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    La bibliothèque interuniversitaire de médecine

    Par Pierrette Casseyre, Directeur BIUM

    La Bibliothèque interuniversitaire de médecine située à Paris est CADIST (centre d'acquisition et de diffusion de l'information scientifique et technique) pour le domaine médical et odontologique.

    Par ailleurs, elle est pôle associé de la BnF pour certains secteurs thématiques de la médecine. De ce fait, en plus des publics médicaux de son ressort universitaire, elle reçoit et accueille un public beaucoup plus diversifié, intéressé à la fois par son fonds patrimonial, ses acquisitions récentes et ses nouveaux produits via le Web.

    Comment peut-on concilier la notion de service public au sens large et la réalisation de prestations qui entraînent une redevance de la part des usagers ? C'est ce que je vais essayer de démontrer.

    Le service « centre de fournitures de documents que volontairement je n'intitule pas « prêt entre bibliothèques », est le service où les prestations comportent un coût : celui-ci est différent selon les organismes.

    Quelques chiffres : 77 506 transactions en 1998. Celles-ci nécessitent de notre part une étude approfondie des différents clients. Ce terme employé peut paraître inusité dans un service public, mais il est tout à fait approprié lors qu'il y a prestations, coût, tarifications. Le problème des tarifications multiples a été évoqué lors de précédentes tables rondes ; je n'y reviendrai pas.

    Actuellement, des demandes de photocopies peuvent être émises via Internet. Cette possibilité existe uniquement pour les clients ayant un compte à la bibliothèque. À cette nouvelle manière de procéder s'ajoute la diversité des méthodes existantes : messagerie électronique, courrier, fax.

    Les différents modes de demande entraînent également différentes formes de traitement. Par exemple, une demande de fax est traitée dans l'heure. Ainsi, les chaînes de traitement sont obligatoirement vues différemment.

    La BIUM possède en outre un laboratoire photographique où deux photographes travaillent à plein temps : 9 000 clichés ont déjà été établis à partir du fonds existant.

    La diversité des demandes (microfiches, diapositives, photographies) induit bien sûr des coûts variés. Ceux-ci ont été étudiés en s'informant des tarifs couramment pratiqués dans les bibliothèques ou organismes possédant des laboratoires photographiques (comme la BnF, la bibliothèque du Muséum, l'École des beaux-arts, etc.).

    Les clients », à la différence des clients demandeurs de photocopies d'articles, sont extrêmement diversifiés : nous trouvons le particulier à la recherche d'un portrait de médecin, l'historien, le cinéaste, l'éditeur... La BIUM travaille également pour d'autres bibliothèques parisiennes ne possédant pas de laboratoire photographique.

    La gestion administrative qui en découle est un acte lourd. Cinq personnes à statut administratif travaillent dans ce service ; le reste du travail est à faire par le personnel de l'agence comptable de l'université, pour des titres de recettes souvent assez complexes ou parfois peu élevées. Il est évident que les recettes découlant du service de fournitures de documents en particulier sont importantes. Comment sont-elles employées ? Au bénéfice de tous, à savoir dans l'acquisition de la documentation scientifique.

    Actuellement, il ne faudrait pas sous-estimer deux aspects importants de la gestion de la BIUM, en particulier le coût de la conservation des documents patrimoniaux, et tout simplement le coût de la documentation médicale actuelle.

    Concernant le premier point, la BIUM se trouve, comme beaucoup de bibliothèques à fonds patrimonial, confrontée au danger de voir disparaître le fonds du XIXe siècle où, après étude, la moitié sinon les deux tiers des ouvrages et périodiques devraient être désacidifiés.

    Il est strictement interdit au lecteur de photocopier ces documents. La bibliothèque a acquis une machine à numériser permettant de prendre le maximum de précautions pour une reproduction. Le lecteur s'étonne, parfois s'indigne. Le patrimoine appartient à tous et sa sauvegarde est primordiale. La BIUM prépare un petit fascicule à l'usage des lecteurs du fonds ancien, pour qu'ils soient partie prenante dans cette sauvegarde.

    Nous sommes, bien sûr, dans l'ère de la photocopie. Mais le lecteur a toujours le choix de prendre des notes, et de plus en plus d'entrer ses données sur micro.

