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Bibliothèques-musées des Arts du spectacles : Journée d'études du 11 mai

1965

    Bibliothèques-musées des Arts du spectacles : Journée d'études du 11 mai

    Par Cécile Giteau

    Le mardi 11 mai, la Section des Bibliothèques-Musées des arts du spec-tacle a tenu une journée d'études dans la salle des conférences du Centre National de la Recherche scientifique, 15, quai Anatole-France.

    La séance, présidée par M. Jean Mercure, Président du Syndicat des metteurs en scène, avait pour objet la Notation des mises en scènes théâtrales.

    La transcription des mises en scène est un problème délicat : les mises en scène écrites les plus détaillées, telles celles laissées par Gaston Baty, restent malgré tout fort imprécises et leur utilisation risquerait souvent de trahir la pensée originale de l'auteur. L'adoption d'une véritable écriture adaptée à son objet faciliterait les recherches des érudits aussi bien que les « reprises » des spectacles.

    Mme J. Challet-Haas, membre-expert du Conseil international de la Cinétographie Laban, déléguée pour la France, fit à ce sujet un exposé sur la Cinétographie Laban et son utilisation pour la notation de la mise en scène théâtrale. Il s'agit d'une « écriture du mouvement », d'un système de signes qui peut permettre « la notation de la situation des acteurs et de leur orientation, de leurs parcours et de leurs gestes, de leurs relations entre eux et avec les objets environnants, en rapport rythmique étroit avec le texte ».

    Connue depuis 1928, cette méthode de notation du mouvement trouve une application dans des domaines divers : recherches folkloriques ou psychothérapiques mais surtout transcription des chorégraphies.

    Les signes de base, au nombre de huit, sont placés sur une portée dérivé e de la portée musicale mais redressée dans le sens de la station verticale. Chaque signe indique à la fois :

    • - la partie du corps en mouvement, par son emplacement sur la portée,
    • - la direction et le niveau d'exécution du mouvement par sa forme et sa couleur,
    • - la durée d'exécution par sa longueur.

    Appliquée à la mise en scène théâtrale, cette méthode permettrait de noter aussi bien :

    • - la division de la scène : « signes de lieu » pour situer les personnages et les objets,
    • - la plantation du décor, l'emplacement des accessoires, la hauteur des praticables : « signes de situation »,
    • - le mouvement des acteurs, le parcours effectué, les entrées et sorties de scène, les déplacements d'objets, etc., tant par rapport au public que par rapport aux acteurs sur scène : « signes de parcours », « signes de front », « signes de relation ».

    La présence de personnalités du monde des spectacles permit, à l'issue de cet exposé, un débat animé, au cours duquel prirent la parole : M. Jean Mercure, président du Syndicat des metteurs en scène ; M. Daniel Lecourtois, pensionnaire de la Comédie-Française ; M. Borislav Horowitz, metteur en scène ; M. Henri Doublier, metteur en scène ; M. Lucas, administrateur du Studio des Champs-Elysées ; M. Mathos, de l'Association des régisseurs de théâtre ; Mme Cournand.

    La nécessité d'une méthode de notation précise est unanimement ressentie par les professionnels du théâtre, non pas tellement par rapport à leur oeuvre personnelle, mais plutôt par rapport aux autres, à titre rétrospectif. Chacun insiste cependant sur le fait qu'une méthode d'écriture du mouvement, sans doute suffisante dans le domaine chorégraphique, ne réussit pas à exprimer pleinement une « mise en scène », les qualités psycho-physiques de chaque acteur échappant à cette méthode, de même que la qualité de pensée et de sensibilité du metteur en scène. Une méthode de notation cinétographique est susceptible néanmoins de constituer, ainsi que le fait remarquer Mme Chal-let-Haas, une « trame sur laquelle peut ensuite s'insérer le contenu émotionnel requis par le texte et le metteur en scène ».

    L'expérience de notation d'une mise en scène théâtrale par la cinéto-graphie Laban n'a, jusqu'alors, été adoptée qu'une seule fois par Catherine Anouilh, pour la mise en scène d'une pièce de Marivaux, au Théâtre de l'Athénée ; M. Henri Doublier propose de faire lui-même, avec la collaboration de Mme Challet-Haas, un essai de cette notation lors d'une de ses prochaines mises en scène.

    M. Jean Mercure conclut le débat en soulignant l'importance d'une telle méthode et en souhaitant que des prises de vue cinématographiques s'ajoutant à une notation cinétographique précise, permettent un jour de conserver avec fidélité les données d'une mise en scène théâtrale.