Les scrupules de certains collègues sur l'organisation du prochain congrès de l'IFLA à Pékin sont respectables. Mais il est aussi permis d'être attaché à la défense des Droits de l'homme tout en soutenant un point de vue opposé au leur.
Depuis la dernière guerre, il est exceptionnel qu'une attitude de boycott à l'égard d'un pays ait été justifiée. Le cas de l'Afrique du Sud de l'apartheid est un des rares qui viennent à l'esprit. Ce sont d'ailleurs les opposants à l'apartheid de l'intérieur qui le souhaitaient. Le plus souvent, le blocus économique pénalise les populations et le blocus intellectuel isole des communautés qui ont besoin de communiquer, autant que faire se peut, avec le reste de l'humanité. Au contraire, le développement économique et la circulation des hommes ; qu'il s'agisse de tourisme ou d'échanges scientifiques et professionnels, peuvent contribuer à une évolution positive. On sait combien la quarantaine imposée par de nombreux pays à l'Irak et par les États-Unis à Cuba est contestable, voire criminelle, et ceux qui pour des raisons qui les honorent se sont naguère abstenus de visiter l'Espagne franquiste n'ont pas compris à quel point le développement économique, auquel le tourisme international a contribué, a permis qu'un régime honni tombe comme un fruit mûr.
Les pays d'Europe centrale et orientale sont engagés dans une transition parfois difficile, parfois inquiétante. Il n'est pas impossible que la Chine, dont le détestable régime politique ne saurait indéfiniment se maintenir en l'état, soit bien placée pour connaître une évolution moins chaotique que celle de la Russie.
Le meilleur service qu'on puisse rendre à ce grand pays pour qu'il réussisse sa transition est de développer avec lui les échanges économiques et humains. Que ce soit pour participer ou non au congrès de l'IFLA, allez en Chine ! Les Chinois ne vous en voudront pas.