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    Conférence Liber

    Londres, 3-6 juillet

    Par Marie-Joëlle Tarin, Conservateur Bibliothèque de la Sorbonne, département des périodiques
    La conférence générale de Liber (Ligue des Bibliothèques européennes de Recherche) a eu lieu à Londres, dans les locaux de la Bibliothèque nationale, du 3au 6 juillet 2001. Elle avait pour thème général : « Nouveaux réseaux de coopération, nouveaux services ».

    Dès le 3juillet, la pré-conférence, organisée par OCLC, entrait dans le vif du sujet en abordant le thème de la coopération «transatlantique », au niveau des bibliothèques de recherche. Le plan stratégique OCLC avec la société PICA vise en effet à un partage du travail et des savoir-faire pour créer une organisation régionale européenne interrogeable de l'extérieur. Les priorités seront la mise en commun des ressources et la création d'outils pour gérer les portails d'accès à celles-ci.

    Cette coopération entre l'Amérique et l'Europe a été reprise dans l'intervention de Stuart Ede, British Library: « Harmonisation of Marc and descriptive cataloguing standards » qui a insisté sur l'harmonisation du format Marc entre le Royaume-Uni et les États-Unis ; dès 1997, un comité a été créé, comité dont Liber fait partie et qui a organisé un premier meeting en mai 2001à Ottawa. Le format MARC 21 a été choisi comme standard international et un travail d'harmonisation est en cours avec les règles de catalogage américaines AACR2.

    Le dernier orateur a décrit la coalition : SPARC (scholarly publishing and academic research coalition), organisée au départ par l'Association des bibliothèques de recherche américaines pour contrer les coûts prohibitifs de l'édition scientifique ; l'objectif prioritaire étant de proposer des solutions alternatives à un moindre coût, en s'appuyant sur des partenaires à la pointe des nouvelles technologies, sur des programmes d'éducation compétitifs et sur des modèles innovants.

    À l'initiative de Liber, une association « soeur » s'est constituée : SPARC Europe pour permettre aux bibliothécaires, aux usagers et aux auteurs de travailler en commun afin de rendre accessible et d'archiver toutes les formes du savoir scientifique et afin d'offrir des solutions face aux augmentations des abonnements aux revues.

    L'appui de partenaires tels que les sociétés savantes, les universités est indispensable. Un comité de direction « intérimaire » a déjà été créé, intégrant des professionnels des Pays-Bas, Allemagne, France (ENSSIB)...

    Et il est tout à fait possible de devenir membre de cette association : (voir le site : http://www.kb.dk/liber/francais/index.htm)

    La conférence proprement dite a débuté le mercredi 4juillet et pratiquement toutes les interventions des 4divisions (Accès au document, gestion des bibliothèques, développement des collections, conservation et préservation) ont traité de trois questions fondamentales :

    • comment mettre en place un système global d'information fiable ?
    • comment évaluer les nouveaux services ?
    • quelle conservation, et pour quel type de document ?

    NOUVEAUX SYSTÈMES D'INFORMATION

    Plusieurs projets ont été exposés. Ainsi, Clive Field (bibliothécaire et directeur des services d'information, université de Birmingham) a présenté une nouvelle structure de travail, à partir d'un échange de compétences. Cette organisation intègre la bibliothèque, les services informatiques et tous les services relevant de l'enseignement ainsi que les départements audiovisuels, des publications...

    Cette nouvelle structure a été progressivement mise en place à l'université de Birmingham avec pour objectifs prioritaires d'identifier les demandes d'information des écoles, le développement de réseaux, la gestion des outils d'enseignement et de recherche, l'évaluation des services rendus. Ce changement de fonctionnement a demandé une parfaite connaissance de l'ensemble des services impliqués et donc une formation accrue des personnels ainsi que le développement d'un travail en équipe.

    Autre projet, cette fois-ci développé en France : le projet PEL-LEAS, exposé par Christian Lupovici, (directeur de la Bibliothèque de l'université de Marne-La-Vallée).

    Au départ,initié par le ministère de l'Éducation, il a pour partenaires des écoles d'ingénieurs, des laboratoires de recherche et l'université de Reims Champagne-Ardenne et pour objectif la création d'une bibliothèque virtuelle intégrant des documents numériques mais restructurant également les informations existantes pour donner accès à des documents de nouveau type. Ce système s'appuiera sur un grand nombre de compétences disséminées sur le campus et à l'extérieur et il donnera accès à tout type de données. Il gérera également la conservation des documents numériques.

