Le succès croissant des stages de lecture rapide depuis les années soixante démontre l'intérêt et l'utilité d'une formation qui trouve sa justification dans la multiplication des écrits auxquels nous sommes confrontés tant dans la vie professionnelle que personnelle.
Ne plus être submergé par le volume de documentation technique ou administrative qui arrive quotidiennement sur les bureaux, gagner du temps sans se sentir frustré en parcourant rapidement ces écrits, tel est le but des stages de formation à la lecture rapide et efficace.
En tant que formateur auprès de publics aussi variés qu'ingénieurs, enseignants, bibliothécaires, documentalistes, étudiants ou personnel de l'administration, je peux confirmer le bénéfice des techniques de lecture au profit de lecteurs lents parce que tributaires d'une lecture intégrale prudente de tous les mots d'un texte ou craignant de perdre trop d'informations lorsqu'ils sont obligés de sélectionner pour aller vite.
Dans l'un et l'autre cas, les outils de la lecture rapide et efficace peuvent donc soit pallier la lenteur, soit lever l'incertitude sur l'efficacité réelle d'une lecture partielle.
Pour la majorité des lecteurs en début de stage, les vitesses de lecture oscillent entre 9 000 et 18 000 mots à l'heure, vitesse qu'il faut comparer à la vitesse de la parole soit 9 000 à 12 000 mots à l'heure. Ces lecteurs qualifiés de « déchiffreurs » abordent un texte plutôt en s'appuyant sur la nature alphabétique du langage.
Or un bon lecteur peut aborder l'écrit à une vitesse de 30 000 à 60 000 mots par heure. A cette vitesse, il y a régression de la prononciation mentale au cours de la lecture en privilégiant une saisie de l'information axée sur la nature idéographique du langage, production de sens plutôt que de son.
Passer d'une lecture « déchiffrage » à une lecture idéo-visuelle, tel est le but des exercices d'entraînement à la rapidité qui permettent de doubler la vitesse de lecture intégrale sans que la compréhension et la mémorisation des textes en souffrent.
Ces exercices reposent sur la connaissance des mécanismes visuels mis en jeu dans l'acte de lire et sont le support d'un entraînement visuel intensif qui permet de développer l'habilité perceptive nécessaire à une saisie plus rapide et plus sûre des informations.
La prise de conscience de freins nés de mauvaises habitudes de lecture souvent liées à la peur de perdre de l'information contribue aussi à l'augmentation des performances.
La rationalisation du comportement de lecteur ouvre parallèlement la voie de l'efficacité. Il va devoir s'agir pour le lecteur d'expliciter son comportement en l'aidant à analyser les rapports qu'il établit avec un texte dans cette situation de communication différée qu'est la situation de lecture.
S'il paraît évident qu'on ne lit pas de la même façon un journal, un dictionnaire, un roman ou un rapport, il importe cependant de réfléchir, dans des situations moins caricaturales, sur la nature du texte et à l'objectif que l'on se fixe, en faisant référence à des critères d'appréciation.
A partir de l'observation préalable d'un texte, il faut évaluer quels sont les facteurs d'incitation ou de blocage qui conduisent soit à une décision de lecture intégrale plus ou moins rapide soit à une décision de lecture partielle ou de non-lecture.
Ces facteurs ou critères de diagnostic prennent en compte le niveau de difficulté du sujet abordé en fonction des connaissances déjà acquises par le lecteur (ou référent culturel), sa motivation, que ce soit l'intérêt ou le plaisir de lire ou l'obligation dans le cas d'écrits sociaux ou professionnels, la lisibilité du texte (présentation, typographie), le choix du vocabulaire et le style de l'auteur.
Faire coïncider l'intention du lecteur objectivée par les critères de diagnostic et l'acte de lire contrôlé par la mesure de la vitesse et l'évaluation de la compréhension, tel est l'enjeu de la mise en oeuvre de la flexibilité qui constitue la base de l'efficacité en lecture.
Et l'on peut ajouter qu'un lecteur efficace est un lecteur satisfait de sa lecture, d'autant plus satisfait qu'il aura pris une décision réfléchie et motivée.
Choisir le type de lecture qui convient le mieux à la nature du texte et à l'objectif poursuivi suppose, outre la possibilité de lire plus vite, la maîtrise des techniques de lecture sélective.
Sélectionner consiste à décider de sacrifier volontairement une partie de l'information soit pour retenir l'essentiel d'un message soit pour trouver une information précise. Un certain nombre de moyens typographiques et linguistiques - structure des textes, redondance, fréquence d'apparition de mots signaux (mots clés) - aide le lecteur dans une démarche parfois hésitante parce qu'inorganisée.
La pratique des techniques de lecture sélective et leurs applications à la lecture d'un journal ou d'un ouvrage documentaire en temps imposé confirme la rentabilité des méthodes en termes d'efficacité et de gain de temps.
Les résultats positifs obtenus à ce jour par les stagiaires qu'ils soient volontaires ou contraints par leur institution, leur satisfaction globale et quasi unanime renforcent la conviction de l'intérêt et de l'utilité de cette formation dans un monde où l'écrit, loin de disparaître, progresse sans cesse.