Après plus de 40 ans d'efforts, c'est-à-dire depuis 1947 date de l'Indépendance, l'Inde est incontestablement devenue une puissance scientifique : sa position de leader des pays du Sud-Est asiatique ne lui est pas contestée.
La place de l'Inde dans le domaine de la recherche scientifique est unique parmi les pays en voie de développement : ces derniers la considèrent comme une "super puissance", et elle est classée au 8e rang mondial dans le domaine des publications scientifiques (dix mille titres contre deux mille pour la Chine).
La population est estimée, en.1992, aux alentours de 883 millions d'habitants avec une augmentation de 2% par an (chiffre équivalent à celui de la Chine). C'est dire l'importance que devraient prendre la médecine et la santé en Inde.
En 1986, 318 000 médecins étaient recensés, soit 1 pour 2 471 habitants (par comparaison, en France la proportion de médecins est 5 fois plus grande), et le chiffre de 695 000 lits d'hôpitaux est avancé (soit seulement le double de la capacité française d'hospitalisation pour une population 15 fois plus nombreuse).
Des systèmes médicaux propres à l'Inde, ayant pour nom "Ayurveda", "Unani" et "Sidha", préexistaient à la colonisation anglaise. Lentement, avec les encouragements du gouvernement britannique, la médecine occidentale prit le pas sur la médecine traditionnelle : le premier collège médical fut établi vers le milieu du 19e siècle. A l'heure actuelle, 466 collèges médicaux et en science de la santé sont dénombrés.
Avec l'essor de la documentation mondiale, P'Tndian Council of Medical Research" fut chargé de remodeler et d'uniformiser l'éducation médicale du pays, domaine qui reste, malgré les efforts faits, à l'état embryonnaire. Une des solutions serait l'extension du nombre des bibliothèques médicales.
Depuis 1978, le développement de l'information médicale sur le territoire commence à être pris en compte par l'Etat indien. L'autorité centrale est représentée par l'Indian Council of Medical Research" (ICMR) sous la tutelle du Ministère de la Santé.
Il y a 613 bibliothèques médicales et en sciences de la santé en Inde. attachées soit à des collèges et écoles médicales ou infirmiers, soit à des hôpitaux de districts. Mais ce n'est pas encore un programme prioritaire pour la nation et cela s'en ressent au niveau du support financier. Les services offerts sont les services traditionnels d'une bibliothèque, sans les moyens modernes apportés par les nouvelles technologies. Pauvreté des budgets, manque de temps praticiens et chercheurs, rareté des demandes de spécialistes, sont quelques-unes des causes de la désaffection des bibliothèques médicales.
Quelques chiffres sont significatifs : 75% n'assurent pas de prêt inter bibliothèques, 68% n'utilisent pas Medline, 38% n'ont pas d'accès libre, 17,4% ne souscrivent aucun abonnement à des périodiques ; 81% ne fournissent pas de service bibliographique.
D'autre part, le Centre national de la documentation (NIC) à New Delhi a mis sur pied un centre de documentation biomédicale pour le "Indian Council of Medical Research" (ICMR). Ce centre, baptisé NIC-ICMR, utilise essentiellement les banques de données américaines type Medline, et a implanté, sur son site, des CD-ROM.
La situation des bibliothèques médicales reste cependant très inégale selon les 5 grandes régions de l'Inde. Une structure en réseau existe qui ne demande qu'à se renforcer.
La Bibliothèque nationale de médecine est située à New Delhi, la capitale. Cinq grands instituts dépendent d'elle, correspondant à chacune des 5 grandes régions précitées :
La Bibliothèque nationale de médecine commence à collaborer avec la "US National Library of Medicine" en vue d'implanter des centres MEDLARS, ainsi qu'avec l'UNESCO dans le but d'appliquer les programmes NATIS et UNISIST.
Les chiffres fournis sont malheureusement assez anciens ; un inventaire des ressources a été entrepris : les 39 bibliothèques d'écoles médicales possédaient 664 000 ouvrages en 1972 et 969 000 en 1979.
Dans ce contexte particulier, les bibliothécaires médicaux sont peu reconnus et peu formés aux techniques documentaires actuelles. Les profils de poste restent à définir. Il faut cependant souligner que les activités d'information en Inde sont gérées par les bibliothécaires ou documentalistes. Cette tradition bibliothéconomique rigoureuse a généré des systèmes de traitement de l'information rationnels.
La "Medical Library Association of India" a pris l'initiative de la formation professionnelle continue des bibliothécaires médicaux et a organisé des cours sur l'indexation, les interrogations de banques de données en ligne. En outre, seuls 20% des bibliothécaires assistent à des congrès professionnels.
La documentation scientifique et médicale peut et doit jouer un rôle plus important dans l'économie des pays en voie de développement, mais, en Inde, il existe une désaffection manifeste à l'égard de la documentation et des bibliothèques médicales en particulier; le sort des bibliothèques scientifiques est plus enviable.
Il y a en Inde une tradition intellectuelle très forte et beaucoup de concepts scientifiques y ont vu le jour. La place de l'Inde dans la recherche scientifique n'est plus à démontrer, mais ne pourra s'imposer qu'avec un plus grand développement de l'information médicale et scientifique dans le pays.
(1) KITTUR K.N.- Medical Libraries in Health Management, Conférence IFLA 1992 New Delhi, meeting n° 97
(2) LALITH NAL.- Information Needs of Health Professionnals in Remote Areas, Conférence IFLA 1992 New Delhi, meeting n° 97
(3) MAJID PATHAN A.- "The Health Sciences Library Network for India", International Library Review, 1989, 21, p.411-439
(4) MAJID PATHAN A.- "Education for Medical Librarianship in India" , International Library Review, 1978, 1978, p. 187-209
NDLR : Le texte intégral de cet article, intitulé "Panorama de l'information médicale et scientifique en Inde", a été publié dans "Documentaliste, sciences de l'information vol. 29, n°6, nov.-déc. 1992, p. 277-283