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Discours prononcé le 12 septembre 1955, au Palais des Académies à Bruxelles pour l'ouverture du Congrès

1955

    Discours prononcé le 12 septembre 1955, au Palais des Académies à Bruxelles pour l'ouverture du Congrès

    Par Julien Cain, Membre de l'Institut, Directeur Bibliothèques de France.

    Monsieur le Ministre,Mesdames, Messieurs,

    Celui qui devait parler ce soir à cette tribune est un écrivain français connu de tous, qui a toujours tenu, en même temps qu'il ne cessait de développer et de renouveler son oeuvre de romancier, d'essayiste, de moraliste, à traiter les plus hautes questions intéressant la culture humaine.

    S'il fallait rechercher dans l'ensemble de l'activité de Georges Duhamel ce qui en fait l'unité profonde, c'est peut-être la volonté qu'il n'a cessé de manifester de défendre cette culture, qui est pour lui la sauvegarde même d'une civilisation à laquelle il est attaché et qui lui paraît menacée de tous côtés. Il aurait assurément repris ce grand thème s'il avait été parmi nous, comme il l'aurait développé au cours des Rencontres de Genève, qui réunissent chaque été quelques-uns des plus grands esprits de ce temps pour une large confrontation de vues sur l'état présent de la culture. C'est avec allégresse qu'il avait accepté de se rendre à Bruxelles, où, à côté des bibliothécaires français qu'il connaît bien et dont il ne cesse, dans ses articles et dans ses livres, de soutenir la tâche, il aurait rencontré des visages nouveaux, échangé des vues, accueilli des objections avec le haut esprit de libéralisme qui est le sien. Si l'état de sa santé l'a contraint, à la dernière heure, à renoncer à ces deux réunions, je puis vous dire, pour les avoir entendus samedi de lui-même, ses sentiments de profonde et sincère déception.

    On m'a demandé de prendre la parole à sa place. Je revenais de Rome où j'ai participé pendant huit jours aux travaux du Congrès international des sciences historiques. Vous voudrez donc bien excuser tout ce que les propos que je vais tenir ont d'improvisé. Je vous demanderai de voir en moi, non pas un représentant des bibliothèques françaises, mais le compatriote et l'ami d'un homme dont la pensée m'est familière.

    En faisant appel à Georges Duhamel les organisateurs de ce congrès suivaient une tradition que l'avenir devra maintenir.

    Les plus anciens d'entre vous se rappellent le beau discours qu'il y a vingt et un ans, lors du deuxième Congrès international des bibliothèques qui se tenait à Madrid, Ortega y Gasset prononça en qualité - c'est ainsi qu'il fut présenté - de professeur de métaphysique à l'Université de Madrid. Un professeur de métaphysique ne craignait pas d'appliquer les ressources de son esprit analytique aux problèmes que pose la profession de bibliothécaire et ce qu'il appela sa mission. Il donnait là un exemple.

    Il n'est pas mauvais que des problèmes comme ceux-ci, problèmes d'organisation, problèmes de technique soient examinés par des esprits supérieurs, en même temps qu'ils le sont par des praticiens et des spécialistes.

    C'est dans une intention semblable que les organisateurs des congrès de documentation qui se sont succédé ont fait à plusieurs reprises appel à des hommes du premier rang.

    Ce fut en 1937 le célèbre romancier H.-G. Wells qui développa des vues pleines d'originalité et de sens à l'issue du grand Congrès de documentation qui se tint à Paris. Il devait les reprendre quelques mois plus tard sur ma demande dans un article de l'Encyclopédie française ; il insistait sur la nécessité d'organiser les bibliothèques, comme les universités, à la mesure de besoins en quelque sorte illimités ; et, afin de satisfaire la curiosité universelle, il préconisait l'utilisation de moyens techniques qui paraissaient alors nouveaux.

    En 1951 nous avons été assez heureux pour obtenir de l'illustre savant Louis de Broglie, secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences, qu'il voulût bien, au seuil du Congrès de Rome, développer ses vues sur la nécessité d'une documentation précise. Il présidait lui-même l'Association pour l'utilisation et la diffusion de la documentation. Les savants, comme les poètes, utilisent volontiers les images. Retenons celle-ci de Louis de Broglie : « Si l'on voulait symboliser l'arbre de science dont les branches maîtresses correspondraient aux différentes disciplines de la science pure et les rameaux à celles de la technique, on devrait encore figurer les deux racines principales par lequelles cet arbre puise sa sève nourricière : la documentation et l'expérimentation ; les fruits de cet arbre étant la production des générations successives de chercheurs, que les documentalistes récoltent et classent méthodiquement pour les transmettre aux générations à venir. »

    Ainsi c'est sous l'égide d'un Ortega y Gasset, d'un Wells, d'un Louis de Broglie que nos Congrès se sont tenus. Il eût été heureux que Georges Duhamel inscrivît son nom à leur suite.

