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    Droit d'auteur et documentation électronique

    Par Alain Marter, Avocat spécialiste de la propriété intellectuelle

    Le droit d'auteur français actuel est fixé par la loi de 1957 modifiée et complétée, notamment par la loi de 1985, désormais codifiée au sein du code de la Propriété intellectuelle.

    Le droit distingue le droit moral et le droit économique de l'auteur.

    Le droit moral qui lie indéfectiblement un créateur à son oeuvre se démembre en quatre droits : divulgation, respect du nom, respect de l'oeuvre, retrait.

    Le droit économique relatif à la possibilité de commercialisation de l'oeuvre se démembre principalement en droit de reproduction, soit la fixation d'une oeuvre sur un support, et en droit de représentation concernant la communication de l'oeuvre préalablement enregistrée ou non.

    Les règles qui régissent le droit d'auteur sont toutes sous tendues par l'idée que le créateur est le faible à protéger ; cela dans un contexte juridique qui, à l'inverse, ne pose en principe aucun droit pour les utilisateurs.

    Les conséquences sont : que l'interprétation des textes juridiques - loi ou contrat - la plus favorable à l'auteur s'impose, que toute partie de droit non expressément cédée par l'auteur est retenue à son profit et que toute cession de droit nécessite une rémunération spécifique et adaptée.

    Dérogation spécifique au droit de reprographie

    La seule dérogation d'envergure apportée à la règle de la nécessité d'une cession expresse est celle figurant à l'article L 122.10 du Code de la Propriété intellectuelle concernant la reprographie.

    Depuis la loi du 3 janvier 1995 l'autorisation de divulgation d'un texte donnée par l'auteur le dépossède de toute possibilité d'interdire la photocopie de ce texte à fin d'usage privé.

    Selon les règles rappelées précédemment, cette dérogation ne peut être étendue au delà de la photocopie traditionnelle et impose l'existence d'une juste rémunération.

    La documentation en ligne touche au droit de reproduction et au droit de représentation

    La documentation électronique en ligne suppose le recours à un support - CD, bande magnétique, disque dur ou puce électronique - sur lequel l'oeuvre est numérisée afin de mise à disposition du consultant.

    La numérisation est juridiquement une reproduction ; elle ne peut être assimilée, ni à une reprographie ni à la constitution d'une copie de sauvegarde. En conséquence, elle nécessite l'autorisation expresse de l'auteur de l'oeuvre ou de son mandataire.

    La communication d'un document électronique sur poste ou en ligne est juridiquement une représentation. Elle suppose donc en plus de la détention licite du support, établi ou acquis régulièrement, une autorisation spécifique indiquant précisément les possibilités et conditions d'utilisation.

    Le contrat établi avec l'auteur ou son représentant, en général l'éditeur du document papier, est d'importance primordiale qu'il s'agisse d'un contrat négocié spécifiquement ou d'une licence imposée à l'occasion de l'acquisition du support.

    Toute atteinte à ces règles peut être constitutive du délit de contrefaçon et entraîner des condamnations tant civiles que pénales.

    Les dispositions européennes ou internationales vont conduire à renforcer en pratique le droit des auteurs

    La transposition en France des directives européennes et le respect des traités internationaux, ne peut que renforcer les règles traditionnelles et conduire à leur application effective.

    Certes les points qui touchent aux documents électroniques sont extrêmement discutés, que ce soit à l'occasion de la conférence internationale conduite dans le cadre de l'adaptation de la Convention de Berne ou au sein des organes de la Communauté européenne.

    La centaine de pays réunis, dans le cadre de l'Organisation de la Propriété intellectuelle (OMPI) en décembre 1996 à Genève pour « la conférence diplomatique sur certaines questions relatives au droit d'auteur et aux droits voisins » se sont séparés sans parvenir à un accord sur la question de la gestion des droits électroniques.

    La première version de la directive européenne « harmonisant certains aspects des règles relatives au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information », présentée par la commission a été rejetée par le Parlement européen. La réécriture entrevue du projet de directive peut laisser espérer une dérogation aux règles du droit de reproduction pour les copies électroniques intermédiaires temporaires (copies caches) et la possibilité d'assouplir les règles au profit d'utilisateurs particuliers tels les étudiants.

    Mais dans l'un et l'autre cas, le débat ne se situe qu'au delà de la réaffirmation des droits prépondérants des auteurs.

    Les nouvelles technologies contribuent à imposer le strict respect du droit d'auteur dans les bibliothèques. Les progrès techniques, au premier rang desquels l'informatisation, permettent un contrôle peu coûteux de l'utilisation des oeuvres et les enjeux économiques sont considérés comme majeurs dans une économie moderne.

    Toutefois le souci de ne pas léser les auteurs et de contribuer au développement de toute forme de création artistique n'implique pas nécessairement que les coûts soient supportés par les utilisateurs eux-mêmes.

    Il convient d'obtenir également que soit pris en compte le droit d'accès à la connaissance et que la mise en oeuvre de nouvelles pratiques n'aillent pas à l'encontre de missions de conservation assurées par les bibliothèques.