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    Expertise en cas d'urgence

    Par Astrid Brandt, Conseiller scientifique

    Le contexte

    Une inondation suivie d'une contamination consécutive du fonds par des moisissures constitue un véritable défi pour une bibliothèque. Il s'agit de réagir rapidement et de façon organisée au risque d'aggraver la situation.

    La direction des services de conservation de la Bibliothèque nationale de France a développé depuis plusieurs années une expertise dans le domaine des interventions en cas d'urgence (inondation et/ou contamination des collections par des moisissures).

    Cette expertise, qui est principalement apportée par le laboratoire de la direction des services de conservation, profite d'abord aux directions des collections de la Bibliothèque nationale de France. Cependant, dans certains cas exceptionnels d'autres bibliothèques peuvent demander à la Bibliothèque nationale de France de mettre cette expertise à leur disposition.

    La problématique

    L'évaluation de l'ampleur des dégâts et la proposition des premières mesures d'intervention doit se fonder sur une approche globale. Aucun facteur ne doit être négligé. Il ect nécessaire d'inspecter les collections, les mobiliers, les bâtiments et les réseaux de fluides. De même, il s'agit de remonter aux causes des sinistres, afin de pouvoir ensuite proposer un plan de prévention de désastres.

    Un tel plan permet en effet d'intervenir rapidement et de minimiser les dégâts. Il s'agit d'avoir à sa disposition un matériel d'intervention en bon état (appareils de mesure de la température et de l'humidité relative, buvards et produits absorbants, ventilateurs, déshumidificateurs, etc.). Par ailleurs, il faut disposer d'une liste de fournisseurs de produits et de services (transport, congélation, lyophilisation, etc.).

    Une analyse insuffisante de la situation après un sinistre peut amener plus ou moins rapidement à l'aggravation de la situation. Ainsi, l'infiltration d'eau derrière des étagères ou en dessous d'un parquet peut provoquer quelques semaines à quelques mois plus tard une contamination générale des collections par des moisissures. Les coûts d'interventions seront d'autant plus élevés que l'analyse des problèmes sera négligée au début de l'intervention.

    Les intervenants

    Il est impératif de faire intervenir plusieurs corps de métiers pour l'expertise : scientifiques de laboratoire, restaurateurs, ingénieurs, architectes, agents de sécurité, etc. Néanmoins, il est nécessaire de charger une personne de la coordination pour assurer la cohérence des différentes opérations. Cette personne doit être spécialement formée pour :

    • reconnaître les différents facteurs d'altération,
    • savoir agir sur ces facteurs,
    • évaluer les propositions faites par les différents corps de métiers,
    • implanter et suivre les mesures préventives ou curatives,
    • former le personnel interne.

    Actuellement les personnes ayant une formation technique suffisamment approfondie sont encore rares. Il est nécessaire de former davantage de personnes aux techniques d'inspection et d'évaluation des conditions de conservation et aux interventions en cas de sinistres. La direction des services de conservation dispense une telle formation en interne. Ses experts interviennent également dans le cadre de séminaires organisés par d'autres institutions.

    Même lorsque l'expertise est confiée à des consultants externes à l'établissement, il est souhaitable de disposer de personnels internes suffisamment avertis pour porter un jugement sur les propositions soumises.

    Les réflexions à mener

    Il serait important d'établir dans ce domaine des chartes définissant le type et les conditions d'intervention des prestataires externes (obligation de moyens ou de résultats ?). En effet, il y a de plus en plus de sociétés qui proposent des interventions dans ce domaine.

    Il est suggéré d'approfondir au niveau national ou régional la réflexion sur :

    • les méthodes d'évaluation des conditions de conservation,
    • l'implantation des procédures en matière de prévention de désastres,
    • la formation du personnel dans ce domaine.

    On citera l'exemple du Conseil canadien des archives qui a mission de contrôler l'emploi des subventions de l'État pour la préservation des fonds d'archives. L'inspection des conditions de conservation et si nécessaire l'amélioration de celles-ci ainsi que la mise au point d'un plan d'intervention en cas de désastre est un préalable pour l'attribution ultérieure des budgets nécessaires à la restauration des collections.