    Ce projet a été conçu pour être utilisé par d'autres universités et doit suivre les évolutions techniques.

    La troisième expérience que je citerai concerne les bibliothèques allemandes : DINI (Deutsche Initiative für Netzwerklnformation), qui a débuté en 1999. Ce projet est axé sur l'utilisation des nouveaux médias dans l'enseignement supérieur et la recherche et comme les projets précédents, il vise à établir une nouveau système d'information où collaboreraient les services informatiques, bibliothéconomiques et nouveaux centres multimédias ; le but étant de fournir et contrôler l'accès à l'information digitale, d'offrir un service pour numériser les documents imprimés, de sélectionner les documents électroniques (à partir d'une série de métadonnées) afin de les mettre à disposition localement, et sur le web et de proposer un outil technique fiable pour une conservation à long terme (http://www.hu-berlin.de/rz/schirmba-cher).

    COMMENT ÉVALUER CES NOUVEAUX SERVICES ET QUELS OUTILS METTRE EN PLACE POUR ACCÉDER À CES NOUVEAUX DOCUMENTS NUMÉRIQUES ?

    De plus en plus, les bibliothèques donnent accès à de nouveaux services mais comment rendre compte de l'utilisation de ceux-ci ?

    Certes, il existe des statistiques et des indices de performance mais qui sont plutôt adaptés aux ressources imprimées. Des organisations telles que l'ICOL (International Coalition of Library Consortia), le CLIR (Council on Library and Information Resources), l'ARL (Association of Research Libraries), E.metrics se sont penchées sur ces nouveaux usages et ont cherché à proposer des statistiques et indices liés à l'utilisation des données diffusées sur les réseaux.

    Dans son intervention, John Carlo Bertot (School of information studies, Florida) propose différentes approches concernant l'utilisation des bases de données, tant dans les bibliothèques de recherche que dans les bibliothèques publiques:

    • nombre de sessions,
    • documents ouverts,
    • fichiers déchargés,
    • temps de connexion,
    • nombre de recherches,
    • localisation des références choisies...

    Mais dans tous les cas, ces nouveaux indicateurs demandent de la part des professionnels des approches différentes, un meilleure coopération avec les fournisseurs et éditeurs. Il ne faut toutefois jamais oublier que ces chiffres ne sont que des estimations et sont liés à un monde qui évolue techniquement.

    Roswitha Poil (University and régional Library Münster) a elle aussi dans sa communication : « Performance indica-tors for the digital library » testé quelques indicateurs pour mesurer la qualité et l'efficience des services offerts par une bibliothèque virtuelle. Elle s'est appuyée sur différents projets tels que Equinox, library performance measurement (http://equinox.dcu.ie/), et sur le rapport du groupe de travail ISO TC 46/SC8/WG4et s'est attachée à lister les problèmes engendrés par l'organisation d'une collection numérique et à définir les différents accès et services proposés à l'utilisateur.

    Suzanne Jouguelet, Bibliothèque nationale de France, a insisté sur l'évaluation faite à la BnF par une société privée, Médiamétrie, pour évaluer les différents services offerts en ligne (catalogue, réservation de places, services commerciaux divers...) ainsi que les usages sur place et à distance.

    Concernant les usages, une étude géographique et sociologique a été menée. L'offre grandissante de service sur le web a nécessité la création d'un comité Internet visant à mettre en place une nouvelle stratégie de services pour un public élargi.

    Sur quels outils s'appuyer pour accéder à cette nouvelle masse d'informations, tel a été le thème de la division accès au document le mercredi 4juillet

    Il est important de signaler que des compagnies commerciales intervenaient pour la première fois dans une conférence de Liber.

    Le premier projet présenté : « Open archives initiative, weaving information assets into the fabric of the Web », par Bas Savenije (Utrecht university library), a pour objectif l'archivage des « pré-prints » ; ce qui pose les questions suivantes :

    • comment et avec quels outils organiser une telle structure?
    • sur quels partenaires s'appuyer pour avoir un contrôle de qualité (certification des données) ?
    • quel sera le rôle des bibliothèques ? sans nul doute un rôle technique, veillant à déterminer et respecter les standards des métadonnées et à créer un environnement intégré pour une utilisation de telles données.

