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A propos de la collaboration entre les professionnels des bibliothèques et les universitaires

1986

    A propos de la collaboration entre les professionnels des bibliothèques et les universitaires

    Par LP. LAPREVOTE, I.U.T. de Nancy

    Vous voudrez bien me permettre de revenir, sans plan précis, sur certains points évoqués jusqu'ici.

    I - Rattachement de la formation des bibliothécaires aux Universités.

    Je tiens à faire remarquer à Monsieur RENOULT que les I.U.T. sont des établissements universitaires. Il n'y a pas d'un côté des Universités et de l'autre des I.U.T. Sur ce point il faut être très précis.

    Dans les I.U.T. la formation des "Métiers du Livre" est organisée à partir du Programme Pédagogique National des I.U.T. "Carrières de l'Information" (P.P.N.). Actuellement ce programme est très souple en ce qui concerne la spécialité Métiers du Livre, car dans son dispositif final il prévoit explicitement cette formation sans donner trop de précision quant au contenu des matières à enseigner. Cela donne donc une grande souplesse d'adaptation sous réserve du respect des volumes horaires de formation prévus dans le P.P.N. et parfois de la dénomination de certains enseignements. On peut donc - et nous le faisons à Nancy depuis des années avec les résultats positifs que l'on sait - offrir une préparation au CAFB dans le cadre de la spécialité Métiers du Livre du département Carrières de l'Information de l'I.U.T. Encore une fois l'essentiel est d'inscrire cette formation à l'intérieur de certaines normes du P.P.N.; Monsieur DIDELOT se souvient que nous avons eu sur ce point quelques conversations enrichissantes.

    II - Formation dans les Départements d'IUT et dans d'autres filières universitaires.

    Il se met en place actuellement dans des filières universitaires autres que celles des I.U.T., des formations qui s'intitulent "communication" ou "information". Le niveau est parfois équivalent à celui des I.U.T. (Bac + 2 ans), parfois supérieur. Ces filières pourront-elles orienter leurs candidats vers les Métiers du Livre et particulièrement les bibliothèques ? Je l'ignore. Tout ce que je sais, c'est qu'on risque d'aller au devant de quelques désillusions. Car, si l'on maîtrise les flux d'étudiants dans les I.U.T., on les maîtrise beaucoup moins dans d'autres formules et l'on pourrait dans les années à venir voir apparaître sur le marché de l'emploi des diplômés trop nombreux se réclamant d'une spécialité relevant de l'information et de la communication. Que ce soit pour les métiers du livre ou pour d'autres métiers de l'information et de la communication, je m'interroge sur les études de débouchés qui ont justifié la mise en place de certaines nouvelles filières. Parce que nous avons une pratique de plus de quinze ans, nous pouvons, dans les I.U.T., dire que nous savons à peu près ce que nous faisons et en tout état de cause encore une fois que nous avons une relative maîtrise des flux d'étudiants.

    777 - L'année spéciale des I. U. T.

    C'est une formule offerte à des étudiants qui ont déjà un diplôme de premier cycle d'enseignement supérieur des I.U.T. et qui leur permet d'obtenir un D.U.T. en un an. Il serait bon, à mon sens que cette année spéciale soit ouverte à ceux qui n'ont pas de diplôme d'enseignement supérieur du premier cycle, mais qui auraient par exemple une solide expérience professionnelle.

    IV - Complémentarité entre la formation des documentalistes et celle des futurs bibliothécaires.

    On a fait une distinction nette parfois trop tranchée entre les documentalistes et les bibliothécaires. Je pense qu'il faut rapprocher le plus possible ces deux types de formations. Cela me paraît nécessaire dans les I.U.T. lorsque nous prenons en charge une préparation au CAFB. Car, l'étudiant qui n'est pas admissible à l'écrit du CAFB doit pouvoir terminer un DUT et mieux vaut que ce soit au titre de la documentation. Par ailleurs certaines techniques me semblent identiques: l'apprentissage de l'utilisation des bases et banques de données par exemple. Enfin, l'organisation de cours communs, comme nous l'avons mis sur pied à Nancy depuis deux ans, grâce à Mme CARRERE et à M. DIDELOT, doit nous conduire à nous demander si cela n'est pas de nature à justifier des équipements spécifiques de formation plus lourds. Par exemple, pourquoi pas une bibliothèque-école ? M. l'Inspecteur Général THIRION, évoquant le fait qu'une partie des enseignements de technologie de l'I.U.T. se faisait à la bibliothèque universitaire et avec l'aide appréciée des bibliothécaires semblait dire tout à l'heure qu'il y avait une sorte de détournement des moyens de la bibliothèque au profit de la formation. Pendant six ans à la tête du Département Carrières de l'information de l'I.U.T., je me suis demandé s'il n'y avait pas une sorte de détournement des moyens de l'I.U.T. pour le centre de formation des bibliothécaires. En fait, il n'y a pas de détournement du tout mais, il faudra bien un jour que l'on précise qui organise la formation initiale et continue et qui amène le savoir technique.