    Ne pouvant me maintenir dans cette haute lignée et m'interdisant d'autre part d'aborder dans une séance comme celle-ci le terrain de la technique, qui sera principalement le nôtre pendant toute cette semaine, je devrais arrêter ici ce discours. J'ai cependant le devoir de vous rappeler quelques-uns des faits et des principes fondamentaux qui doivent être présents à vos esprits à l'ouverture de ce congrès qui a pour thème : « les tâches et les responsabilités des bibliothèques et des centres de documentation dans la vie moderne. »

    Thème assurément ambitieux, mais qui n'a pas été choisi au hasard. Et qui doit manifester d'abord une unité réelle sous des apparences de diversité. Un congrès commun, plusieurs réunions particulières, il y a là de quoi déconcerter. A côté du 3° Congrès international des bibliothèques, organisé par la Fédération internationale des Associations de bibliothécaires, de la 22e Conférence internationale de documentation, du 4° Congrès des bibliothèques musicales nous avons une journée médicale, des journées agricoles, des réunions des bibliothèques de théâtre, des bibliothèques de malades, d'autres encore que j'oublie sans doute. Ils groupent bibliothécaires et documentalistes, auxquels s'ajoutent des clas-sificateurs, des normalisateurs, des bibliographes, des représentants d'organismes publics ou privés. Si les uns et les autres ont quitté pour une semaine leur bibliothèque ou leur centre de documentation pour se rendre à Bruxelles, s'ils entendent procéder sur des questions précises à de larges échanges de vues, c'est qu'ils ont conscience que, à des degrés divers et sous des formes différentes, ce sont les mêmes problèmes qui se posent à tous. C'est bien là le motif profond de ce rassemblement d'organisations, que de vaines discussions théoriques ont tenté d'opposer les unes aux autres, alors que tout doit les rapprocher. Il s'agira de libres confrontations, moins peut-être pour aboutir à des formules d'unité plus ou moins factice, que pour rechercher des méthodes de travail et des techniques nouvelles ou renouvelées.

    Vous me permettrez de formuler ici un souhait qui est, je le sais, dans l'esprit de tous, c'est que nos activités, et je dirai volontiers nos curiosités, s'élargissent encore dans un avenir prochain.

    Nos deux grandes fédérations sont nées en Europe : la F.I.D., issue de l'Institut international de bibliographie créé il y a 60 ans à Bruxelles, et auquel sont associés pour toujours les noms respectés en Belgique et aussi à l'étranger d'Henri La Fontaine et de Paul Otlet ; la F.I.A.B., plus jeune, puisque nous pourrions fêter ses vingt-cinq ans. Nous savons que l'une et l'autre groupent des représentants des autres continents et que leur volonté souvent affirmée est d'accueillir le plus grand nombre de pays non européens. Mais les représentants de l'Europe sont en grande majorité dans ce congrès de Bruxelles et nous devons regretter certaines absences. Nous avons du moins la certitude que les travaux seront poursuivis dans un véritable esprit international, l'esprit même qui inspire d'ailleurs notre tâche quotidienne.

    Toutes les variétés de bibliothèques sont ici représentées. C'est l'honneur de nos vieux pays d'Europe, dont je parlais il y a un instant, de maintenir vivantes, au lieu d'en faire des nécropoles, ces bibliothèques de haute culture fondées par des hommes qui étaient des humanistes. Dès l'époque de la Renaissance ils déployèrent à la chasse au livre, suivant la formule d'Ortega y Gasset, une astuce et une ténacité incroyables. Nous leur devons les trésors de nos Bibliothèques nationales, ces collections de manuscrits, d'incunables, de livres précieux qui font leur gloire. Un petit nombre d'hommes pouvaient en avoir en quelque sorte la maîtrise, se contentant de listes sommaires consignées sur quelques registres. Mais à mesure que nos grandes bibliothèques se sont développées, suivant un rythme que les événements extérieurs venaient souvent troubler, le bibliothécaire lui-même - aussi bien que le chercheur ou le simple lecteur - s'est perdu dans sa propre richesse. Il a bien fallu alors inventer les catalogues, en préciser, en diversifier les formes, et faire d'eux la clef de cet immense domaine.

