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    La bibliothèque de la fille du docteur

    Par Joëlle Muller, Conservateur Médiathèque de la Villette,Paris

    J'ai appris à lire très vite, sans même que mes parents en aient conscience. J'ai dû apprendre à lire en partie avec des rudiments appris à l'école maternelle et en partie avec tous les imprimés qui me passaient sous les yeux, les journaux, les romans-photos que ma mère aimait lire, les publicités. Quand je suis entrée à l'école primaire, l'institutrice découvrit que je savais lire mais pas écrire.

    Enfant née dans une famille pauvre, nous n'avions pas de livres à la maison. Ma première bibliothèque fut celle de la fille de mon docteur. J'étais de santé fragile et sujette aux otites à répétition et j'allais régulièrement voir mon médecin avec ma mère. Quand il apprit ma passion pour la lecture et connaissant notre situation financière, il m'emmena dans la chambre de sa fille. Un mur entier était recouvert de livres, des livres de la bibliothèque Rouge et Or, de la bibliothèque Rose, de la bibliothèque Bleue, tout ce dont je rêvais. Mon médecin fut mon premier bibliothécaire. Chaque mois, je repartais de chez lui avec une dizaine de livres que je ramenais la fois suivante pour en emprunter d'autres. Il me demandait toujours mon avis sur celui que j'avais préféré.

    Plus tard, j'ai découvert les bibliothèques municipales. Mais à l'époque, les sections enfantines n'existaient pas ou étaient très peu pourvues. J'avais déjà tout lu et je suis passée directement à la section adulte. Pour moi, la bibliothèque de la fille du docteur, c'était le paradis.