    Le deuxième point, à savoir le coût de la documentation médicale actuelle, est capital. Tout d'abord, quelques chiffres.

    Prix moyen d'un périodique édité :

    • Pays-Bas 9 812 F
    • Allemagne 3 230 F
    • Royaume-Uni 3288 F
    • États-Unis 2 696 F

    Pourcentages d'augmentation :

    • chez Elsevier 45 % de 1995 à 1997
    • chez Springer 25 % de 1995 à 1997 10% de 1997 à 1998
    • chez Karger 32 % de 1995 à 1997 7 % de 1997 à 1998

    La BIUM va faire paraître in extenso sur son Web le rapport d'activité 1998 du service des périodiques. Par ailleurs, ce rapport sera affiché au-dessus des photocopieurs et distribué.

    Le lecteur est consommateur. Il existe des associations de consommateurs pour dénoncer tel ou tel procédé. Pour l'instant, rien de tel dans les bibliothèques si ce n'est des réactions, pour la plupart isolées (je dois dire que l'ABF a voté une motion sur l'information scientifique dans l'université), devant l'augmentation insoutenable de certains éditeurs médicaux et scientifiques en position de monopole.

    Comme dans certains pays étrangers, l'idée de groupements d'achats ou de consortia fait lentement son chemin dans les bibliothèques universitaires, plus précisément dans les secteurs scientifiques ou médicaux, ceci permettant l'existence d'un groupe de pression. Mais les chercheurs, les universitaires doivent absolument se mobiliser avec les bibliothèques car ils sont partie prenante, la plupart du temps en tant qu'auteurs.

    La BIUM met à la disposition des lecteurs de très nombreuses bases de données accessibles gratuitement. Il semble tout à fait normal que des entreprises privées, en l'occurrence des laboratoires, paient un droit d'inscription beaucoup plus élevé que celui du lecteur autorisé, bénéficiant ainsi de services dispendieux à moindre coût.

    Une très forte demande est en émergence actuellement de la part d'utilisateurs soit réels, soit potentiels de la BIUM. En effet, un besoin dans l'urgence de recherches bibliographiques sur un sujet, avec à la clef les photocopies afférentes des articles principaux, est une nécessité réelle.

    Les recherches bibliographiques étaient faites sous forme payante jusqu'à l'apparition des cédéroms bibliographiques, dont la consultation gratuite avait fait disparaître cette prestation. Mais un service que je qualifierai de « clefs en main » est de plus en plus demandé. Pour beaucoup de médecins, le temps est très précieux, a fortiori pour les médecins étrangers. D'emblée, cette clientèle est tout à fait prête à payer les services rendus. Dans l'esprit du public, il n'y a donc pas opposition entre service public et coût de certaines prestations.

    Mais à quoi reconnaît-on un service public, si ce n'est à sa manière de servir ?

    L'aide à l'utilisateur dans l'interrogation des bases de données sur cédérom ou sur Internet est un service à valeur ajoutée très apprécié. Le temps d'attente minimum d'accès à un document, grâce au travail des magasiniers, est d'autant plus apprécié que le public médical est un public pressé, souvent entre deux consultations, ou entre deux trains lorsque le lecteur vient de province.

    Internet ouvre des possibilités infinies d'accès non seulement aux collections de la bibliothèque, mais à un panorama du contenu quand c'est possible. Le Web de la BIUM a été conçu dans cette voie et les projets à long terme vont dans ce sens.

    Les dossiers d'actualité médicale créés et régulièrement mis à jour font connaître sur un thème donné les richesses de la bibliothèque en articles, ouvrages, chapitres d'ouvrages, mémoires, thèses, adresses d'organismes. La base de données des thèses et des congrès obéit à la même optique.

    L'annuaire des bibliothèques médicales, la liste et les liens des sites médicaux Internet sont aussi très consultés.

    Enfin, deux prestations proposent à tous un accès au fonds iconographique.

    La première exposition virtuelle sur l'évolution de la médecine à travers les frontispices du XVIe au XIXesiècle inaugure une série qui sera régulièrement accessible à tous.

    Ainsi, l'étude économique de la gestion d'une bibliothèque et des prestations payantes peuvent tout à fait - et doivent - exister sans que le service public devienne plus qu'un voeu. Au contraire, l'équilibre entre ces deux notions est possible, souhaitable, réaliste.