Précédant ce colloque, une enquête avait été réalisée par le Service de la lecture publique, par l'intermédiaire des 54 BCP, auprès des lecteurs de plus de 16 ans : 47 438 questionnaires ont été diffusés et 14 315 réponses ont été enregistrées dans un délai de trois semaines, soit 30 %. Il est rare qu'une telle enquête ayant lieu au niveau national obtienne une telle proportion de réponses (on se contente le plus souvent de sondages). Le rapport détaillé, publié dans le Bulletin des bibliothèques de France n° 6 de juin 1972 (pp. 288-291) à la suite de mon compte rendu sur le colloque des lecteurs, n'a pas obtenu auprès de la presse et des professionnels du livre l'écho espéré. L'analyse des résultats, comme le notait Jean Prasteau dans Le Figaro du 27 mai 1972, était pourtant passionnante :
Ainsi, les chiffres à propos des motivations de la lecture sont éloquents: elle est d'abord un divertissement, 49 % des enquêtés ont déclaré lire pour leur distraction, 28% pour s'instruire et 15% pour s'informer.
Quant aux éléments qui influencent le choix des lecteurs, les réponses réservent des surprises 22 % ont en effet choisi en fonction de l'actualité, 18 % sur des conseils de bibliothécaires, 18 % sur la foi de la presse, 12 % à la suite de conversations amicales, 9 % après une émission de télévision, 6 % sous l'influence de libraires et 3 % sous celle de la radio.
À propos de la télévision, les chiffres semblent donner raison à ceux qui pensent qu'elle joue un rôle plutôt néfaste. Si en effet 63 % des enquêtés assurent que la télévision n'a aucune influence sur la fréquence de lecture, 23 % avouent lire moins depuis qu'ils possèdent un téléviseur alors que 8 % affirment lire plus.
Pour 45 % des interrogés, la lecture demeure le meilleur moyen d'acquérir des connaissances, 14 % seulement pensent que l'audiovisuel joue ce rôle efficacement.
Le goût du roman demeure le plus protégé des lecteurs de BCP, 38 % d'entre eux l'indiquent, auxquels il faut ajouter 7 % de fanatiques du roman policier. L'histoire vient ensuite avec 11 %, la presse et l'art avec 1 % sont bien loin. Quant aux BD elles ne retiennent l'attention que de 0,5 % des fidèles des bibliobus.
On a également interrogé les lecteurs sur les obstacles qu'ils voyaient à la lecture. Pour 46 %, c'est le manque de temps, 17 % estiment que c'est plutôt le prix des livres et 15 % la fatigue, 2 % ont déclaré que les caractères trop petits de bien des ouvrages les décourageaient trop souvent.
Vingt-trois ans après, les lecteurs des bibliothèques départementales de prêt réagiraient-ils de la même façon ?