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    Non-titulaires

    Uers une intégration partielle, mais significative

    Par Dominique Lahary, Bibliothèque départementale de prêt du Val-d'Oise

    Le14 mai a été signé entre le ministre de la Fonction publique et certaines organisations syndicales un protocole d'accord en vue de la résorption de l'emploi précaire dans les trois fonctions publiques (d'État, territoriale et hospitalière). Sa durée maximale sera de quatre ans. Les mesures qui seront prises pour son application se répartissent en quatre volets : l'intégration de non-titulaires, la lutte contre le recours à l'emploi précaire, la protection sociale des nontitulaires et l'insertion des CES.

    Les mesures prévues

    L'intégration de non-titulaires

    Il sera procédé à des intégrations par concours d'agents non titulaires qui assurent des fonctions dévolues aux agents titulaires. Les intéressés devront être en activité ou en congé à la date de signature du protocole, sur des emplois permanents (même si c'est à titre de remplaçant). Ils devront avoir au moment de l'ouverture de la procédure de recrutement quatre ans d'ancienneté en équivalent temps plein au cours des huit années précédentes. La durée probable du plan étant de quatre ans, il est permis de penser que plusieurs vagues de recrutement auront lieu dans ce délai pour différents corps ou cadres d'emplois concernés.

    Dans la Fonction publique d'État, le protocole s'applique aux administrations centrales et services déconcentrés et aux établissements d'enseignement public, à l'exception des personnes rémunérées sur les ressources propres des établissements. Il sera transposé aux agents non titulaires de droit public exerçant dans les établissements publics administratifs. Le plan vise explicitement les agents de catégorie C et les personnels enseignants. La situation des autres agents fera l'objet de mesures adaptées au sein des ministères concernés. Les ministères procéderont au dénombrement et à l'identification des agents concernés et les comités techniques paritaires seront saisis du dossier. L'intégration se fera par concours, notamment par des concours spécifiques réservés aux non-titulaires concernés, et pouvant consister en un entretien.

    Dans la Fonction publique territoriale, le protocole s'applique aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics. Deux catégories d'agents non titulaires sont concernés : ceux qui occupent des emplois ne donnant pas lieu à recrutement (c'est-à-dire les emplois d'échelle 2, dont les agents du patrimoine) et ceux qui ont été recrutés dans des cadres d'emplois pour lesquels un concours au plus a donné lieu à l'établissement d'une liste d'aptitude à la date de signature du protocole : les cadres d'emplois d'assistant de conservation, d'assistant qualifié de conservation, de bibliothécaire (1) et de conservateur répondent à cette condition, mais pour les agents qualifiés du patrimoine cela dépendra du nombre de concours déjà organisés par les centres de gestion ou les collectivités non affiliées. L'intégration dans les cadres d'emplois accessibles par concours se fera par des concours spécifiques consistant probablement en un entretien. Celle dans les cadres d'emplois accessibles sans concours sera directe. Les postes créés pour la circonstance ne seront pas ouverts à d'autres candidats. Les autorités territoriales demeureront maîtresses de leur décision en matière de création de postes et de recrutement dans ces postes mais, les listes d'aptitude ainsi établies étant de validité nationale, des lauréats pourraient être recrutés dans d'autres collectivités. À la ville de Paris des mesures homologues seront prises. Toutes ces dispositions devront faire l'objet d'une loi modificative.

    La lutte contre le recours à l'emploi précaire

    Le recours à l'emploi précaire devrait être limité, notamment par une gestion prévisionnelle des effectifs, métiers et emplois et ainsi que par l'adaptation des statuts particuliers des corps et cadres d'emplois. Dans la Fonction publique d'État, les comités techniques paritaires seront saisis du dossier et il devrait y avoir suppression progressive des crédits de rémunération des non-titulaires excédant les besoins de remplacement. Dans la Fonction publique territoriale, le contrôle de légalité devrait être renforcé.

    La protection sociale des agents non titulaires

    Diverses mesures d'amélioration devraient être prises, et notamment l'obligation d'un engagement écrit, généralement un contrat, précisant les conditions de rémunération, les fonctions exercées, la durée de l'engagement et ses conditions de renouvellement.

