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Aperçu de la situation des bibliothèques dans la Bosnie-Herzégovine en guerre

1995
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    Aperçu de la situation des bibliothèques dans la Bosnie-Herzégovine en guerre

    Par Edina Vlasic, Présidente Association des bibliothécaires de Bosnie-Herzégovine

    On a du mal à imaginer l'ampleur des destructions et l'état de ruine du patrimoine culturel quand on ne l'a pas vu de ses propres yeux.

    Nous allons tenter de faire l'état des dommages subis par les collections des bibliothèques de Bosnie-Herzégovine à partir des données dont nous pouvons disposer. Il est à redouter qu'il ne s'agisse là que d'un état provisoire des dégâts, la guerre continuant toujours à faire rage. Les informations ne concernent que les bibliothèques se trouvant dans les zones contrôlées par le gouvernement de Bosnie-Herzégovine et Sarajevo, ville où se trouvent les bibliothèques de la ligne de front, dont les bâtiments sont détruits ou occupés.

    Du point de vue du patrimoine, c'est l'Institut oriental à Sarajevo qui a souffert le plus, ayant perdu plus de 99 % de ses collections de manuscrits et de ses archives. La collection de manuscrits était riche de 5 263 manuscrits en langues orientales, dont le plus ancien, en arabe, remontait à 1023. Quant aux archives, elles comprenaient les manuscrits turcs (7 156 documents originaux), un fonds de 66 sidzils (documents émanant des tribunaux locaux), et les archives du Villayet, composées plus de 200 000 manuscrits remontant aux trente dernières années de l'administration ottomane en Bosnie-Herzégovine. Il y avait aussi un fonds de « defters » ou registres, datant des XVeet XVIe siècles, recopiés d'autres archives. Les fonds de la bibliothèque comportaient par ailleurs plus de 10 000 monographies d'Orientalia et domaines voisins, et un nombre égal de volumes reliés de revues.

    Les pertes subies par la Bibliothèque nationale et universitaire de Bosnie-Herzégovine sont inestimables, tant du point de vue des collections que du matériel. L'incendie a fait rage pendant deux jours. Sur les 850 000 monographies, 730 000 sont perdues, ainsi que 33 000 revues. En ce qui concerne le fonds bosniaque, qui couvre la période de 1850 à 1992, 34 000 monographies sur 50 000 ont été détruites, ainsi que 700 titres de revues et 2 000 titres de journaux. Ont été également touchés les équipements informatiques, les fax, télex, banques de données, ainsi que les ateliers de photo, microfilm et reliure. À cela, il faut encore ajouter les archives concernant l'Association des bibliothécaires de Bosnie-Herzégovine et toutes les annexes.

    La bibliothèque municipale de Sarajevo avait avant la guerre un réseau de 20 bibliothèques de quartier disséminées dans la ville. Elle possédait 250 000 monographies, dont 150 000 sont perdues, ainsi que la totalité des archives et des catalogues informatisés. Elle avait également une section pour les aveugles, riche de 11 000 monographies et 1 000 titres de périodiques. La bibliothèque municipale de Mostar a été complètement détruite, et c'est là 160 000 monographies, 60 titres de revues et 20 titres de journaux qui sont perdus à jamais. À Sarajevo, les sections suivantes de la bibliothèque universitaire ont été détruites :

    • mécanique : 30 000 monographies, 160 titres de revues ;
    • électricité : 120 000 monographies, 70 titres de revues ;
    • eaux et forêts : 45 000 monographies, 120 titres de revues ;
    • agriculture : 10000 monographies, 250 titres de revues ;
    • transports : 8 000 monographies, 20 titres de revues.

    Nous ne possédons aucune données en ce qui concerne les secteurs occupés de la ville, de même qu'en ce qui concerne la bibliothèque franciscaine de théologie. À Mostar la bibliothèque universitaire, qui comprenait 60 000 monographies et 50 titres de revues, a été entièrement détruite.

    À Bihac, les bibliothèques de l'Institut supérieur de technologie et de l'Institut supérieur d'économie, qui comprenaient plus de 5 000 monographies et 12 titres de revues, ont été totalement détruites.

    À notre grand regret, nous ne possédons pas d'informations concernant les bibliothèques spécialisées qui sont plus d'une centaine à Sarajevo. Mentionnons simplement l'Energoinvest, une grosse société, dont cinq bibliothèques ont été partiellement détruites par le feu. Huit bibliothèques d'instituts se trouvent dans les territoires occupés et nous savons que rien que deux d'entre elles possédaient déjà 16 000 monographies et 200 titres de revues.

    Trois des bibliothèques médicales se trouvent dans les territoires occupés et elles possédaient à elles seules 8 500 monographies et 220 titres de revues. Nous n'avons malheureusement pas réussi à obtenir des informations concernant les bibliothèques scolaires et les bibliothèques spécialisées en dehors de Sarajevo.

    Nous tenons à remercier Souad Hubert qui a traduit cet article.