    Il a fallu davantage. Comme il s'agissait de soulager d'efforts inutiles les hommes dont la triste mission - c'est bien Ortega y Gasset qui parlait ainsi - doit être de lire beaucoup de livres, le plus de livres possible, « le naturaliste, le médecin, le philosophe, l'historien », alors le bibliographe est intervenu. La tâche des bibliographes est immense, elle est en fait sans limites. Elle est héroïque par là-même, et chacun devrait saluer avec reconnaissance l'effort de ces érudits qui s'appliquent à interposer une sorte de « filtre » entre l'homme et « le torrent des livres ». Le bibliographe vient au secours du bibliothécaire - il est vrai qu'ils se confondent souvent. Il l'aide à rédiger des catalogues clairs et bien ordonnés permettant de travailler aisément dans les plus vastes dépôts.

    Mais, à vrai dire, c'est aujourd'hui dans des bibliothèques spécialisées, dans des instituts et des centres créés à des fins particulières que la recherche scientifique se poursuit le plus aisément. Des organismes sont nés et se sont développés, surtout dans le domaine des sciences appliquées et dans celui des sciences sociales. L'industriel sait aujourd'hui qu'il ne saurait y avoir de progrès sans documentation scientifique, et avec la notion moderne de productivité est apparue récemment celle de l'information technique au bénéfice des entreprises. Une documentation saine et équilibrée de la chose publique ne peut se concevoir sans un appareil statistique bien établi et des informations sûres. Il n'est pas de scie'nce qui ne s'efforce de constituer un appareil documentaire correspondant à ses besoins propres. C'est le cas de la plus récente, celle qui retient l'attention universelle, la science de l'atome : les savants spécialisés dans le domaine de la recherche nucléaire ont pu et su constituer rapidement une documentation abondante, jugée par eux inappréciable.

    Retenons ici la voix autorisée du prince Louis de Broglie. Il souhaite que s'améliorent encore les méthodes de catalogue et de classification ; il appelle l'attention sur l'utilisation des appareils de sélection mécanique et électronique à grand rendement, « ces cerveaux mécaniques d'une complexité et d'une rapidité stupéfiantes, seuls capables de suivre l'évolution de la science moderne ». Et il conclut : « A la conception classique de la documentation statique, il importe que se substitue rapidement celle d'une information active, dynamique, étendue dans ses sources comme dans son action à l'ensemble des pays civilisés. »

    De telles perspectives ne s'ouvrent pas à toutes les disciplines. Beaucoup d'entre elles ont appris à être modestes et il peut leur paraître interdit d'espérer que de tels moyens soient mis à leur disposition. Je pense aux philosophes, aux philologues, aux historiens. Pour les uns et les autres, la bibliothèque est le laboratoire. A ce laboratoire, ils ne demandent que les instruments indispensables à leur travail. Ils souhaitent certes des bibliothèques spéciales, mais avant tout des catalogues bien établis et des bibliographies complètes. Ce souhait, je le recueillais il y a quelques jour à Rome au Congrès des Sciences historiques. Les savants et les éru-dits, venus des pays les plus divers, qui étaient là rassemblés en foule étudiaient dans leurs diverses sections des problèmes parfaitement posés. Ils se gardaient bien de conclure. Ils demandaient d'abord que de nouveaux matériaux leur fussent procurés, que de nouvelles sources fussent ouvertes à leur soif de savoir, que de plus sûrs moyens de travail leur fussent offerts. Ce sont bien là des vérités fondamentales, que doivent reconnaître ceux-là mêmes qui d'abord les contestaient. Je me rappelle, qu'il y a sept ou huit ans, je participais à l'Unesco, à une délibération d'où devait sortir le Conseil international de la philosophie et des sciences humaines. Le président de notre Comité, homme éminent et plein d'esprit, dans le discours qu'il nous tînt pour nous proposer un programme, nous supplia d'être ambitieux et de ne pas nous contenter d'accoucher de souris bibliographiques. On accoucha de bien d'autres choses ; mais les souris bibliographiques parurent indispensables au président lui-même, qui convint qu'on ne pouvait s'en passer.

