'origine étrangère (anglaise, allemande) qui ont le mieux perçu la logique de la démarche. Quelles que soient les modalités pratiques retenues, il semble en tout cas important de toujours ménager la possibilité d'entretiens personnels, soit pour expliciter la méthode ou les tableaux, soit pour remplacer ceux-ci, en cas d'impossibilité à recueillir des données sous cette forme.

    La méthode

    Concernant la méthode, le bilan est plus négatif. Outre la qualité moyenne des résultats obtenus, conséquence de l'absence d'outils d'évaluation informatiques et de la non-utilisation des données citées précédemment, les faiblesses sont nombreuses. Une véritable formation aurait été souhaitable à tous les niveaux, auprès des personnes qui ont participé à l'enquête, à la bibliothèque, comme auprès des enseignants interrogés. Il est dommage également que, faute de temps, l'occasion d'une réelle sensibilisation à la classification Dewey pour les enseignants n'ait pu être saisie. Ils auraient pu ainsi mieux se retrouver dans l'organisation physique des collections, mais aussi tirer partie de l'information, même partielle, contenue sous la forme des cotes. Cette meilleure perception aurait pu ainsi redescendre, même pour une faible part, au niveau des étudiants.

    L'établissement des tableaux aurait dû prévoir un travail de fond, puis une meilleure synthèse, entre les trois sections de la bibliothèque, au sujet des intitulés des disciplines et des rubriques de subdivisions, afin qu'aucune ambiguïté ne subsiste. D'autre part, il semble que ces tableaux auraient gagné en clarté et en complétude avec l'ajout de descripteurs qui auraient précisé les contenus respectifs et envisagé toutes les facettes d'un sujet.

    Enfin, au cours de l'opération elle-même, un gros travail d'assistance aurait été nécessaire auprès des personnes effectuant les évaluations, suivi d'une reformulation des réponses avec ceux qui les avaient fournies pour contribuer à rendre les réponses plus homogènes et les synthèses qui en découlaient plus fiables. Faute de ce suivi les résultats obtenus ont été assez partiels et hétérogènes.

    L'utilisation actuelle du plan de développement des collections

    En interne, concrètement, les résultats du travail d'évaluation et d'identification des besoins ont permis à deux nouveaux conservateurs, arrivés depuis l'opération, d'avoir une vue d'ensemble des collections par discipline. Cependant, aucun suivi n'ayant pu être mis en place, contrairement à l'esprit de la méthode qui ne constitue justement pas une « opération » mais repose sur l'adaptation permanente des données, cette information vieillit peu à peu.

    Si les résultats obtenus ont été utilisés pour les acquisitions courantes, ainsi que pour certains gros achats rétrospectifs, aucun bilan chiffré exprimant la portée réelle des travaux n'a pu être fait. Enfin, aucune politique de désherbage n'a pu être mise en place.

    Il faut préciser que, depuis la réalisation de cette expérience, la bibliothèque de l'université de Savoie a été confrontée à deux gros dossiers qui ont mobilisé toutes ses énergies : la construction d'un bâtiment de 2 000 m2au Bourget-du-Lac (la section sciences y a réouvert ses portes le 3 janvier 1995) et l'étude d'informatisation de la gestion dans ses différents modules (acquisition, catalogue, prêt...). Par ailleurs, la croissance du personnel n'ayant pas suivi celle des crédits, l'effort poursuivi pour la mise à niveau des collections a prévalu au quotidien sur les autres activités, dont le suivi du PDC.

    Malgré ces aspects négatifs, on peut cependant dire que le bilan d'ensemble est positif. Lors de la reprise du processus, la première expérience en la matière devrait permettre de pallier quelques défauts, et de nouveaux outils informatiques, mis en place d'ici là, devraient contribuer à de meilleurs résultats. Mais surtout, le travail déjà fait en collaboration avec les enseignants et le dialogue mené avec eux dans la perspective d'une meilleure adaptation des fonds demeurent. C'est à l'occasion de telles opérations concrètes que le dialogue, qui devrait être naturel et constant, peut enfin réellement s'amorcer ou se développer.

    La mise en place d'un plan de développement des collections est une opération lourde dont la complexité des ramifications ne doit pas être sous-estimée, notamment dans ses aspects conception, formation, temps (avant, pendant, après, à long terme). Telle que définie à la bibliothèque de l'Université Laval, la « liste des étapes pour l'élaboration d'une politique sectorielle (4) laisse rêveur par rapport au quotidien... Pour la bibliothèque de l'université de Savoie, l'expérience menée n'est encore à l'heure actuelle qu'une esquisse de ce qu'il faudrait faire, tant du point de vue de la méthode que des moyens mis en oeuvre, en outils comme en personnel. Cependant, si l'on considère les résultats de l'expérience chambérienne, qui n'est qu'une petite expérience artisanale, on peut constater que, malgré toutes les limites évoquées, on n'est pas si loin du bilan issu du lourd travail avec Conspectus entrepris aux États-Unis. Côté négatif, on trouve un conglomérat d'évaluations subjectives et de grosses difficultés pour l'évaluation de certains secteurs multidisciplinaires ; côté positif, une amélioration des services rendus, la possibilité d'un renforcement de la position de la bibliothèque dans les processus de planification de l'université, une implication plus grande des enseignants dans le développement des collections. Beaucoup reste à faire, mais l'enjeu en vaut la peine, puisque cela touche les deux pôles essentiels de l'activité des bibliothèques : le développement des fonds, la satisfaction des usagers et de leurs besoins.

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    Bibliographie

    1. Les Bibliothèques universitaires : rapport au mtnistre d'État ministre de l'Éducation nationale, de /a Jeunesse et des Sports / André Miquet - La Documentation française, 1989. retour au texte

    2. RLG Conspectus worksheet. retour au texte

    3. Cf. Université Laval. Bibliothèque. Guide pour l'élaboration de politiques sectorielles de développement des collections - Éd. rev. Québec, 1986. retour au texte

    4. cf. op. cit. retour au texte