L'Unesco, ayant passé contrat avec la F.I.A.B. pour étudier les normes en matière de bibliothèques, c'est un chercheur anglais, F.N. Withers, qui fut chargé de rassembler la documentation et d'en tirer une sorte de catalogue. M. Withers dès l'abord s'excuse de n'avoir pu travailler sur certains documents, soit parce que leur langue les lui rendait inaccessibles, telles les publications russes, tchèques, soit parce que le temps qui lui était imparti était trop court et ne lui permettait pas de prendre connaissance de textes moins connus ou moins faciles d'accès que ceux qu'il a maniés. Si bien que ce rapport est en fait une compilation intéressant un petit nombre de pays (seize), dont dix sont européens, les autres anglophones (U.S.A., Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud), à l'exception d'un seul, le Japon, qui, pour se mieux faire connaître, fait paraître quantité d'informations en américain.
Cependant ce travail a un intérêt réel, dans la mesure où il rassemble en un même fascicule des chiffres dispersés dans une centaine d'articles et de brochures, émanant d'organismes officiels ou d'associations diverses, à moins qu'ils n'aient paru dans quelque revue de bibliothéconomie. Il présente quelques inconvénients, car il est difficile de coordonner des normes qui n'ont pas été conçues ni rédigées de la même façon, aussi les tableaux généraux qui les regroupent donnent souvent une impression de fouillis, qu'il faut, pour les interpréter, prendre la peine de réordonner.
La part du lion, c'est-à-dire la moitié, est évidemment consacrée aux bibliothèques publiques : c'est dans ce domaine que la normalisation a été le plus poussée, sans doute parce que celles-ci sont les plus nombreuses, que les bibliothécaires ont en face d'eux un plus grand nombre d'autorités de tutelle et qu'il est nécessaire de donner aux administrateurs, souvent peu informés des problèmes des bibliothèques, les moyens de comparer et d'évaluer ce qu'elles doivent être. Pratiquement tous les pays de la C.E.E., les pays Scandinaves et de l'Est européen, la Grande-Bretagne évidemment, ont publié des normes plus ou moins complètes. Signalons les quatre textes danois, dont deux seulement avaient été traduits en anglais : leur analyse occupe une dizaine de pages (à peine moins que les normes américaines). Elles intéressent évidemment des agglomérations assez petites (5.000 à 50.000 habitants). Un seul pays, l'Afrique du Sud, évalue le niveau minimum de fonctionnement d'une bibliothèque publique, donnant ainsi aux bibliothécaires un bâton pour être battus : prêter au moins six livres par habitant desservi. Pour l'essentiel, il s'agit de normes ou de conseils pour l'emplacement de la bibliothèque dans la cité, la surface (toujours convertie en mètres carrés), la taille des collections, le personnel.
Les normes des bibliothèques scolaires tiennent ici autant de place que celles des bibliothèques universitaires ; leur rôle dans l'éducation a été mis en valeur beaucoup plus récemment, si bien qu'elles ont subi un gros retard dans leur développement, par rapport aux autres types de bibliothèques. C'est pourquoi les normes proposées sont souvent plus généreuses ; ainsi au Canada où il est recommandé d'avoir un bibliothécaire pour trois cents élèves, puis un par tranches de cinq cents et autant de personnel de bureau, de posséder au moins dix ouvrages par élève, de dépenser annuellement environ 8 dollars pour les livres et 4 dollars pour le matériel audiovisuel par écolier. En Australie, où les écoles semblent assez petites, les normes sont établies pour des groupes de 50 à 1.200 élèves au maximum.
Bibliothèques universitaires, bibliothèques spécialisées et bibliothèques nationales ont suscité moins de réflexion normative, sinon pour les collèges du premier degré ou les institutions d'enseignement supérieur récemment créées (U.S.A., Nouvelle-Zélande, Grande-Bretagne, Canada). On trouve plutôt des rapports sur le fonctionnement actuel de celles-ci (Grande-Bretagne, Inde, Canada) ou des prévisions de coût (Canada) : la plupart d'entre elles existent depuis longtemps, et lecteurs (et bibliothécaires) passent pour savoir définir les besoins, connaître les manques de leur lieu de travail, si bien que les textes qui essaient de cerner ce que pourrait être une bibliothèque raisonnablement conçue, contiennent plutôt une définition du rôle des divers services offerts par elle, et précisent seulement quel rapport maintenir entre les crédits accordés aux publications en série, aux monographies et à la reliure, grosso modo quelle surface prévoir par lecteur (surface au sol, surface de table), de combien de bibliothécaires disposer. Dans chacun de ces rapports, l'on insiste sur l'importance de la coopération et du prêt interbibliothèques. Quant aux bibliothèques nationales, M. Withers ne connaît guère que les publications de l'UNESCO dans ce domaine et le rapport annuel de la Library of Congress.
Suivent quelques réflexions sur les normes pour les pays sous-dévelop-pés, selon les manuels de l'UNESCO, un catalogue des fonctions pour les divers types de bibliothèques, quelques documents officiels traduits en anglais, concernant la Tchécoslovaquie, l'Allemagne de l'Est et l'Union soviétique.
C'est donc un instrument de travail commode que M. Withers a mis au point : il reste à l'approfondir. En effet, il ne donne aucune information sur l'Espagne ou l'Amérique du Sud, quoique divers pays aient publié des éléments de normes, il ne connaît pas, et pour cause, les propositions françaises exprimées dans le VIe Plan et désormais acceptées. Enfin les bibliothèques spécialisées, auxquelles sont consacrées quatre pages, et les bibliothèques nationales, qui ont droit à cinq, ne sont presque pas étudiées et la question reste entière.