    V - Personnel mis à la disposition de la formation.

    Il faudra bien en effet un jour que l'on clarifie la situation du personnel mis à la disposition de la formation professionnelle. Les I.U.T. ont l'obligation de recourir à des professionnels pour leurs formations à finalité professionnelle. Quand il s'agit de formation de bibliothécaires, il est normal d'aller chercher des bibliothécaires pour assurer une partie de l'enseignement technologique. Une filière de formation à finalité professionnelle ne peut pas fonctionner dans de bonnes conditions si elle n'est pas animée, administrée, coordonnée par des professionnels suffisamment compétents et motivés et disponibles. Nous avons heureusement à Nancy M. DIDELOT et M. MICHEL. Mais se pose la question du rapport administratif, j'allais presque dire dans certains cas hiérarchique - entre ces professionnels et le système éducatif. Sur le plan administratif je pense que la situation n'est pas satisfaisante. Il vaudrait mieux qu'un ou plusieurs bibliothécaires soient formellement mis à disposition de l'I.U.T. ; ou pourquoi pas qu'ils soient placés pendant un nombre d'années à déterminer dans un statut d'enseignant associé avec la possibilité de retrouver par la suite leur corps d'origine. Pourquoi ne pas demander la création de quelques postes d'enseignants de la 71esection du CCU (Sciences de l'Information et de la Communication), avec des profils métiers du livre pour y placer ceux qui auraient à prendre en charge dans le cadre des I.U.T. l'animation des centres de formation aux métiers des bibliothèques ?

    VI - Remarques finales.

    Nous avons encore ici à Nancy à régler quelques problèmes techniques et peut-être psychologiques pour disposer d'un outil de formation encore plus performant.

    Problèmes techniques d'abord. Notre système administratif devient de plus en plus contraignant et de plus en plus rigoureux. L'I.U.T. par ailleurs se bureaucratise. Entre le moment où l'on a créé sur le papier l'I.U.T. tertiaire, où l'on a construit ses bâtiments et maintenant, nous avons évolué. Les conditions de gestion de l'I.U.T. ne sont plus ce qu'elles étaient il y a cinq ans seulement. Nous risquons d'être de moins en moins à l'aise face aux situations aréglementaires. Je dis bien aréglementaires et pas irréglementaires si vous permettez ce néologisme. Prenons l'exemple de la bibliothèque de l'I.U.T.: nous l'avons créée et mise en place, avec l'accord du directeur de l'I.U.T. parce que Gérard THIRION et moi partageons un même principe: pas d'établissement universitaire sans bibliothèque universitaire. Mais tout n'est pas réglé sur le plan administratif, c'est entre autres pour cela que la bibliothèque de l'I.U.T. est sous la responsabilité du Département Carrières de l'Information mais que le bibliothécaire est sous la responsabilité du conservateur des Bibliothèques universitaires.

    Personnellement, mais c'est sans doute ma formation d'origine qui veut cela, je préfère les situations dans lesquelles les organigrammes et les responsabilités des uns et des autres sont bien précisées, ne serait-ce que pour mieux savoir quand et comment il faut faire évoluer les choses.

    Restent les problèmes que j'appellerai psychologiques. Paradoxalement bibliothécaires et universitaires se connaissent mal. Quelqu'un a parlé tout à l'heure du corporatisme des bibliothécaires, mais il y a aussi un corporatisme des universitaires, pas toujours injustifié d'ailleurs. L'essentiel c'est de bien nous mettre dans la tête que nous participons ensemble à un même processus de formation, que nous sommes, parce que fonctionnaires, au service de la collectivité, que nous devons répondre aux besoins exprimés par la société et pas seulement à notre conception personnelle et nécessairement limitée de ces besoins. Et là je crois que nous avons encore beaucoup à faire. Prenons l'exemple de la bibliothèque de l'I.U.T.: nous l'avons créée et pour cela nous avons bénéficié de la compétence et du dévouement de M. MICHEL qui maintenant participe directement à nos enseignements. Il a peut-être eu à supporter parfois les humeurs de certains universitaires, dont je suis, mais nous avons eu, nous, à mieux comprendre les usages et les exigences des bibliothécaires. Cela ne nous empêche pas d'avoir mis en place une expérience positive et intéressante que nos étudiants apprécient. Il y a six ans nous n'avions pas de bibliothèque à l'I.U.T. et maintenant il est hors de question que notre bibliothèque puisse fermer: demandez aux étudiants ce qu'ils en pensent. Nous avons travaillé ensemble et dans la même direction: cela a été positif. Cette collaboration entre les universitaires et votre profession est donc possible et souhaitable.