    C'est le mérite des bibliothécaires qui dirigent des centres de recherche de s'appliquer à en faire aussi des bibliothèques d'enseignement. Le livre doit compléter, appuyer la leçon du maître, si grand que soit celui-ci. Les bibliothécaires universitaires, nombreux dans cette salle, le savent bien. Ce sont d'autres problèmes que doivent résoudre chaque jour ceux qui ont la charge des bibliothèques publiques. Problèmes qui varient suivant la structure et l'importance de celles-ci. Il peut s'agir d'assurer un véritable service public dans une grande ville, il peut s'agir d'un secteur strictement limité. Mais pour tous, comme aussi pour ceux qui s'efforcent d'atteindre par une distribution intelligente du livre les milieux ruraux les plus dispersés, il s'agit en définitive de faire un choix dans l'immensité de la production. Or, ce choix engage la responsabilité du bibliothécaire et met en jeu ses qualités profondes, qui, autant qu'intellectuelles, sont morales. Ce n'est pas dans une assemblée comme celle-ci que je dois souligner que ce choix doit s'exercer en dehors de toute exclusive, dans un climat de liberté.

    Je voudrais que ce fût aussi dans le respect de certaines valeurs culturelles auxquelles Georges Duhamel vous demanderait avec moi de demeurer attachés. Car s'il convient d'étudier les moyens les plus simples, les plus pratiques, de répandre le livre dans tous les milieux, et notamment dans ceux que pourrait peut-être attirer d'abord l'image et que pourrait aussi séduire davantage toute la gamme des moyens audio-visuels qui leur sont abondamment proposés, il ne faut pas oublier que le livre n'est pas seulement un moyen de distraction passagère ou d'information rapide : il doit demeurer au service de la culture, d'une culture qui comporte bien des degrés. C'est ici que Georges Duhamel aurait aimé prendre la parole et qu'il aurait retrouvé les accents de sa Défense des Lettres.

    Dans cette croisade ardente qu'il mène depuis près de trente ans pour le livre, il lui est peut-être arrivé de s'élever d'une manière trop vive, jugée par lui-même excessive, contre des formes nouvelles d'expression de la pensée - radio ou cinéma. C'est un débat que Duhamel a tenu à clore en départageant équitablement les parties.

    Il demande seulement que l'ancienne primauté conférée au livre ne soit pas contestée. Et il ne cache pas les hauts motifs sentimentaux qui l'animent : « Imaginons, dit-il, ce que serait une existence sans lecture et mesurons avec frayeur l'empire que prendraient aussitôt sur nous la douleur, le souci, la fatigue, l'adversité... Le livre est l'ami de la solitude. Il nourrit l'individualisme libérateur. Dans la lecture solitaire, l'homme qui se cherche lui-même a quelque chance de se rencontrer. Il choisit, il se choisit. Il échappe aux puissances d'endoctrinement. »

    Ne reprenons pas à notre tour ce débat. Mais insistons ici sur le fait que, dans la confusion du monde moderne, où des valeurs qui paraissaient bien établies sont soudain remises en question, c'est le mot d'abord, c'est l'écrit qui permet de fixer les idées avec exactitude, de les rendre claires et communicables.

    Et à ce point de vue je ne regrette pas d'avoir donné ce titre : « La Civilisation écrite » à un volume de l'Encyclopédie française où les problèmes intéressant la production et la distribution du livre et de l'écrit étaient examinés.

    Il n'est pas de bibliothécaire dont la vocation n'ait été éveillée par l'amour du livre. Amour parfois exclusif, et qui prête à rire aux sceptiques - mais les sceptiques, malgré l'endurcissement de l'âge et les déceptions qu'apporte la vie, sont rares dans cette noble profession. Que de motifs cependant pour que s'y introduise le découragement devant de si grandes tâches à accomplir, et qui sans cesse s'accumulent, avec des moyens le plus souvent insuffisants, parfois même dérisoires ! La plupart des pays ici représentés n'accordent à leurs institutions culturelles, et plus particulièrement aux bibliothèques et centres de documentation, que des crédits trop faibles pour un bon fonctionnement. Des comparaisons s'établissent, qui laissent parfois derrière elles beaucoup d'amertume. On se reprend aussitôt, avec une secrète satisfaction même, quand dans cette émulation si désintéressée, on suppute les richesses authentiques que les siècles ont accumulées dans nos vieux dépôts d'Europe ; on voudrait seulement pouvoir toujours les mettre en pleine valeur.