    Contrats emploi-solidarité

    Des mesures devraient être prise pour leur assurer une formation, notamment la préparation aux concours. Les CES ne devront pas occuper des emplois correspondant à des besoins permanents.

    Premiers commentaires

    Les deux têtes de l'hydre

    Le recours aux emplois précaires est dans les fonctions publiques un mal récurrent qui, tel les têtes de l'hydre de Lerne, réapparaît sitôt combattu. Le dernier grand plan d'intégration des non-titulaires dans la Fonction publique territoriale a dix ans. Tout est aujourd'hui à recommencer. On voudrait croire que ce plan-ci sera le dernier, il est permis d'en douter. Au moins est-il susceptible de régler une partie des cas douloureux qui se présentent dans de nombreuses bibliothèques. Car ces dernières années, deux phénomènes parallèles ont entraîné la prolifération des emplois précaires dans nos établissements.

    Le premier tient à l'insuffisance des postes budgétaires. C'est ainsi qu'on a vu notamment les CES se multiplier, dans les bibliothèques universitaires comme dans les bibliothèques municipales et départementales. « En aucun cas [les CES] ne pourront occuper des emplois correspondant à des besoins permanents » est-il écrit noir sur blanc dans le protocole. Pour que cette phrase ne demeure pas un voeu pieux, il faudra réviser bien des politiques délibérées de gestion des ressources humaines !

    Le second phénomène tient à l'inadaptation des procédures de recrutement mises en place à la suite de la réforme statutaire de 1991-1992, particulièrement dans la Fonction publique territoriale. Dans un premier temps, les concours n'étant pas mis en place, les collectivités ont recruté sur contrat des agents qu'elles ont choisis pour leur compétence. Puis ces concours ont été organisés, ce qui n'a rien résolu. Les non-titulaires n'ont pas forcément été reçus, et ceux qui ont été reçus n'ont pas forcément été recrutés : il est difficile de convaincre des élus ou des directeurs de bibliothèque qu'on peut recruter des candidats n'ayant bénéficié d'aucune formation professionnelle au motif que celle-ci sera assurée après le recrutement ! Et de nouveaux non-titulaires ont été engagés. Pour s'attaquer à la racine du mal il faudra bien, comme il est écrit dans le protocole, procéder à l'adaptation [...] des statuts particuliers des corps et cadres d'emplois ».

    Les « CAFBistes » et les autres

    On a beaucoup parlé du cas de ces centaines de titulaires du CAFB recrutés comme contractuels, et menacés chaque année d'un non-renouvellement de leur contrat. Après de nombreuses démarches et protestations, ceux-ci ont obtenu la mesure que l'on sait : 30 % des postes ouverts lors des trois prochaines sessions du concours d'assistant sont réservés aux titulaires du CAFB, qui concourront sur titre et non sur épreuves. Le protocole d'accord apporte une solution plus globale : il ne se limite pas au seul cadre d'emplois des assistants, ce qui devrait permettre à des agents non titulaires occupant par exemple un emploi d'assistant qualifié d'être titularisés à ce niveau, tandis que des personnes titulaires non du CAFB mais d'autres diplômes comme les DUT se trouvaient dans une situation similaire. Aussi peut-on espérer que la conjugaison des deux mesures permette de résoudre de nombreux cas individuels. Cela suppose que l'exercice du contrôle de légalité, dont le protocole prévoit le renforcement, ne s'applique pas de façon prématurée : pour que les contractuels puissent bénéficier des mesures de ce plan pendant les quatre années annoncées, encore faut-il que leurs contrats soient renouvelés autant de fois que nécessaire.

    Dans la Fonction publique d'État, hormis le cas des agents de catégorie C explicitement prévu, il faudra attendre que les ministères concernés aient procédé à l'inventaire des postes nécessaires et obtenu leur création pour savoir dans quelle mesure le sort des nombreux non-titulaires, notamment ceux de la BNF, sera réglé.

    1. La liste d'aptitude du second concours de bibliothécaire n'étant parue que le 15 mai, soit un jour après la signature du protocole. retour au texte