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4es Rencontres des Maisons d'écrivain et des patrimoines littéraires

2000
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    4es Rencontres des Maisons d'écrivain et des patrimoines littéraires

    Bourges, 25-26-27 novembre 1999

    Par Elisabeth Dousset, Médiathèque de Bourges

    Ces Rencontres sont désormais un rendez-vous annuel inscrit dans les agendas de responsables de sites et patrimoines littéraires, de passionnés des lieux d'écrivain et d'amateurs de littérature. Les 4" Rencontres ont eu pour thème : « Commémorer : pour quoi ? comment ? »

    En bibliothèque, c'est une pratique fréquente dont il est parfois difficile de s'extraire tant les occasions sont nombreuses au long de l'année. Pour un site littéraire, la célébration ne revient pas annuellement, mais la mettre en oeuvre n'est pas si simple lorsque chaque jour l'auteur est déjà l'unique principe des actions.

    Afin d'amorcer la réflexion et de la situer dans le temps long, Jean-Claude Bonnet (1) a présenté avec brio et clarté comment, de l'éloge antique à l'oraison funèbre puis au concours d'éloquence commémorative, les vivants célèbrent leurs défunts, jusqu'à la création du Panthéon à la Révolution. Depuis, l'attachement des Français à ce temple reste vif même si le dénigrement de l'institution participe finalement de sa symbolique.

    Introduits d'aussi magistrale façon dans le sujet, les participants ont mieux inscrit dans la perspective historique la Délégation aux célébrations nationales, malgré la jeunesse de cet élément de la politique de la V République. Toujours à l'écoute d'initiatives structurées, en même temps instigatrice de manifestations, la Délégation cherche dorénavant à relever des événements qui ont marqué les mentalités : l'invention de l'imprimerie plutôt que la mort de Gutenberg ou la parution de L'Histoire de France d'Ernest Lavisse, pour prendre des exemples dans le domaine du livre.

    Les récits sur les commémorations ont été aussi variés que les écrivains concernés. Rien n'est comparable entre Georges Bataille à Orléans, un auteur encore inconnu dans sa ville, et Racine, universellement connu, étudié dans toutes les écoles et universités au-delà de La Ferté-Milon, son village d'enfance, ou Louis Guilloux que Saint-Brieuc et une partie de la Bretagne ont célébré tout au long de 1999 avec imagination et renouvellement, ou encore Goethe, objet en Allemagne et en France de colloques souvent accompagnés de concerts de belle tenue.

    Quant à la commémoration de Balzac (1799-1850), qui se poursuit en 2000, elle est multiforme, parfois prétexte presque mince à fêtes et à ripailles, mais aussi occasion de réflexion sur cette immense oeuvre foisonnante. Pour Eluard, la célébration coïncida en 1997 avec l'ouverture de la partie du musée d'Art et d'Histoire de Saint-Denis où est conservé le fonds. À chaque écrivain et à chaque site son aventure, donc. De cette diversité naît la richesse des faits de commémoration auxquels les divers spécialistes des auteurs concernés ont su nous sensibiliser.

    Introduite par l'inspecteur général Hélène Waysborg-Loing, la dernière partie de la journée mettait l'accent sur le travail en milieu scolaire. Deux professeurs et deux élèves du collège Stéphane-Mallarmé de Sens (Yonne) ont relaté avec un enthousiasme encore tout vif l'expérience vécue en 1996 et 1997, dans la préparation du centenaire du poète en 1998. La passion et la rigueur de tous les acteurs, hors temps scolaire, se sont concrétisées de façon transdisciplinaire par des éventails calligraphiés et par une borne interactive riche en textes et jeux d'écriture, de retour du musée Mallarmé à Vulaines-sur-Seine.

    Dans la même logique, les participants ont découvert en soirée l'exposition permanente réalisée au lycée Alain-Fournier par les élèves sur cet auteur et son univers imaginaire. De nombreux documents en fac-similé y figurent et donnent accès par exemple à la genèse du Grand Meaulnes.

    La journée s'est conclue avec la lecture de textes de Balzac remarquablement choisis, assurée avec une belle maîtrise par les élèves de la section A3 théâtre de ce lycée.

    Le jour suivant, après l'assemblée générale de la Fédération, les travaux ont repris après les encouragements et le soutien de Françoise Chatenay-Dolto au nom du directeur du livre. Le professeur Jean-Marie Valentin a brossé le tableau des manifestations organisées pendant l'année Goethe, à peine achevée au moment des Rencontres, tant en France qu'en Allemagne : il a mis l'accent sur les nombreuses rencontres universitaires souvent enrichies de concerts grâce à l'appui financier de sociétés privées.

    Commémorer comporte aussi une part de création vivante, illustrée de trois façons : Alain Meilland a partagé avec flamme et humour son expérience de comédien réalisateur de deux spectacles autour de Vian et d'Eluard (un hommage peut-il être un brin irrévérencieux dans sa partie créative ?). Yves Charnet (2) a lu des textes, encore inaboutis selon lui, issus de sa résidence au château du Cayla (chez Maurice de Guérin) et lié son écriture de l'intime à celle de son hôte romantique. Pierre-Yves Duchemin a projeté sur grand écran quelques pages de sites Web d'écrivains commémorés, une expression neuve mais finalement assez peu novatrice encore.

    Un montage-lecture de La Rabouilleuse par le théâtre du Lamparo a terminé la journée avec bonheur.

    Le troisième jour, l'auditoire a apprécié les précisions des intervenants qui esquissaient ainsi un guide de la commémoration, certainement à compléter et à actualiser en permanence. Les outils institutionnels de la commémoration, les supports de substitution et les raisons de leur choix, la recherche de partenaires et la communication sont les sujets des communications prochainement accessibles sur le site de la Fédération ouvert à l'occasion des Rencontres : www. litterature-lieux. corn

    Michel Melot a rassemblé l'essentiel des travaux et tracé des pistes pour l'avenir, avant que l'auditoire ne regagne ses pénates ou ne se rende à Issoudun sur les pas de Balzac dans la ville encore proche de celle de La Rabouilleuse, et au château de Frapesle où il se réfugia à trois reprises chez son amie Zulma Carraud.

    Ces Rencontres sont un moment d'échanges d'expériences, de découvertes réciproques et de repositionnement possible dans l'activité de chacun. Un collègue bibliothécaire y a puisé une énergie renouvelée pour faire sortir de la discrétion où sa ville le tient le site littéraire dont il a la charge. Un ayant droit a collecté des idées pour son patrimoine littéraire... Peu à peu les liens se tissent, les isolements se rompent.

    Les prochaines Rencontres sont fixées les 30 novembre, 1er et 2 décembre 2000, sur le thème du voyage littéraire : celui de l'écrivain mais aussi du visiteur. Renseignements au 02 48 23 22 50.

    1. Naissance du Panthéon, essai sur le culte des grands hommes. Fayard, 1998. retour au texte

    2. Proses du fils. La Table ronde, 1993. Coeur furieux. La Table ronde, 1998. retour au texte