    Et quand il s'agit, non plus de collections anciennes, mais de centres nouveaux, formés à la mesure de besoins nouveaux, la passion de créer, le désir de servir sont les plus forts, et triomphent d'obstacles qui paraissaient d'abord insurmontables. C'est aux savants, pour lesquels tant de travaux sont poursuivis, à persuader les pouvoirs publics d'accorder à ces centres le personnel, les locaux, les crédits nécessaires à leur fonctionnement, - comme c'est au public qui veut lire à demander que le service de la lecture soit assuré décemment comme les autres services publics.

    Pour que le livre soit présent partout et offert comme il devrait l'être à l'école ou à l'université, dans les laboratoires, à la campagne comme à la ville, c'est dans tous les pays un effort immense à accomplir, mais d'abord un effort de persuasion.

    Nous savons que pour le soutenir nous pouvons compter sur l'Unesco et sur son Directeur général que nous venons d'entendre. L'Unesco vient d'inscrire au programme de son Département des Activités culturelles l'organisation d'une campagne pour les Musées, et j'ai vivement applaudi cette initiative qui veut faire connaître à un large public dans le monde entier les trésors de l'art ou les témoins de l'activité de l'homme.

    Pourquoi à New-Delhi, où se tiendra en 1956 la prochaine conférence générale, n'y joindrait-on pas une campagne pour le Livre et les Bibliothécaires ? Cette idée ne pourrait que séduire un grand nombre de jeunes Etats qui seront représentés à cette conférence, et qui souhaitent être aidés par l'expérience de vieux pays dans les efforts qu'ils veulent tenter.

    Les préoccupations majeures de l'Unesco sont les nôtres. Education, Science, Culture, ces trois termes essentiels, que nous venons de trouver sur notre chemin, que nous retrouverons sans cesse au cours de ce congrès, définissent le programme général de l'Unesco, tel qu'il fut arrêté à la Conférence préparatoire de Londres de décembre 1945. Je n'oublie pas que c'est en y siégeant que je rencontrai pour la première fois celui qui est aujourd'hui à la tête de l'institution, le Dr Luther Evans.

    C'est un honneur pour tous les bibliothécaires de saluer en lui un confrère éminent, car ils savent l'oeuvre qu'il a accomplie pendant plusieurs années à la Bibliothèque du Congrès de Washington et tout ce qu'il a ajouté d'efficace à une organisation déjà exemplaire.

    Ils savent que, comme il l'a dit avec esprit ce matin, il n'a pas enterré son passé et qu'ils trouveront en lui, pour des tâches importantes sur le plan international, tout l'appui dont ils ont besoin.

    Monsieur le Ministre,

    En décidant de tenir ce congrès à Bruxelles, les membres des associations ici réunies savaient bien que cette belle capitale serait un lieu favorable à leurs travaux. Un pays, entre tous ceux de l'Occident, chargé des oeuvres d'un art qui n'a cessé de se renouveler à travers les siècles ; un pays ouvert aussi à l'avenir, à ce point qu'on a pu voir en lui une terre d'expérience ; une tradition de libertés civiques fièrement conquises et soigneusement préservées ; une volonté intransigeante d'indépendance nationale : ce sont là de beaux titres à cette admiration et à cette considération particulières qui dans le monde entier entourent la Belgique.

    Intéressés plus particulièrement par les institutions culturelles de votre pays, nous en savons la variété et l'efficacité. Nous nous proposons au cours de cette semaine, mettant à l'épreuve l'obligeance de nos collègues de Belgique, de les étudier mieux.

    Permettez-moi, d'ajouter, Monsieur le Ministre, que nous retiendrons les paroles si claires par lesquelles vous avez défini ce que doit être l'action des pouvoirs publics dans le domaine qui est le nôtre ; ces paroles ajouteront à la gratitude que nous vous devons.

    Le Comité belge d'organisation de ce Congrès, dirigé par les plus hauts fonctionnaires de votre Ministère, s'est appliqué à tout aplanir sous nos pas et à nous faire connaître l'essentiel. Ceux d'entre nous dont l'attention se porte davantage sur les bibliothèques populaires voudront sans doute connaître les grandes lignes de la structure nouvelle qu'on se propose de leur donner. Nous connaissons déjà la qualité des méthodes en usage dans vos bibliothèques universitaires ; nous en approfondirons l'étude avec profit. Et quant à votre Bibliothèque royale, nous tenons à vous remercier de nous avoir mis dans la confidence de projets en voie de réalisation qui feront d'elle une des plus belles bibliothèques d'Europe

    Vous voulez bien, Monsieur le Ministre, nous accueillir au nom du Gouvernement belge, dans ce noble Palais des Académies : c'est un honneur dont nous mesurons le prix.