Nos collègues savent que l'on pouvait distinguer, en gros, deux grandes écoles de catalogage en ce qui concernait les publications de collectivités : d'un côté, le code l'A.L.A., et les Normes du Vatican qui en sont imitées, ont adopté depuis longtemps le principe qui consiste à considérer les collectivités ou personnes morales comme auteurs figurant en vedette; et de l'autre, les Instructions prussiennes, appliquées dans toute l'Europe centrale, qui considéraient toujours ces publications comme des anonymes à classer au titre, plus exactement au substanitivum regens. Certains codes plus récents, comme le code soviétique, les codes italien, espagnol, admettaient les collectivités en vedette sous des formes variables et dans un domaine plus ou moins étendu.
La grande nouveauté apportée par les débats de la Conférence internationale, c'est la capitulation de l'école prussienne : dans l'après-midi du 11 octobre, qualifiée d' «historique» par l'un des présents, nous avons entendu successivement les délégués de l'Allemagne fédérale, de l'Autriche, et bien d'autres, se rallier au principe du catalogage au nom de la collectivité. Le ralliement de l'Allemagne nous paraît particulièrement important : avec leurs strictes traditions en matière de catalogage, on peut attendre beaucoup de nos collègues d'Outre-Rhin pour une plus grande rigueur dans ce domaine.
Il y a cependant des irréductibles : les Pays-Bas, la Finlande, le Danemark restent opposés à l'introduction de la vedette de collectivité. Ce phénomène est dû, croyons-nous, à l'importance des bibliothèques publiques dans les pays Scandinaves : alors que les principes débattus par la Conférence intéressent surtout les grandes bibliothèques d'étude, les innovations en pareille matière semblent moins nécessaires du point de vue des catalogues de lecture publique.
Une autre grande querelle qui divisait le monde des bibliothèques était celle de la « vedette géographique ». On sait que le code anglo-américain cataloguait les « institutions » telles que musées, bibliothèques, universités, etc., sous le nom du lieu où était le siège; alors que les « sociétés » se trouvaient directement à leur nom. Et comme d'autre part les publications officielles des Etats, territoires, villes, sont cataloguées sous le nom de ces Etats, territoires, villes, il n'avait pas été possible de faire comprendre clairement que ces noms, malgré les apparences, n'était pas des « vedettes géographiques », mais le nom courant de ces collectivités de nature particulière. Sur ce point, les efforts persévérants des représentants français lors de la préparation de la Conférence ont porté leurs fruits : personne ne parle plus de « vedette géographique », dont les Américains ont abandonné l'usage dans leur récent projet de code; il a été admis que les « autorités territoriales » sont représentées par leur nom le plus courant.
Ceci dit, si le catalogage à la collectivité a été admis à une très large majorité, de sérieuses divergences subsistent sur l'extension à donner à ce principe, notamment avec les Soviétiques, qui en ont limité dans leur code l'application à certaines catégories de publications. De sorte que l'accord s'est fait, dans les cas litigieux, sur la double entrée : entrée principale au titre ou à la collectivité, avec entrée secondaire à la solution rejetée pour l'entrée principale.
Quels changements seront à apporter à notre norme ? Ils seront peu nombreux. Le plus important est le cas de changement de nom : alors que notre usage est de regrouper les publications sous la dernière forme du nom, la majorité a voté en faveur du catalogage aux noms successifs; cependant permission a été laissée de regrouper au dernier nom.
Enfin, des voeux ont été formulés : publication d'une liste de formes approuvées des noms des Etats et autres autorités territoriales, avec traductions autorisées dans les principales langues; et publication de listes de « vedettes uniformes » pour les principales collectivités nationales et internationales. Ces listes amèneront enfin l'uniformisation souhaitée des vedettes de collectivités, rendant ainsi service aux bibliothécaires de tous les pays.