    D'autres projets ont été détaillés par des fournisseurs tels que ISI (Helen Szigeti) qui a construit une nouvelle plate-forme du savoir intégrant du contenu, des outils de recherche et des nouvelles technologies appropriées.

    Une autre expérience, rapportée par Hans de Canck (société EliAS), propose une nouvelle utilisation de la Z 3950pour récupérer et intégrer un grand nombre de données numériques : (http://www.librivision.com).

    QUE CONSERVER ET COMMENT ORGANISER L'ARCHIVAGE DES DONNÉES DANS UN ENVIRONNEMENT AUSSI MOUVANT?

    Que devons nous choisir et garder ? Telle est la question que se pose Steen Bille Larsen (Royal Library, Copenhagen) : « National H brades : dumping ground or source for national knowledge ?», sachant que les missions fondamentales de toute bibliothèque nationale sont de collecter, conserver et donner accès à la documentation patrimoniale. Or en 2001, nous sommes en train d'organiser une bibliothèque d'un autre type, dite « hybride », avec des nouvelles priorités intégrant à la fois des médias traditionnels et des nouveaux supports. Il nous faut donc réfléchir à une nouvelle conception de l'information, et mettre en place une stratégie double, visant d'une part à conserver les documents imprimés et d'autre part à préserver les données numériques.

    De toute façon, une réflexion commune entre les différents pays s'avère indispensable car aucune bibliothèque nationale ne pourra tout sélectionner et il nous faudra choisir et partager.

    En France, ce concept de conservation partagée, comme le souligne Pascal Sanz, est en train d'évoluer avec la création de nouvelles structures telles que le CTLes (Centre technique du livre de l'enseignement supérieur). En effet, ce centre accueille des collections de bibliothèques de recherche, des universités mais il pourrait rapidement pratiquer des redistributions de documents, en cas d'exemplaires multiples.

    Hubert Dupuy (Bibliothèque nationale de France) reprend cette idée de conservation en insistant sur les différences existant entre la conservation des documents traditionnels et celle des documents numériques. Les coûts ne sont pas du même ordre et il faut dire qu'il y a encore peu de spécialistes de la conservation des documents électroniques.

    En effet, combien de temps faut-il pour numériser un document?

    Tout d'abord, la saisie varie selon la nature du texte capturé (manuscrit, texte imprimé...) et l'ajout de métadonnées dépend de la richesse de celles-ci.

    Quel coût ? Marilyn Deegan (the Bodleian Library, Oxford) se pose la question et pense qu'il est trop tôt actuellement pour se prononcer. Cependant, il faut savoir que l'information devra être éditée sous plusieurs formats et que l'accès devra être possible de n'importe quel point du globe.

    Enfin, les usagers sont-ils impliqués dans l'organisation de ces nouvelles archives, tel est le sujet de la communication d'Elizabeth Honer et Susan Graham, the Public record Office (PRO), London : « Should users have a role in defining the future archive ?»

    Le PRO a adopté pour la conservation une approche axée sur la transparence et le partenariat. Il a donc décidé de choisir ce qu'il voulait conserver. Il a ainsi sélectionné un certain nombre de données en 1997et après consultation auprès du public, a procédé à une validation des choix en 1998. Cette expérience positive va s'étendre à d'autres domaines thématiques précis tels que la sécurité, l'environnement, la fiscalité, sujets qui concernent tout citoyen britannique.

    Cette conférence de Liber s'est terminée par une intervention de Lynne J. Brindley (Chief Executive, British Library) sur les liens de coopération tissés par la British library ; le but étant de donner accès pour tous à l'ensemble des collections : à l'école, à l'université, au travail, à la maison. Elle a insisté sur le partage des responsabilités et sur la nécessité de travailler ensemble : avec l'enseignement supérieur, avec toutes les bibliothèques de recherche, avec les bibliothèques publiques, avec les autres bibliothèques nationales, avec d'autres secteurs d'activités tels que les musées, avec le domaine commercial (éditeurs, fournisseurs...). Ce travail en commun est indispensable car les collections numériques sont internationales et ne connaissent pas de frontières.

    La prochaine conférence Liber aura lieu à Graz, Autriche, du 2au 6 juillet 2002et aura pour thème général : Les bibliothèques, portails d'information.