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La bibliothèque centrale de prêt de la Seine-Maritime

1979
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    La bibliothèque centrale de prêt de la Seine-Maritime

    Par Michel Dargaud

    La création de la discothèque

    La Bibliothèque Centrale de Prêt de la Seine-Maritime ne dispose que de deux bibliobus et d'un personnel de 8 personnes pour remplir sa mission. Cette pauvreté en moyens est certes commune à la majorité des B.C.P. mais se révèle d'autant plus difficile à assumer que la Seine-Maritime est un département très peuplé : 733 communes de moins de 20 000 habitants totalisant 662 000 habitants.

    Cependant nous avons choisi de mener de préférence une action en profondeur (desserte efficace des communes touchées) plutôt qu'une action dispersée qui viserait à toucher le maximum de communes. C'est pourquoi seules 170 communes sont pour le moment desservies par l'une ou l'autre de nos deux bibliobus.

    [...] Dans ce contexte, créer une discothèque n'était pas chose évidente, la meilleure preuve en est qu'un crédit exceptionnel pour achat de cassettes avait été refusé par l'ancienne Direction des Bibliothèques, en 1975.

    J'ai quand même décidé la création d'une discothèque en partant du principe que l'on pouvait réduire la durée du travail supplémentaire nécessaire à cette création à deux ou trois ans et intégrer par la suite la discothèque au travail courant. Le tout était de considérer la cassette au niveau des crédits, du traitement et du prêt, comme un document identique au livre.

    Des cassettes, pourquoi ?

    A la fin 1973, une enquête lancée auprès des lecteurs des deux bibliobus avait montré que le public concerné se répartissait également entre partisans du disque et partisans de la cassette. Si nous avons choisi exclusivement la cassette, c'est donc surtout en fonction d'autres critères qui restent valables aujourd'hui :

    L'inconvénient majeur de la cassette n'est pas sa qualité de son inférieure à celle du disque puisque cela n'affecte réellement que les amateurs très éclairés de musique classique mais la pauvreté des titres disponibles, essentiellement dans le domaine des enfants (qui représentent presque la moitié de notre public).

    En revanche les avantages sont multiples, surtout dans le cadre d'une B.C.P. : l'encombrement de la cassette est très réduit (problème de la place dans les bibliobus) sa maniabilité très grande (utilisation en voiture par exemple), enfin et surtout sa durée d'écoute et sa robustesse sont nettement plus importantes que celles du disque : il ne pouvait être question de consacrer, comme tel est le cas dans la majorité des discothèques classiques, la moitié du temps de discothèque à la vérification du bon état du support. Avec la cassette, cela est sans doute inutile et de toute façon difficilement faisable (sauf avec la machine à vérifier les cassettes dont il a été question mais dont j'estime pour le moment qu'elle tient un peu de la sophistication).

    Pour ce problème de contrôle du bon état des cassettes, nous faisons donc pour le moment confiance aux lecteurs qui n'hésitent pas à nous signaler que telle bande est cassée, bloquée ou défile mal. Le remboursement ne leur est demandé qu'en cas de faute évidente de leur part. A ce jour, après 10 mois de fonctionnement pour environ 3 600 prêts, environ 35 cassettes (soit 1 %) attendent d'être ou réparées ou mises au rebut.

    Techniques de traitement des cassettes

    Elles sont à peu près semblables - et heureusement - à celles utilisées dans d'autres « cassettothèques » mais il a fallu consacrer pas mal de temps à les mettre au point. C'est pourquoi une diffusion très large des informations disponibles sur ce problème des cassettes est des plus souhaitables.

    L'estampillage se fait chez nous non pas au moyen d'une étiquette autocollante (toujours arrachable) mais par impression - très rapide - dans le plastique de la cassette de la marque de la bibliothèque (demander à un graveur un petit poinçon que l'on monte ensuite sur un fer relié à un rhéostat : principe de la pyrogravure). Cela n'empêche évidemment pas les vols mais la preuve de ceux-ci reste entière. [...].

    Le numéro d'inventaire est porté non pas au feutre indélébile mais - solution plus propre - au moyen d'une étiquette numérotée automatiquement.

    La cote, [...] est collée sur la tranche de la jaquette : le boîtier protège ainsi cette cote.

    Pour l'équipement, rien n'est à ajouter à la cassette telle qu'elle est fournie dans le commerce. Le seul problème est de prévoir des boîtiers de rechange (vendus seuls, voire donnés par grossistes ou disquaires) pour remplacer ceux que souvent on retrouve cassés ou fêlés.

    La (ou les) fiche(s) de prêt est bien sûr coupée au format et insérée entre la cassette et la jaquette. Reste le problème de l'usure de celle-ci.

    Premier bilan du prêt de cassettes

    Avec un fonds de base de 2 500 cassettes (environ 1 000 titres) le prêt dans les deux bibliobus a démarré en janvier 1978. Dans le bibliobus de prêt-dépôt sont présentées sur tourniquets environ 200 cassettes, dans le bibliobus de prêt direct environ 400 cassettes sont en libre accès. Il ne s'agit en fait que des boîtiers munis de leurs jaquettes, les bandes étant regroupées par ordre numérique d'inventaire dans des tiroirs placés près de la bibliothécaire, le tout bien sûr pour éviter les vols. Pour notre 3e bibliobus en chantier et destiné essentiellement aux enfants, le libre accès sera total (les bandes restant dans leurs boîtiers) au moins à titre d'essai.

    Ce prêt de nos cassettes aux enfants qui passe donc pour le moment par l'intermédiaire des instituteurs (au contraire des livres) est également handicapé par la pauvreté destitres de qualité disponibles sur le marché. Anne Bustarret signale que la situation devrait s'améliorer puisque dès cette année le nombre de références a doublé par rapport à l'année dernière. [...]

    En ce qui concerne le prêt aux adultes, les problèmes rencontrés sont ceux prévus au départ et de trois sortes :

    • - Le choix à la disposition des lecteurs est trop réduit (200 ou 400 cassettes) et la situation n'évoluera pas tant qu'on ne pourra pas mettre en route un véritable discobus ou au moins des bibliobus offrant plus de place.
    • - Nos prêts étant limités à trois ou quatre documents par personne, les lecteurs sont obligés de faire un choix entre cassettes et livres et ne peuvent donc, comme il serait souhaitable, emprunter les deux.
    • - Nous n'avons pas le temps d'établir des catalogues de nos fonds (en livres ou en cassettes) et demandons aux lecteurs de trouver leur bonheur dans les 2 500 à 2 800 documents mis à leur disposition dans les bibliobus mais nous acceptons depuis longtemps la réservation d'une fois sur l'autre d'un livre par personne. Nous ne pouvons pas le faire pour les cassettes tant que durera la médiocrité des instruments de travail en ce domaine et surtout tant que nos recherches se révéleraient trop souvent infructueuses (en l'absence d'une multiplication des enregistrements disponibles sur cassettes).

    Toutes ces contraintes exposées (contraintes ressenties surtout par nous-mêmes et pas tellement dénoncées par les lecteurs), il reste que le bilan de fonctionnement de notre « casset-tothèque » après 10 mois est plutôt positif : nous avons en effet fait le plein des lecteurs concernés puisque 21 % d'entre eux empruntent des cassettes (le parc des magnétophones de cassettes est estimé à 15 % des foyers par une enquête nationale du Ministère de la Culture).

    Ce public est essentiellement jeune, peut-être plus masculin et choisit principalement des variétés, surtout de la musique pop (la proportion du choix proposé en musique classique est de 40 %, la proportion du choix fait par les lecteurs est de 30 %).