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    Technique de conservation

    Par Monique Ducreux, Conservateur général Bibliothèque centrale du Muséum d'histoire naturelle

    Je parlerai des problèmes de conservation des collections à partir d'un exemple concret, celui de la Bibliothèque centrale du Muséum et de me permettre d'évoquer l'aide apportée par la Bibliothèque nationale de France (service de conservation) dans une opération d'expertise, de réhabilitation et d'assainissement d'un local contaminé par des champignons.

    La Bibliothèque centrale du Muséum en effet a été confrontée à une situation qui risquait de compromettre gravement à moyen et long termes les conditions de conservation de ses collections précieuses conservées d'ordinaire dans la salle dénommée Salle des Vélins.

    La Bibliothèque du Muséum, bibliothèque de recherche patrimoniale et publique, spécialisée dans le domaine des sciences de la nature et de la vie, détient outre ses collections courantes de périodiques et d'ouvrages, des collections anciennes d'imprimés, des manuscrits, des iconographies originales, tableaux, gravures, estampes, objets d'art.

    Si elle a bénéficié de la rénovation de la Galerie de zoologie devenue Grande Galerie de l'Évolution, qui a permis de réhabiliter, restructurer le bâtiment de consultation, quelques accidents sont survenus pendant cette période qui auraient pu, s'ils n'avaient pu être résolus, être graves de conséquence.

    En effet, au cours des travaux commencés en juillet 1993, la Salle des Vélins a été inondée par deux fois en juillet et octobre, inondations dues à la négligence de l'entreprise. Il faut préciser que fort heureusement la pièce avait été vidée de son contenu bien avant les travaux. Elle abrite en effet d'ordinaire les 7 000 aquarelles originales de la collection des Vélins du Muséum, des incunables, des éditions rares et originales, des reliures précieuses, des têtes de collection de périodiques (Journal des Savants, Bulletins et Mémoires de l'Académie des Sciences), des objets : bureau de Buffon, globes célestes et terrestres de Coronelli, tableaux, peintures, iconographies et portraits de savants, ainsi que les 3 000 volumes constituant la bibliothèque de Chevreul, célèbre chimiste.

    Après ces inondations, les dégâts constatés étaient considérables. Ils concernaient le mobilier resté en place sur lequel des moisissures se développaient activement ainsi que sur le parquet et les murs.

    De 1994 à 1995 plusieurs expertises ont été demandées :

    • CRCDG (Centre de recherche et de conservation des documents graphiques),
    • un restaurateur privé (M. Nove),
    • le Centre technique du bois,
    • le laboratoire de cryptogamie du Muséum (Mme Roquebert et Mme Bury),
    • le service de conservation de la Bibliothèque nationale de France.

    Les analyses de l'air ambiant, les prélèvements effectués sur les moisissures ont conclu à la présence de nombreuses colonies de champignons microscopiques imparfaits de la famille des deutéromycètes appartenant aux genres : trichoderma, penicillium, aspergillus, ahaetomium, etc. Champignons tous plus ou moins friands de poussière, peinture, cuir, encre et surtout pour ce qui concerne les trichoderma de bois.

    Il fallait donc désinfecter. Quant aux procédés possibles de désinfection, chaque société consultée émettait un avis différent:

    • les unes conseillaient un démontage partiel de ce qui était visiblement contaminé, lessivage des murs et des sols ;
    • les autres (Bibliothèque nationale de France - Astrid Brandt -, laboratoire de cryptogamie) conseillaient un démontage total avec désinfection de l'atmosphère par un procédé à sec et désinfection par peinture antifongique des murs et des sols.

    Après bien des discussions, c'est finalement les conseils conjugués de la Bibliothèque nationale de France et du laboratoire de cryptogamie qui furent suivis par la Mission interministérielle des grands travaux chargée de la maîtrise d'ouvrage des opérations. En conclusion, il a été procédé à trois désinfections espacées de quatre à six mois, suivies d'un dépoussiérage soigneux. Les murs et sols ont été enduits d'un produit fongicide, de même que les meubles de rangement des iconographies. Entre-temps un nouveau parquet et de nouvelles boiseries avaient été posés. La dernière désinfection (février 1996) a été efficace puisque les prélèvements qui ont suivi n'ont pas mis en évidence de champignons.

    Le local est donc maintenant sain, reste à le climatiser, opération financée par la Direction de l'information scientifique des technologies nouvelles et des bibliothèques sur 1996/1997.

    Le service de conservation de la Bibliothèque nationale de France a été dans cette opération, le recours, l'expert, le guide et le conseil. Le poids de son avis a été déterminant. D'autres bibliothèques peuvent être confrontées au même type de problème et afin d'éviter les errements qui furent les miens, un guide élaboré par la Bibliothèque nationale de France avec des adresses ou un mode d'emploi pourrait être d'une grande utilité. En tout cas merci à l'efficacité de toute l'équipe du service de conservation.