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    Les noms d'auteurs personnes physiques

    Par Paule Salvan

    La question du choix des vedettes d'auteurs personnes physiques et l'une des plus controversées. Les usages ont varié d'une bibliothèque à une autre et souvent même, à l'intérieur d'un même catalogue, les principes suivis étaient quelque peu flottants. Aussi pouvait-on s'attendre à ce que cette question fît l'objet de discussions passionnées à la Conférence internationale.

    La Commission du code était parvenue à fixer sa propre doctrine : elle estimait que seule l'adoption des usages nationaux pouvait faciliter un accord sur le plan international. Ce principe était déjà recommandé dans les Instructions sommaires publiées par la Direction des Bibliothèques de France (1) Il était nettement formulé dans l'avant-projet de norme soumis à l'enquête publique (Pr Z 44-061, juillet 1959), et il faut reconnaître d'ailleurs qu'il avait suscité quelques réactions vives de la part de certains bibliothécaires municipaux consternés d'avoir à adopter, pour Tchekov, la vedette Cehov ! Leurs craintes, d'ailleurs n'étaient pas fondées puisque le projet de norme prévoyait des exceptions pour les bibliothèques de lecture publique. L'application du principe des usages nationaux soulevait d'évidentes difficultés. Il a paru facile sans doute d'adopter par exemple l'usage italien pour les noms à préfixes, ce qui a conduit à rompre avec un usage ancien et à renoncer au rejet des préfixes pour certains noms comme celui de d'Annunzio. Mais les usages n'étaient pas toujours cohérents dans les pays appartenant à une même aire linguistique, par exemple entre le Portugal et le Brésil. Des contradictions apparaissaient d'autre part dans les catalogues des divers pays d'expression française et une entente préalable s'avérait indispensable.

    Aussi, adoptant la suggestion de M. Pierre Bourgeois, la Commission du code fit-elle appel, pour une réunion extraordinaire qui se tint le 17 avril 1961, à des collèges belges, suisses et luxembourgeois.

    Les opinions des représentants, assez divergentes au départ, parurent se rapprocher. On admit qu'aucune difficulté majeure ne se présentait pour l'adoption du principe des usages nationaux, ce qui entraînait la nécessité d'un accord entre Belges et Néerlandais pour le traitement des noms flamands. Toutefois, à leur retour, les représentants belges et suisses ne purent recueillir l'accord de leurs groupes de travail respectifs. Rien de définitif n'était acquis quand s'ouvrit la Conférence internationale.

    Le rapport de base sur les « noms à préfixes » (confié à Mme Ascarelli) avait fait l'objet d'une note provisoire qui énumérait quatre solutions :

    • 1°) principe de la langue du préfixe,
    • 2°) principe des usages nationaux (= usage du pays dont l'auteur est citoyen),
    • 3°) principe de l'origine au nom (= usage du pays dont l'auteur est originaire),
    • 4°) principe de la langue dans laquelle l'auteur écrit habituellement.

    On voit aisément les avantages et les inconvénients de chaque système. Le premier fut délibérément rejeté par la Commission française qui maintint sa préférence pour le second principe (usages nationaux). Le critère de la langue était défendu par certains, mais ne réglait pas aisément le cas des auteurs plurilingues. L'origine du nom avait également quelques partisans; il fallait reconnaître toutefois qu'il était difficile aux Anglo-saxons, par exemple, d'envisager le rejet de la particule pour des noms d'origine française comme Mazo De la Roche.

    Contrairement à ce que l'on pouvait attendre, l'article 12 de l'exposé des principes relatif à ce problème fut finalement adopté par une large majorité (54 sur 60 votants) : « Lorsque le nom d'un auteur personne phy- « sique comprend plusieurs mots, le choix du mot d'entrée est déterminé, « autant que possible, par l'usage reconnu du pays dont le porteur du nom « est citoyen, ou si cela n'est pas possible, par l'usage admis dans la langue « qu'il emploie en général. »

    Afin de préparer les tâches ultérieures, des groupes de travail se créèrent au cours de la Conférence entre représentants de pays bilingues. Le problème particulièrement ardu des noms orientaux était étudié parallèlement par des spécialistes. Les accords qui devront être conclus entre pays appartenant à une même aire linguistique font l'objet de la Résolution V, publiée à l'issue de la Conférence : « La Conférence recommande que les pays « appartenant ou se rattachant pour une partie de leurs ressortissants à « une même aire linguistique procèdent aux consultations nécessaires en « vue d'unifier leurs usages respectifs concernant la forme d'entrée des « noms de personnes dans la langue commune. »

    Bien entendu, des listes de vedettes établies par pays faciliteraient singulièrement le travail du bibliothécaire.

    On peut ainsi espérer que l'on en finira avec l'un des problèmes les plus irritants du catalogage, l'un de ceux qui a donné lieu à des discussions vaines et prolongées. Il n'est pas nécessaire d'insister sur l'intérêt de la normalisation qui pourra s'introduire à la faveur de la décision prise sur le plan international, en ce qui concerne en particulier les bibliographies.

    1. Rééditées par les soins de l'Institut pédagogique national. Les Instructions font l'objet d'une refonte sous un titre général : Traitement et catalogue des livres et documents. retour au texte